Veuve d’un ancien sergent-chef, retraité de l’armée française après quinze ans de service et mort en 1958, Mme L. et son fils, tous deux algériens, se sont tournés vers la justice pour obtenir que la pension qu’ils touchent du ministère de la défense français soit revalorisée comme l’ont été celles des retraités militaires français.
En mars 2000, le tribunal administratif leur a donné tort, s’appuyant sur une série de lois qui ont instauré une «cristallisation » des pensions pour les anciens soldats devenus étrangers. C’est donc pour demander au Conseil constitutionnel d’annuler ces textes que leur avocat, Me Arnaud Lyon-Caen, a posé la question préalable de constitutionnalité, estimant qu’une telle distinction entre nationaux et étrangers « porte une atteinte inconstitutionnelle au principe d’égalité ».
Le Conseil d’État juge la « cristallisation » contraire au droit européen
L’histoire de la « cristallisation » commence avec la décolonisation. À partir de 1959, la France décide de ne plus revaloriser les pensions militaires versées à ses anciens soldats devenus étrangers et à leurs ayants droit. Ceux-ci perçoivent alors un montant qui demeure fixe, tandis que les sommes versées aux anciens militaires français sont régulièrement revalorisées. Au fil des ans, la différence se creuse. « Au point qu’un étranger peut toucher 20 fois moins qu’un Français alors même qu’ils ont combattu la même durée, sous le même uniforme », dénonce Antoine Math, l’un des spécialistes du dossier auprès du Groupe d’information et de soutien des immigrés Gisti.
Un combat politico-judiciaire s’engage. En 2001, dans l’arrêt Diop, du nom d’un ancien militaire sénégalais, le Conseil d’État juge la « cristallisation » contraire au droit européen. Le gouvernement est obligé de réagir. Il le fait en augmentant un peu les pensions mais surtout en instaurant un critère de résidence, visant à prendre en compte le coût de la vie dans les différents pays. Au final, un retraité vivant en France touche bien plus qu’un résident malien. De plus, les pensionnés de nationalité française perçoivent, eux, une pension pleine, quel que soit leur pays de résidence.
Au Conseil constitutionnel de trancher
Cette disparité de traitement sera de nouveau l’occasion de bien des procédures, en France comme en Europe. Avec des résultats contradictoires. En 2006, le film Indigènes met à l’honneur ces militaires venues des colonies combattre en France. « Le film a fait pleurer Bernadette Chirac », se souvient Me Arnaud Lyon-Caen, qui était déjà à la manœuvre dans l’arrêt Diop.
Une loi de « décristallisation » est donc promise par Jacques Chirac, alors président de la République et désormais… membre du Conseil constitutionnel. « Mais cette avancée n’a concerné que les prestations au feu », déplore l’avocat, soit la retraite du combattant et les pensions militaires d’invalidité et non pas la retraite des militaires de carrière.
Les années passant, le nombre de pensionnés « cristallisés » a fortement diminué. Il en resterait environ 50 000, selon la Cour des comptes, qui s’est penché début 2010 sur le sujet dans un rapport dont le titre même avait valeur de préconisation : « Une égalité de traitement trop longtemps retardée ». La haute juridiction financière plaidait pour un « alignement intégral » des pensions versées aux étrangers sur celles bénéficiant aux Français, chiffrant la mesure à 152 millions d’euros par an. Il revient désormais au Conseil constitutionnel de trancher.
Mathieu CASTAGNET la croix
En mars 2000, le tribunal administratif leur a donné tort, s’appuyant sur une série de lois qui ont instauré une «cristallisation » des pensions pour les anciens soldats devenus étrangers. C’est donc pour demander au Conseil constitutionnel d’annuler ces textes que leur avocat, Me Arnaud Lyon-Caen, a posé la question préalable de constitutionnalité, estimant qu’une telle distinction entre nationaux et étrangers « porte une atteinte inconstitutionnelle au principe d’égalité ».
Le Conseil d’État juge la « cristallisation » contraire au droit européen
L’histoire de la « cristallisation » commence avec la décolonisation. À partir de 1959, la France décide de ne plus revaloriser les pensions militaires versées à ses anciens soldats devenus étrangers et à leurs ayants droit. Ceux-ci perçoivent alors un montant qui demeure fixe, tandis que les sommes versées aux anciens militaires français sont régulièrement revalorisées. Au fil des ans, la différence se creuse. « Au point qu’un étranger peut toucher 20 fois moins qu’un Français alors même qu’ils ont combattu la même durée, sous le même uniforme », dénonce Antoine Math, l’un des spécialistes du dossier auprès du Groupe d’information et de soutien des immigrés Gisti.
Un combat politico-judiciaire s’engage. En 2001, dans l’arrêt Diop, du nom d’un ancien militaire sénégalais, le Conseil d’État juge la « cristallisation » contraire au droit européen. Le gouvernement est obligé de réagir. Il le fait en augmentant un peu les pensions mais surtout en instaurant un critère de résidence, visant à prendre en compte le coût de la vie dans les différents pays. Au final, un retraité vivant en France touche bien plus qu’un résident malien. De plus, les pensionnés de nationalité française perçoivent, eux, une pension pleine, quel que soit leur pays de résidence.
Au Conseil constitutionnel de trancher
Cette disparité de traitement sera de nouveau l’occasion de bien des procédures, en France comme en Europe. Avec des résultats contradictoires. En 2006, le film Indigènes met à l’honneur ces militaires venues des colonies combattre en France. « Le film a fait pleurer Bernadette Chirac », se souvient Me Arnaud Lyon-Caen, qui était déjà à la manœuvre dans l’arrêt Diop.
Une loi de « décristallisation » est donc promise par Jacques Chirac, alors président de la République et désormais… membre du Conseil constitutionnel. « Mais cette avancée n’a concerné que les prestations au feu », déplore l’avocat, soit la retraite du combattant et les pensions militaires d’invalidité et non pas la retraite des militaires de carrière.
Les années passant, le nombre de pensionnés « cristallisés » a fortement diminué. Il en resterait environ 50 000, selon la Cour des comptes, qui s’est penché début 2010 sur le sujet dans un rapport dont le titre même avait valeur de préconisation : « Une égalité de traitement trop longtemps retardée ». La haute juridiction financière plaidait pour un « alignement intégral » des pensions versées aux étrangers sur celles bénéficiant aux Français, chiffrant la mesure à 152 millions d’euros par an. Il revient désormais au Conseil constitutionnel de trancher.
Mathieu CASTAGNET la croix