Face à l'Iran et ses coreligionnaires chiites de la région, l'union fait la force. C'est le constat dressé par les dirigeants des six monarchies sunnites du golfe Persique, réunis lundi à Riyad en Arabie saoudite, pour examiner un projet d'union politique entre elles. L'idée n'est pas nouvelle: elle a été officiellement lancée en décembre par le roi Abdallah d'Arabie saoudite, qui veut protéger sa zone d'influence de la menace multiforme iranienne. Dans un premier temps, cette nouvelle structure - qui succéderait à l'actuel Conseil de coopération du Golfe CCG- regrouperait le royaume saoudien et son minuscule voisin, Bahreïn. Un choix qui ne doit rien au hasard.
Seule monarchie peuplée d'une majorité de chiites, Bahreïn est secoué depuis plus d'un an par une révolte des disciples d'Ali, qui réclament une meilleure représentation politique, des emplois dans la fonction publique et l'arrêt des discriminations en matière d'accession au logement. «L'option de l'union est une urgence», a insisté dimanche le premier ministre de Bahreïn, le prince Khalifa Ben Salmane al-Khalifa, considéré comme un proche du pouvoir saoudien. Pour Bahreïn, cette union présente le double avantage de faire oublier son particularisme démographique, et de renforcer le bouclier que les pays du CCG lui ont fourni l'an dernier au plus fort de la crise avec les chiites du royaume. Un millier de militaires, venus principalement d'Arabie saoudite, sont stationnés depuis à Bahreïn, pour épauler une infrastructure sécuritaire jugée défaillante par de nombreux observateurs.
Outre sa dimension politique, cette union devrait comporter un important volet sécuritaire et militaire, avec à terme la création «d'une structure unifiée pour assurer (notre) défense», selon le premier ministre bahreïnien. Conséquence prévisible de cette annonce: les chiites de Bahreïn crient à la manipulation. Cheikh Ali Salmane, patron du principal groupe de l'opposition chiite, exige que le projet soit préalablement soumis par référendum à la population. Avec cette initiative, l'intifada larvée qui agite l'archipel va encore se durcir, les radicaux chiites trouvant là une raison supplémentaire d'accentuer leur lutte contre une monarchie sunnite refusant toute concession de nature à crever l'abcès.
En Iran, la majorité des membres du Parlement ont également «condamné» cette initiative. «Les dirigeants saoudiens et bahreïniens doivent savoir que cela va renforcer l'unité du peuple bahreïnien face aux forces d'occupation (saoudiennes, NDLR) et la crise à Bahreïn va être transférée en Arabie saoudite et pousser la région vers l'insécurité», ont averti des élus iraniens. Ils ne font pas mystère de l'autre risque induit par ce projet: que les 15% de chiites saoudiens installés dans les provinces pétrolières, juste en face de Bahreïn, se révoltent à leur tour. Une menace qui doit être prise au sérieux: régulièrement depuis un an, des incidents éclatent entre manifestants et forces de l'ordre. Comme Manama, Riyad accuse l'Iran de pousser les chiites saoudiens à protester.
Une union loin de voir le jour
À terme, cette Union risque donc de durcir encore la guerre froide que se livrent Saoudiens et Iraniens dans le Golfe. Les États-Unis, garants de la sécurité des monarchies pétrolières, ne s'opposeraient pas à un tel projet. Oman en revanche, pays historiquement le moins anti iranien du Golfe, et à un degré moindre Koweït, le plus proche des côtes iraniennes, seraient, eux, plus prudents. Quant au Qatar, il aurait adopté une position attentiste: si tous les membres du CCG acceptent, Doha leur emboîterait le pas. Bref, cette future Union du Golfe est encore loin de voir le jour. Des libéraux, regroupés dans le Forum des associations civiles du Golfe, appellent Riyad et Manama à «reconsidérer cette initiative inappropriée». N'oublions pas non plus que trente et un ans après sa création, le Conseil de coopération du Golfe, n'a toujours pas réussi à instaurer une intégration économique entre ses membres.
Par Georges Malbrunot
Seule monarchie peuplée d'une majorité de chiites, Bahreïn est secoué depuis plus d'un an par une révolte des disciples d'Ali, qui réclament une meilleure représentation politique, des emplois dans la fonction publique et l'arrêt des discriminations en matière d'accession au logement. «L'option de l'union est une urgence», a insisté dimanche le premier ministre de Bahreïn, le prince Khalifa Ben Salmane al-Khalifa, considéré comme un proche du pouvoir saoudien. Pour Bahreïn, cette union présente le double avantage de faire oublier son particularisme démographique, et de renforcer le bouclier que les pays du CCG lui ont fourni l'an dernier au plus fort de la crise avec les chiites du royaume. Un millier de militaires, venus principalement d'Arabie saoudite, sont stationnés depuis à Bahreïn, pour épauler une infrastructure sécuritaire jugée défaillante par de nombreux observateurs.
Outre sa dimension politique, cette union devrait comporter un important volet sécuritaire et militaire, avec à terme la création «d'une structure unifiée pour assurer (notre) défense», selon le premier ministre bahreïnien. Conséquence prévisible de cette annonce: les chiites de Bahreïn crient à la manipulation. Cheikh Ali Salmane, patron du principal groupe de l'opposition chiite, exige que le projet soit préalablement soumis par référendum à la population. Avec cette initiative, l'intifada larvée qui agite l'archipel va encore se durcir, les radicaux chiites trouvant là une raison supplémentaire d'accentuer leur lutte contre une monarchie sunnite refusant toute concession de nature à crever l'abcès.
En Iran, la majorité des membres du Parlement ont également «condamné» cette initiative. «Les dirigeants saoudiens et bahreïniens doivent savoir que cela va renforcer l'unité du peuple bahreïnien face aux forces d'occupation (saoudiennes, NDLR) et la crise à Bahreïn va être transférée en Arabie saoudite et pousser la région vers l'insécurité», ont averti des élus iraniens. Ils ne font pas mystère de l'autre risque induit par ce projet: que les 15% de chiites saoudiens installés dans les provinces pétrolières, juste en face de Bahreïn, se révoltent à leur tour. Une menace qui doit être prise au sérieux: régulièrement depuis un an, des incidents éclatent entre manifestants et forces de l'ordre. Comme Manama, Riyad accuse l'Iran de pousser les chiites saoudiens à protester.
Une union loin de voir le jour
À terme, cette Union risque donc de durcir encore la guerre froide que se livrent Saoudiens et Iraniens dans le Golfe. Les États-Unis, garants de la sécurité des monarchies pétrolières, ne s'opposeraient pas à un tel projet. Oman en revanche, pays historiquement le moins anti iranien du Golfe, et à un degré moindre Koweït, le plus proche des côtes iraniennes, seraient, eux, plus prudents. Quant au Qatar, il aurait adopté une position attentiste: si tous les membres du CCG acceptent, Doha leur emboîterait le pas. Bref, cette future Union du Golfe est encore loin de voir le jour. Des libéraux, regroupés dans le Forum des associations civiles du Golfe, appellent Riyad et Manama à «reconsidérer cette initiative inappropriée». N'oublions pas non plus que trente et un ans après sa création, le Conseil de coopération du Golfe, n'a toujours pas réussi à instaurer une intégration économique entre ses membres.
Par Georges Malbrunot