Onze ans jour pour jour après le 11 Septembre, le «choc des civilisations» et la réalité brutale d'un islam radical qui fait feu de toute provocation pour mener sa guerre contre l'Occident rattrape une Amérique qui, pour cause de campagne électorale, avait mis les affaires du monde entre parenthèses. Le réveil est difficile à Washington après l'euphorie de la libération de la Libye du joug du dictateur Mouammar Kadhafi par une coalition occidentale menée par la France, la Grande-Bretagne et les États-Unis. Pour la première fois depuis trente-trois ans, un ambassadeur américain a été tué à Benghazi. Le consulat a été incendié après une attaque ressemblant fort à un acte de guerre. Un assaut similaire, quoique sans victimes, a été mené contre l'ambassade américaine du Caire, où la bannière étoilée a été arrachée par les assaillants et remplacée par un drapeau noir islamiste.
«Comment cela a-t-il pu se produire dans un pays que nous avons aidé à libérer et une ville que nous avons aidé à sauver?», a lancé ce mercredi Hillary Clinton. «Cette question reflète la grande complexité du monde», a-t-elle poursuivi, appelant toutefois à garder «un œil attentif»: «Cette attaque a été menée par un petit groupe sauvage et violent» et non par le gouvernement de Tripoli, a dit Clinton, rappelant que des Libyens avaient combattu aux côtés des Américains pendant l'attaque. L'Administration, qui a dépêché mercredi une équipe antiterroriste de marines pour protéger son personnel diplomatique, soupçonne un attentat planifié. «Nous ne tournerons pas le dos» à la nouvelle Libye qui émerge, a-t-elle cependant insisté, promettant de renforcer le dispositif de protection des ambassades américaines. Quelques minutes plus tard, c'était au tour du président Obama d'intervenir depuis le jardin aux roses de la Maison-Blanche, pour condamner dans les termes les plus forts une attaque scandaleuse». «Justice sera faite», a-t-il promis.
Une réaction malvenue
Cette précision était loin d'être anodine dans le contexte électoral. Mardi soir, le candidat républicain Mitt Romney avait accusé l'Administration «de sympathiser avec ceux qui avaient mené les attaques plutôt que de les condamner». Il visait un communiqué publié avant les troubles par l'ambassade américaine au Caire. Sous pression des autorités islamistes égyptiennes, après la colère déclenchée par la mise en ligne sur Internet d'un film d'un obscur cinéaste californien diabolisant l'islam, celle-ci avait condamné les «efforts continus de certains individus désaxés, qui visent à heurter les sentiments religieux des musulmans». Un message d'apaisement qui n'empêcherait pas les violences plus tard dans la soirée.
«Romney a exploité une faiblesse frappante de l'Administration, dont tous les responsables continuent implicitement de lier les violences perpétrées à Benghazi avec la publication de ce film, commentait mercredi le spécialiste du Moyen-Orient Daniel Pipes. Établir un tel lien est une erreur. Depuis 1979, avec la fatwa prononcée par Khomeyni contre le livre de Salman Rushdie, les islamistes ont cherché à prouver qu'ils avaient le droit de nous dire ce que nous devions penser de l'islam… Cela a été vrai pendant l'affaire des caricatures danoises, pendant l'affaire Theo Van Gogh. Dans le passé, nos leaders étaient plus fermes dans leur défense de notre liberté de parole… Mais ce président a été beaucoup moins clair. Blâme-t-il les islamistes ou le cinéaste qui a fait le film?», a noté Pipes.
Le porte-parole d'Obama, Ben LaBolt, s'est dit choqué que le candidat Romney «choisisse de mener une attaque politique au moment où les États-Unis sont confrontés à la mort tragique de leurs officiels diplomatiques». De nombreux analystes de politique étrangère ont également affirmé que la réaction du républicain était malvenue. Mais la question posée par Romney n'en touche pas moins une corde sensible, en insistant sur la naïveté d'Obama vis-à-vis de l'islam. Le président a beaucoup communiqué sur son bilan de politique étrangère, se présentant en commandant en chef avisé et en tombeur de Ben Laden. Mais l'affaire de Benghazi vient rappeler aux Américains combien les positions des États-Unis sont aujourd'hui fragiles au Moyen-Orient.
Par Laure Mandeville
«Comment cela a-t-il pu se produire dans un pays que nous avons aidé à libérer et une ville que nous avons aidé à sauver?», a lancé ce mercredi Hillary Clinton. «Cette question reflète la grande complexité du monde», a-t-elle poursuivi, appelant toutefois à garder «un œil attentif»: «Cette attaque a été menée par un petit groupe sauvage et violent» et non par le gouvernement de Tripoli, a dit Clinton, rappelant que des Libyens avaient combattu aux côtés des Américains pendant l'attaque. L'Administration, qui a dépêché mercredi une équipe antiterroriste de marines pour protéger son personnel diplomatique, soupçonne un attentat planifié. «Nous ne tournerons pas le dos» à la nouvelle Libye qui émerge, a-t-elle cependant insisté, promettant de renforcer le dispositif de protection des ambassades américaines. Quelques minutes plus tard, c'était au tour du président Obama d'intervenir depuis le jardin aux roses de la Maison-Blanche, pour condamner dans les termes les plus forts une attaque scandaleuse». «Justice sera faite», a-t-il promis.
Une réaction malvenue
Cette précision était loin d'être anodine dans le contexte électoral. Mardi soir, le candidat républicain Mitt Romney avait accusé l'Administration «de sympathiser avec ceux qui avaient mené les attaques plutôt que de les condamner». Il visait un communiqué publié avant les troubles par l'ambassade américaine au Caire. Sous pression des autorités islamistes égyptiennes, après la colère déclenchée par la mise en ligne sur Internet d'un film d'un obscur cinéaste californien diabolisant l'islam, celle-ci avait condamné les «efforts continus de certains individus désaxés, qui visent à heurter les sentiments religieux des musulmans». Un message d'apaisement qui n'empêcherait pas les violences plus tard dans la soirée.
«Romney a exploité une faiblesse frappante de l'Administration, dont tous les responsables continuent implicitement de lier les violences perpétrées à Benghazi avec la publication de ce film, commentait mercredi le spécialiste du Moyen-Orient Daniel Pipes. Établir un tel lien est une erreur. Depuis 1979, avec la fatwa prononcée par Khomeyni contre le livre de Salman Rushdie, les islamistes ont cherché à prouver qu'ils avaient le droit de nous dire ce que nous devions penser de l'islam… Cela a été vrai pendant l'affaire des caricatures danoises, pendant l'affaire Theo Van Gogh. Dans le passé, nos leaders étaient plus fermes dans leur défense de notre liberté de parole… Mais ce président a été beaucoup moins clair. Blâme-t-il les islamistes ou le cinéaste qui a fait le film?», a noté Pipes.
Le porte-parole d'Obama, Ben LaBolt, s'est dit choqué que le candidat Romney «choisisse de mener une attaque politique au moment où les États-Unis sont confrontés à la mort tragique de leurs officiels diplomatiques». De nombreux analystes de politique étrangère ont également affirmé que la réaction du républicain était malvenue. Mais la question posée par Romney n'en touche pas moins une corde sensible, en insistant sur la naïveté d'Obama vis-à-vis de l'islam. Le président a beaucoup communiqué sur son bilan de politique étrangère, se présentant en commandant en chef avisé et en tombeur de Ben Laden. Mais l'affaire de Benghazi vient rappeler aux Américains combien les positions des États-Unis sont aujourd'hui fragiles au Moyen-Orient.
Par Laure Mandeville