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MARC LEISING DG DE SOCICIM SUR LA CRISE FINANCIERE AU SENEGAL « Sococim connaît un ralentissement d’activité depuis quelques mois »

Rédigé par leral.net le Dimanche 1 Septembre 2013 à 19:00 | | 0 commentaire(s)|

Les conséquences de la crise financière internationale commencent à toucher l’entreprise sénégalaise. En marge de la manifestation à caractère social que la Sococim a organisé, ce mardi 2 décembre, en faveur des imams et oulémas de Rufisque et Bargny, le directeur général de cette usine de fabrication de ciment, M Marc Leinsing, a fait part de sa crainte provoquée par la crise financière internationale qui, selon lui, commence à toucher le pays.


MARC LEISING DG DE SOCICIM SUR LA CRISE FINANCIERE AU SENEGAL « Sococim connaît un ralentissement d’activité depuis quelques mois »
Quelle est votre analyse sur la crise financière internationale ?

Je trouve que la presse sénégalaise ne parle pas suffisamment de la crise financière internationale qui commence à toucher le Sénégal et des pays comme le Mali. Nous, on a depuis quelques mois maintenant connu un ralentissement d’activité. Je suis inquiet parce qu’on a démarré de nouvelles installations qui augmentent notre capacité. Un moment où finalement l’activité globale de la consommation se ralentit. Alors qu’on pensait avoir une progression relativement importante cette année de nos ventes. Elles vont se situer en fin d’année à, à peu près au niveau de l’année dernière. Le ralentissement est très net. L’an denier, on parlait de pénurie de ciment, de spéculation parce qu’il y avait un manque de ciment sur le marché. Aujourd’hui, les camions qui sont sur notre parking sont en attente non pas de chargement mais de client.

Est-ce que vous pouvez nous dire, spécifiquement, dans quel secteur il y a eu ralentissement ?

Je pense que d’abord les Grands travaux sont au ralenti dans la mesure où les grandes entreprises ne sont plus payées. Elles ont levé le pied et ralenti leurs activités. Ensuite, je pense que la construction individuelle avec l’aide extérieure au Sénégal qui vient soit par des subventions, soit par la diaspora, doit se ralentir avec la crise internationale. Ce qui fait que tout cela amène une réduction de la consommation et nous amène à ralentir la production. L’autre aspect c’est que le monde est en crise, le secteur cimentier en Europe aussi. Donc le monde occidental aussi est amené aussi à disposer d’une surcapacité. Ainsi, il va bénéficier à d’autres pays y compris en Afrique qui étaient en sous-production et qui l’est encore dans certains pays. Ces produits européens vont arriver à des prix très bas puisque cette fois-ci, on ne parle pas de coûts de production mais de coûts marginaux. C’est l’excédent de production des pays occidentaux qui va se retrouver sur le marché international et qui va arriver aux portes de l’Afrique à des prix relativement bas. Vous allez dire que c’est bien pour le consommateur. Mais nous avons fait visiter une de nos usines en France au Président Wade, il n’a vu personne dans l’usine parce qu’elle est entièrement automatisée. Ici, au Sénégal, nous avons fait le choix de ne rien automatiser, d’avoir le maximum de personnel dans l’usine. Aujourd’hui, sans compter les chauffeurs, nous avons mille personnes qui travaillent tous les jours dans l’usine.

Donc vous pensez qu’il y a une possibilité de voir l’arrivée des produits européens sur le marché sénégalais ?

Pas demain parce qu’on va se battre pour que cela n’arrive pas. On fera tout pour ça et je pense que sur le marché sénégalais on pourra rester compétitif parce qu’on pratique déjà des prix relativement bas et donc au saura les tenir. Par contre, les pays de la sous-région nous seront difficilement accessibles parce que pour nous, il faudra également affréter des bateaux. On va se retrouver dans la même logique que des pays européens qui vont devoir mettre du ciment dans un bateau. Et que le bateau parte d’Espagne ou quitte Dakar pour aller à Conakry ou ailleurs, l’écart des coûts de fret est faible. Donc ce sera le coût de production qui fera la différence. Pour nous, ce sont des pays plus difficiles d’accès sur lesquels il va falloir effectivement qu’on se batte pour conserver notre part de marché.

Est-ce que vous êtes touchée directement ou indirectement par la dette intérieure qui frappe les entreprises sénégalaises ?

Nous directement, non parce que l’Etat ne nous doit rien. Par contre, pour certains de nos sous-traitants, l’Etat leur doit pas mal d’argent ; des entreprises comme Fougerolles (Eiffage), CSE, CDE. Ce sont ces entreprises-là qui ralentissent le volume et donc consomment moins. Les Grands travaux représentent 10 à 15% de nos sorties d’usine en ciment. Mais, il faut noter qu’il y a encore des grands travaux qui continuent. Tout n’est pas à l’arrêt, il y a des chantiers qui se terminent sur la corniche, la Vdn, les grands hôtels… Je n’ai pas un chiffre exact pour faire la comparaison avec la situation d’avant mais je peux dire qu’il y a un ralentissement de capacité de 15 à 0. Aujourd’hui, ce n’est pas encore alarmant.

Avec une surexploitation des ressources, est-ce qu’on peut s’attendre à une pénurie du ciment dans les années à venir ?

Non, il y a une richesse de pierre au Sénégal qui permet des siècles durant encore d’exploiter le sous sol. Il y a aucun problème de ce côté-là, les ressources existent. Par contre, ce qu’on peut maintenant mettre en cause c’est la surexploitation par le nombre d’exploitations qui est annoncé. Il faut rappeler que CDS (Ndlr : Cimenteries du Sahel) fait une extension de son usine. Pour nous également, vous avez vu que du sol, ressortent des massifs importants. Ce sont les massifs du gros four pour démarrer dans quelques mois. L’ensemble des deux sites vont être capables de produire 6,5 millions de tonnes de ciment par an pour un pays qui n’en consomme pas encore 2,5 millions. Ça veut dire que déjà, les deux opérateurs cimentiers ont largement, sur place, de quoi assurer la consommation du pays. On voit qu’aujourd’hui, il n’y a pas de pénurie alors qu’on commence à peine à augmenter notre capacité avec nos gros broyeur-ciment. On sait, aujourd’hui, que le pays s’ouvre à d’autres opérateurs. On parle de Kheweul, SDI… Et donc beaucoup d’opérateurs qui vont arriver là et ne vont pas favoriser un certain nombre d’actions notamment sociales. Une entreprise qui n’est pas soumise à une concurrence extrême, peut créer plus d’emplois que ceux induits. Tout ça est possible dans un contexte dont on bénéficie, jusque-là.

Si l’offre en ciment est suffisante, qu’est ce qui explique les spéculations parfois notées sur les prix de la tonne de ciment ?

Ça s’est produit, il y a un an alors que les capacités de production du Sénégal étaient de l’ordre de 2,7 millions à 3 millions de tonnes avec les Ciments du Sahel. Ça correspondait à une époque où la demande était trop forte avec les pays de la sous-région qui étaient dopés par une croissance qui allait de 4 à 8%. Cette année, le ralentissement fait que, avec l’augmentation de capacités dont on bénéficie, le Sénégal prouve qu’on est capable de produire 3 mille tonnes de ciment supplémentaires tous les jours. Avec cette augmentation de capacités, plus le ralentissement qu’on observe au niveau des ventes, il y a plus raison de penser qu’il puisse y avoir encore dans les années qui viennent, une pénurie notable.