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Madior Diouf et le dialogue politique : ‘On a l'impression que, au fond, on s'amuse’

Un des porte-parole de la Ca2007 et secrétaire général du Rnd, Madior Diouf a un avis tranché sur les sujets qui agitent le landernau politique. Il le donne sans fioritures. Sur la question du dialogue politique, le Pr Diouf pense que, au fond, les protagonistes s’amusent. Entretien


Rédigé par leral.net le Mardi 3 Novembre 2009 à 14:42 | | 0 commentaire(s)|

Madior Diouf et le dialogue politique : ‘On a l'impression que, au fond, on s'amuse’
Walf fadjri : La nouvelle position de Benno Siggil Senegaal ne va-t-elle pas ralentir le processus de dialogue avec le pouvoir ?

Madior DIOUF : Il y a beaucoup de cohérence dans les positions de Benno Siggil Senegaal. Il est important de lire les deux lettres qui ont été adressées par Benno au président de la République. Parce qu'il a répondu une première fois dans un style et avec des mots que personne n'attendait. Ensuite, une deuxième fois pour proposer un format et on a l'impression qu'au fond on s'amuse. Parce que ce qu'il a dit dans cette deuxième lettre, c'est que, pour lui, le format des réunions, c’est pour la production d'images qui lui permettront de dire partout dans le monde qu'il dialogue avec son opposition. Or, ce qui nous intéresse, ce n'est pas seulement de discuter du programme politique de Wade. C'est son affaire avec le peuple. S'il gère mal, au moment des élections, le peuple aura une réponse pour sanctionner dans un sens ou dans un autre sa gestion. Le dialogue politique, dans un Etat démocratique, ce n’est pas comme Wade le conçoit et comme il a contribué à le faire pratiquer à Abdou Diouf. C'est-à-dire que l'atmosphère s'est échauffée et on appelle les gens pour en discuter, les trublions entrent dans le gouvernement et c'est fini. Wade doit comprendre définitivement que pour l'opposition, cette option est écartée. Il ne doit pas l'attendre de Benno Siggil Senegaal. Il y a des principes que l'on respecte, que nous faisons respecter et qui peuvent nécessiter des rencontres entre le Chef de l'Etat et l'opposition. Permettant à cette dernière de dire ses positions et que le minimum républicain puisse être respecté. Par exemple, aujourd'hui, l'insécurité est un problème récurrent. Ce sont des points importants pour lesquels, dans le cadre du dialogue politique, on peut accepter de discuter. Mais il ne s'agit ni d'être un bureau d'étude pour Wade ni d’inviter à discuter un programme avec lui. Nous avons discuté dans le cadre des assises nationales où Amadou Makhtar Mbow a fait un excellent travail.

Walf fadjri : Comment qualifiez-vous la récente sortie du Chef de l'Etat contre M. Mbow ?

Madior DIOUF : M. Mbow a honoré le Sénégal à l'Unesco et n'a jamais été critiqué pour incompétence, détournement ou quoi que ce soit. Au contraire, c'est quelqu'un qui doit être fier de ce qu'il a fait à l'Unesco et tous les Africains sur ce plan sont d'accord sur son travail. Sauf, évidemment Wade qui combat les fils du Sénégal quand ils sont dans des postes particulièrement importants sur le plan international et honorent, par leur position même à ces postes, le Sénégal. Qu'il s'agisse de Jacques Diouf, de Moussa Touré et de beaucoup d'autres, ils ont honoré le Sénégal rien que par leur position et leur travail positif. Ce qu'ont fait ces Sénégalais-là, le Chef de l'Etat a le devoir non seulement de s'en glorifier mais de les aider et non pas de les combattre. Chez nous, c'est une méchanceté qui ne se comprend pas.

Walf fadjri : Les sorties tous azimuts des responsables de partis membres de Benno Siggil Senegaal sur la question de la candidature ne menacent-elles pas l'unité de votre coalition ?

Madior DIOUF : Nous n'avons pas le droit de nous émouvoir, outre mesure, des comportements soit des jeunes soit de moins jeunes dans les partis, s'exprimant sur comment devra s'organiser la candidature de l'opposition pour se donner les meilleurs chances de l'emporter, dès le premier ou au deuxième tour. Nous avons un ou deux ans devant nous. Donc, la question de la candidature ne saurait être la priorité. La priorité, ce sont les urgences nationales et nous nous en préoccupons. Mais, il est tout aussi normal que dans les partis, les gens s'expriment. Ce qui est anormal c'est le fait de s'exprimer de manière désobligeante à l'égard des gens. Et cela ne dépend pas de période électorale ou non. La vie politique doit être civilisée et le discours doit y avoir une certaine élévation. Par conséquent, les propos désobligeants n'y ont pas leur place. Quand on a un problème individuel avec quelqu'un, la justice est organisée dans notre pays, il faut le régler. S'il s'agit d'un problème politique, il faut le régler politiquement. Mais, le discours politique doit avoir une certaine tenue. Et cette exigence satisfaite, il faut admettre que les forces politiques qui cherchent des modalités d'une victoire peuvent réfléchir et sortir beaucoup d'idées. Nous pensons que, uni et avec une candidature unique, on pourrait avoir une victoire plus assurée et plus rapide. Mais, d'autres peuvent préférer la candidature soit plurielle etc. Mais, tout cela, c'est, à notre avis, trop tôt.

Walf fadjri : Concernant l'affaire Alex Ségura, l'on craint, maintenant, de possibles sanctions de la part des bailleurs…

Madior DIOUF : Le risque est réel et c'est tout à fait normal. Le Sénégal en tant qu'administration avec un président élu qui est en train de faire fonctionner l'Etat, ce Sénégal-là, en réalité, à des problèmes avec tous les bailleurs de fonds de ce pays.

Tous ceux qui aident le Sénégal en finançant des programmes de manière à tenter de répondre à la demande globale en développement se soucient de la bonne application des règles. Dans un contexte comme celui-là, les pays et organismes qui apportent des crédits pour aider le Sénégal à financer des programmes ont besoin d'une gouvernance soucieuse de règles. C'est-à-dire des décaissements réguliers, une utilisation de l'argent qui soit morale, régulière et conforme aux objectifs de développement qui ont été définis. Mais, quand ces partenaires apprennent qu'on fait des gaspillages de cette nature-là (cadeau à Alex Ségura, Ndlr), la moindre des choses c'est qu'ils retiennent leurs mains en attendant que les choses soient claires. Et c'est ce que le Fmi a commencé de faire. Quand un Etat commet une faute de cette nature, il a intérêt à régler le problème le plus rapidement possible. Que le président de la République nous donne les explications qu'il faut. Parce qu'il n'y a pas une autorité capable de faire décaisser de l'argent à un niveau aussi important, ici au Sénégal. Nous savons comment fonctionne le système et quelle est l'organisation du pouvoir dans notre pays. Par conséquent, c'est à lui de s'expliquer et cela ne devrait pas tarder.

Walf fadjri : Mais le Premier ministre s'est déjà expliqué sur cette affaire ?

Madior DIOUF : Ce que le Premier ministre Souleymane Ndéné Ndiaye, a dit – ‘que c'est juste un cadeau que le président à donné à Alex Segura’ - ne peut pas dédouaner Abdoulaye Wade. Parce que ces explications sont irrecevables. Si c'était un cadeau, on n'aurait pas des conséquences aussi graves que celles que nous connaissons aujourd'hui. Les mots ont un sens et, il faut cesser de tromper le peuple. Le Premier ministre a essayé de dédramatiser la chose mais, il ne s'agit pas d'un problème mineur. Il s'agit d'une question particulièrement grave qui doit être réglée de manière que le Sénégal puisse retrouver une image respectable et honorable. Dire que l'on a donné de l'argent mais que ce n'était qu'un cadeau n'est pas acceptable comme explication. C'est pourquoi Abdoulaye Wade et son gouvernement doivent s'expliquer sur cette affaire. Parce qu'ils ne doivent pas être ignorants des règles éthiques et déontologiques qui s'imposent aux fonctionnaires du Fmi dans leur travail. Le comité d'éthique de cette institution doit être également connu des gouvernements qui se respectent. Donc, le gouvernement doit être informé de ce qui est décent et indécent dans les rapports avec les fonctionnaires du Fmi. C'est pourquoi on ne peut pas accepter que l'on minimise le problème en parlant de simple cadeau. Le Sénégal a des problèmes d'argent, ce cadeau peut bien aller quelque part. On doit laisser tranquille le trésor public en un repos décent de manière que les fournisseurs qui vont pour être payés puissent y trouver quelque chose. Mais, quand on en est venu à des situations de cette nature, il est inadmissible qu'on prétende avoir donné des cadeaux à plusieurs valises d'argent. C'est sûr que Alex Segura n'a rien demandé de tout cela. La preuve c'est qu'il s'est protégé en avisant immédiatement sa tutelle de manière a être dans les règles de la décence et de l'éthique dans le cadre de son travail.
walfadrji

Pape Alé Niang