Marie NDiaye, c'est cette écrivaine déjà bien connue pour avoir écrit Rosie Carpe (éditions de Minuit 2001, réédité en 2009) qui lui fit remporter le prix Femina. Elle sera dorénavant encore plus connue, puisque lauréate du Goncourt 2009 pour son ouvrage Trois femmes puissantes (éditions Gallimard). Voilà donc la jeune Française [elle est née en France d'un père Sénégalais] auréolée du plus prestigieux des prix littéraires. Une chose est sûre : si elle a eu ce prix, c'est qu'elle le méritait, et là-dessus, on n'en trouve pas qui s'inscrivent en faux contre son mérite. Mais on peut dire que si cette écrivaine prolifique n’avait pas résidé en France [elle vit désormais à Berlin], ou qu'elle s’était trouvée dans un de ces pays du tiers-monde où règne une démocratie de façade, un prix du genre Goncourt aurait pu lui passer sous le nez, malgré tout son talent. Pourquoi, nous demanderez-vous ?
Eh bien, parce qu’au mois d’août 2009, Marie NDiaye a tenu des propos durs à l’endroit de certains responsables politiques, et même du chef de l’Etat. Dans une interview [au magazine Les Inrockuptibles], elle déclarait trouver "monstrueuse" la France de Nicolas Sarkozy, ajoutant : "Besson, Hortefeux, tous ces gens-là, je les trouve monstrueux." C’est son droit le plus absolu de le penser et de le dire, mais reconnaissons qu’en Afrique et même dans certains pays européens, on n’aurait pas gratté longtemps pour trouver de la diffamation ou de l’injure à chef d’Etat dans cette sortie. Des pressions de toutes parts seraient venues pour influencer le jury d’un quelconque prix littéraire afin de la disqualifier. Mais il n’en rien été en France. Les membres du jury n’ont pas estimé devoir poser quelque réserve que ce soit à la sélection de la jeune femme pour ce prix Goncourt. Seules quelques voix, après la remise du prix, se sont élevées contre les propos de Marie NDiaye. Sont de celles-là le député UMP Eric Raoult qui, au lieu de faire un raffut du diable pour imposer un imbécile et impensable "devoir de réserve" aux bénéficiaires du Goncourt, aurait mieux fait de tout simplement féliciter la France pour sa neutralité dans la délivrance des prix. En ne le faisant pas, il devait s’attendre à ce que toute la communauté littéraire et les partis politiques d’opposition lui tombent dessus à bras raccourcis.
Eric Raoult paie maintenant, la queue entre les jambes, le prix de ses habituelles déclarations à l’emporte-pièce qui font toujours des "flops". Le ministre de la Culture, Frédéric Mitterrand, sollicité par Marie NDiaye pour un arbitrage dans l’affaire et qui a déclaré préférer se tenir à équidistance, a en fait refusé implicitement de blâmer directement ou indirectement l’écrivaine. L’UMP n’a pas estimé devoir soutenir le député de son propre bord dans sa croisade, et même Nicolas Sarkozy, à l’occasion d’un discours sur l’identité nationale le 12 novembre, a rappelé à quel point la France était une terre de liberté où on pouvait dire tout ce qu’on voulait sans problème. Une façon peut-être de recadrer le député qui, depuis, a essayé de mettre un peu d’eau dans son vin. En guise de conclusion, on peut dire que si la démocratie, les droits de l’Homme, les libertés, notamment celle de la presse, sont parfois un peu malmenés dans l’Hexagone, la France reste quand même la France, ce pays où l'on n’interfère pas à tout va, et on comprend pourquoi un grand nombre d’écrivains et d'écrivaines étrangers s’y sont installés, qui y ont trouvé bonheur et réussite. Ils sont très nombreux à avoir obtenu de multiples prix littéraires qu’ils n’auraient sans doute jamais espéré avoir dans leurs pays d’origine. Il ne faut pas l’oublier !
Courrier International
Eh bien, parce qu’au mois d’août 2009, Marie NDiaye a tenu des propos durs à l’endroit de certains responsables politiques, et même du chef de l’Etat. Dans une interview [au magazine Les Inrockuptibles], elle déclarait trouver "monstrueuse" la France de Nicolas Sarkozy, ajoutant : "Besson, Hortefeux, tous ces gens-là, je les trouve monstrueux." C’est son droit le plus absolu de le penser et de le dire, mais reconnaissons qu’en Afrique et même dans certains pays européens, on n’aurait pas gratté longtemps pour trouver de la diffamation ou de l’injure à chef d’Etat dans cette sortie. Des pressions de toutes parts seraient venues pour influencer le jury d’un quelconque prix littéraire afin de la disqualifier. Mais il n’en rien été en France. Les membres du jury n’ont pas estimé devoir poser quelque réserve que ce soit à la sélection de la jeune femme pour ce prix Goncourt. Seules quelques voix, après la remise du prix, se sont élevées contre les propos de Marie NDiaye. Sont de celles-là le député UMP Eric Raoult qui, au lieu de faire un raffut du diable pour imposer un imbécile et impensable "devoir de réserve" aux bénéficiaires du Goncourt, aurait mieux fait de tout simplement féliciter la France pour sa neutralité dans la délivrance des prix. En ne le faisant pas, il devait s’attendre à ce que toute la communauté littéraire et les partis politiques d’opposition lui tombent dessus à bras raccourcis.
Eric Raoult paie maintenant, la queue entre les jambes, le prix de ses habituelles déclarations à l’emporte-pièce qui font toujours des "flops". Le ministre de la Culture, Frédéric Mitterrand, sollicité par Marie NDiaye pour un arbitrage dans l’affaire et qui a déclaré préférer se tenir à équidistance, a en fait refusé implicitement de blâmer directement ou indirectement l’écrivaine. L’UMP n’a pas estimé devoir soutenir le député de son propre bord dans sa croisade, et même Nicolas Sarkozy, à l’occasion d’un discours sur l’identité nationale le 12 novembre, a rappelé à quel point la France était une terre de liberté où on pouvait dire tout ce qu’on voulait sans problème. Une façon peut-être de recadrer le député qui, depuis, a essayé de mettre un peu d’eau dans son vin. En guise de conclusion, on peut dire que si la démocratie, les droits de l’Homme, les libertés, notamment celle de la presse, sont parfois un peu malmenés dans l’Hexagone, la France reste quand même la France, ce pays où l'on n’interfère pas à tout va, et on comprend pourquoi un grand nombre d’écrivains et d'écrivaines étrangers s’y sont installés, qui y ont trouvé bonheur et réussite. Ils sont très nombreux à avoir obtenu de multiples prix littéraires qu’ils n’auraient sans doute jamais espéré avoir dans leurs pays d’origine. Il ne faut pas l’oublier !
Courrier International