Son style cosmopolite, métissé sans être stéréotypé, a déjà séduit Rihanna et Michelle Obama. Inspirations, design, projets, Mimi Plange nous parle de sa vision cosmopolite de la mode.
Scarifications
« Cela vient du Ghana, ma terre natale, le pays où mes parents sont nés, le point de départ de ma création. Tout est parti d’une cicatrice que ma mère a sur le visage. Elle m’a expliqué qu’on lui a fait ça quand elle avait 13 ans, lors d’un rituel pratiqué dans son village. J’ai grandi aux États-Unis et je n’ai pas vécu ce genre d’expériences, alors ça m’a toujours intriguée. À partir de là, j’ai commencé à m’intéresser à toutes ces marques tribales, aux rituels de scarification qui sont pratiqués dans plusieurs pays d’Afrique. J’utilise cet élément dans la plupart de mes collections, d’une manière ou d’une autre, pour souligner un élément. C’est très présent dans mes pièces en cuir et sur les broderies. »
Fleurs et couleurs
« En tant que designer, on est inspiré par la beauté des paysages, les symétries, les formes et les couleurs. Je vis aux États-Unis dans un environnement multiculturel. L’ Afrique est ma source principale d’inspiration, mais quand il s’agit de travailler sur les couleurs, je me plonge dans de vieilles photos japonaises qui ont été colorées à la peinture. Ça me plaît beaucoup. Les motifs de fleurs sont arrivés au moment où je me suis intéressée à l’esthétique de l’époque victorienne, en particulier durant la période précoloniale en Afrique, avec toutes ces jolies planches botaniques. À partir de ça, je dessine les motifs sur Photoshop ou Illustrator, je compose mes couleurs. À chaque saison, j’intègre des éléments floraux mais tout part de la couleur. »
Mode africaine
« Je passe beaucoup de temps dans les bibliothèques et je me plonge dans des livres qui parlent de civilisations anciennes. Je ne suis jamais en panne d’inspiration parce que l’Afrique est un vaste continent avec une grande richesse culturelle. Les collections se structurent les unes par rapport aux autres, elles sont liées. Mon travail ne consiste pas à explorer un élément par saison puis à passer à un autre l’année suivante. L’important c’est que le travail dans son ensemble offre une vision neuve de l’Afrique. En même temps, je ne veux pas être cataloguée designer africaine. Toutes ces références servent à donner une vision inattendue de la Mode africaine »
Michelle Obama
« Elle a une grande influence sur l’industrie de la mode aux États-Unis. Elle est incroyable parce qu’elle fait la promotion de beaucoup de jeunes créateurs en portant leurs vêtements. Elle nous a repérés suite à une parution dans le New York Times. Son équipe nous a contactés et nous lui avons proposé des tenues qu’elle a portées à la télévision. C’était dingue ! Vous imaginez l’effet de cette exposition médiatique. En 2014, elle nous a invités à la Maison Blanche pour la soirée consacrée au design. C’était très inspirant et impressionnant. Michelle Obama inspire les femmes car elle fait partie de ces personnes qui n’ont pas besoin qu’on leur dise comment s’habiller. Nous étions une toute petite marque, pas très connue, mais elle a décidé de porter nos vêtements quand même. C’est ce genre de femmes que nous voulons habiller, celles qui ont confiance en elles. »
Afro-Américaine
« L’industrie de la mode est très difficile pour tout le monde. Il y a des designers dans le monde entier qui tentent de créer leur marque. En tant qu’Afro-Américaine, je dirais que la nouveauté tient dans ma création pas dans ma personne. Peu importe à quoi je ressemble, d’où je viens, l’important c’est la marque et ce que j’en fais. À la fin de la journée, je suis Mimi Plange, je suis née au Ghana et j’ai grandi aux États-Unis, c’est la seule histoire que je connaisse. Je ne vais pas raconter une histoire africaine parce que je n’ai jamais vécu là-bas. Mais j’essaie de créer une nouvelle conversation sur l’Afrique, loin des stéréotypes traditionnels. »
Diversité
« Toutes les cultures m’intéressent et j’aime que les choses se mélangent. Notre monde devient de plus en plus petit. Avant on voyait des choses à l’étranger qu’on ne trouvait pas ailleurs. Maintenant, on trouve tout partout et tout le monde veut y avoir accès. C’est ça, la modernité, le futur. Avec Internet, l’information circule tellement vite que bientôt les cultures vont s’imbriquer les unes dans les autres. Il faut être prêt à l’accepter. »
L'Europe
« C’est là que nous achetons nos tissus, principalement auprès de la maison Malhia Kent en France et aussi en Angleterre. L’Europe est une source importante d’inspiration, surtout au niveau des techniques et du savoir-faire. Chez nous, en Amérique, on pense à fabriquer vite et facilement. Chez vous, c’est plus réfléchi, plus technique, la mode va moins vite. »
Projets éthiques
« Nous avons pour ambition de devenir une marque globale, avec une clientèle plus large à travers le monde. En dehors des vêtements, nous souhaitons aussi développer des lignes d’accessoires. Sur un autre plan, nous réfléchissons à installer une partie de la production en Afrique. Actuellement, nous fabriquons tout à New York, mais nous prospectons dans plusieurs pays africains. Nous commençons à travailler avec ITC (Ethical Fashion Initiative) sur un projet en Éthiopie pour fabriquer des accessoires en cuir. Ça devrait voir le jour début 2016. »
Source : madame.lefigaro.fr via afriquefemme.com