Les membres du Crrse ont salué la volonté de rupture des autorités en charge de la question de l’énergie, ont souligné la nécessité d’aborder la question de manière holistique. Selon eux, les perturbations notées dans d’autres structures telles que la Sar ont des incidences sur le fonctionnement de la Senelec. Face à la complexité du problème, ils proposent une Coalition nationale pour la prise en charge du secteur. Autre innovation majeure, la mise en place d’un Comité National de l’Energie (CNE), présidé par le chef de l’Etat, dont est membre le Ministère de l’Economie et des Finances et qui, par des ressources spéciales, va permettre la sécurisation de l’approvisionnement en combustibles. Un Fonds de Sécurisation de l’Importation des Produits Pétroliers (FSIPP) a d’ailleurs mis en place.
Le Comité de restructuration ouvert à toutes les compétences sénégalaises
Il y a une corrélation nette entre la disponibilité de l’énergie et le développement. C’est ce qui a guidé l’esprit de l’Etat en mettant en place ce comité qui est une innovation majeure. Ce comité est une structure indépendante composée de personnalités issues de différents secteurs (des membres issus du secteur de l’énergie, qui sont des personnes ressources, des représentants des associations de consommateurs, des syndicalistes, des représentants du Parlement, et d’autres secteurs sociaux) pour réfléchir sur les problèmes et proposer des solutions. C’est ça qui fait la force du comité qui reste ouvert. Le ministre de l’Energie nous encourage à l’ouvrir davantage pour tirer profit de l’expérience et de l’expertise de n’importe quel secteur ou de n’importe quelle personne ressource ayant la volonté de participer à nos travaux. Le comité a un mandat assez large parce que nos attributions vont du plan de restructuration à la relance du secteur de l’énergie. Et pour cela, le comité mobilise toute l’expertise dont il dispose, à savoir les experts et personnes ressources qui le composent. Il tire également profit des résultats des audits des cabinets qui ont été sélectionnés par le gouvernement pour essayer de diagnostiquer la situation du secteur, montrer l’ampleur et l’acuité des difficultés auxquelles il est confronté.
Le comité a eu l’idée, dès le départ, de ne pas uniquement compter sur les travaux des cabinets d’audits parce qu’il y a certains qui sont encore en train de travailler et n’ont pas remis leurs rapports. Nous avons choisi d’aller sur le terrain pour nous faire une idée, pour appréhender la situation. Nous avons fait une vingtaine d’auditions. L’ensemble des sociétés et structures qui travaillent dans le secteur (Senelec, Comité national des hydrocarbures, Petrosen, etc.) ont été auditionnées. Et c’est sur cette base, tenant compte de l’urgence, que nous avons eu à travailler sur un plan d’urgence qui a été remis, le mercredi 19 janvier, au ministre d’Etat en charge de l’Energie. Il a bien accueilli les propositions et nous a assuré de l’engagement du gouvernement à les mettre en œuvre. Il nous a invité à faire de même en ce qui concerne le sous-secteur des hydrocarbures. Evidemment, nous avons travaillé sur tous les sous-secteurs : électricité, hydrocarbures et carburants, gaz, etc.
Un diagnostic largement partagé
Mais nous avons privilégié, dans un premier temps, en ce qui concerne les mesures d’urgences, le sous-secteur de l’électricité dont nous venons de déposer notre premier rapport qui, maintenant, doit être mis en œuvre parce que le gouvernement est d’accord avec les propositions du comité. Il y a d’abord le plan d’urgence sur l’électricité, ensuite il y aura un autre sur les hydrocarbures, et enfin, il y aura un plan de restructuration proprement dit et qui prendra plus de temps. Le comité est chargé par le gouvernement d’assurer le suivi de la mise en œuvre des différentes recommandations. En termes de périmètre de mission, c’est assez rare. Ça veut dire aussi qu’il y a une large confiance accordée au comité dont il faut souligner la qualité des membres. C’est des gens d’expérience qui connaissent bien le secteur pour y avoir travaillé pendant longtemps.
Dire la vérité aux Sénégalais
Nous avons la volonté de partager les résultats de ces travaux effectués pendant ces trois derniers mois pour dire la vérité aux Sénégalais, parce que si ce dossier est devenu si difficile à gérer aujourd’hui, c’est que pendant longtemps on a utilisé des propos trop diplomatiques pour expliquer une situation très complexe. La rupture intervenue, c’est, désormais, quelle que soient les difficultés, de dire la vérité aux Sénégalais. Ce qui est nouveau aussi, c’est que, pour la première fois, il y a un diagnostic largement partagé. Que ce soient les cabinets d’audits qui ont été sélectionnés et qui ont conduit ce travail, les techniciens du ministère ou les membres du comité, tout le monde est d’accord sur le diagnostic.
De manière générale, ce diagnostic révèle que la situation du secteur est plus complexe que ce qu’on a dit jusque-là, que ce que les médias en disent et ce que le Sénégalais ressent chez lui parce qu’il n’a pas d’électricité. Jusqu’ici on n’a traité que la Senelec, pensant que le problème ne concerne que cette dernière ; alors qu’en réalité, à côté de la Senelec, il y a la Sar (Société africaine de raffinage), il y a d’autres structures qui participent à la complexité du problème. La deuxième chose que montrent les travaux du comité, c’est qu’il n’y a pas de fatalité. La situation est difficile, mais il est possible de s’en sortir. Et dans ce sens, le comité a fait un excellent travail en proposant des axes d’actions au gouvernement dans l’immédiat et pour l’avenir (voir par ailleurs).
La communication sur les délestages est très importante car il faut un respect vis-à-vis du public. Le tailleur qui attend le retour des délestages pour faire son travail doit être informé sur le calendrier des délestages. Nous avons même demandé au directeur de la communication de Senelec de beaucoup communiquer. Mais aussi respecter les délais. Si vous dites qu’il y aura coupures de 12h à 20h, il faut respecter ce chronogramme. Il faut dire la vérité aux Sénégalais. Pour la fin des délestages, c’est difficile de donner une date.
Programme d’économie d’énergie
La mise en œuvre de ces solutions requiert la participation de tous : des acteurs, des populations, mais aussi des médias notamment sur le volet économie d’énergie. C’est vrai qu’on en parle beaucoup, mais ce que l’audit a révélé sur ce volet, c’est que si le Sénégal arrivait à installer 3,5 millions de lampes à basse consommation (Lbc), on peut économiser 50 Mw. Une centrale de 50 Mw, c’est presque 35 milliards de francs Cfa. Rien que ça pourrait permettre à la Senelec, chaque soir, de diminuer, dans la distribution de l’énergie, 50 Mw. Avec ces lampes à basse consommation, c’est une baisse de 9 % de Mw qui ont été économisés et 15 % de réduction sur les factures. L’agressivité, c’est étudier aussi ces possibilité-là, les Lbc, l’économie d’énergie, la récupération des capacités des installations.
Des propositions ont été faites dans ce sens. L’Agence française de développement (Afd) vient d’accepter de financer un vaste programme d’utilisation de Lbc, jusqu’à 5 millions de lampes. En effet, une étude a montré qu’en France, si on éteignait l’ensemble des ordinateurs qu’on mettait en veille, on économiserait une centrale nucléaire. Ça nous donne une idée de l’importance de l’économie d’énergie. L’Etat a déjà pris un décret interdisant la production et l’importation des lampes incandescentes à partir du 1er mars 2011. En réalité, les petits gestes que recommande la Senelec (éteindre les lampes, débrancher les appareils, etc.) peuvent paraître dérisoires, mais si on explique aux gens ce que cela représente comme économie d’énergie, on verrait que c’est important.
Les populations aussi peuvent jouer un rôle extrêmement important. Souvent on ne parle que de la puissance installée, mais on oublie, aujourd’hui, que, si on voit l’évolution de la situation dans le monde et qui impacte sur le prix du pétrole (qui est actuellement au dessus des 100 dollars), on se rend compte que si les choses continuent à se gâter, le Sénégal a un défi extrêmement important à relever. Ça aussi on a voulu le mettre sur la table pour que les Sénégalais comprennent l’ampleur de ce défi qui est déjà là, mais qui risque d’être beaucoup plus compliqué à l’avenir, si les Sénégalais ne prennent pas des attitudes permettant à notre pays de faire face à cette situation à l’échelle mondiale.
On joue sur plusieurs tableaux. Le délestage c’est quand la demande est supérieure à l’offre. L’électricité a ceci de particulier, il faut que l’offre et la demande soient instantanément en équilibre. Quand on a une offre qui est ce qu’elle est, on peut penser à jouer sur la demande en la réduisant. C’est le troisième plan qui concerne la mise en place d’un plan agressif de gestion de la demande. Il est possible, si on a une forte volonté politique derrière, d’agir sur la demande. C’est le cas avec les fameuses Lbc. Si vous avez un usager qui a l’habitude d’utiliser des lampes de 40 Watts, si vous passez à 8 Watts, 11 Watts, vous voyez bien que votre consommation est passée du simple au quart ; la consommation aussi.
Mais si vous avez un usager normal, en plus de l’éclairage vous avez une télé, un frigo – c’est le frigo qui consomme le plus parmi les équipements d’un usager moyen – on constate que parfois le thermostat pose ne s’arrête pas, par conséquent la consommation ne s’arrête pas non plus. Dans ce cas, la consommation peut être multipliée par deux, par trois ou par même quatre. Alors si j’installe des Lbc chez moi et que je ne ferme pas le frigo il y a de très fortes raisons pour que l’incidence de ces lampes là soit minime. Je crois dans ce cas de figure, la Senelec a aussi des efforts à faire pour sensibiliser les usagers. Parfois ce sont des faits qui peuvent impacter jusqu’à 20 % de la demande.
Rétablir la confiance avec les clients
Il faut qu’on règle aussi la question des factures. Car on ne peut pas comprendre qu’on délivre à quelqu’un qui consomme 40.000 francs une facture de un millions de francs. Il y a problème. Il faut qu’on rétablisse la confiance entre la Senelec et les consommateurs en améliorant les relations. Mais avec ce plan d’urgence on va rassurer les consommateurs dans leurs relations avec la Senelec. C’est dans cadre que la communication est importante. Est-ce qu’il ne faut pas désigner un médiateur entre la Senelec et les populations pour régler certaines problèmes qui surviendront entre eux ?
Une coalition pour la prise en charge du secteur
Depuis les années 1980, nous sommes dans des situations difficiles dans le domaine de l’énergie. C’est un problème complexe, difficile et têtu que nous vivons depuis longtemps. Il faut que les Sénégalais aient la modestie d’accepter que ce n’est pas le fait particulièrement d’une personne, mais que nos réalités africaines font que la couverture des besoins énergétiques d’un petit pays comme le nôtre, ne peut pas être une question simple. Dans d’autres contextes, en Europe par exemple, quand il y a des problèmes, l’interconnexion peut aider à les résoudre. La France peut, par exemple, importer de l’énergie en Roumanie, ou vice versa. Mais les réalités africaines sont telles, aujourd’hui, que quand on aborde cette question, il ne faut pas ignorer le contexte.
Ce qui fait le plus mal, c’est de voir que nous en sommes encore là, malgré tous les efforts qui ont été faits depuis très longtemps et malgré tous les sacrifices consentis par les Sénégalais depuis très longtemps. Malheureusement, dans le traitement de ce dossier, on a comme l’impression qu’on refusait de s’arrêter pour voir pourquoi on en est encore là. D’où l’intérêt de la création de ce comité.
Le problème nécessite une volonté politique très forte. Et on est en train d’assister, dans ce sens, à une évolution positive. Aussi, avons-nous avons besoin d’une coalition de tous les acteurs : les acteurs politiques qui doivent donner l’exemple, montrer qu’ils ont conscience de l’importance de ce secteur ; les acteurs techniques qui doivent faire preuve d’innovations en proposant des solutions osées ; des financiers parce que c’est un secteur qui nécessite beaucoup d’investissements ; mais aussi la compréhension des acteurs sociaux (syndicats) parce qu’à chaque fois qu’on tape dur sur la Senelec, ça se ressent d’une manière ou d’une autre. Tout le monde a sa part dans cette affaire.
C’est une bataille pour le devenir du pays. Ou on arrive à régler ce problème et on peut encore continuer à croire à notre rêve d’émergence, ou on n’y arrive pas et on peut dire adieu à ce rêve. Quand on a un combat de ce niveau, nous croyons qu’au-delà de nos divergences politiques, au-delà des prises de positions des uns et des autres, on peut se mettre d’accord sur l’essentiel. Le comité n’a pas la prétention d’avoir toutes les solutions, mais au moins, quand on a la modestie, de se dire qu’on est ensemble et qu’il y a des solutions qui sont entre les mains de ceux qui sont dans le secteur, et d’autres qui sont en dehors, on peut avancer.
Volonté de rupture
Aujourd’hui, il y a de grands espoirs. Le ministre en charge de l’Energie a dit « oui, j’ai de bons ingénieurs, j’ai de bons financiers, mais je ne me contente pas de mes compétences technico-financiers, je veux une approche inclusive, participative, je veux créer quelque chose d’assez indépendant et je veux que ceux qui sont choisis pour travailler dans cette équipe se sentent libres de dire ce qu’ils pensent, de formuler des propositions aussi brutalement qu’ils le jugeront utile parce que c’est ça qui sera profitable au gouvernement… ». Le gouvernement a dit : « on va créer ce Crrse, mais on va même montrer au peuple sénégalais qu’on va mettre la question de l’énergie au top de l’agenda politique, on va même créer un Comité national de l’énergie et qui sera dirigé par le président de la République ». Cette volonté d’avoir une approche holistique, est porteuse de grands espoirs.
C’est parce qu’il y a une volonté de rupture, qu’après avoir fixé le cadre pour voir la situation et les interactions, la complexité du système, le comité a dégagé des solutions bien structurées et bien hiérarchisées en allant de ce qui est très urgent aux solutions à long terme. On est dans une démarche qui ne consiste pas seulement à chercher une solution de sortie de crise, mais on cherche aussi à libérer notre pays de cette contrainte énergétique pour que demain, pourquoi pas, petit pays non producteur de pétrole, nous puissions devenir un grand pays exportateur d’électricité en Afrique. Et le gouvernement est aujourd’hui dans les dispositions pour faire les sacrifices nécessaires pour y arriver.
Résoudre durablement les difficultés d’approvisionnement en combustibles
A cause du déficit de production de la Sar, la Senelec, pour couvrir le reste de ses besoins, est obligée d’importer du fuel. Quand la Sar s’est arrêtée, Senelec s’est vue refuser par certaines multinationales qui avaient la capacité d’importer parce qu’elle n’avait pas les moyens de payer normalement. C’est la raison pour laquelle Senelec s’est portée volontaire pour chercher une licence d’importation, Depuis 1998, pour exercer dans le sous-secteur des hydrocarbures, il faut une licence. Les 700 tonnes que la raffinerie (de la Sar) fournit à travers ses installations, c’est un fuel noble, issu du pétrole noble venant du Nigeria qui est même plus cher que le pétrole américain. Pourquoi la Sar traite ce pétrole brut ? C’est parce que ses installations sont vétustes. La Sar ne peut pas traiter un brut plus lourd. Aujourd’hui, il n’y a qu’une centrale qui est approvisionnée de ce fuel, c’est celle de Kounoune conformément aux dispositions régissant son contrat. Elle a une consommation de l’ordre de 350 tonnes par jour. La Sar en fournit 700 tonnes. Cela veut dire que tous les jours, la Sar aurait dû mettre en place un stock traditionnel d’un jour de consommation pour Kounoune. Et au bout du mois, on aurait, au moins, un stock d’un mois pour cette centrale. Mais aujourd’hui, le problème numéro un que nous avons, c’est le combustible. Le Comité national des hydrocarbures, toutes les deux semaines, se réunit, regarde la production de la raffinerie, voit la consommation du marché, puis se projette dans deux mois pour dire : voilà pour chaque produit, il y a un déficit de tant pour la raffinerie et qu’il faut tout de suite importer ce déficit pour l’avoir le mois prochain. Donc, au mois d’octobre déjà, on avait dit qu’il fallait une importation de 30.000 tonnes devant venir dans la fourchette du 15 au 20 décembre pour approvisionner la Senelec.
Ce bateau est arrivé dans les délais et la Senelec n’était pas dans les moyens financiers de payer. Le bateau est parti. Au mois de novembre, nous avions également dit qu’il fallait, dans la fourchette du 15 au 20 janvier 2011, encore 30.000 tonnes. Le bateau qui était parti est revenu pour cette nouvelle échéance. Et c’est ce bateau qui est aujourd’hui là et dont on est en train de faire les analyses. Donc, dans la chaîne d’approvisionnement, le bateau qui devait être là au mois de décembre, n’est pas là, ce qui induit un déficit de 30.000 tonnes. C’est ce qui nous crée ces difficultés actuelles. Et maintenant qu’il est là, il y a un problème de conformité sur la qualité. Puisque nous-nous souvenons de ce qui s’est passé en juillet dernier (un problème de fuel avait endommagé les deux tiers des capacités de productions de la Senelec), la Sar s’est dite qu’il fallait s’arrêter et y regarder de plus près. D’autant plus que ce qui était ressorti de l’incident de juillet, c’était qu’il fallait, désormais, marquer une attention particulière pour la qualité du produit.
Aujourd’hui, ce produit est encore en train d’être analysé pour une troisième fois. Voilà pourquoi nous sommes dans une situation tendue. C’est pourquoi, des programmes d’urgence ont été déroulés pour l’importation de fuel pour Kounoune, parce que la Sar est en arrêt depuis le 22 janvier. La Sar s’est arrêtée également parce que la cargaison de brut qui devait arriver le 22 janvier, pour assurer la soudure, ne sera là que le 13 février. Donc, nous n’avons plus de fuel produit par la Sar aujourd’hui et il faut alimenter la centrale de Kounoune. Heureusement que nous avons une importation qui est arrivée aujourd’hui même (vendredi 4 février) et qui est en train d’être analysée et dont les premiers résultats à notre disposition disent que le produit est conforme pour Kounoune.
Ce qui veut dire que la centrale de Kounoune, en principe, ne devrait pas s’arrêter et aura, ainsi, avec 5.000 tonnes, une autonomie d’au moins trois semaines. Reste maintenant le problème du tanker qui est là en train d’être analysé et dont les résultats ne sont pas encore disponibles. C’est ce tanker qui doit régler l’approvisionnement en combustible des autres centrales qui n’ont pas besoin d’un fuel très noble. Il fallait également procéder, aujourd’hui (vendredi dernier), à une importation d’urgence de 10.000 tonnes qui seront là normalement le 9 février et, en plus de cela, dérouler un autre programme d’importation de 40.000 tonnes qui vont arriver courant février pour pouvoir approvisionner correctement tout le système de Senelec. Ce sont des montants très importants, 1.500 tonnes de fuel par jour, c’est à peu près 450 millions de francs Cfa. Il faut approvisionner certaines centrales avec 200 tonnes de diesel. Ce qui fait 100 millions de francs Cfa de plus. Donc, Senelec a besoin, au moins, de 500 millions de francs Cfa par jour pour fonctionner correctement en matière de combustible. En termes d’achat de combustible et d’énergie de manière générale, Senelec a, en charge mensuelle, 17 milliards de francs Cfa. Alors, si, comme le disent certains, Senelec voulait faire des stocks de trois ou quatre mois, il faudrait multiplier ces 17 milliards de francs Cfa par trois ou quatre. Et il faudrait les immobiliser. Ce qui pose le problème du stock de sécurité déjà en moyens financiers, mais en plus de cela, il faudrait payer des frais de stockage. Le stockage du fuel, comme de tous les autres produits liquides ou produits blancs, c’est 6 francs Cfa le litre. Là aussi, c’est des dépenses énormes. Ce qui pose le problème de mise en place des stocks de sécurité au-delà même des capacités de stockage.
Déficit de capacités de stockage résolu
En effet, en dehors des difficultés de mobilisation de tous ces moyens financiers, il y a le problème des capacités de stockage. Aujourd’hui, sans Senstock (qui vient de démarrer et qui a une capacité de 160.000 m3), ce que nous avions en capacités de stockage terrestres, c’était 90.000 m3 (DOT de Yarakh, SPP produits blancs de Total). Il y en a dans le port (environ 300.000 m3), mais ces stockages portuaires sont surtout destinés à la réexportation pour les navires. Nous avons estimé, pour le marché sénégalais, en 2009, pour avoir les 35 jours de stock de sécurité, comme le prévoit la réglementation, il fallait au moins avoir 250.000 m3 de capacités de stockage. Au fond, c’est aujourd’hui seulement que nous sommes en train de résoudre ce problème de déficit de capacités de stockage. Avec Senstock (160.000 m3) plus les 90.000 m3 déjà existantes, nous sommes donc à 250.000 m3. Aujourd’hui, si Senstock fonctionne correctement, nous avons les moyens de mettre en œuvre les capacités de stockage de sécurité pour 35 jours. Restera encore, toujours, le problème financier parce que le texte dit qu’il faut réaliser ces capacités de stockage de 35 jours pour chaque produit (fuel, carburant, gasoil, pétrole, diesel, etc.). Et si vous calculez tout cela en termes de 35 jours de frais de stockage, c’est assez important.
Cherté des factures malgré les coupures
C’est une question « Seneleco-Senelec ». Senelec a un contrat avec les clients de façon générale. Le contrat stipule que le compteur ou le comptage, c’est l’élément qui mesure votre consommation qui est facturée. C’est instrument de mesure, de la même manière que la balance qui est chez le commerçant, est soumis aux mêmes règles de contrôle et de certification. C’est le contrôle économique qui est chargé de s’assurer de la viabilité de ces éléments de mesure. Néanmoins, quand on installe un compteur chez un client, s’il pense que le compteur n’est pas fiable, il a la possibilité de demander un étalonnage comme c’est le cas pour les industriels. Quand vous demandez un étalonnage, on mesure et si l’on se rend compte que le comptage n’est plus fiable, les redressements nécessaires sont faits pour vous rembourser s’il y a eu des consommations anormalement chez vous. Le cas échéant, si votre comptage est normal et qu’il y a eu des pertes, on est obligé de redresser dans le sens de rattraper les pertes occasionnées. C’est plus simple quand il s’agit d’un abonné basse tension. La façon la plus simple de vérifier, c’est que quand il n’y a pas de délestage, coupez le disjoncteur et regardez le compteur. Si le disque tourne, ça veut dire qu’il y a de l’électricité quelque part dans la maison. Si ça ne tourne pas du tout, en ce moment il n y a pas d’électricité dans la maison. C’est pareil quand il y a délestage. La preuve, s’il vous arrive de rester un à deux mois hors de chez vous, certainement vous allez recevoir une facture qui ne sera pas celle que vous aviez l’habitude de recevoir. A partir de ce moment là, c’est extrêmement difficile de dire que les délestages sont là et les factures augmentent. On ne peut pas facturer les clients pour financer quoi que ce soit. Il y a cinq indicateurs sur lesquels on est mesuré en tant que commerciaux. Il s’agit, entre autres de la fiabilité de la facturation et le taux de recouvrement. Nous ne pouvons pas le faire parce que nous sommes aussi surveillés par la commission de régulation du secteur de l’électricité.
Améliorer le management et la bonne gouvernance à la SENELEC
L’Etat s’est engagé aussi dans la bonne gouvernance. C’est dans ce cadre qu’il faut comprendre la nomination de Cheikh Tidiane Mbaye à la présidence du conseil d’administration de la Senelec. C’est un signal fort que l’Etat a donné. La mission qui lui a été donnée est de proposer un nouveau mode de gouvernance car on ne peut pas demander aux populations de faire des efforts et ne pas dire à la Senelec d’en faire autant. Mais je crois que la gestion de Senelec va s’améliorer et cela va se répercuter sur le consommateur. Il faut donc aller vers une vente normale de service public de l’électricité pour permettre à la Senelec de pouvoir optimiser ses coûts pour donner un produit de qualité et qui ne soit pas aussi cher. Car on ne peut pas penser augmenter fréquemment le coût de l’électricité. D’ailleurs, il y a tellement de projets dans cette société pour permettre aux consommateurs d’avoir du courant à coût réduit mais, malheureusement, avec la crise qu’elle connaît, ils sont suspendus car on ne peut pas investir en période de conjoncture.
Si on approvisionne correctement les centrales en combustible, il n’y aura pas de délestages. Même s’il y en a, c’est pour une heure. Et si on met un budget pour les pièces de rechange jusqu’en juin, la Senelec peut remettre à niveau certains équipements et entamer la procédure de location. Nous avons discuté avec les techniciens de Senelec qui soutiennent que si on règle les problèmes du combustible, en mettant des ressources pour l’entretien et l’équipement, la production sera normale.
Depuis 2003, trois centrales toutes neuves ont été achetées et mises en service. Il s’agit de Kounoune, Gti, C6 et C7 avec une capacité de 226 ou 286 Mw. L’approvisionnement de ces centrales doit être sécurisé. Si on approvisionnait correctement les centrales, on ne devrait pas avoir de déficit.
Si Gti fonctionnait correctement, il y aurait juste un équilibre précaire. Si aujourd’hui on loue une capacité additionnelle pour permettre d’entretenir les machines et qu’on répare certains, Senelec, qui est à un niveau de production équilibré, va garder cet équilibre. Ce qu’il faut dire aux populations, c’est que les délestages sont les conséquences d’une situation qui est prise en compte par le gouvernement. Ce qui explique la mise en place de ce comité de relance et de restructuration du secteur de l’énergie. Il faut seulement espérer que les recommandations faites soient appliquées dans quelques mois.
Subventions de l’Etat
Il faut préciser aussi que la Senelec vend à perte aux consommateurs. Elle produit une électricité à 167 francs Cfa le KW qu’elle revend à 108 ou 120 francs Cfa. Donc elle vend à perte. Elle vendrait plus à perte si l’Etat ne faisait pas un effort financier. On parle des nombreux milliards investis dans la Senelec mais il faut préciser que près de 210 milliards sont destinés à la subvention qui permet à chaque Sénégalais de payer moins cher son électricité. Cela mérite d’être clarifié.
La question des marchés réglée avec le statut de la Sar
Aujourd’hui, tout le monde, qu’il s’agisse du gouvernement, de l’Armp ou des bailleurs de fonds, sait que quand on dit plan d’urgence, c’est état d’urgence énergie. C’est une question de souveraineté. Le gouvernement sait là où il faut passer pour mobiliser les moyens et régler le problème et que les appels d’offres ne constituent pas un blocage. Sur la question des marchés, c’est assez simple. La Sar est aujourd’hui une société privée. Elle n’est plus contrôlée par l’Armp ou la Dcmp. Elle peut s’approvisionner librement en combustible comme elle a commencé à le faire par une communication appropriée il y a quelques jours. Elle va s’approvisionner car c’est une exigence de l’Etat et des autres actionnaires. Donc, il n’y a rien à craindre concernant les marchés car c’est une société privée. Les approvisionnements vont se faire à meilleur prix et dans la transparence.
Location temporaire d’une centrale par l’APIX
Pour ce qui est de la location qui est l’autre grosse affaire, Aminata Niane (directeur général de l’Apix) a prouvé qu’elle a la capacité de gérer dans la transparence ce volet. Elle a déjà commencé à le faire par une bonne communication. Il n’y a aucune inquiétude à se faire. En plus, pour les pièces de rechange et les autres accessoires, le Code des marchés publics prévoit des cas exprès d’urgence que l’Armp et la Dcmp autorisent tous les jours. En cas d’urgence justifiée, c’est l’Armp qui donnera les autorisations. Donc, c’est vous dire que sur tous les plans, les marchés sont bien ficelés.
Les trois premiers éléments du plan d’urgence sont tellement bien verrouillés que, s’ils sont bien compris, théoriquement on ne peut pas avoir de problèmes car l’approvisionnement en combustible est confié à la Sar pour la sécurisation. La Sar a prouvé qu’elle pouvait le faire. La Senelec doit être en mesure de payer et l’Etat s’est doté des instruments de paiement par des lignes de crédit notamment de la Banque islamique de développement qui était déjà là et d’autres établissements bancaires qui sont venus s’y ajouter. La Sar va lancer les appels d’offres. Ce n’est pas encore le cas. C’est pourquoi nous sommes encore dans les délestages. On est actuellement dans une situation de sortie de contrat. C’est à partir de fin mars que le processus va commencer. Mais l’Etat se donne les moyens de sécuriser le paiement par la Senelec car si elle ne paie pas, ça ne pourra pas marcher. Mais elle va pouvoir payer parce que l’Etat du Sénégal et ses partenaires au développement sont déterminés et tout le monde sait que l’approvisionnement se fera de façon transparente. La Senelec va aussi s’approvisionner au meilleur prix des marchés car elle achetait parfois dans des conditions très compliquées. Parfois dans du cash dans le passé. Ce qui va disparaître car elle va revenir dans une situation normale pour une société comme elle. D’ailleurs, elle ne peut pas ne pas être rentable dans la mesure où elle produit un produit précieux que tous ses clients paient cash à la caisse. La confiance qui manquait va revenir car il y a une détermination des autorités avec des procédures de bonne gouvernance pour l’accompagner. La Senelec va être en mesure de s’approvisionner.
Normalement, on n’aura plus à nous retrouver dans une situation où on arrête à cause du fuel. Car il y a des dispositifs de paiement qui se mettent en place et Senelec va être restructurée avec un rééchelonnement de sa dette pour que ses revenus ne soient pas gagés mais qu’il y ait une partie pour payer le combustible qui lui permet de fonctionner.
Croire au plan d’urgence
Théoriquement, la Senelec a des capacités qui sont supérieures aux besoins du pays. Mais il y a des centrales qui sont en panne ou mal entretenues, d’autres qui marchent mais qui ne sont pas efficientes. En attendant que ces équipements soient pleinement fonctionnels, l’Apix va louer des machines qui vont permettre au pays de disposer de capacités fonctionnelles pendant que le processus de maintenance et de remise en état se réalise. Ce qui permettra de faire face à la demande et même quand il s’agira de faire encore une maintenance que la Senelec le fasse sans problème. C’est ce qui va se faire dans un court délai pour faire face à la demande. La seule conséquence, c’est qu’il y aura des productions très chères, une énergie pas toujours de bonne qualité. Mais concomitamment, le programme de création de nouvelles capacités continue. Ce qui fait qu’à la fin du processus, on aura des centrales optimisées et d’autres qui vont venir. Ce qui nous conduira à avoir à la fin un système de production moderne, jeune, efficient, bien maintenu et qui va donner une énergie disponible pour d’autres pays mais aussi à des coûts supportables pour l’économie. C’est pourquoi, il faut croire en ce plan qui est fiable, bien maîtrisé avec un système de financement du combustible cohérent. Le comité n’a fait que des recommandations mais le gouvernement s’est déjà donné les moyens. Car si l’Apix a pu lancer des appels d’offres, cela veut dire qu’il y a une proximité entre ce que faisaient le comité et les autorités qui ne voulaient pas attendre au dernier moment pour agir. C’est important de relayer la fiabilité du système et son opérationnalité. Ce que nous avons dit est parfaitement réalisable de façon concomitante et maîtrisée car s’il y avait une faille, ça ne marcherait pas. Ce plan va dans le temps car on ne peut pas régler les délestages et ne pas régler le problème de l’énergie et on ne peut pas le faire en un ou trois mois. Dans cette situation, on ne peut pas ne pas respecter les engagements pris. L’énergie, telle que nous le pensons et vu l’engagement de l’Etat, il n’y a aucune raison de douter. Jamais on n’a été aussi déterminé au niveau de l’Etat dans un projet comme celui là.
Les nouveautés du plan d’urgence
En juillet et août lorsque le ministre de l’Energie a été convoqué à l’Assemblée nationale, on était sceptique, pas convaincu pour l’avenir car la situation était sombre. C’est pourquoi le Crrse est très important car il y a le ministère qui défend une ligne très officielle, claire et technique mais aussi, il y a les syndicats. Cependant, il y a d’autres qui prennent le chemin d’aborder les choses sous d’autres angles. Pour la question de la sécurisation du combustible, on va créer un mécanisme qui sera logé quelle que part en dehors de la Senelec et qui ne s’occupera que de cette question. Ce fonds est mis en place et sera alimenté directement par le ministère de l’Economie et des Finances. Cela n’existait pas avant et c’est une nouveauté. Le combustible est le problème principal de la Senelec. Si on ne le règle pas, rien ne marchera. Aujourd’hui, il y a un changement. Un nouveau dispositif est mis en place avec un mécanisme spécial pour sécuriser le combustible.
Le gouvernement a décidé de sortir certaines questions du champ de la Senelec pour mieux les régler. Cela vaut dire qu’on ne va pas fatiguer davantage les autorités de la Senelec à aller chercher quoi que soit mais on leur demandera de se concentrer sur des domaines techniques et spécifiques. Il y a un plan de location pour amener des capacités additionnelles de 180 Mw dont 50 immédiatement. Ce qui a été confié à l’Apix qui travaille sur les investissements. Elle a déjà mis en place un comité technique pour optimiser les choix pour ne pas louer n’importe quoi. L’Apix a des instruments qui l’organisent, des opportunités, des ouvertures et une crédibilité qui lui permettent d’aller louer des capacités additionnelles.
Création d’un dispositif pour suivre la mise en œuvre
On va créer un dispositif, une instance pour suivre la mise en œuvre. Les choses sont en train de bouger. Il y a aussi la création d’un Conseil national de l’énergie qui ne s’occupera que de regarder si telle action annoncée à telle date a été exécutée et si on a réuni les conditions pour ça. Ce sont ces modalités et instruments qui nous rassurent aujourd’hui. Ce sont des éléments nouveaux, concrets, dynamiques qu’il faut intégrer pour pouvoir impacter positivement sur la mise en œuvre. Le Conseil national de l’électricité est presque un conseil de guerre. Le président a voulu que ce soit ainsi. Chaque semaine, on voit si chacun a exécuté les responsabilités qui lui ont été confiées. Si ce n’est pas fait, on vire la personne. C’est cela l’esprit nouveau : aller en guerre contre les délestages. Si tout est mis en œuvre, il n’y aura pas de problèmes. Le combat, c’est celui de la mise en œuvre du plan d’urgence. Il faut qu’on exige sa mise en œuvre. Nous allons chercher les ressources qu’il faut pour trouver une solution au secteur de l’énergie. C’est pourquoi, les télécoms vont participer au renforcement du secteur de l’énergie. Nous sommes en face d’un malade (Senelec). Il ne faut pas l’acculer. Il y a un matraquage médiatique sur la Senelec avec des réclamations à n’en plus finir. Parfois, il nous est difficile d’aller faire le recouvrement ou de faire les relevés. Il faut donc se concentrer sur ce malade qui était entretenu dans un système usurier.
Nous avons demandé au gouvernement de tout faire pour que la centrale à charbon soit disponible en 2014, quelles qu’en soient les difficultés. C’est une recommandation forte du comité pour dire que nous travaillons pour trouver des solutions au secteur de l’énergie.
Source: lesoleil.sn
Le Comité de restructuration ouvert à toutes les compétences sénégalaises
Il y a une corrélation nette entre la disponibilité de l’énergie et le développement. C’est ce qui a guidé l’esprit de l’Etat en mettant en place ce comité qui est une innovation majeure. Ce comité est une structure indépendante composée de personnalités issues de différents secteurs (des membres issus du secteur de l’énergie, qui sont des personnes ressources, des représentants des associations de consommateurs, des syndicalistes, des représentants du Parlement, et d’autres secteurs sociaux) pour réfléchir sur les problèmes et proposer des solutions. C’est ça qui fait la force du comité qui reste ouvert. Le ministre de l’Energie nous encourage à l’ouvrir davantage pour tirer profit de l’expérience et de l’expertise de n’importe quel secteur ou de n’importe quelle personne ressource ayant la volonté de participer à nos travaux. Le comité a un mandat assez large parce que nos attributions vont du plan de restructuration à la relance du secteur de l’énergie. Et pour cela, le comité mobilise toute l’expertise dont il dispose, à savoir les experts et personnes ressources qui le composent. Il tire également profit des résultats des audits des cabinets qui ont été sélectionnés par le gouvernement pour essayer de diagnostiquer la situation du secteur, montrer l’ampleur et l’acuité des difficultés auxquelles il est confronté.
Le comité a eu l’idée, dès le départ, de ne pas uniquement compter sur les travaux des cabinets d’audits parce qu’il y a certains qui sont encore en train de travailler et n’ont pas remis leurs rapports. Nous avons choisi d’aller sur le terrain pour nous faire une idée, pour appréhender la situation. Nous avons fait une vingtaine d’auditions. L’ensemble des sociétés et structures qui travaillent dans le secteur (Senelec, Comité national des hydrocarbures, Petrosen, etc.) ont été auditionnées. Et c’est sur cette base, tenant compte de l’urgence, que nous avons eu à travailler sur un plan d’urgence qui a été remis, le mercredi 19 janvier, au ministre d’Etat en charge de l’Energie. Il a bien accueilli les propositions et nous a assuré de l’engagement du gouvernement à les mettre en œuvre. Il nous a invité à faire de même en ce qui concerne le sous-secteur des hydrocarbures. Evidemment, nous avons travaillé sur tous les sous-secteurs : électricité, hydrocarbures et carburants, gaz, etc.
Un diagnostic largement partagé
Mais nous avons privilégié, dans un premier temps, en ce qui concerne les mesures d’urgences, le sous-secteur de l’électricité dont nous venons de déposer notre premier rapport qui, maintenant, doit être mis en œuvre parce que le gouvernement est d’accord avec les propositions du comité. Il y a d’abord le plan d’urgence sur l’électricité, ensuite il y aura un autre sur les hydrocarbures, et enfin, il y aura un plan de restructuration proprement dit et qui prendra plus de temps. Le comité est chargé par le gouvernement d’assurer le suivi de la mise en œuvre des différentes recommandations. En termes de périmètre de mission, c’est assez rare. Ça veut dire aussi qu’il y a une large confiance accordée au comité dont il faut souligner la qualité des membres. C’est des gens d’expérience qui connaissent bien le secteur pour y avoir travaillé pendant longtemps.
Dire la vérité aux Sénégalais
Nous avons la volonté de partager les résultats de ces travaux effectués pendant ces trois derniers mois pour dire la vérité aux Sénégalais, parce que si ce dossier est devenu si difficile à gérer aujourd’hui, c’est que pendant longtemps on a utilisé des propos trop diplomatiques pour expliquer une situation très complexe. La rupture intervenue, c’est, désormais, quelle que soient les difficultés, de dire la vérité aux Sénégalais. Ce qui est nouveau aussi, c’est que, pour la première fois, il y a un diagnostic largement partagé. Que ce soient les cabinets d’audits qui ont été sélectionnés et qui ont conduit ce travail, les techniciens du ministère ou les membres du comité, tout le monde est d’accord sur le diagnostic.
De manière générale, ce diagnostic révèle que la situation du secteur est plus complexe que ce qu’on a dit jusque-là, que ce que les médias en disent et ce que le Sénégalais ressent chez lui parce qu’il n’a pas d’électricité. Jusqu’ici on n’a traité que la Senelec, pensant que le problème ne concerne que cette dernière ; alors qu’en réalité, à côté de la Senelec, il y a la Sar (Société africaine de raffinage), il y a d’autres structures qui participent à la complexité du problème. La deuxième chose que montrent les travaux du comité, c’est qu’il n’y a pas de fatalité. La situation est difficile, mais il est possible de s’en sortir. Et dans ce sens, le comité a fait un excellent travail en proposant des axes d’actions au gouvernement dans l’immédiat et pour l’avenir (voir par ailleurs).
La communication sur les délestages est très importante car il faut un respect vis-à-vis du public. Le tailleur qui attend le retour des délestages pour faire son travail doit être informé sur le calendrier des délestages. Nous avons même demandé au directeur de la communication de Senelec de beaucoup communiquer. Mais aussi respecter les délais. Si vous dites qu’il y aura coupures de 12h à 20h, il faut respecter ce chronogramme. Il faut dire la vérité aux Sénégalais. Pour la fin des délestages, c’est difficile de donner une date.
Programme d’économie d’énergie
La mise en œuvre de ces solutions requiert la participation de tous : des acteurs, des populations, mais aussi des médias notamment sur le volet économie d’énergie. C’est vrai qu’on en parle beaucoup, mais ce que l’audit a révélé sur ce volet, c’est que si le Sénégal arrivait à installer 3,5 millions de lampes à basse consommation (Lbc), on peut économiser 50 Mw. Une centrale de 50 Mw, c’est presque 35 milliards de francs Cfa. Rien que ça pourrait permettre à la Senelec, chaque soir, de diminuer, dans la distribution de l’énergie, 50 Mw. Avec ces lampes à basse consommation, c’est une baisse de 9 % de Mw qui ont été économisés et 15 % de réduction sur les factures. L’agressivité, c’est étudier aussi ces possibilité-là, les Lbc, l’économie d’énergie, la récupération des capacités des installations.
Des propositions ont été faites dans ce sens. L’Agence française de développement (Afd) vient d’accepter de financer un vaste programme d’utilisation de Lbc, jusqu’à 5 millions de lampes. En effet, une étude a montré qu’en France, si on éteignait l’ensemble des ordinateurs qu’on mettait en veille, on économiserait une centrale nucléaire. Ça nous donne une idée de l’importance de l’économie d’énergie. L’Etat a déjà pris un décret interdisant la production et l’importation des lampes incandescentes à partir du 1er mars 2011. En réalité, les petits gestes que recommande la Senelec (éteindre les lampes, débrancher les appareils, etc.) peuvent paraître dérisoires, mais si on explique aux gens ce que cela représente comme économie d’énergie, on verrait que c’est important.
Les populations aussi peuvent jouer un rôle extrêmement important. Souvent on ne parle que de la puissance installée, mais on oublie, aujourd’hui, que, si on voit l’évolution de la situation dans le monde et qui impacte sur le prix du pétrole (qui est actuellement au dessus des 100 dollars), on se rend compte que si les choses continuent à se gâter, le Sénégal a un défi extrêmement important à relever. Ça aussi on a voulu le mettre sur la table pour que les Sénégalais comprennent l’ampleur de ce défi qui est déjà là, mais qui risque d’être beaucoup plus compliqué à l’avenir, si les Sénégalais ne prennent pas des attitudes permettant à notre pays de faire face à cette situation à l’échelle mondiale.
On joue sur plusieurs tableaux. Le délestage c’est quand la demande est supérieure à l’offre. L’électricité a ceci de particulier, il faut que l’offre et la demande soient instantanément en équilibre. Quand on a une offre qui est ce qu’elle est, on peut penser à jouer sur la demande en la réduisant. C’est le troisième plan qui concerne la mise en place d’un plan agressif de gestion de la demande. Il est possible, si on a une forte volonté politique derrière, d’agir sur la demande. C’est le cas avec les fameuses Lbc. Si vous avez un usager qui a l’habitude d’utiliser des lampes de 40 Watts, si vous passez à 8 Watts, 11 Watts, vous voyez bien que votre consommation est passée du simple au quart ; la consommation aussi.
Mais si vous avez un usager normal, en plus de l’éclairage vous avez une télé, un frigo – c’est le frigo qui consomme le plus parmi les équipements d’un usager moyen – on constate que parfois le thermostat pose ne s’arrête pas, par conséquent la consommation ne s’arrête pas non plus. Dans ce cas, la consommation peut être multipliée par deux, par trois ou par même quatre. Alors si j’installe des Lbc chez moi et que je ne ferme pas le frigo il y a de très fortes raisons pour que l’incidence de ces lampes là soit minime. Je crois dans ce cas de figure, la Senelec a aussi des efforts à faire pour sensibiliser les usagers. Parfois ce sont des faits qui peuvent impacter jusqu’à 20 % de la demande.
Rétablir la confiance avec les clients
Il faut qu’on règle aussi la question des factures. Car on ne peut pas comprendre qu’on délivre à quelqu’un qui consomme 40.000 francs une facture de un millions de francs. Il y a problème. Il faut qu’on rétablisse la confiance entre la Senelec et les consommateurs en améliorant les relations. Mais avec ce plan d’urgence on va rassurer les consommateurs dans leurs relations avec la Senelec. C’est dans cadre que la communication est importante. Est-ce qu’il ne faut pas désigner un médiateur entre la Senelec et les populations pour régler certaines problèmes qui surviendront entre eux ?
Une coalition pour la prise en charge du secteur
Depuis les années 1980, nous sommes dans des situations difficiles dans le domaine de l’énergie. C’est un problème complexe, difficile et têtu que nous vivons depuis longtemps. Il faut que les Sénégalais aient la modestie d’accepter que ce n’est pas le fait particulièrement d’une personne, mais que nos réalités africaines font que la couverture des besoins énergétiques d’un petit pays comme le nôtre, ne peut pas être une question simple. Dans d’autres contextes, en Europe par exemple, quand il y a des problèmes, l’interconnexion peut aider à les résoudre. La France peut, par exemple, importer de l’énergie en Roumanie, ou vice versa. Mais les réalités africaines sont telles, aujourd’hui, que quand on aborde cette question, il ne faut pas ignorer le contexte.
Ce qui fait le plus mal, c’est de voir que nous en sommes encore là, malgré tous les efforts qui ont été faits depuis très longtemps et malgré tous les sacrifices consentis par les Sénégalais depuis très longtemps. Malheureusement, dans le traitement de ce dossier, on a comme l’impression qu’on refusait de s’arrêter pour voir pourquoi on en est encore là. D’où l’intérêt de la création de ce comité.
Le problème nécessite une volonté politique très forte. Et on est en train d’assister, dans ce sens, à une évolution positive. Aussi, avons-nous avons besoin d’une coalition de tous les acteurs : les acteurs politiques qui doivent donner l’exemple, montrer qu’ils ont conscience de l’importance de ce secteur ; les acteurs techniques qui doivent faire preuve d’innovations en proposant des solutions osées ; des financiers parce que c’est un secteur qui nécessite beaucoup d’investissements ; mais aussi la compréhension des acteurs sociaux (syndicats) parce qu’à chaque fois qu’on tape dur sur la Senelec, ça se ressent d’une manière ou d’une autre. Tout le monde a sa part dans cette affaire.
C’est une bataille pour le devenir du pays. Ou on arrive à régler ce problème et on peut encore continuer à croire à notre rêve d’émergence, ou on n’y arrive pas et on peut dire adieu à ce rêve. Quand on a un combat de ce niveau, nous croyons qu’au-delà de nos divergences politiques, au-delà des prises de positions des uns et des autres, on peut se mettre d’accord sur l’essentiel. Le comité n’a pas la prétention d’avoir toutes les solutions, mais au moins, quand on a la modestie, de se dire qu’on est ensemble et qu’il y a des solutions qui sont entre les mains de ceux qui sont dans le secteur, et d’autres qui sont en dehors, on peut avancer.
Volonté de rupture
Aujourd’hui, il y a de grands espoirs. Le ministre en charge de l’Energie a dit « oui, j’ai de bons ingénieurs, j’ai de bons financiers, mais je ne me contente pas de mes compétences technico-financiers, je veux une approche inclusive, participative, je veux créer quelque chose d’assez indépendant et je veux que ceux qui sont choisis pour travailler dans cette équipe se sentent libres de dire ce qu’ils pensent, de formuler des propositions aussi brutalement qu’ils le jugeront utile parce que c’est ça qui sera profitable au gouvernement… ». Le gouvernement a dit : « on va créer ce Crrse, mais on va même montrer au peuple sénégalais qu’on va mettre la question de l’énergie au top de l’agenda politique, on va même créer un Comité national de l’énergie et qui sera dirigé par le président de la République ». Cette volonté d’avoir une approche holistique, est porteuse de grands espoirs.
C’est parce qu’il y a une volonté de rupture, qu’après avoir fixé le cadre pour voir la situation et les interactions, la complexité du système, le comité a dégagé des solutions bien structurées et bien hiérarchisées en allant de ce qui est très urgent aux solutions à long terme. On est dans une démarche qui ne consiste pas seulement à chercher une solution de sortie de crise, mais on cherche aussi à libérer notre pays de cette contrainte énergétique pour que demain, pourquoi pas, petit pays non producteur de pétrole, nous puissions devenir un grand pays exportateur d’électricité en Afrique. Et le gouvernement est aujourd’hui dans les dispositions pour faire les sacrifices nécessaires pour y arriver.
Résoudre durablement les difficultés d’approvisionnement en combustibles
A cause du déficit de production de la Sar, la Senelec, pour couvrir le reste de ses besoins, est obligée d’importer du fuel. Quand la Sar s’est arrêtée, Senelec s’est vue refuser par certaines multinationales qui avaient la capacité d’importer parce qu’elle n’avait pas les moyens de payer normalement. C’est la raison pour laquelle Senelec s’est portée volontaire pour chercher une licence d’importation, Depuis 1998, pour exercer dans le sous-secteur des hydrocarbures, il faut une licence. Les 700 tonnes que la raffinerie (de la Sar) fournit à travers ses installations, c’est un fuel noble, issu du pétrole noble venant du Nigeria qui est même plus cher que le pétrole américain. Pourquoi la Sar traite ce pétrole brut ? C’est parce que ses installations sont vétustes. La Sar ne peut pas traiter un brut plus lourd. Aujourd’hui, il n’y a qu’une centrale qui est approvisionnée de ce fuel, c’est celle de Kounoune conformément aux dispositions régissant son contrat. Elle a une consommation de l’ordre de 350 tonnes par jour. La Sar en fournit 700 tonnes. Cela veut dire que tous les jours, la Sar aurait dû mettre en place un stock traditionnel d’un jour de consommation pour Kounoune. Et au bout du mois, on aurait, au moins, un stock d’un mois pour cette centrale. Mais aujourd’hui, le problème numéro un que nous avons, c’est le combustible. Le Comité national des hydrocarbures, toutes les deux semaines, se réunit, regarde la production de la raffinerie, voit la consommation du marché, puis se projette dans deux mois pour dire : voilà pour chaque produit, il y a un déficit de tant pour la raffinerie et qu’il faut tout de suite importer ce déficit pour l’avoir le mois prochain. Donc, au mois d’octobre déjà, on avait dit qu’il fallait une importation de 30.000 tonnes devant venir dans la fourchette du 15 au 20 décembre pour approvisionner la Senelec.
Ce bateau est arrivé dans les délais et la Senelec n’était pas dans les moyens financiers de payer. Le bateau est parti. Au mois de novembre, nous avions également dit qu’il fallait, dans la fourchette du 15 au 20 janvier 2011, encore 30.000 tonnes. Le bateau qui était parti est revenu pour cette nouvelle échéance. Et c’est ce bateau qui est aujourd’hui là et dont on est en train de faire les analyses. Donc, dans la chaîne d’approvisionnement, le bateau qui devait être là au mois de décembre, n’est pas là, ce qui induit un déficit de 30.000 tonnes. C’est ce qui nous crée ces difficultés actuelles. Et maintenant qu’il est là, il y a un problème de conformité sur la qualité. Puisque nous-nous souvenons de ce qui s’est passé en juillet dernier (un problème de fuel avait endommagé les deux tiers des capacités de productions de la Senelec), la Sar s’est dite qu’il fallait s’arrêter et y regarder de plus près. D’autant plus que ce qui était ressorti de l’incident de juillet, c’était qu’il fallait, désormais, marquer une attention particulière pour la qualité du produit.
Aujourd’hui, ce produit est encore en train d’être analysé pour une troisième fois. Voilà pourquoi nous sommes dans une situation tendue. C’est pourquoi, des programmes d’urgence ont été déroulés pour l’importation de fuel pour Kounoune, parce que la Sar est en arrêt depuis le 22 janvier. La Sar s’est arrêtée également parce que la cargaison de brut qui devait arriver le 22 janvier, pour assurer la soudure, ne sera là que le 13 février. Donc, nous n’avons plus de fuel produit par la Sar aujourd’hui et il faut alimenter la centrale de Kounoune. Heureusement que nous avons une importation qui est arrivée aujourd’hui même (vendredi 4 février) et qui est en train d’être analysée et dont les premiers résultats à notre disposition disent que le produit est conforme pour Kounoune.
Ce qui veut dire que la centrale de Kounoune, en principe, ne devrait pas s’arrêter et aura, ainsi, avec 5.000 tonnes, une autonomie d’au moins trois semaines. Reste maintenant le problème du tanker qui est là en train d’être analysé et dont les résultats ne sont pas encore disponibles. C’est ce tanker qui doit régler l’approvisionnement en combustible des autres centrales qui n’ont pas besoin d’un fuel très noble. Il fallait également procéder, aujourd’hui (vendredi dernier), à une importation d’urgence de 10.000 tonnes qui seront là normalement le 9 février et, en plus de cela, dérouler un autre programme d’importation de 40.000 tonnes qui vont arriver courant février pour pouvoir approvisionner correctement tout le système de Senelec. Ce sont des montants très importants, 1.500 tonnes de fuel par jour, c’est à peu près 450 millions de francs Cfa. Il faut approvisionner certaines centrales avec 200 tonnes de diesel. Ce qui fait 100 millions de francs Cfa de plus. Donc, Senelec a besoin, au moins, de 500 millions de francs Cfa par jour pour fonctionner correctement en matière de combustible. En termes d’achat de combustible et d’énergie de manière générale, Senelec a, en charge mensuelle, 17 milliards de francs Cfa. Alors, si, comme le disent certains, Senelec voulait faire des stocks de trois ou quatre mois, il faudrait multiplier ces 17 milliards de francs Cfa par trois ou quatre. Et il faudrait les immobiliser. Ce qui pose le problème du stock de sécurité déjà en moyens financiers, mais en plus de cela, il faudrait payer des frais de stockage. Le stockage du fuel, comme de tous les autres produits liquides ou produits blancs, c’est 6 francs Cfa le litre. Là aussi, c’est des dépenses énormes. Ce qui pose le problème de mise en place des stocks de sécurité au-delà même des capacités de stockage.
Déficit de capacités de stockage résolu
En effet, en dehors des difficultés de mobilisation de tous ces moyens financiers, il y a le problème des capacités de stockage. Aujourd’hui, sans Senstock (qui vient de démarrer et qui a une capacité de 160.000 m3), ce que nous avions en capacités de stockage terrestres, c’était 90.000 m3 (DOT de Yarakh, SPP produits blancs de Total). Il y en a dans le port (environ 300.000 m3), mais ces stockages portuaires sont surtout destinés à la réexportation pour les navires. Nous avons estimé, pour le marché sénégalais, en 2009, pour avoir les 35 jours de stock de sécurité, comme le prévoit la réglementation, il fallait au moins avoir 250.000 m3 de capacités de stockage. Au fond, c’est aujourd’hui seulement que nous sommes en train de résoudre ce problème de déficit de capacités de stockage. Avec Senstock (160.000 m3) plus les 90.000 m3 déjà existantes, nous sommes donc à 250.000 m3. Aujourd’hui, si Senstock fonctionne correctement, nous avons les moyens de mettre en œuvre les capacités de stockage de sécurité pour 35 jours. Restera encore, toujours, le problème financier parce que le texte dit qu’il faut réaliser ces capacités de stockage de 35 jours pour chaque produit (fuel, carburant, gasoil, pétrole, diesel, etc.). Et si vous calculez tout cela en termes de 35 jours de frais de stockage, c’est assez important.
Cherté des factures malgré les coupures
C’est une question « Seneleco-Senelec ». Senelec a un contrat avec les clients de façon générale. Le contrat stipule que le compteur ou le comptage, c’est l’élément qui mesure votre consommation qui est facturée. C’est instrument de mesure, de la même manière que la balance qui est chez le commerçant, est soumis aux mêmes règles de contrôle et de certification. C’est le contrôle économique qui est chargé de s’assurer de la viabilité de ces éléments de mesure. Néanmoins, quand on installe un compteur chez un client, s’il pense que le compteur n’est pas fiable, il a la possibilité de demander un étalonnage comme c’est le cas pour les industriels. Quand vous demandez un étalonnage, on mesure et si l’on se rend compte que le comptage n’est plus fiable, les redressements nécessaires sont faits pour vous rembourser s’il y a eu des consommations anormalement chez vous. Le cas échéant, si votre comptage est normal et qu’il y a eu des pertes, on est obligé de redresser dans le sens de rattraper les pertes occasionnées. C’est plus simple quand il s’agit d’un abonné basse tension. La façon la plus simple de vérifier, c’est que quand il n’y a pas de délestage, coupez le disjoncteur et regardez le compteur. Si le disque tourne, ça veut dire qu’il y a de l’électricité quelque part dans la maison. Si ça ne tourne pas du tout, en ce moment il n y a pas d’électricité dans la maison. C’est pareil quand il y a délestage. La preuve, s’il vous arrive de rester un à deux mois hors de chez vous, certainement vous allez recevoir une facture qui ne sera pas celle que vous aviez l’habitude de recevoir. A partir de ce moment là, c’est extrêmement difficile de dire que les délestages sont là et les factures augmentent. On ne peut pas facturer les clients pour financer quoi que ce soit. Il y a cinq indicateurs sur lesquels on est mesuré en tant que commerciaux. Il s’agit, entre autres de la fiabilité de la facturation et le taux de recouvrement. Nous ne pouvons pas le faire parce que nous sommes aussi surveillés par la commission de régulation du secteur de l’électricité.
Améliorer le management et la bonne gouvernance à la SENELEC
L’Etat s’est engagé aussi dans la bonne gouvernance. C’est dans ce cadre qu’il faut comprendre la nomination de Cheikh Tidiane Mbaye à la présidence du conseil d’administration de la Senelec. C’est un signal fort que l’Etat a donné. La mission qui lui a été donnée est de proposer un nouveau mode de gouvernance car on ne peut pas demander aux populations de faire des efforts et ne pas dire à la Senelec d’en faire autant. Mais je crois que la gestion de Senelec va s’améliorer et cela va se répercuter sur le consommateur. Il faut donc aller vers une vente normale de service public de l’électricité pour permettre à la Senelec de pouvoir optimiser ses coûts pour donner un produit de qualité et qui ne soit pas aussi cher. Car on ne peut pas penser augmenter fréquemment le coût de l’électricité. D’ailleurs, il y a tellement de projets dans cette société pour permettre aux consommateurs d’avoir du courant à coût réduit mais, malheureusement, avec la crise qu’elle connaît, ils sont suspendus car on ne peut pas investir en période de conjoncture.
Si on approvisionne correctement les centrales en combustible, il n’y aura pas de délestages. Même s’il y en a, c’est pour une heure. Et si on met un budget pour les pièces de rechange jusqu’en juin, la Senelec peut remettre à niveau certains équipements et entamer la procédure de location. Nous avons discuté avec les techniciens de Senelec qui soutiennent que si on règle les problèmes du combustible, en mettant des ressources pour l’entretien et l’équipement, la production sera normale.
Depuis 2003, trois centrales toutes neuves ont été achetées et mises en service. Il s’agit de Kounoune, Gti, C6 et C7 avec une capacité de 226 ou 286 Mw. L’approvisionnement de ces centrales doit être sécurisé. Si on approvisionnait correctement les centrales, on ne devrait pas avoir de déficit.
Si Gti fonctionnait correctement, il y aurait juste un équilibre précaire. Si aujourd’hui on loue une capacité additionnelle pour permettre d’entretenir les machines et qu’on répare certains, Senelec, qui est à un niveau de production équilibré, va garder cet équilibre. Ce qu’il faut dire aux populations, c’est que les délestages sont les conséquences d’une situation qui est prise en compte par le gouvernement. Ce qui explique la mise en place de ce comité de relance et de restructuration du secteur de l’énergie. Il faut seulement espérer que les recommandations faites soient appliquées dans quelques mois.
Subventions de l’Etat
Il faut préciser aussi que la Senelec vend à perte aux consommateurs. Elle produit une électricité à 167 francs Cfa le KW qu’elle revend à 108 ou 120 francs Cfa. Donc elle vend à perte. Elle vendrait plus à perte si l’Etat ne faisait pas un effort financier. On parle des nombreux milliards investis dans la Senelec mais il faut préciser que près de 210 milliards sont destinés à la subvention qui permet à chaque Sénégalais de payer moins cher son électricité. Cela mérite d’être clarifié.
La question des marchés réglée avec le statut de la Sar
Aujourd’hui, tout le monde, qu’il s’agisse du gouvernement, de l’Armp ou des bailleurs de fonds, sait que quand on dit plan d’urgence, c’est état d’urgence énergie. C’est une question de souveraineté. Le gouvernement sait là où il faut passer pour mobiliser les moyens et régler le problème et que les appels d’offres ne constituent pas un blocage. Sur la question des marchés, c’est assez simple. La Sar est aujourd’hui une société privée. Elle n’est plus contrôlée par l’Armp ou la Dcmp. Elle peut s’approvisionner librement en combustible comme elle a commencé à le faire par une communication appropriée il y a quelques jours. Elle va s’approvisionner car c’est une exigence de l’Etat et des autres actionnaires. Donc, il n’y a rien à craindre concernant les marchés car c’est une société privée. Les approvisionnements vont se faire à meilleur prix et dans la transparence.
Location temporaire d’une centrale par l’APIX
Pour ce qui est de la location qui est l’autre grosse affaire, Aminata Niane (directeur général de l’Apix) a prouvé qu’elle a la capacité de gérer dans la transparence ce volet. Elle a déjà commencé à le faire par une bonne communication. Il n’y a aucune inquiétude à se faire. En plus, pour les pièces de rechange et les autres accessoires, le Code des marchés publics prévoit des cas exprès d’urgence que l’Armp et la Dcmp autorisent tous les jours. En cas d’urgence justifiée, c’est l’Armp qui donnera les autorisations. Donc, c’est vous dire que sur tous les plans, les marchés sont bien ficelés.
Les trois premiers éléments du plan d’urgence sont tellement bien verrouillés que, s’ils sont bien compris, théoriquement on ne peut pas avoir de problèmes car l’approvisionnement en combustible est confié à la Sar pour la sécurisation. La Sar a prouvé qu’elle pouvait le faire. La Senelec doit être en mesure de payer et l’Etat s’est doté des instruments de paiement par des lignes de crédit notamment de la Banque islamique de développement qui était déjà là et d’autres établissements bancaires qui sont venus s’y ajouter. La Sar va lancer les appels d’offres. Ce n’est pas encore le cas. C’est pourquoi nous sommes encore dans les délestages. On est actuellement dans une situation de sortie de contrat. C’est à partir de fin mars que le processus va commencer. Mais l’Etat se donne les moyens de sécuriser le paiement par la Senelec car si elle ne paie pas, ça ne pourra pas marcher. Mais elle va pouvoir payer parce que l’Etat du Sénégal et ses partenaires au développement sont déterminés et tout le monde sait que l’approvisionnement se fera de façon transparente. La Senelec va aussi s’approvisionner au meilleur prix des marchés car elle achetait parfois dans des conditions très compliquées. Parfois dans du cash dans le passé. Ce qui va disparaître car elle va revenir dans une situation normale pour une société comme elle. D’ailleurs, elle ne peut pas ne pas être rentable dans la mesure où elle produit un produit précieux que tous ses clients paient cash à la caisse. La confiance qui manquait va revenir car il y a une détermination des autorités avec des procédures de bonne gouvernance pour l’accompagner. La Senelec va être en mesure de s’approvisionner.
Normalement, on n’aura plus à nous retrouver dans une situation où on arrête à cause du fuel. Car il y a des dispositifs de paiement qui se mettent en place et Senelec va être restructurée avec un rééchelonnement de sa dette pour que ses revenus ne soient pas gagés mais qu’il y ait une partie pour payer le combustible qui lui permet de fonctionner.
Croire au plan d’urgence
Théoriquement, la Senelec a des capacités qui sont supérieures aux besoins du pays. Mais il y a des centrales qui sont en panne ou mal entretenues, d’autres qui marchent mais qui ne sont pas efficientes. En attendant que ces équipements soient pleinement fonctionnels, l’Apix va louer des machines qui vont permettre au pays de disposer de capacités fonctionnelles pendant que le processus de maintenance et de remise en état se réalise. Ce qui permettra de faire face à la demande et même quand il s’agira de faire encore une maintenance que la Senelec le fasse sans problème. C’est ce qui va se faire dans un court délai pour faire face à la demande. La seule conséquence, c’est qu’il y aura des productions très chères, une énergie pas toujours de bonne qualité. Mais concomitamment, le programme de création de nouvelles capacités continue. Ce qui fait qu’à la fin du processus, on aura des centrales optimisées et d’autres qui vont venir. Ce qui nous conduira à avoir à la fin un système de production moderne, jeune, efficient, bien maintenu et qui va donner une énergie disponible pour d’autres pays mais aussi à des coûts supportables pour l’économie. C’est pourquoi, il faut croire en ce plan qui est fiable, bien maîtrisé avec un système de financement du combustible cohérent. Le comité n’a fait que des recommandations mais le gouvernement s’est déjà donné les moyens. Car si l’Apix a pu lancer des appels d’offres, cela veut dire qu’il y a une proximité entre ce que faisaient le comité et les autorités qui ne voulaient pas attendre au dernier moment pour agir. C’est important de relayer la fiabilité du système et son opérationnalité. Ce que nous avons dit est parfaitement réalisable de façon concomitante et maîtrisée car s’il y avait une faille, ça ne marcherait pas. Ce plan va dans le temps car on ne peut pas régler les délestages et ne pas régler le problème de l’énergie et on ne peut pas le faire en un ou trois mois. Dans cette situation, on ne peut pas ne pas respecter les engagements pris. L’énergie, telle que nous le pensons et vu l’engagement de l’Etat, il n’y a aucune raison de douter. Jamais on n’a été aussi déterminé au niveau de l’Etat dans un projet comme celui là.
Les nouveautés du plan d’urgence
En juillet et août lorsque le ministre de l’Energie a été convoqué à l’Assemblée nationale, on était sceptique, pas convaincu pour l’avenir car la situation était sombre. C’est pourquoi le Crrse est très important car il y a le ministère qui défend une ligne très officielle, claire et technique mais aussi, il y a les syndicats. Cependant, il y a d’autres qui prennent le chemin d’aborder les choses sous d’autres angles. Pour la question de la sécurisation du combustible, on va créer un mécanisme qui sera logé quelle que part en dehors de la Senelec et qui ne s’occupera que de cette question. Ce fonds est mis en place et sera alimenté directement par le ministère de l’Economie et des Finances. Cela n’existait pas avant et c’est une nouveauté. Le combustible est le problème principal de la Senelec. Si on ne le règle pas, rien ne marchera. Aujourd’hui, il y a un changement. Un nouveau dispositif est mis en place avec un mécanisme spécial pour sécuriser le combustible.
Le gouvernement a décidé de sortir certaines questions du champ de la Senelec pour mieux les régler. Cela vaut dire qu’on ne va pas fatiguer davantage les autorités de la Senelec à aller chercher quoi que soit mais on leur demandera de se concentrer sur des domaines techniques et spécifiques. Il y a un plan de location pour amener des capacités additionnelles de 180 Mw dont 50 immédiatement. Ce qui a été confié à l’Apix qui travaille sur les investissements. Elle a déjà mis en place un comité technique pour optimiser les choix pour ne pas louer n’importe quoi. L’Apix a des instruments qui l’organisent, des opportunités, des ouvertures et une crédibilité qui lui permettent d’aller louer des capacités additionnelles.
Création d’un dispositif pour suivre la mise en œuvre
On va créer un dispositif, une instance pour suivre la mise en œuvre. Les choses sont en train de bouger. Il y a aussi la création d’un Conseil national de l’énergie qui ne s’occupera que de regarder si telle action annoncée à telle date a été exécutée et si on a réuni les conditions pour ça. Ce sont ces modalités et instruments qui nous rassurent aujourd’hui. Ce sont des éléments nouveaux, concrets, dynamiques qu’il faut intégrer pour pouvoir impacter positivement sur la mise en œuvre. Le Conseil national de l’électricité est presque un conseil de guerre. Le président a voulu que ce soit ainsi. Chaque semaine, on voit si chacun a exécuté les responsabilités qui lui ont été confiées. Si ce n’est pas fait, on vire la personne. C’est cela l’esprit nouveau : aller en guerre contre les délestages. Si tout est mis en œuvre, il n’y aura pas de problèmes. Le combat, c’est celui de la mise en œuvre du plan d’urgence. Il faut qu’on exige sa mise en œuvre. Nous allons chercher les ressources qu’il faut pour trouver une solution au secteur de l’énergie. C’est pourquoi, les télécoms vont participer au renforcement du secteur de l’énergie. Nous sommes en face d’un malade (Senelec). Il ne faut pas l’acculer. Il y a un matraquage médiatique sur la Senelec avec des réclamations à n’en plus finir. Parfois, il nous est difficile d’aller faire le recouvrement ou de faire les relevés. Il faut donc se concentrer sur ce malade qui était entretenu dans un système usurier.
Nous avons demandé au gouvernement de tout faire pour que la centrale à charbon soit disponible en 2014, quelles qu’en soient les difficultés. C’est une recommandation forte du comité pour dire que nous travaillons pour trouver des solutions au secteur de l’énergie.
Source: lesoleil.sn