Ce n'est pas encore un naufrage mais, à sept semaines de l'élection présidentielle, le bateau de la campagne Romney traverse une véritable zone de tempête. Avec un chômage au-dessus de 8% et 60% des Américains convaincus que le pays va «dans la mauvaise direction», le challenger d'Obama devrait, en théorie, avoir le vent en poupe. «Avec de tels chiffres, une victoire du président sortant devrait être une impossibilité mathématique», note Jonathan Martin du journal Politico. Au lieu de cela, Romney se retrouve empêtré dans une cascade de gaffes et de minicrises d'autant plus embarrassantes qu'il en est lui-même responsable. La dernière concerne la mise en ligne lundi, sur le site du journal libéral Mother Jones, d'une vidéo montrant Romney en train d'ironiser sur «les 47 % d'Américains qui ne paient pas d'impôts et dépendent du gouvernement». «Ceux-là ne voteront sans doute jamais pour moi» car «ils estiment avoir droit à la santé, à la nourriture, au logement et quoi que ce soit d'autre!», explique sans fard le candidat républicain à de riches donateurs, qui ont payé 50.000 dollars pour venir l'écouter. «Mon boulot n'est pas de m'occuper de ces gens-là, je ne les convaincrai jamais qu'ils doivent assumer leurs propres responsabilités», dit-il avec une franchise - et une imprudence - stupéfiante.
La vidéo, tournée subrepticement en mai à Boca Roca en Floride, dans la maison du financier Mark Leder, n'était pas censée se retrouver sur Internet. Mais beaucoup de stratèges républicains observent discrètement que George W. Bush n'aurait jamais commis l'impair de prononcer de telles paroles en public. C'est le petit-fils du président Carter qui a mis Mother Jones en contact avec l'auteur de la vidéo, un geste perçu par certains comme une vengeance contre les attaques répétées du camp conservateur contre son grand-père. Le document est en tout cas une véritable aubaine pour les démocrates. «C'est difficile d'être le président de tous les Américains quand vous avez tiré un trait avec mépris sur la moitié de la nation», a asséné Jim Messina, le directeur de campagne d'Obama, qui dépeint Romney comme un multimillionnaire acquis aux intérêts des plus riches. «Quand on est président des États-Unis, on est le président de tous les Américains, pas seulement de ceux qui ont voté pour vous», a surenchéri la Maison-Blanche. Forcé de se justifier par l'ouragan de critiques, le candidat républicain a dû convoquer une conférence de presse. Nerveux et raide, Mitt Romney a reconnu que ses propos n'avaient pas été «formulés élégamment», même s'il ne s'est pas rétracté sur «le fond du débat». L'effet était assez calamiteux.
Plus tard dans la journée, Mother Jones a encore enfoncé le clou, avec cette fois une vidéo, tirée de la même réunion de donateurs, dans laquelle on peut entendre Mitt Romney affirmer que «les Palestiniens ne s'intéressent absolument pas à la paix» avec Israël, et «qu'un cheminement vers la paix est presque absolument impensable». Le candidat républicain y confesse notamment que s'il était élu, il n'interviendrait pas pour tenter de relancer le processus de paix israélo-palestinien. «Ce n'est pas du leadership, c'est le contraire du leadership», a réagi le porte-parole de la Maison-Blanche, Jay Carney.
Le timing de la sortie de la vidéo est assassin, alors que la campagne Romney se remet à peine de ses faux pas de la semaine dernière. Accusant Obama d'avoir semé les graines de la révolte par son indulgence vis-à-vis des extrémistes, le camp républicain avait tiré à vue sur la Maison-Blanche, en pleine crise libyenne et égyptienne, sans même prendre le temps d'établir les faits, s'attirant une volée de bois vert de ses propres rangs.
Tensions parmi les conseillers
Résultat, de fortes tensions se font jour dans l'équipe de campagne. Les unes concernent la main excessive que conservent les faucons néoconservateurs en politique étrangère. Les autres traduisent des divergences sur la gestion de la campagne. L'une des critiques récurrentes concerne aussi le message trop économique de Romney, qui a échoué à changer son image de «robot» technocrate. Trois sondages donnent désormais l'avantage à Obama sur la gestion de l'économie. Plusieurs figures conservatrices estiment enfin que Romney a dilué l'effet porteur de la nomination de son candidat à la vice-présidence, Paul Ryan, en brouillant ses intentions concernant Medicare et la réduction de la dette. «Mon équipe est formidable», a rétorqué lundi le candidat.
La campagne républicaine s'apprête à lancer une série de nouveaux clips publicitaires pour préciser son projet de gouvernement. Il s'agit de présenter une alternative plus claire à Obama. Malgré leurs récents revers, les républicains continuent d'affirmer que les Américains en rêvent et que la victoire reste à portée de main. Il est vrai que si le président est en tête, l'écart (d'environ 4 %) entre les deux hommes reste dans la marge d'erreur statistique.
Par Laure Mandeville
La vidéo, tournée subrepticement en mai à Boca Roca en Floride, dans la maison du financier Mark Leder, n'était pas censée se retrouver sur Internet. Mais beaucoup de stratèges républicains observent discrètement que George W. Bush n'aurait jamais commis l'impair de prononcer de telles paroles en public. C'est le petit-fils du président Carter qui a mis Mother Jones en contact avec l'auteur de la vidéo, un geste perçu par certains comme une vengeance contre les attaques répétées du camp conservateur contre son grand-père. Le document est en tout cas une véritable aubaine pour les démocrates. «C'est difficile d'être le président de tous les Américains quand vous avez tiré un trait avec mépris sur la moitié de la nation», a asséné Jim Messina, le directeur de campagne d'Obama, qui dépeint Romney comme un multimillionnaire acquis aux intérêts des plus riches. «Quand on est président des États-Unis, on est le président de tous les Américains, pas seulement de ceux qui ont voté pour vous», a surenchéri la Maison-Blanche. Forcé de se justifier par l'ouragan de critiques, le candidat républicain a dû convoquer une conférence de presse. Nerveux et raide, Mitt Romney a reconnu que ses propos n'avaient pas été «formulés élégamment», même s'il ne s'est pas rétracté sur «le fond du débat». L'effet était assez calamiteux.
Plus tard dans la journée, Mother Jones a encore enfoncé le clou, avec cette fois une vidéo, tirée de la même réunion de donateurs, dans laquelle on peut entendre Mitt Romney affirmer que «les Palestiniens ne s'intéressent absolument pas à la paix» avec Israël, et «qu'un cheminement vers la paix est presque absolument impensable». Le candidat républicain y confesse notamment que s'il était élu, il n'interviendrait pas pour tenter de relancer le processus de paix israélo-palestinien. «Ce n'est pas du leadership, c'est le contraire du leadership», a réagi le porte-parole de la Maison-Blanche, Jay Carney.
Le timing de la sortie de la vidéo est assassin, alors que la campagne Romney se remet à peine de ses faux pas de la semaine dernière. Accusant Obama d'avoir semé les graines de la révolte par son indulgence vis-à-vis des extrémistes, le camp républicain avait tiré à vue sur la Maison-Blanche, en pleine crise libyenne et égyptienne, sans même prendre le temps d'établir les faits, s'attirant une volée de bois vert de ses propres rangs.
Tensions parmi les conseillers
Résultat, de fortes tensions se font jour dans l'équipe de campagne. Les unes concernent la main excessive que conservent les faucons néoconservateurs en politique étrangère. Les autres traduisent des divergences sur la gestion de la campagne. L'une des critiques récurrentes concerne aussi le message trop économique de Romney, qui a échoué à changer son image de «robot» technocrate. Trois sondages donnent désormais l'avantage à Obama sur la gestion de l'économie. Plusieurs figures conservatrices estiment enfin que Romney a dilué l'effet porteur de la nomination de son candidat à la vice-présidence, Paul Ryan, en brouillant ses intentions concernant Medicare et la réduction de la dette. «Mon équipe est formidable», a rétorqué lundi le candidat.
La campagne républicaine s'apprête à lancer une série de nouveaux clips publicitaires pour préciser son projet de gouvernement. Il s'agit de présenter une alternative plus claire à Obama. Malgré leurs récents revers, les républicains continuent d'affirmer que les Américains en rêvent et que la victoire reste à portée de main. Il est vrai que si le président est en tête, l'écart (d'environ 4 %) entre les deux hommes reste dans la marge d'erreur statistique.
Par Laure Mandeville