Ils avaient mis les petits plats dans les grands, en février 2008. En effet, quelques cinquante journalistes, venus des cinq continents, avaient séjourné au Sénégal, devenu le nombril du monde, le temps de la conférence de presse de lancement. D’ailleurs, ces journalistes, traités comme des pachas, étaient conviés à un mini-concert organisé par Youssou Ndour à la mythique île de Gorée. « Ils », ce sont le chanteur interplanétaire Youssou Ndour et le très « class » industriel Alessandro Benetton, qui s’étaient associés pour lancer, sous les lambris dorés de l’hôtel « TERANGA », le slogan « Africa Works » (entendez l’Afrique Travaille) aux fins carillonnait ce duo « pour donner une visibilité internationale au microcrédit et promouvoir ce mode de financement sur le continent africain. » L’on se rappelle que dans son intervention, Youssou Ndour avait justifié l’impératif de ce projet en soutenant mordicus : « le microcrédit est la voie à prendre, car le système bancaire n’est pas adapté pour les plus démunis ». Et l’interprète de « Birima » de renchérir que « jusqu’ici, ce sont les États qui s’endettaient, maintenant il faut que les populations aient le courage de s’endetter. J’espère que cette campagne va donner aux institutions financières l’occasion de réagir, financièrement parlant (…) ».
Nébuleuse autour d’1, 3 million de dollars
L’opération a été également une occasion de lancer la mutuelle d’épargne et de crédit dénommée « Birima » par Youssou Ndour. Il nous revient que quand le bailleur, Alessandro Benetton, qui a accepté de financer, l’avait interpelé sur l’appellation, Youssou Ndour lui a dit qu’il l’appellerait « Birima », du nom du Damel du Cayor. Et le magnat italien de lui demander les raisons. Pour toute réponse, l’artiste interplanétaire répondra que « Birima était un homme qui tenait toujours parole ». C’est ainsi que Benetton opinera du bonnet, c'est-à-dire paraphera, sans sourciller, l’accord avec Youssou. Toutefois, nos sources, au parfum des tractations ayant abouti à ce projet, soutiennent qu’il s’est agi « d’un mariage d’amour et de raison ». Se voulant explicite, nos vis-à-vis renseignent qu’en réalité, la firme italienne a investi dans « Birima » et dans la campagne de publicité mondiale à coups de millions. En retour, cette « implication sociale » pour paraphraser les clauses du contrat, devait permettre à Alessandro Benetton de surfer sur la vague « équitable » à la mode. Par la suite, s’en sont suivi des financements émanant du principal bailleur, en l’occurrence Benetton. Mais, une nébuleuse plane sur la rondelette somme d’1, 3 million de dollars « injectée » par Alessandro. Ce dernier, subjugué par le discours « généreux » du chanteur interplanétaire, « n’avait pris aucune garantie particulière et n’avait revendiqué aucun rôle dans la gestion de ce fonds ».
Illusions perdus
Toutefois, ce projet lancé avec faste avait suscité de l’espoir, notamment auprès des strates les plus défavorisées, compte tenu du discours à tout le moins rassurant de l’administrateur, qui n’est autre que le nommé Ibrahima Malick Thioune. En effet, ce dernier avait, en son temps, plus précisément en février 2008, laissé entendre devant la cohorte de journalistes nationaux comme internationaux que « 85% des projets ne trouvent pas de financement au Sénégal et sur les onze millions d’habitants du pays, plusieurs dépendent déjà du projet Birima. Les taux de bancarisation et de pénétration bancaire se situent autour de 4% » Et Thioune de poursuivre : « nos cibles seront donc des personnes exclues du système bancaire à cause de leurs revenus ou de leur éloignement des banques. Les pauvres, les artisans, les artistes, bref, personne ne sera exclu » Malheureusement, depuis lors, les choses n’ont pas eu l’effet escompté car le projet a été dévoyé de sa mission.
Appel aux bailleurs de fonds
Un avis que ne partage pas Youssou Ndour, lequel invité lors d’un forum organisé à Lille intitulé « L’argent responsable : un monde plus éthique est-il possible ? » laissera entendre : « Ce n’est pas une banque en soi, c’est plus une mutuelle avec une démarche totalement différente. Nous avons aujourd’hui près d’un millier de clients ». Toutefois, l’artiste international reconnaît, à mi-mot, qu’il est nécessaire de « rebooster ce label Birima qui existe déjà ». Pour cela, il en appelle aux « bailleurs de fonds qui ont l’habitude de prêter aux banques traditionnelles et qui peuvent aussi, en même temps, prendre en compte le microcrédit ». « Si nous ne trouvons pas des institutions financières, ça va être difficile, au Sénégal comme ailleurs en Afrique », reconnaît celui que Martine Aubry vient de faire citoyen d’honneur de la ville de Lille.
Selon le nommé Moustapha Ndiaye, coordinateur initial de la structure coopérative, dès le départ, « Birima a suscité un grand intérêt, enregistrant plus de 200 adhésions dès la première semaine. L’adhésion s’obtenait alors en fournissant une pièce d’identité, trois photos et 10 000 FCFA de frais (15,2 euros). L’objectif était d’atteindre 5000 membres en une année. » En ce qui concerne les crédits, Birima s’était fixé initialement un objectif de 500 accords de crédit sur cinq ans, pour une moyenne de 500 000 FCFA par opération. C’est triste, mais force est de le reconnaitre, Birima a été une tempête dans un verre d’eau, eu égard au fait que celui qui détenait les rênes de ce projet, en l’occurrence Thioune, a quitté la boite. Qui plus est, « Birima ne connaît pas la même popularité que son auteur. Malgré les promesses, il n’y a qu’une seule agence ouverte où les éventuels clients doivent venir effectuer des versements. Le projet n’est pas populaire. J’ai moi-même essayé d’avoir des informations et on m’a rétorqué que Birima travaillera bientôt avec un réseau solidaire européen», fait remarquer cet adhérent qui enfoncera le clou: « la plupart des candidats qui avaient déposé un dossier et des frais de 10 000 francs ont perdu leur argent. Le premier directeur a démissionné et le site Internet ne marche plus ».
Pour Ibrahima Thioune, l'ancien directeur général de Birima qui a quitté la société il y a une année, il avait soutenu, à travers une sortie dans les médias : « il est clair que l’objectif n’a pas été atteint et que le résultat est mitigé ». Pourtant, selon lui, l’absence de garantie demandée aux emprunteurs rend Birima très attractif, à juste titre, puisque, statistiquement, 98% des microcrédits contractés au Sénégal sont remboursés.
EDOUARD DIAGNE lesenegalais.net
Nébuleuse autour d’1, 3 million de dollars
L’opération a été également une occasion de lancer la mutuelle d’épargne et de crédit dénommée « Birima » par Youssou Ndour. Il nous revient que quand le bailleur, Alessandro Benetton, qui a accepté de financer, l’avait interpelé sur l’appellation, Youssou Ndour lui a dit qu’il l’appellerait « Birima », du nom du Damel du Cayor. Et le magnat italien de lui demander les raisons. Pour toute réponse, l’artiste interplanétaire répondra que « Birima était un homme qui tenait toujours parole ». C’est ainsi que Benetton opinera du bonnet, c'est-à-dire paraphera, sans sourciller, l’accord avec Youssou. Toutefois, nos sources, au parfum des tractations ayant abouti à ce projet, soutiennent qu’il s’est agi « d’un mariage d’amour et de raison ». Se voulant explicite, nos vis-à-vis renseignent qu’en réalité, la firme italienne a investi dans « Birima » et dans la campagne de publicité mondiale à coups de millions. En retour, cette « implication sociale » pour paraphraser les clauses du contrat, devait permettre à Alessandro Benetton de surfer sur la vague « équitable » à la mode. Par la suite, s’en sont suivi des financements émanant du principal bailleur, en l’occurrence Benetton. Mais, une nébuleuse plane sur la rondelette somme d’1, 3 million de dollars « injectée » par Alessandro. Ce dernier, subjugué par le discours « généreux » du chanteur interplanétaire, « n’avait pris aucune garantie particulière et n’avait revendiqué aucun rôle dans la gestion de ce fonds ».
Illusions perdus
Toutefois, ce projet lancé avec faste avait suscité de l’espoir, notamment auprès des strates les plus défavorisées, compte tenu du discours à tout le moins rassurant de l’administrateur, qui n’est autre que le nommé Ibrahima Malick Thioune. En effet, ce dernier avait, en son temps, plus précisément en février 2008, laissé entendre devant la cohorte de journalistes nationaux comme internationaux que « 85% des projets ne trouvent pas de financement au Sénégal et sur les onze millions d’habitants du pays, plusieurs dépendent déjà du projet Birima. Les taux de bancarisation et de pénétration bancaire se situent autour de 4% » Et Thioune de poursuivre : « nos cibles seront donc des personnes exclues du système bancaire à cause de leurs revenus ou de leur éloignement des banques. Les pauvres, les artisans, les artistes, bref, personne ne sera exclu » Malheureusement, depuis lors, les choses n’ont pas eu l’effet escompté car le projet a été dévoyé de sa mission.
Appel aux bailleurs de fonds
Un avis que ne partage pas Youssou Ndour, lequel invité lors d’un forum organisé à Lille intitulé « L’argent responsable : un monde plus éthique est-il possible ? » laissera entendre : « Ce n’est pas une banque en soi, c’est plus une mutuelle avec une démarche totalement différente. Nous avons aujourd’hui près d’un millier de clients ». Toutefois, l’artiste international reconnaît, à mi-mot, qu’il est nécessaire de « rebooster ce label Birima qui existe déjà ». Pour cela, il en appelle aux « bailleurs de fonds qui ont l’habitude de prêter aux banques traditionnelles et qui peuvent aussi, en même temps, prendre en compte le microcrédit ». « Si nous ne trouvons pas des institutions financières, ça va être difficile, au Sénégal comme ailleurs en Afrique », reconnaît celui que Martine Aubry vient de faire citoyen d’honneur de la ville de Lille.
Selon le nommé Moustapha Ndiaye, coordinateur initial de la structure coopérative, dès le départ, « Birima a suscité un grand intérêt, enregistrant plus de 200 adhésions dès la première semaine. L’adhésion s’obtenait alors en fournissant une pièce d’identité, trois photos et 10 000 FCFA de frais (15,2 euros). L’objectif était d’atteindre 5000 membres en une année. » En ce qui concerne les crédits, Birima s’était fixé initialement un objectif de 500 accords de crédit sur cinq ans, pour une moyenne de 500 000 FCFA par opération. C’est triste, mais force est de le reconnaitre, Birima a été une tempête dans un verre d’eau, eu égard au fait que celui qui détenait les rênes de ce projet, en l’occurrence Thioune, a quitté la boite. Qui plus est, « Birima ne connaît pas la même popularité que son auteur. Malgré les promesses, il n’y a qu’une seule agence ouverte où les éventuels clients doivent venir effectuer des versements. Le projet n’est pas populaire. J’ai moi-même essayé d’avoir des informations et on m’a rétorqué que Birima travaillera bientôt avec un réseau solidaire européen», fait remarquer cet adhérent qui enfoncera le clou: « la plupart des candidats qui avaient déposé un dossier et des frais de 10 000 francs ont perdu leur argent. Le premier directeur a démissionné et le site Internet ne marche plus ».
Pour Ibrahima Thioune, l'ancien directeur général de Birima qui a quitté la société il y a une année, il avait soutenu, à travers une sortie dans les médias : « il est clair que l’objectif n’a pas été atteint et que le résultat est mitigé ». Pourtant, selon lui, l’absence de garantie demandée aux emprunteurs rend Birima très attractif, à juste titre, puisque, statistiquement, 98% des microcrédits contractés au Sénégal sont remboursés.
EDOUARD DIAGNE lesenegalais.net