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"Nous sommes non violents mais prêts à prendre des balles"

Cheikh Fadel Barro, coordinateur de 'Y en a marre': "Nous sommes non violents mais prêts à prendre des balles"

Au Sénégal, l’opposition à la candidature du président Wade à un troisième mandat consécutif met la rue en ébullition. A la base de cette contestation, on retrouve le mouvement "Y en a marre". Entretien avec le coordinateur de cette structure inédite au potentiel de mobilisation immense.


Rédigé par leral.net le Jeudi 23 Février 2012 à 15:35 | | 2 commentaire(s)|

"Nous sommes non violents mais prêts à prendre des balles"
L'élection présidentielle se tiendra ce dimanche 26 février au Sénégal. Et bien que la constitution interdise à un président d'enchaîner trois mandats, la candidature du président sortant, Abdoulaye Wade (qui finit son deuxième mandat), a bien été validée par le Conseil constitutionnel.
Le chef d'Etat, âgé de 85 ans dont douze au pouvoir, sera donc bien candidat à sa propre succession lors du scrutin de dimanche.

Cette situation a provoqué une vague de vive contestation dans la rue sénégalaise. Contestation qui a été réprimée avec violence comme en attestent les six morts et les nombreux blessés qu'on faits les affrontements entre manifestants et forces de l'ordre dans le pays depuis la fin janvier.

Le collectif "Y en a marre" à la base de la contestation

A la base de cette contestation, on retrouve le collectif "Y en a marre". Cette structure citoyenne inédite, à l'origine de laquelle on trouve des rappeurs et des journalistes, est farouchement opposée à la candidature du président Abdoulaye Wade à un nouveau mandat de cinq ans.
Mais le combat de "Y en a marre" va bien au-delà de l'unique opposition à cette candidature, comme nous l'explique le coordinateur du mouvement, le journaliste Cheikh Fadel Barro.

Le mouvement est né dans l'écume des vagues du Printemps arabe, le 18 janvier 2011, soit quatre jours à peine après la fuite du président Ben Ali de Tunisie, chassé du pouvoir par la rue tunisienne.
Tout a commencé avec les coupures d'électricité récurrentes qui compliquent la vie des Dakarois. "Nous nous sommes dit qu'il fallait mettre quelque-chose en place pour y faire face", explique Cheikh Fadel Barro. "Nous" désignant un collectif de journalistes et de rappeurs (porteurs de la contestation sociale au Sénégal) originaires de Kaolack, à 200km au sud de Dakar.

"Nous voulions créer non pas un parti politique mais une structure populaire dans laquelle la jeunesse se reconnaîtrait et qui se ferait l’écho sonore des frustrations de toute une génération", poursuit le coordinateur du mouvement. "Mais nous voulions aussi que cette structure soit une structure de prise en charge où l’on assume ses responsabilités, où chaque jeune essaie de rompre avec le fatalisme et de s’engager pour la construction de son propre destin".

"Rien ne sert de changer de chef d’orchestre si on continue à jouer la même symphonie"

Très vite, les revendications dépassent de loin le simple problème des coupures électriques pour se porter sur la question de la mauvaise gouvernance en général. "Nous avons compris que pour faire quelque-chose d’utile, il ne suffisait pas d’enlever une tête à la direction du pays pour la remplacer par une autre. Autrement dit changer de chef d’orchestre mais continuer à jouer la même symphonie", analyse notre interlocuteur.

"Si nous voulions fondamentalement un changement, il fallait faire respecter la loi et le peuple sénégalais. (...). Il fallait d’abord créer les conditions d’une démocratie participative pour intéresser la majorité des Sénégalais à la gestion du bien public. C’est pourquoi nous avons réalisé de vastes opérations d’inscription des jeunes sur les listes électorales", développe Cheikh Fadel Barro avec éloquence.

Dans un second temps, toujours soucieux de faire respecter la loi sénégalaise afin de baliser les agissements de l'élite politique, le collectif s'est opposé à une modification de la Constitution dans un sens clairement favorable au président Wade et à son fils Karim. La pression populaire aura finalement raison de ce projet qui sera abandonné le 23 juin 2011.

"Sentinelles de la démocratie"
"Nous nous sommes alors positionnés en sentinelles de la démocratie", explique poétiquement le journaliste. "Dès les 23 juin, nous nous sommes opposés énergiquement à toute modification de la constitution et nous avons obtenu gain de cause. Mais aujourd'hui, la candidature d’Abdoulaye Wade remet en cause l’acquis du 23 juin. C’est une régression démocratique", dénonce un Cheikh Fadel Barro soudain plus vindicatif.

"C’est pourquoi nous nous opposons énergiquement à sa candidature en maintenant une pression continue dans la rue, partout dans le pays", explique le militant.

Une opposition énergique qui n'est pas sans avoir un coût. Car, comme nous l'avons indiqué, la répression des manifestations a déjà fait sept morts et des dizaines de blessés dans le pays.

"Mais quand nous avons commencé ce combat, nous l’avons dit: nous n’allons pas tirer une seule balle, parce que 'Y en a marre' est non violent mais nous sommes prêts à prendre une balle", expose Cheikh Fadel Barro sur un ton grave mais résolu.

Les membres de "Y en a marre" sont évidemment des cibles de choix des intimidations et de la répression.

Pas plus tard que ce mercredi, des membres en vue du collectif, dont deux célèbres rappeurs (Kilifeu et Simon) ont été déférés devant le tribunal des flagrants délits de Dakar pour "participation à l'organisation d'une manifestation interdite". Ils voulaient en fait organiser un sit-in permanent à partir du 16 février sur la Place de l'Obélisque à Dakar jusqu'au retrait de la candidature du chef de l'État. Or les manifestations à caractère politique ont été interdites dans le centre de la capitale depuis juillet dernier.

Le jugement a été mis en délibéré par le tribunal jusque lundi prochain, soit le lendemain du scrutin présidentiel. Le coordinateur du mouvement l'interprète comme une façon d'empêcher les accusés d'exercer leur droit à manifester d'ici à ce que l'élection ait lieu.

Si Abdoulaye Wade est élu, "nous serons là comme son œil de Caïn"

Mais rien ne semble pouvoir amenuiser la détermination du collectif à obtenir gain de cause et à faire respecter les droits des Sénégalais. "Que Wade force sa candidature, qu’il remporte même les élections ne va pas signifier la fin du combat que nous menons", confirme le journaliste opposant. "Nous menons un combat de fond, une bataille de principe, ce n’est donc pas la conjoncture politique actuelle qui va nous décourager. Nous avions inscrit dès le départ, l’action de 'Y en a marre' dans la durée".

Il en est convaincu, si d'aventures le président Wade devait se succéder à lui-même, "les Sénégalais ne l’accepteront pas". "Nous serons là comme son œil de Caïn, comme sa mauvaise conscience. On s’opposera énergiquement et catégoriquement à lui parce que même élu, il ne sera pas considéré comme le président du Sénégal, car il n’aurait pas dû être autorisé à se présenter", s'exclame avec force ce jeune homme déterminé.

Il est à noter que si "Y en a marre" s'oppose aussi farouchement au président sortant, il se refuse tout aussi catégoriquement à donner la moindre consigne de vote ou d'exprimer son soutien à un quelconque candidat. "Le seul soutien que l'on peut apporter c’est au peuple sénégalais. Nous allons continuer d’essayer de le réveiller pour qu'il puisse s’organiser et s'auto-gérer afin de s’ériger en contre-pouvoir contre une élite politique qui ne le respecte pas, tout simplement", conclut Cheikh Fadel Barro.

Julien Vlassenbroek

( Les News )


1.Posté par simel le 23/02/2012 21:23 | Alerter
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désormais nous lancerons les jeunes de niari tali à vos trousses... vous êtes du venin, ils sont votre antidote... j'ai ramassé quelques uns de vos tee-shirts là bas, vous savez !
ca vous apprendra à sensibiliser, bande de malades !

2.Posté par NDIAKHOUM le 24/02/2012 11:02 | Alerter
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Et pourquoi tu ne sortirais pas alors pour face au lieu de lancer des jeunes de niary talli ! Rien que des tapètes vous êtes et des nullards. Tout jeune devrait s'approprier le concept de ce mouvement que je salue fort l'initiative car il montre au moins son intelligence, son patriotisme et son intellectualisme face à une système de cons et d'ignorants des lois et valeurs d'un pays.
YEN A VRAIMENT MARRE ET MARRE DE CE SYSTEME! VIVE LE SENEGAL ! VIVE LA JEUNESSE! VIVE LE PATRIOTISME!

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