La diffusion, samedi, d'une vidéo montrant les quatre otages français enlevés par al-Qaida au Maghreb islamique (Aqmi) à Arlit, au Niger, sur un site d'Areva le 16 septembre 2010, ne doit rien au hasard. Cet appel public à la relance des négociations pour la libération des captifs ne s'accompagne pas d'un ultimatum. Il intervient alors qu'en France, la communication autour de l'affaire change, à la veille du deuxième anniversaire du kidnapping. Après avoir observé le silence jusqu'ici, les familles des prisonniers d'Aqmi ont décidé de «mettre les otages au cœur de l'actualité». Un collectif regroupant les proches a prévu d'organiser samedi un rassemblement de soutien à Meudon, en région parisienne. De son côté, François Hollande doit recevoir mercredi à l'Élysée les familles de Daniel Laribe, Pierre Legrand, Marc Féret et Thierry Dole.
Aqmi réclame 100 millions d'euros pour lâcher ses proies
Sommés de s'exprimer pour la première fois depuis des mois, les captifs répètent tous le même message: il faut privilégier la négociation. La supplique est adressée au président français et à leurs employeurs. Daniel Laribe, dont la femme, Françoise, a été libérée en février avec un Malgache et un Togolais contre une importante rançon, insiste sur le «prix fort à payer». «Je m'adresse à Areva, qui est pleinement responsable de ce qui est arrivé. Il y a peut-être un prix fort à payer, mais il est à la hauteur du manque de précaution pour nous protéger à Arlit», déclare Daniel Laribe dans la vidéo mise en ligne par le site d'information mauritanien Sahara Média. Ces propos - à prendre avec prudence, puisqu'ils sont prononcés par un prisonnier dans le cadre d'un chantage - rappellent que les discussions entre intermédiaires et chefs terroristes ont pour l'instant échoué, en partie pour des raisons financières.
Aqmi réclame 100 millions d'euros pour lâcher ses proies. Spécialisée dans le commerce des otages, la filiale sahélienne d'al-Qaida a, à de rares exceptions près, toujours réussi à toucher les pactoles réclamés, d'où une inflation galopante. Le coût d'une libération est ainsi passé en quelques années d'un million à plus de dix millions d'euros par tête d'Occidental. La spirale infernale a permis aux djihadistes de renforcer leurs capacités militaires. «Ces groupes exigent des rançons dont le montant en euros atteint l'équivalent de l'aide donnée à certains pays d'Afrique (l'AFD, l'aide française au développement, a versé près de 100 millions d'euros au Mali en 2010, NDLR)», expliquait jeudi Laurent Fabius devant les étudiants de Sciences Po.
«Preuve de vie»
Aqmi a également tenu à fournir aux autorités françaises des éléments de décor. Les prises de vues des otages laissent penser qu'ils sont retenus dans des endroits différents. Il s'agit de montrer qu'une opération lancée par des commandos français serait vaine puisque les otages sont dispersés. Le jeune Pierre Legrand, visiblement très éprouvé, et Marc Féret, l'employé de Satom, sont filmés devant un groupe de geôliers en armes aux turbans différents de ceux portés par les gardes de Daniel Laribe et de Thierry Dole.
En donnant une «preuve de vie», Aqmi a aussi voulu exhiber ses «cartes» au moment où la perspective d'une solution négociée reste plus éloignée que jamais. La prise de contrôle par des milices islamistes du nord du Mali, un territoire presque aussi vaste que la France, a compliqué le travail des intermédiaires et modifié en profondeur les données du problème. Depuis peu, l'hypothèse d'une intervention militaire africaine, avec le soutien logistique de la France, pour rétablir l'intégrité territoriale du Mali prend de la consistance. Elle ne peut qu'inquiéter Aqmi qui a fait de Tombouctou sa «capitale». Une raison de plus pour Aqmi d'engager au plus vite la bataille de la communication.
Par Thierry Oberlé
Aqmi réclame 100 millions d'euros pour lâcher ses proies
Sommés de s'exprimer pour la première fois depuis des mois, les captifs répètent tous le même message: il faut privilégier la négociation. La supplique est adressée au président français et à leurs employeurs. Daniel Laribe, dont la femme, Françoise, a été libérée en février avec un Malgache et un Togolais contre une importante rançon, insiste sur le «prix fort à payer». «Je m'adresse à Areva, qui est pleinement responsable de ce qui est arrivé. Il y a peut-être un prix fort à payer, mais il est à la hauteur du manque de précaution pour nous protéger à Arlit», déclare Daniel Laribe dans la vidéo mise en ligne par le site d'information mauritanien Sahara Média. Ces propos - à prendre avec prudence, puisqu'ils sont prononcés par un prisonnier dans le cadre d'un chantage - rappellent que les discussions entre intermédiaires et chefs terroristes ont pour l'instant échoué, en partie pour des raisons financières.
Aqmi réclame 100 millions d'euros pour lâcher ses proies. Spécialisée dans le commerce des otages, la filiale sahélienne d'al-Qaida a, à de rares exceptions près, toujours réussi à toucher les pactoles réclamés, d'où une inflation galopante. Le coût d'une libération est ainsi passé en quelques années d'un million à plus de dix millions d'euros par tête d'Occidental. La spirale infernale a permis aux djihadistes de renforcer leurs capacités militaires. «Ces groupes exigent des rançons dont le montant en euros atteint l'équivalent de l'aide donnée à certains pays d'Afrique (l'AFD, l'aide française au développement, a versé près de 100 millions d'euros au Mali en 2010, NDLR)», expliquait jeudi Laurent Fabius devant les étudiants de Sciences Po.
«Preuve de vie»
Aqmi a également tenu à fournir aux autorités françaises des éléments de décor. Les prises de vues des otages laissent penser qu'ils sont retenus dans des endroits différents. Il s'agit de montrer qu'une opération lancée par des commandos français serait vaine puisque les otages sont dispersés. Le jeune Pierre Legrand, visiblement très éprouvé, et Marc Féret, l'employé de Satom, sont filmés devant un groupe de geôliers en armes aux turbans différents de ceux portés par les gardes de Daniel Laribe et de Thierry Dole.
En donnant une «preuve de vie», Aqmi a aussi voulu exhiber ses «cartes» au moment où la perspective d'une solution négociée reste plus éloignée que jamais. La prise de contrôle par des milices islamistes du nord du Mali, un territoire presque aussi vaste que la France, a compliqué le travail des intermédiaires et modifié en profondeur les données du problème. Depuis peu, l'hypothèse d'une intervention militaire africaine, avec le soutien logistique de la France, pour rétablir l'intégrité territoriale du Mali prend de la consistance. Elle ne peut qu'inquiéter Aqmi qui a fait de Tombouctou sa «capitale». Une raison de plus pour Aqmi d'engager au plus vite la bataille de la communication.
Par Thierry Oberlé