Islamabad
La fin du cauchemar pour Rimsha Masih? L'imam qui l'accuse de blasphème a été arrêté samedi pour faux témoignage. Khalid Chishti a été placé en détention provisoire pour deux semaines. C'est son assistant, Mohammad Zubair, qui a vendu la mèche aux policiers.
Les faits remontent au 16 août. Dans le quartier de Mehrabadi, à Islamabad, Amad, 22 ans, flâne devant chez lui. Il aperçoit une enfant déambuler avec un sac plastique. Il la connaît bien: elle s'appelle Rimsha et elle fait le ménage dans plusieurs maisons du voisinage. «Qu'est-ce que tu jettes?» lui demande-t-il. Silence. Rimsha se débarrasse du sac et rentre chez elle. Intrigué, le garçon jette un œil dans la besace et aperçoit un tas de feuilles rongées par les flammes. Il distingue des versets du Coran. Les pages sont extraites du Noorani Qaida, un manuel coranique. Amad file dans la mosquée et alerte l'imam, Khalid Chishti. D'après Mohammad Zubair, son assistant, Khalid Chishti aurait déchiré des pages du Coran et les aurait placées dans le sac. «C'est le seul moyen de chasser les chrétiens du quartier», aurait-il confié. Puis le religieux dépose plainte contre l'adolescente pour blasphème envers le Coran.
«Le doute devrait bénéficier à ma cliente»
Vendredi dernier, lors de la grande prière, l'imam clame dans son sermon qu'il ne reculera pas. «J'ai toujours dit la vérité devant Dieu et devant les médias. Je suis honnête et prêt à donner ma vie pour défendre l'honneur du Prophète», hurle-t-il à travers les haut-parleurs du minaret. Interrogé par Le Figaro après la prière, il répète que Rimsha Masih est coupable. «Dans son sac, il y avait des pages du Coran mélangées à celle d'un manuel coranique. Tout non-musulman qui insulte notre foi doit être puni», affirme-t-il, entouré d'une vingtaine de fidèles. Vingt-quatre heures plus tard, il est arrêté par la police. Présenté devant un juge dimanche matin, yeux bandés et menottes aux poings, Khalid Chishti est placé en détention provisoire pour deux semaines. Ironie du sort, il séjourne dans la même prison que Rimsha, à Rawalpindi, près de la capitale.
Son interpellation est un nouvel espoir pour l'adolescente qui attend sa libération provisoire. L'avocat de l'imam a obtenu deux reports d'audience cette semaine en invoquant des vices de procédure. Une nouvelle audience est prévue lundi matin à Islamabad. L'avocat de Rimsha, Tahir Naveed Chaudhry, est optimiste: «Le témoignage de l'assistant de l'imam met en doute la crédibilité de l'accusation. Le doute devrait bénéficier à ma cliente», assure-t-il.
L'affaire illustre l'intolérance qui frappe une partie du clergé pakistanais. Formés dans des madrasas sunnites de tendance salafiste, barelvie ou déobandie, beaucoup d'imams propagent une interprétation radicale du Coran. Ils sont souvent accusés d'attiser la haine contre les minorités religieuses.
Par Emmanuel Derville
La fin du cauchemar pour Rimsha Masih? L'imam qui l'accuse de blasphème a été arrêté samedi pour faux témoignage. Khalid Chishti a été placé en détention provisoire pour deux semaines. C'est son assistant, Mohammad Zubair, qui a vendu la mèche aux policiers.
Les faits remontent au 16 août. Dans le quartier de Mehrabadi, à Islamabad, Amad, 22 ans, flâne devant chez lui. Il aperçoit une enfant déambuler avec un sac plastique. Il la connaît bien: elle s'appelle Rimsha et elle fait le ménage dans plusieurs maisons du voisinage. «Qu'est-ce que tu jettes?» lui demande-t-il. Silence. Rimsha se débarrasse du sac et rentre chez elle. Intrigué, le garçon jette un œil dans la besace et aperçoit un tas de feuilles rongées par les flammes. Il distingue des versets du Coran. Les pages sont extraites du Noorani Qaida, un manuel coranique. Amad file dans la mosquée et alerte l'imam, Khalid Chishti. D'après Mohammad Zubair, son assistant, Khalid Chishti aurait déchiré des pages du Coran et les aurait placées dans le sac. «C'est le seul moyen de chasser les chrétiens du quartier», aurait-il confié. Puis le religieux dépose plainte contre l'adolescente pour blasphème envers le Coran.
«Le doute devrait bénéficier à ma cliente»
Vendredi dernier, lors de la grande prière, l'imam clame dans son sermon qu'il ne reculera pas. «J'ai toujours dit la vérité devant Dieu et devant les médias. Je suis honnête et prêt à donner ma vie pour défendre l'honneur du Prophète», hurle-t-il à travers les haut-parleurs du minaret. Interrogé par Le Figaro après la prière, il répète que Rimsha Masih est coupable. «Dans son sac, il y avait des pages du Coran mélangées à celle d'un manuel coranique. Tout non-musulman qui insulte notre foi doit être puni», affirme-t-il, entouré d'une vingtaine de fidèles. Vingt-quatre heures plus tard, il est arrêté par la police. Présenté devant un juge dimanche matin, yeux bandés et menottes aux poings, Khalid Chishti est placé en détention provisoire pour deux semaines. Ironie du sort, il séjourne dans la même prison que Rimsha, à Rawalpindi, près de la capitale.
Son interpellation est un nouvel espoir pour l'adolescente qui attend sa libération provisoire. L'avocat de l'imam a obtenu deux reports d'audience cette semaine en invoquant des vices de procédure. Une nouvelle audience est prévue lundi matin à Islamabad. L'avocat de Rimsha, Tahir Naveed Chaudhry, est optimiste: «Le témoignage de l'assistant de l'imam met en doute la crédibilité de l'accusation. Le doute devrait bénéficier à ma cliente», assure-t-il.
L'affaire illustre l'intolérance qui frappe une partie du clergé pakistanais. Formés dans des madrasas sunnites de tendance salafiste, barelvie ou déobandie, beaucoup d'imams propagent une interprétation radicale du Coran. Ils sont souvent accusés d'attiser la haine contre les minorités religieuses.
Par Emmanuel Derville