On se souvient que le Comité national de Pilotage (Cnp) des Assises nationales s’est réuni le samedi 4 août 2012. En lisant, le surlendemain, les commentaires de certains quotidiens et de quelques radios de la place, je me suis demandé s’il s’agissait bien du même Cnp. Quelques morceaux choisis : « Nuages entre le président Macky Sall et les Assises nationales », « Risque de clash entre ……… », « Les Assises nationales exigent ceci, exigent cela, enjoignent le président Macky Sall de renoncer à ceci, à cela …. etc.
Il convient de rappeler quand même que les Assises nationales sont composées de partis politiques, d’organisations de la société civile, de personnalités indépendantes. Son directoire national est composé de personnalités comme le président Amadou Mahtar Mbow, l’ancien Ministre Cheikh Hamidou Kane, l’ancien Premier ministre Mamadou Lamine Loum, le général Mouhamadou Seck, le président Mansour Cama, etc. Sont membres des Assises nationales de nombreux autres hommes et femmes qui ont quand même blanchi sous le harnais administratif, politique, gouvernemental, de l’enseignement, etc. On peut donner les exemples suivants : Mme Maïmouna Touré, le Pr Ibrahima Fall, l’ancien Ministre Mamoudou Touré, l’ambassadeur Falilou Kane, le Pr Abdoulaye Bara Diop, etc. Comment peut-on imaginer un seul instant que des hommes et des femmes de cette trempe, ainsi que de nombreux autres du même niveau, se permettent d’exiger du président de la République, de l’enjoindre de, de lui instruire de ? Il faut quand même savoir raison garder !
Au cours du Cnp du 4 août 2012, il a été rappelé les positions de principe des Assises nationales consignées dans le rapport général et, en particulier, dans la Charte de gouvernance démocratique. Nous sommes pour la suppression du Sénat, pour que le président de la République ne soit plus secrétaire général de son parti, que les pouvoirs soient équilibrés, que les hommes et les femmes qui sont promus ne le doivent qu’à la compétence, à l’expérience et à la bonne moralité. Nous avons même été plus loin, en recommandant, pas en exigeant, que les directeurs généraux des grosses sociétés ou agences nationales soient nommés après appels à candidature. Nous sommes également pour la sacralisation – le mot n’est pas trop fort – des deniers publics. Nous sommes, de la même manière, foncièrement contre l’impunité, le népotisme, le favoritisme, ainsi que tous les maux qui ont plombé notre marche vers le développement économique et social depuis 1960.
Notre travail a consisté, pendant plus d’un an, à diagnostiquer sans complaisance ces maux pour aboutir, de façon consensuelle, à des propositions de solutions alternatives. Ce sont ces propositions que nous avons résumées, sous forme de grandes orientations, dans la Charte de gouvernance démocratique. Tout au long de cet important document, il n’est question que de Bonne Gouvernance. Ce ne peut, évidemment, être ni la Bible, ni le Coran et il ne l’est point. Nous sommes parfaitement conscients surtout, pour rassurer notre ami et frère Mouhamadou Mbodj, que « les conclusions des Assises nationales n’ont pas la même valeur que la Constitution ». Nous ne saurions non plus « utiliser les Assises nationales pour installer une crise au sommet de l’État ». M. Mbodj a participé à ces importantes rencontres citoyennes et y a été d’un apport décisif. Nous ne serions plus nous-mêmes en tout cas, si la seule idée nous traversait l’esprit que les Assises nationales ont une valeur constitutionnelle. Les hommes et les femmes que mon ami et frère Mouhamadou Mbodj a côtoyés pendant plus d’un an et qu’il connaît bien ne sauraient, non plus, « utiliser les Assises nationales pour installer une crise au sommet de l’État ». Les Assises nationales ne sont – nous en sommes convaincus, aussi convaincus que nous mourrons un jour – ni une Constitution, ni la Bible ni le Coran. Cependant, comme la Constitution, la Bible et le Coran, elles ne recommandent que le bien pour toute la communauté. Elles n’invitent qu’à la Démocratie et à la Bonne Gouvernance. Seuls les prédateurs, les njublang professionnels, les éternels habitués à la facilité et donc aux passe-droits, sont franchement hostiles aux deux documents majeurs que nous avons mis plus d’un an à produire.
Il convient surtout de rappeler, à l’intention des chasseurs de prébendes qui déclarent parfois n’importe quoi, que nous sommes conscients que le président Macky Sall a été élu à une confortable majorité le 25 mars 2012. Nous savons surtout que, c’est à lui que la Constitution reconnaît la prérogative de déterminer la politique de la Nation et de nommer un gouvernement pour l’appliquer. C’est également lui qui nomme à tous les emplois civils et militaires. Nous ne pouvons nous permettre donc, sous quelque forme que ce soit, de lui faire des injonctions. Cependant, nous avons bien le droit, en tant que citoyennes et citoyennes, d’avoir un point de vue sur la manière dont il nous gouverne. Nous devrions même espérer que sa gouvernance s’inspire, autant que faire se peut, de la Charte de gouvernance démocratique.
Nous leur rappellerons en particulier, – et surtout à celui-là (pour ne pas le nommer) qui a osé déclarer que « Les Assises nationales ne lient pas Macky Sall » –, que le candidat Macky Sall a signé sans réserve la Charte de gouvernance démocratique et, entre les deux tours de l’élection présidentielle, pris part à un Cnp où il a confirmé son engagement à appliquer les conclusions des Assises nationales une fois élu. Porté à la magistrature suprême, Il nous a manifesté sa bonne volonté en recevant d’abord le Directoire des Assises nationales, puis en proposant lui-même la mise en place officielle d’une Commission consultative et de Suivi de la mise en œuvre des conclusions des Assises nationales.
Malgré ces signes de bonne volonté, nous ne somme pas naïfs au point de croire qu’il va appliquer toutes et tout de suite les conclusions des Assises nationales. Tout son mandat n’y suffirait pas d’ailleurs. Il y faut des préalables, notamment une nouvelle Constitution. Il est vrai que certaines des conclusions peuvent être mises en œuvre sans avoir besoin de changer les règles du jeu vigueur.
Enfin, nos compatriotes devraient savoir que, à l’occasion d’une rencontre aussi importante que le Cnp, des individualités s’expriment librement, conformément à leur tempérament. Encore qu’il ne m’ait pas été donné de constater qu’un intervenant a fait des injonctions au président Sall ou exigé quoi que ce soit de lui. Les travaux du Cnp sont surtout sanctionnés par un communiqué largement diffusé. C’est ce communiqué qui reflète les positions des Assises nationales par rapport aux multiples questions soulevées et discutées. Je renvoie le lecteur à ce communiqué pour apprécier.
Au début de ce texte, je faisais aussi état de la volonté inébranlable de certains de nos compatriotes de provoquer l’implosion de la Coalition Bennoo Bokk Yaakaar (Bby). Toute leur préoccupation – et ils y travaillent tous les jours –, c’est de persuader le président Sall que c’est lui qui a été élu, et qu’il le serait même sans Bby. Les plus zélés vont jusqu’à vouloir le convaincre que ses partenaires Moustapha Niasse, Ousmane Tanor Dieng, le Pr Bathily, Amath Dansokho, etc, constituent à la longue un danger pour lui. Ils ne seront jamais loyaux et mettront des bâtons dans les roues de sa gouvernance. Ils ajoutent que, même s’ils ne se présentent pas à l’élection présidentielle de 2017, ils désigneront des candidats dans leurs camps respectifs. Dans tous les cas, quel que soit le cas de figure, le président Sall fera face à de nombreux candidats en 2017. Sa préoccupation devrait donc être de respecter rigoureusement ses engagements et de gagner la confiance de ses compatriotes. Il ne craindrait alors personne en ce moment-là.
Ma modeste personne est persuadée que le maintien et la consolidation de Bby sont le bon choix, bon pour le pays, bon pour le président Macky Sall. Ces quatre compatriotes qu’on tente de lui présenter comme des « diables », des « dinosaures » qui doivent débarrasser le plancher, sont des hommes d’État, des hommes d’honneur et de dignité. Ils aiment leur pays et peuvent beaucoup lui apporter encore. Les cadres de l’Apr les plus intolérants qui les qualifient ainsi, sont pressés de se retrouver seuls avec le nouveau président dans la Coalition Macky 2012 et d’avoir leurs parts du gâteau. J’en ai entendu un déclarer sans gêne, au cours d’une certaine émission, que les cadres de l’Apr ont un cercle dit de « non encore nommés ou élus ». C’est proprement indécent ! Le président Macky Sall a intérêt à se méfier de ces courtisans zélés qui veulent le convaincre qu’un pouvoir ne se partage pas. S’il commet l’imprudence de le écouter, ils l’entraîneront irrémédiablement vers le détestable wadisme !
Autour des présidents nouvellement élus, il se constitue rapidement un cercle composé de parents, d’amis et de militants dits des premières heures, qui ne manquent pas d’exercer sur eux de fortes pressions. J’ai le sentiment que c’est déjà arrivé pour le président Sall. Je rappelle aux jeunes cadres de l’Apr, et surtout aux plus pressés d’entre eux, qu’eux- mêmes révélaient, qu’avant le 25 mars 2012, ils n’étaient que 29 et qu’ils sont maintenant plus de 600. On était dans le premier mois du mandat du président Sall. Combien sont-ils maintenant ? Combien, parmi eux, osaient-ils seulement côtoyer Macky Sall après le 8 novembre 2008 ? L’écrasante majorité de ces lycaons sont des chasseurs de prébendes. Ce ne sont sûrement pas ces gens-là qui feront gagner au président de la République la sympathie des populations. Tous les cadres de l’Apr ne sont sûrement pas de cet acabit. Les plus convaincus d’entre eux – et il y en a sûrement –, devraient faciliter la tâche au président de la République. Ils doivent surtout comprendre que, dans un pays, tout le monde ne peut pas prétendre à un poste et l’obtenir. Ils ne devraient pas perdre de vue non plus que le pays, laissé en lambeaux, a besoin d’être reconstruit de fond en comble. Le président Macky Sall y arriverait difficilement avec sa seule Coalition Macky 2012.
Il me donne l’impression, pour le moment tout au moins, de le comprendre et n’entendrait pas gouverner seul. Avec le temps, nous apprécierons. En attendant, il a pris des mesures que j’ai encouragées et soutenues, à côté d’autres qui n’ont pas emporté pas mon adhésion. Je ne m’y appesantirai pas pour les avoir largement développées dans mes contributions antérieures. Je ferai état cependant de deux mesures certes symboliques, mais très importantes. De mon point de vue tout au moins. Lors de sa première visite officielle en France, il s’est fait accompagner notamment de Monsieur Ousmane Tanor Dieng. Nul ne conteste à ce dernier sa connaissance de l’État et ses hautes qualités de diplomate. Aujourd’hui, ce sont ses amis socialistes qui sont au pouvoir en France. M. Dieng avait donc bien sa place dans ce voyage et le président Sall l’a compris.
De la même manière, le Dr Cheikh Tidiane Gadio, le Pr Abdoulaye Bathily et Serigne Mansour Sy Djamil étaient du voyage d’Addis-Abeba. Á l’époque, la presse avait insisté sur les qualités et l’expérience des uns et des autres, chacun dans son domaine de compétence, dont notre pays a grandement besoin. J’encourage donc le président Sall à prendre souvent de telles initiatives. Il doit chercher les compétences et l’expérience des affaires publiques partout où elles se trouvent, dût-il aller jusqu’en Nouvelle Calédonie.
Au moment où je suis sur le point de conclure ce texte j’apprends, par voie de presse, que le président Macky Sall a pris la décision de revenir sur toutes les mesures prises par son prédécesseur entre les deux tours de l’élection présidentielle, en faveur des généraux de l’Armée nationale. L’argument de poids de cette mesure serait que le budget ne peut pas supporter certaines dépenses. Si cette information est rigoureusement exacte, je félicite vivement le président de la République et souhaite qu’il aille jusqu’au bout. Il n’a rien à craindre, le peuple sera à ses côtés. L’ancien vieux président politicien a abusé des mesures de ce genre, injustes, frustrantes, parfois iniques. Y revenir est déjà un acte de courage et de bonne gouvernance. J’ose espérer que le président Sall ne s’arrêtera pas en si bon chemin. En tout cas, il a là, à sa portée, un filon qui pourrait lui valoir une remarquable popularité.
Le lundi 6 août 2012, la presse a annoncé une autre mesure, qu’on peut considérer, si elle est avérée, comme un acte majeure de Bonne Gouvernance et de Justice. Il s’agit de la suspension d’un important lotissement d’une partie importante des terres de l’Aéroport L.S.S. de Dakar. Comme les nombreux autres qui l’ont précédé, ce lotissement a profité aux mêmes compatriotes déjà fort nantis : magistrats, chefs religieux (toujours eux), officiers supérieurs et généraux de l’Armée nationale, inspecteurs des Impôts, ministres, députés, etc. Il semble d’ailleurs que certains des bénéficiaires forment un front commun pour lutter contre la mesure et menaceraient même de « paralyser le travail au niveau des services des impôts et domaines ». Si la mesure annoncée le 6 août 2012 a été vraiment prise par le président Sall, il ne doit craindre aucune menace. Qui ose affronter le peuple, quand ce dernier approuve toutes les mesures de redressements ? Et il les approuve dans son écrasante majorité. Je soutiens donc le président et l’encourage à aller plus loin encore dans ces mesures dites de redressements des nombreux torts que nous a faits son prédécesseur. Qu’il évite surtout les reculades ! Elles produisent des effets irréparables. Je reviendrai d‘ailleurs sur ces mesures-là et sur d’autres que j’ai appréciées (positivement ou négativement).
Sans doute, des compatriotes seront-ils prompts à crier : « Cette fois, lui aussi réclame sa part du gâteau ! ». Ils se tromperaient lourdement. J’avais bien précisé dans une contribution antérieure que je ne suis ni d’un côté ni de l’autre. Mon seul camp est la Justice, la Démocratie, la Bonne Gouvernance. La preuve, c’est que je ne suis pas toujours d’accord avec certaines mesures du président Sall. J’ai, en particulier, de sérieuses réserves par rapport à certaines de ses nominations et au maintien de certaines directions et agences nationales. Je suis surtout manifestement opposé à sa volonté de maintenir le Sénat. Les limites du budget qu’il évoque pour justifier la suppression de certains avantages aux généraux de l’Armée nationale, devraient raisonnablement justifier celle du Sénat. Un gouvernement ne peut pas ignorer l’opinion publique. Or, celle-ci est dans son écrasante majorité pour la suppression du Sénat, qui sera surtout celui du président de la République, puisqu’il nommera 55 des 100 sénateurs. Sommes-nous loin du Sénat de Wade ?
Pour le reste, en direction de mes compatriotes qui penseraient que je réclame ma part du gâteau, je me contenterai de leur répondre simplement ceci : « La sikket daan dunde ba saxub sikkim, man na caa wey, bu amee tuuti ngor ak ngëm.»
Dakar, le 12 août 2012
Mody Niang, mail: modyniang@arc.sn
Il convient de rappeler quand même que les Assises nationales sont composées de partis politiques, d’organisations de la société civile, de personnalités indépendantes. Son directoire national est composé de personnalités comme le président Amadou Mahtar Mbow, l’ancien Ministre Cheikh Hamidou Kane, l’ancien Premier ministre Mamadou Lamine Loum, le général Mouhamadou Seck, le président Mansour Cama, etc. Sont membres des Assises nationales de nombreux autres hommes et femmes qui ont quand même blanchi sous le harnais administratif, politique, gouvernemental, de l’enseignement, etc. On peut donner les exemples suivants : Mme Maïmouna Touré, le Pr Ibrahima Fall, l’ancien Ministre Mamoudou Touré, l’ambassadeur Falilou Kane, le Pr Abdoulaye Bara Diop, etc. Comment peut-on imaginer un seul instant que des hommes et des femmes de cette trempe, ainsi que de nombreux autres du même niveau, se permettent d’exiger du président de la République, de l’enjoindre de, de lui instruire de ? Il faut quand même savoir raison garder !
Au cours du Cnp du 4 août 2012, il a été rappelé les positions de principe des Assises nationales consignées dans le rapport général et, en particulier, dans la Charte de gouvernance démocratique. Nous sommes pour la suppression du Sénat, pour que le président de la République ne soit plus secrétaire général de son parti, que les pouvoirs soient équilibrés, que les hommes et les femmes qui sont promus ne le doivent qu’à la compétence, à l’expérience et à la bonne moralité. Nous avons même été plus loin, en recommandant, pas en exigeant, que les directeurs généraux des grosses sociétés ou agences nationales soient nommés après appels à candidature. Nous sommes également pour la sacralisation – le mot n’est pas trop fort – des deniers publics. Nous sommes, de la même manière, foncièrement contre l’impunité, le népotisme, le favoritisme, ainsi que tous les maux qui ont plombé notre marche vers le développement économique et social depuis 1960.
Notre travail a consisté, pendant plus d’un an, à diagnostiquer sans complaisance ces maux pour aboutir, de façon consensuelle, à des propositions de solutions alternatives. Ce sont ces propositions que nous avons résumées, sous forme de grandes orientations, dans la Charte de gouvernance démocratique. Tout au long de cet important document, il n’est question que de Bonne Gouvernance. Ce ne peut, évidemment, être ni la Bible, ni le Coran et il ne l’est point. Nous sommes parfaitement conscients surtout, pour rassurer notre ami et frère Mouhamadou Mbodj, que « les conclusions des Assises nationales n’ont pas la même valeur que la Constitution ». Nous ne saurions non plus « utiliser les Assises nationales pour installer une crise au sommet de l’État ». M. Mbodj a participé à ces importantes rencontres citoyennes et y a été d’un apport décisif. Nous ne serions plus nous-mêmes en tout cas, si la seule idée nous traversait l’esprit que les Assises nationales ont une valeur constitutionnelle. Les hommes et les femmes que mon ami et frère Mouhamadou Mbodj a côtoyés pendant plus d’un an et qu’il connaît bien ne sauraient, non plus, « utiliser les Assises nationales pour installer une crise au sommet de l’État ». Les Assises nationales ne sont – nous en sommes convaincus, aussi convaincus que nous mourrons un jour – ni une Constitution, ni la Bible ni le Coran. Cependant, comme la Constitution, la Bible et le Coran, elles ne recommandent que le bien pour toute la communauté. Elles n’invitent qu’à la Démocratie et à la Bonne Gouvernance. Seuls les prédateurs, les njublang professionnels, les éternels habitués à la facilité et donc aux passe-droits, sont franchement hostiles aux deux documents majeurs que nous avons mis plus d’un an à produire.
Il convient surtout de rappeler, à l’intention des chasseurs de prébendes qui déclarent parfois n’importe quoi, que nous sommes conscients que le président Macky Sall a été élu à une confortable majorité le 25 mars 2012. Nous savons surtout que, c’est à lui que la Constitution reconnaît la prérogative de déterminer la politique de la Nation et de nommer un gouvernement pour l’appliquer. C’est également lui qui nomme à tous les emplois civils et militaires. Nous ne pouvons nous permettre donc, sous quelque forme que ce soit, de lui faire des injonctions. Cependant, nous avons bien le droit, en tant que citoyennes et citoyennes, d’avoir un point de vue sur la manière dont il nous gouverne. Nous devrions même espérer que sa gouvernance s’inspire, autant que faire se peut, de la Charte de gouvernance démocratique.
Nous leur rappellerons en particulier, – et surtout à celui-là (pour ne pas le nommer) qui a osé déclarer que « Les Assises nationales ne lient pas Macky Sall » –, que le candidat Macky Sall a signé sans réserve la Charte de gouvernance démocratique et, entre les deux tours de l’élection présidentielle, pris part à un Cnp où il a confirmé son engagement à appliquer les conclusions des Assises nationales une fois élu. Porté à la magistrature suprême, Il nous a manifesté sa bonne volonté en recevant d’abord le Directoire des Assises nationales, puis en proposant lui-même la mise en place officielle d’une Commission consultative et de Suivi de la mise en œuvre des conclusions des Assises nationales.
Malgré ces signes de bonne volonté, nous ne somme pas naïfs au point de croire qu’il va appliquer toutes et tout de suite les conclusions des Assises nationales. Tout son mandat n’y suffirait pas d’ailleurs. Il y faut des préalables, notamment une nouvelle Constitution. Il est vrai que certaines des conclusions peuvent être mises en œuvre sans avoir besoin de changer les règles du jeu vigueur.
Enfin, nos compatriotes devraient savoir que, à l’occasion d’une rencontre aussi importante que le Cnp, des individualités s’expriment librement, conformément à leur tempérament. Encore qu’il ne m’ait pas été donné de constater qu’un intervenant a fait des injonctions au président Sall ou exigé quoi que ce soit de lui. Les travaux du Cnp sont surtout sanctionnés par un communiqué largement diffusé. C’est ce communiqué qui reflète les positions des Assises nationales par rapport aux multiples questions soulevées et discutées. Je renvoie le lecteur à ce communiqué pour apprécier.
Au début de ce texte, je faisais aussi état de la volonté inébranlable de certains de nos compatriotes de provoquer l’implosion de la Coalition Bennoo Bokk Yaakaar (Bby). Toute leur préoccupation – et ils y travaillent tous les jours –, c’est de persuader le président Sall que c’est lui qui a été élu, et qu’il le serait même sans Bby. Les plus zélés vont jusqu’à vouloir le convaincre que ses partenaires Moustapha Niasse, Ousmane Tanor Dieng, le Pr Bathily, Amath Dansokho, etc, constituent à la longue un danger pour lui. Ils ne seront jamais loyaux et mettront des bâtons dans les roues de sa gouvernance. Ils ajoutent que, même s’ils ne se présentent pas à l’élection présidentielle de 2017, ils désigneront des candidats dans leurs camps respectifs. Dans tous les cas, quel que soit le cas de figure, le président Sall fera face à de nombreux candidats en 2017. Sa préoccupation devrait donc être de respecter rigoureusement ses engagements et de gagner la confiance de ses compatriotes. Il ne craindrait alors personne en ce moment-là.
Ma modeste personne est persuadée que le maintien et la consolidation de Bby sont le bon choix, bon pour le pays, bon pour le président Macky Sall. Ces quatre compatriotes qu’on tente de lui présenter comme des « diables », des « dinosaures » qui doivent débarrasser le plancher, sont des hommes d’État, des hommes d’honneur et de dignité. Ils aiment leur pays et peuvent beaucoup lui apporter encore. Les cadres de l’Apr les plus intolérants qui les qualifient ainsi, sont pressés de se retrouver seuls avec le nouveau président dans la Coalition Macky 2012 et d’avoir leurs parts du gâteau. J’en ai entendu un déclarer sans gêne, au cours d’une certaine émission, que les cadres de l’Apr ont un cercle dit de « non encore nommés ou élus ». C’est proprement indécent ! Le président Macky Sall a intérêt à se méfier de ces courtisans zélés qui veulent le convaincre qu’un pouvoir ne se partage pas. S’il commet l’imprudence de le écouter, ils l’entraîneront irrémédiablement vers le détestable wadisme !
Autour des présidents nouvellement élus, il se constitue rapidement un cercle composé de parents, d’amis et de militants dits des premières heures, qui ne manquent pas d’exercer sur eux de fortes pressions. J’ai le sentiment que c’est déjà arrivé pour le président Sall. Je rappelle aux jeunes cadres de l’Apr, et surtout aux plus pressés d’entre eux, qu’eux- mêmes révélaient, qu’avant le 25 mars 2012, ils n’étaient que 29 et qu’ils sont maintenant plus de 600. On était dans le premier mois du mandat du président Sall. Combien sont-ils maintenant ? Combien, parmi eux, osaient-ils seulement côtoyer Macky Sall après le 8 novembre 2008 ? L’écrasante majorité de ces lycaons sont des chasseurs de prébendes. Ce ne sont sûrement pas ces gens-là qui feront gagner au président de la République la sympathie des populations. Tous les cadres de l’Apr ne sont sûrement pas de cet acabit. Les plus convaincus d’entre eux – et il y en a sûrement –, devraient faciliter la tâche au président de la République. Ils doivent surtout comprendre que, dans un pays, tout le monde ne peut pas prétendre à un poste et l’obtenir. Ils ne devraient pas perdre de vue non plus que le pays, laissé en lambeaux, a besoin d’être reconstruit de fond en comble. Le président Macky Sall y arriverait difficilement avec sa seule Coalition Macky 2012.
Il me donne l’impression, pour le moment tout au moins, de le comprendre et n’entendrait pas gouverner seul. Avec le temps, nous apprécierons. En attendant, il a pris des mesures que j’ai encouragées et soutenues, à côté d’autres qui n’ont pas emporté pas mon adhésion. Je ne m’y appesantirai pas pour les avoir largement développées dans mes contributions antérieures. Je ferai état cependant de deux mesures certes symboliques, mais très importantes. De mon point de vue tout au moins. Lors de sa première visite officielle en France, il s’est fait accompagner notamment de Monsieur Ousmane Tanor Dieng. Nul ne conteste à ce dernier sa connaissance de l’État et ses hautes qualités de diplomate. Aujourd’hui, ce sont ses amis socialistes qui sont au pouvoir en France. M. Dieng avait donc bien sa place dans ce voyage et le président Sall l’a compris.
De la même manière, le Dr Cheikh Tidiane Gadio, le Pr Abdoulaye Bathily et Serigne Mansour Sy Djamil étaient du voyage d’Addis-Abeba. Á l’époque, la presse avait insisté sur les qualités et l’expérience des uns et des autres, chacun dans son domaine de compétence, dont notre pays a grandement besoin. J’encourage donc le président Sall à prendre souvent de telles initiatives. Il doit chercher les compétences et l’expérience des affaires publiques partout où elles se trouvent, dût-il aller jusqu’en Nouvelle Calédonie.
Au moment où je suis sur le point de conclure ce texte j’apprends, par voie de presse, que le président Macky Sall a pris la décision de revenir sur toutes les mesures prises par son prédécesseur entre les deux tours de l’élection présidentielle, en faveur des généraux de l’Armée nationale. L’argument de poids de cette mesure serait que le budget ne peut pas supporter certaines dépenses. Si cette information est rigoureusement exacte, je félicite vivement le président de la République et souhaite qu’il aille jusqu’au bout. Il n’a rien à craindre, le peuple sera à ses côtés. L’ancien vieux président politicien a abusé des mesures de ce genre, injustes, frustrantes, parfois iniques. Y revenir est déjà un acte de courage et de bonne gouvernance. J’ose espérer que le président Sall ne s’arrêtera pas en si bon chemin. En tout cas, il a là, à sa portée, un filon qui pourrait lui valoir une remarquable popularité.
Le lundi 6 août 2012, la presse a annoncé une autre mesure, qu’on peut considérer, si elle est avérée, comme un acte majeure de Bonne Gouvernance et de Justice. Il s’agit de la suspension d’un important lotissement d’une partie importante des terres de l’Aéroport L.S.S. de Dakar. Comme les nombreux autres qui l’ont précédé, ce lotissement a profité aux mêmes compatriotes déjà fort nantis : magistrats, chefs religieux (toujours eux), officiers supérieurs et généraux de l’Armée nationale, inspecteurs des Impôts, ministres, députés, etc. Il semble d’ailleurs que certains des bénéficiaires forment un front commun pour lutter contre la mesure et menaceraient même de « paralyser le travail au niveau des services des impôts et domaines ». Si la mesure annoncée le 6 août 2012 a été vraiment prise par le président Sall, il ne doit craindre aucune menace. Qui ose affronter le peuple, quand ce dernier approuve toutes les mesures de redressements ? Et il les approuve dans son écrasante majorité. Je soutiens donc le président et l’encourage à aller plus loin encore dans ces mesures dites de redressements des nombreux torts que nous a faits son prédécesseur. Qu’il évite surtout les reculades ! Elles produisent des effets irréparables. Je reviendrai d‘ailleurs sur ces mesures-là et sur d’autres que j’ai appréciées (positivement ou négativement).
Sans doute, des compatriotes seront-ils prompts à crier : « Cette fois, lui aussi réclame sa part du gâteau ! ». Ils se tromperaient lourdement. J’avais bien précisé dans une contribution antérieure que je ne suis ni d’un côté ni de l’autre. Mon seul camp est la Justice, la Démocratie, la Bonne Gouvernance. La preuve, c’est que je ne suis pas toujours d’accord avec certaines mesures du président Sall. J’ai, en particulier, de sérieuses réserves par rapport à certaines de ses nominations et au maintien de certaines directions et agences nationales. Je suis surtout manifestement opposé à sa volonté de maintenir le Sénat. Les limites du budget qu’il évoque pour justifier la suppression de certains avantages aux généraux de l’Armée nationale, devraient raisonnablement justifier celle du Sénat. Un gouvernement ne peut pas ignorer l’opinion publique. Or, celle-ci est dans son écrasante majorité pour la suppression du Sénat, qui sera surtout celui du président de la République, puisqu’il nommera 55 des 100 sénateurs. Sommes-nous loin du Sénat de Wade ?
Pour le reste, en direction de mes compatriotes qui penseraient que je réclame ma part du gâteau, je me contenterai de leur répondre simplement ceci : « La sikket daan dunde ba saxub sikkim, man na caa wey, bu amee tuuti ngor ak ngëm.»
Dakar, le 12 août 2012
Mody Niang, mail: modyniang@arc.sn