Bien qu'elle considère comme loufoque la théorie du complot avancée par la défense de Jérôme Kerviel, la Société générale a soigneusement préparé sa riposte à la déposition du témoin de dernière minute qui sera entendu jeudi matin par la cour d'appel de Paris. Les trois avocats de la banque ont remis, mercredi, une note de 28 pages à la cour, au ministère public et aux conseils de M. Kerviel.
Le témoin, Philippe Houbé, se présente comme salarié d'une filiale de courtage de la Société générale, Newedge (Fimat à l'époque des faits). Selon lui, la banque ne pouvait ni ignorer qu'en 2007, M. Kerviel avait spéculé à hauteurs de dizaines de milliards d'euros, ni qu'il avait gagné 1,4 milliard. En 2008, elle aurait tiré prétexte de ses positions non couvertes de 50 milliards pour lui faire porter le chapeau de ses pertes à elle dans la crise des subprimes, les 50 milliards étant en réalité couverts secrètement par un desk dont le trader ignorait l'existence.
Selon les informations recueillies jeudi par Le Figaro, la réplique de la Société générale se fonde sur quelques grands axes. Ses conseils font valoir, pour commencer, que Philippe Houbé n'avait, de par sa position chez Fimat, qu'une vision très parcellaire des opérations de Jérôme Kerviel, qui intervenait de diverses manières sur les marchés. Dès lors, ses conclusions relèveraient davantage de la déduction fumeuse que des constatations irréfragables.
Des opérations fictives pour contrebalancer celles de Kerviel
Par ailleurs, la défense tente de créer le doute au sujet de positions symétriques à celles de de Jérôme Kerviel, prises par la banque pendant le grand et périlleux «débouclement» de janvier 2008. Réponse: ces opérations correspondent justement au débouclement pendant lequel les positions de M. Kerviel sont passées sur le compte du trader chargé de les liquider, d'où l'apparence d'une deuxième position de 50 milliards.
De même, si la «Soc Gen» a elle-même créé pour l'occasion des opérations fictives, c'était pour contrebalancer celles de Jérôme Kerviel et éviter la propagation de l'information financièrement létale selon laquelle la banque, en catastrophe, se débarrassait de 50 milliards de positions directionnelles (non couvertes). Mercredi, un témoin, ancien haut cadre de la Société Générale, affirmait que si les marchés apprenaient la nouvelle, la banque était «morte».
La partie civile maintient, par conséquent, que son préjudice après débouclement, exclusivement lié aux spéculations déraisonnables de Jérôme Kerviel, se monte à 6,3 milliards d'euros. Déduction faite du 1,4 milliard gagné, en 2007, et découvert caché dans les comptes du trader, la facture est ramenée à 4,9 milliards.
Les dés seront jetés
La défense va s'attacher, ce jeudi, à démontrer la véracité de son postulat, totalement inédit avant l'ouverture du procès en appel. Jusqu'à présent, elle n'a guère semblé convaincre la cour, pour employer un euphémisme. Mais les retournements de situation sont toujours possibles tant qu'un procès n'est pas terminé.
Quoi qu'il en soit, les avocats de Jérôme Kerviel ont tout misé sur le témoignage de Philippe Houbé et des liasses de documents versés vendredi dernier aux débats.
À propos de ces derniers, la présidente a déjà indiqué qu'elle n'y avait rien vu de nouveau. Reste donc le témoin: jeudi soir, les dés seront jetés.
Par Stéphane Durand-Souffland
Le témoin, Philippe Houbé, se présente comme salarié d'une filiale de courtage de la Société générale, Newedge (Fimat à l'époque des faits). Selon lui, la banque ne pouvait ni ignorer qu'en 2007, M. Kerviel avait spéculé à hauteurs de dizaines de milliards d'euros, ni qu'il avait gagné 1,4 milliard. En 2008, elle aurait tiré prétexte de ses positions non couvertes de 50 milliards pour lui faire porter le chapeau de ses pertes à elle dans la crise des subprimes, les 50 milliards étant en réalité couverts secrètement par un desk dont le trader ignorait l'existence.
Selon les informations recueillies jeudi par Le Figaro, la réplique de la Société générale se fonde sur quelques grands axes. Ses conseils font valoir, pour commencer, que Philippe Houbé n'avait, de par sa position chez Fimat, qu'une vision très parcellaire des opérations de Jérôme Kerviel, qui intervenait de diverses manières sur les marchés. Dès lors, ses conclusions relèveraient davantage de la déduction fumeuse que des constatations irréfragables.
Des opérations fictives pour contrebalancer celles de Kerviel
Par ailleurs, la défense tente de créer le doute au sujet de positions symétriques à celles de de Jérôme Kerviel, prises par la banque pendant le grand et périlleux «débouclement» de janvier 2008. Réponse: ces opérations correspondent justement au débouclement pendant lequel les positions de M. Kerviel sont passées sur le compte du trader chargé de les liquider, d'où l'apparence d'une deuxième position de 50 milliards.
De même, si la «Soc Gen» a elle-même créé pour l'occasion des opérations fictives, c'était pour contrebalancer celles de Jérôme Kerviel et éviter la propagation de l'information financièrement létale selon laquelle la banque, en catastrophe, se débarrassait de 50 milliards de positions directionnelles (non couvertes). Mercredi, un témoin, ancien haut cadre de la Société Générale, affirmait que si les marchés apprenaient la nouvelle, la banque était «morte».
La partie civile maintient, par conséquent, que son préjudice après débouclement, exclusivement lié aux spéculations déraisonnables de Jérôme Kerviel, se monte à 6,3 milliards d'euros. Déduction faite du 1,4 milliard gagné, en 2007, et découvert caché dans les comptes du trader, la facture est ramenée à 4,9 milliards.
Les dés seront jetés
La défense va s'attacher, ce jeudi, à démontrer la véracité de son postulat, totalement inédit avant l'ouverture du procès en appel. Jusqu'à présent, elle n'a guère semblé convaincre la cour, pour employer un euphémisme. Mais les retournements de situation sont toujours possibles tant qu'un procès n'est pas terminé.
Quoi qu'il en soit, les avocats de Jérôme Kerviel ont tout misé sur le témoignage de Philippe Houbé et des liasses de documents versés vendredi dernier aux débats.
À propos de ces derniers, la présidente a déjà indiqué qu'elle n'y avait rien vu de nouveau. Reste donc le témoin: jeudi soir, les dés seront jetés.
Par Stéphane Durand-Souffland