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Rentrée solennelle des Cours et Tribunaux: Le Président Macky Sall évoque la nécessité de concilier les avancées technologiques...

Le président de la République, Macky Sall a présidé ce jeudi, la cérémonie de la rentrée solennelle des Cours et Tribunaux, placée sous le thème « Protection de la vie privée ». Il souligne que l’évènement reste un rendez-vous républicain traditionnel, marquant le début d'année judiciaire. Il a relevé la nécessité de concilier les avancées technologiques et l’exigence de protéger les droits fondamentaux attachés à la vie privée.


Rédigé par leral.net le Jeudi 25 Janvier 2024 à 14:30 | | 0 commentaire(s)|

Le président de la République, Macky Sall a, d’abord, salué l’ensemble de la famille judiciaire, tout en présentant ses meilleurs vœux de bonne santé, de bien-être et de réussite. Il a également eu une pensée pour les collègues disparus et prié afin qu’ils reposent en paix. Au-delà du rituel, cette cérémonie offre un moment privilégié d’écoute et d’échanges entre l’exécutif, le judiciaire et le Barreau, dans un esprit constructif, dont la finalité est de contribuer au bon fonctionnement de la justice, condition sine qua non de l’Etat de droit.

Pour l’audience de cette année, dont le thème retenu est la "Protection de la vie privée". Il reste un sujet classique et d’actualité permanente. La problématique se pose aujourd’hui, avec encore plus d’acuité. « La problématique nous interpelle tous au plus haut point, pouvoirs publics, secteur privé et citoyens et citoyennes. Elle met en lumière la nécessité d’assurer l’équilibre entre le principe de liberté et l’impératif de protéger ce qui relève de la sphère privée, y compris les données personnelles », a relevé le Président Sall.

Ainsi, le Conseiller délégué à la Cour suprême, Barou Diop, retient-il, a rappelé avec pertinence, les différents aspects de la question ; aspects juridiques, judiciaires et également philosophiques, religieux et technologiques, entre autres. Il souligne que dans un monde marqué par l’explosion des technologies de l’information et de la communication et la frénésie des réseaux sociaux, la vie privée, fondement de l’intégrité physique et morale, est aujourd’hui, plus que jamais, exposée et menacée dans son existence. « Officiel ou personne privée, nul n’est épargné. On peut légitimement se demander ce qui reste de la vie privée. Surtout, lorsque tel ou tel aspect qui en relève, est utilisé dans une volonté manifeste de nuire », déduit-il.

Nécessité de concilier les avancées technologiques...

Le Président Sall est revenu sur les excellentes réflexions livrées. Il relève la nécessité de concilier les avancées technologiques avec l’exigence de protéger les droits fondamentaux attachés à la vie privée. Selon lui, des lois et institutions dédiées à cette protection, ne manquent pas. Mais, il y a certainement lieu d’interroger leur adéquation avec les réalités évolutives du temps.

Sous ce registre, le Président Sall reconnaît qu’il s'agit surtout d’adapter le cadre juridique, en corrigeant ses imperfections et en anticipant sur les besoins futurs, au moment où on entre de plain-pied dans l’ère de l’intelligence artificielle. Il a salué les importantes réformes réalisées ces dernières années, pour protéger l’intimité et la dignité des personnes.

Le Président Sall a rappelé que la Commission de Protection des données personnelles, autorité administrative indépendante, dotée de pouvoirs de sanction, a été mise en place pour rendre effectives les dispositions de la loi 2008-12 du 25 janvier 2008 sur la protection des données à caractère personnel. Plus récemment, évoque-t-il, le Code des communications électroniques a été adopté. En ses articles 36 et suivants, il édicte de manière explicite, la nécessité de protéger la vie privée, ainsi que les données personnelles des utilisateurs.

« Quant à la loi 2016-29 du 30 novembre 2016, portant modification du Code Pénal, elle conforte la répression des atteintes à la vie privée, notamment par l’amélioration des dispositions pénales relatives à la lutte contre la cybercriminalité. Je dois également ajouter que la protection de la vie privée n’incombe pas seulement à l'État. Elle s’impose aussi au milieu socio professionnel privé, pour préserver l'équilibre entre le travail et la vie personnelle et établir une relation de confiance et de respect mutuels entre l’employeur et l’employé », a précisé le Chef de l’Etat.

Sécurité des personnes et des biens

Le Président Sall signale que la même exigence s’applique aux procédures judiciaires, de l’enquête jusqu’au jugement, afin de protéger l’intimité et la dignité des personnes, poursuivies et des témoins. Notamment, des informations qui touchent à la vie privée. « La protection de la vie privée dans une pratique de portée universelle, n’exclut pas la possibilité pour l’Etat, d’infléchir certaines règles, à des fins d’intérêt général, notamment pour assurer la sécurité des personnes et des biens, ou réprimer certaines formes de criminalité. Il en est ainsi de la loi 2016-29 du 08 novembre 2016, qui aménage des restrictions à la protection de la vie privée, dans des circonstances spécifiques où la sécurité publique est en jeu », explique le Président Sall.

Sur ce, il soutient avoir mesuré toute la sensibilité afférente à cette restriction. « Les circonstances doivent la justifier. Je pense par exemple à la lutte contre le terrorisme, la cybercriminalité et la criminalité organisée, dont les modes opératoires sortent de l’ordinaire.

Dans le même esprit, la loi 2016-33 du 14 décembre 2016 autorise des mesures spécifiques pour la collecte et le traitement d’informations, relevant d’activités de renseignement. Là également, nécessité fait loi. Et, par ses fonctions régaliennes, dont il a seul le monopole, l’Etat est le garant de l’ordre et de la sécurité publics
», dit-il.

Aménagement de dispositions légales et réglementaires

Dès lors, retient-il, tout manquement à cette mission exclusive, lui est naturellement imputé. D’où la nécessité d’aménager des dispositions légales et réglementaires, donnant les moyens d’agir pour assurer cette prérogative d’intérêt général. « Je pense en particulier aux impératifs de sécurité nationale. Sous tous les angles d’analyse, la matière est complexe et constitue un défi permanent pour l’Exécutif, le Législatif et le Judiciaire.

Dans une société qui se veut démocratique comme la nôtre, où la liberté est le principe et la restriction, l’exception, l’exercice de protection de la vie privée ressemble à un mouvement de balancier, dont l’équilibre délicat conditionne le bon fonctionnement de l’Etat de droit
», a reconnu le chef de l’Etat. Et, il reste d’avis que le sujet du jour, au-delà des textes, relève aussi de considérations d’ordre éthique et moral, qui engagent en tant que citoyens et citoyennes, liés par le contrat social et dotés du libre-arbitre, c’est-à-dire l’aptitude à déterminer par nous-mêmes et non par crainte d’une force coercitive. Cela, insiste-t-il, ramène au devoir de responsabilité qui accompagne et valorise l’exercice des libertés individuelles et collectives. « Si par définition, la loi s’applique erga omnes, on ne peut garantir son application, en mettant un juge ou un gendarme derrière chaque justiciable. Surtout, lorsque nous avons choisi l’Etat de droit et non l’Etat de police », prévient-il.

Lorsque chacun a pleinement conscience de ses propres responsabilités vis-à-vis du contrat social, la vie privée et l’intérêt général sont mieux protégés. « Je ne parle pas ici du Contrat social au sens de Jean Jacques Rousseau. Je pense plutôt à nos propres valeurs de culture et de civilisation, qui nous enseignent les vertus et lois de la vie en société : am jom, am jaanu biir, am ngor, am kersaak teggin, saangg soutoureu. Ce sont là des valeurs ancestrales, connues de toutes les composantes socioculturelles de la nation sénégalaise, qui constituent autant de barrières morales à ne pas franchir, par respect pour la dignité humaine », recommande-t-il.

« En pratiquant ces valeurs, revitalisant les fondements du vivre ensemble, chaque citoyen, conclut-il, doit se déclarer ouvert à l’année judiciaire 2024.»



Ousmane Wade