Et depuis, on vole d’accusations en contre-accusations, tandis que le triste constat est bien là, qui s’impose : la flotte aérienne commerciale sénégalaise est plus que jamais clouée au sol, au grand dam de ses nombreux usagers. Et pourtant, à la création d’ASI en 2000, on jubilait d’allégresse car on croyait avoir trouvé là un exemple réussi d’une saine coopération sud-sud qui venait concrétiser l’excellence des relations amicales et séculaires liant deux pays qui ne devaient sortir de cette alliance que gagnant-gagnant.
Air Afrique venait de sombrer, le Maroc bénéficiait d’une expérience avérée dans le domaine du transport aérien, et l’aéroport de Yoff, de par sa situation géographique, a toujours eu une vocation internationale jamais démentie. On se demande alors aujourd’hui quel grain de sable a bien pu enrayer le fonctionnement d’un si beau mécanisme qui faisait l’admiration de l’ouest africain au point de lui susciter des émules. Le Sénégal ne cache pas son refus de voir la RAM engager un "retrait immédiat" de la gestion et du capital de sa flotte tandis que les Marocains s’irritent et jugent irrecevable que son partenaire lui impose de subventionner "à fonds perdus et à hauteur de 27 millions d’euros" la reprise des activités d’ASI. Les positions semblent tranchées et la situation on ne peut plus bloquée.
Dommage pour tout le monde. Car si cette belle coopération capote, outre qu’elle cause un préjudice certain à de nombreux usagers de la compagnie, elle met en péril plus de 500 emplois. Et bien au-delà, elle pose à nouveau la délicate question des alliances sud-sud tout comme elle remet en question la fiabilité des récentes offensives économiques marocaines initiées depuis quelque temps en Afrique de l’Ouest. A l’heure actuelle, dans cette délicate question, les accusations succèdent aux accusations et il est sans doute difficile de faire la part de la pure vérité. Mais il faudrait sans doute éviter de politiser le problème. Peut-être même qu’il aurait fallu commencer par là : laisser la question à ceux qui la maîtrisent le mieux, et faire appel à ses techniciens. La politique ne s’embarrasse pas souvent de la délicatesse qu’exigent cependant politesse, diplomatie et rapports humains sains. Le tout nouveau ministre sénégalais des transports, Karim Wade, devrait trouver dans ce conflit ASI-RAM une bonne entrée en matière car cette affaire représente sans doute pour lui, un baptême du feu.
Il ne devra cependant pas oublier que l’avait précédé à ce poste un certain Farba Senghor dont les propos tranchés et les méthodes de travail, pour être atypiques, n’étaient pas forcément constructives. Il lui serait sage de savoir en tenir compte. En tout état de cause, c’est la compagnie sénégalaise qu’il faudra sauver, et pour cela, il est nécessaire d’aplanir les ressentiments des uns et des autres. Ce sont de longues traditions de coopération économique, culturelle et religieuse qu’il faut désormais restaurer, préserver et sécuriser. Sénégalais comme Marocains y ont tout à gagner. Et l’ouest africain y retrouverait sans doute une compagnie aérienne qui, légitimement, faisait sa fierté. Alors, on croise les doigts.
Par Jean Claude KONGO
Le Pays
Air Afrique venait de sombrer, le Maroc bénéficiait d’une expérience avérée dans le domaine du transport aérien, et l’aéroport de Yoff, de par sa situation géographique, a toujours eu une vocation internationale jamais démentie. On se demande alors aujourd’hui quel grain de sable a bien pu enrayer le fonctionnement d’un si beau mécanisme qui faisait l’admiration de l’ouest africain au point de lui susciter des émules. Le Sénégal ne cache pas son refus de voir la RAM engager un "retrait immédiat" de la gestion et du capital de sa flotte tandis que les Marocains s’irritent et jugent irrecevable que son partenaire lui impose de subventionner "à fonds perdus et à hauteur de 27 millions d’euros" la reprise des activités d’ASI. Les positions semblent tranchées et la situation on ne peut plus bloquée.
Dommage pour tout le monde. Car si cette belle coopération capote, outre qu’elle cause un préjudice certain à de nombreux usagers de la compagnie, elle met en péril plus de 500 emplois. Et bien au-delà, elle pose à nouveau la délicate question des alliances sud-sud tout comme elle remet en question la fiabilité des récentes offensives économiques marocaines initiées depuis quelque temps en Afrique de l’Ouest. A l’heure actuelle, dans cette délicate question, les accusations succèdent aux accusations et il est sans doute difficile de faire la part de la pure vérité. Mais il faudrait sans doute éviter de politiser le problème. Peut-être même qu’il aurait fallu commencer par là : laisser la question à ceux qui la maîtrisent le mieux, et faire appel à ses techniciens. La politique ne s’embarrasse pas souvent de la délicatesse qu’exigent cependant politesse, diplomatie et rapports humains sains. Le tout nouveau ministre sénégalais des transports, Karim Wade, devrait trouver dans ce conflit ASI-RAM une bonne entrée en matière car cette affaire représente sans doute pour lui, un baptême du feu.
Il ne devra cependant pas oublier que l’avait précédé à ce poste un certain Farba Senghor dont les propos tranchés et les méthodes de travail, pour être atypiques, n’étaient pas forcément constructives. Il lui serait sage de savoir en tenir compte. En tout état de cause, c’est la compagnie sénégalaise qu’il faudra sauver, et pour cela, il est nécessaire d’aplanir les ressentiments des uns et des autres. Ce sont de longues traditions de coopération économique, culturelle et religieuse qu’il faut désormais restaurer, préserver et sécuriser. Sénégalais comme Marocains y ont tout à gagner. Et l’ouest africain y retrouverait sans doute une compagnie aérienne qui, légitimement, faisait sa fierté. Alors, on croise les doigts.
Par Jean Claude KONGO
Le Pays