Une femme sans âge. Sokhna Camara a l’air de faire partie de l’ethnie Lébou, mais on lui collerait bien une identité Malienne. Le teint clair, elle se dit petite-fille de Djinn. Elle est issue de la lignée de Meïssa Waly Dione, dit-elle, et d’une grande voyante aux pouvoirs mystiques énormes. Celle-ci avait aidé un djinn à accoucher alors qu’elle a eu des complications durant une semaine et personne jusque-là n’arrivait à la tirer d’affaire. Le travail accompli, elle a eu en récompense à ce geste, « l’honneur » d’avoir un enfant avec un Djinn.
Dans son domicile à la cité Rue 10, Sokhna Camara que ses amies appellent affectueusement Tacko, essaie de perpétuer la tradition. A première vue, l’arrière petite-fille de Meïssa Waly Dione fait peur. Le Samedi 18 juin dernier, elle se préparait à une séance de Ndeup (séance d’incantation des Djinns en guise de traitement). Vêtue d’une sorte de grand boubou de couleur rouge, elle était bien à l’aise, pieds nus. Pour sa préparation mystique, elle portait en bandoulière un nombre incalculable de gris-gris, mais également une hache bien fourrée dans son étui.
Dans une chambrette où elle nous a reçu, il est formellement interdit de porter des chaussures. Là réside également un « Djinn ». Il s’agit d’un coin bien aménagé, clôturé par un petit pagne. À l’intérieur, l’on pouvait voir des canaris, avec tout ce que cela nécessite comme arsenal dont le Djinn a besoin. Il n’y a pas que cela, un « tama » (un petit tambour) était accroché par-ci, des amulettes par-là, ainsi que des cornes de différents animaux. C’est quasiment le même décor qui se reflète dans cette chambrette. Sur l’un des murs est accrochée une photo du président de Prometra. Sokhna Camara fait partie de cette communauté.
Assise sur une grande chaise, comme une reine, Sokhna Camara est maintenant prête à répondre à nos questions. Entre nous, se trouvaient plusieurs calebasses qu’elle a couvertes avec des voiles sur lesquels sont déposées des queues de différents animaux. Mais avant qu’on ne commence l’entretien, un homme d’une cinquantaine d’années fait irruption dans la chambrette. Il est invité par la « reine » des liens à s’asseoir à ses côtés, « juste, lui dit-elle, à côté du Djinn ». Cette petite-fille de Djinn a tenu également à ce que son mari Mignane Sène assiste à l’interview.
« Un Djinn peut causer l’impuissance. Je reçois des personnalités de l’Etat… »
Mignane Sène ne se limite pas seulement à son rôle d’époux. Il est aussi son assistant et l’aide lorsqu’elle est dans une séance de « Ndeup » ou lorsqu’elle se livre au traitement d’un patient. Sokhna Camara traite, si on l’en croit, plusieurs maladies. « Je traite le rap (quand une personne est habitée par un Djinn le poussant à entrer en transe), la stérilité, le cancer, ces jeunes qui piquent une crise dans les écoles. Mais je traite aussi des gens qui ont une épouse ou une petite amie Djinn ou l’inverse parce que cela existe. Vous savez, le Djinn peut même causer l’impuissance chez un homme ».
Comment parvient-elle à traiter ce genre de maladie ? C’est son secret qu’elle ne livre à personne. On insiste. Elle accepte de lever un petit coin du voile : « le Ndeup est un moyen de soigner un malade. Ndeup veut dire retourner. C’est la raison qui est bouleversée par le fait d’un Djinn. Ainsi, il faut faire les éloges du Djinn pour délivrer la personne. Mais, en fin de compte, tout le mérite revient à Dieu ».
Alors qu’elle dévoilait ses petits secrets, une dame est entrée pour déposer un bol contenant de la graisse. Un chat surgi de nulle part, vient laper là-dedans, avant de disparaître comme il était venu. Pas du tout perturbée par cette intrusion, Sokhna Camara poursuit pour parler de la clientèle qui la sollicite. « J’ai des clients qui viennent de l’intérieur du Sénégal, et même de l’étranger (Etats -Unis, Europe etc). Je reçois même des personnalités de l’Etat, mais c’est à des moments précis parce qu’elles ne viennent pas me consulter en plein jour », nous confie-t-elle. Cependant, elle ne veut aucunement donner un nom, encore moins le genre de maladies ou les préoccupations qui les conduisent à elle. Seulement, ce ne sont pas uniquement les personnalités de l’Etat qui viennent la voir, il y a également des lutteurs. Là également, elle se dit très sollicitée et refuse de donner un quelconque nom.
« Ces animaux-là ne sont pas des animaux, ce sont mes amis »
Dans sa demeure en apparence ordinaire, cette arrière petite-fille de Meïssa Waly Dione vit avec plusieurs sortes d’animaux. Des animaux domestiques, mais aussi des animaux sauvages. Pourtant, Sokhna Camara ne veut pas qu’on les appelle ainsi. « Les gens les appellent des animaux, mais en réalité, ce sont mes amis et ils apparaissent sous différentes formes. Je ne sais pas si tu comprends ce que je veux dire. Parfois ils ont besoin de moi et ils m’appellent et là on reste ensemble. Ils m’aident aussi dans mon travail. Par exemple, quand quelqu’un vient me voir pour une consultation, s’ils ne sont pas d’accord, j’éconduis le visiteur et il attendra un autre jour. Vous savez on dit même que j’ai une chèvre qui parle, mais c’est parce que les gens ne comprennent rien. Est-ce que vous avez une fois vu une chèvre parler ? Cela n’existe pas ».
Après que ses « amis » lui ont donné toute cette « capacité » à soigner les malades, Sokhna Camara se dit en devoir d’organiser des séances de « tour » pour faire plaisir à ses ancêtres Djinn qui lui ont donné le pouvoir de soigner des personnes qui sont au bord de l’agonie.
Des séances de « tour » chaque année pour « sauver le pays »
Mais il lui arrive aussi parfois d’organiser d’autres séances, chaque année, au cours desquelles elle égorge trois bœufs. « C’est pour sauver le pays », nous assure-t-elle. Cela, à l’instar de ses camarades de Prometra, après avoir senti un mal venir.
Seulement, ces pratiques mystiques ne sont pas de tout repos. Un nuit, nous a-t-elle raconté, alors qu’elle était dans la chambre avec son mari, avec dans un coin un petit espace pour célébrer ses ancêtres, la demeure a pris feu subitement. Et pourtant, rien ne leur est arrivé. Mais c’est à ce moment que le « pouvoir » lui est parvenu, comme par magie. Extraordinaire !
Alassane DRAME l'asquotidien
Dans son domicile à la cité Rue 10, Sokhna Camara que ses amies appellent affectueusement Tacko, essaie de perpétuer la tradition. A première vue, l’arrière petite-fille de Meïssa Waly Dione fait peur. Le Samedi 18 juin dernier, elle se préparait à une séance de Ndeup (séance d’incantation des Djinns en guise de traitement). Vêtue d’une sorte de grand boubou de couleur rouge, elle était bien à l’aise, pieds nus. Pour sa préparation mystique, elle portait en bandoulière un nombre incalculable de gris-gris, mais également une hache bien fourrée dans son étui.
Dans une chambrette où elle nous a reçu, il est formellement interdit de porter des chaussures. Là réside également un « Djinn ». Il s’agit d’un coin bien aménagé, clôturé par un petit pagne. À l’intérieur, l’on pouvait voir des canaris, avec tout ce que cela nécessite comme arsenal dont le Djinn a besoin. Il n’y a pas que cela, un « tama » (un petit tambour) était accroché par-ci, des amulettes par-là, ainsi que des cornes de différents animaux. C’est quasiment le même décor qui se reflète dans cette chambrette. Sur l’un des murs est accrochée une photo du président de Prometra. Sokhna Camara fait partie de cette communauté.
Assise sur une grande chaise, comme une reine, Sokhna Camara est maintenant prête à répondre à nos questions. Entre nous, se trouvaient plusieurs calebasses qu’elle a couvertes avec des voiles sur lesquels sont déposées des queues de différents animaux. Mais avant qu’on ne commence l’entretien, un homme d’une cinquantaine d’années fait irruption dans la chambrette. Il est invité par la « reine » des liens à s’asseoir à ses côtés, « juste, lui dit-elle, à côté du Djinn ». Cette petite-fille de Djinn a tenu également à ce que son mari Mignane Sène assiste à l’interview.
« Un Djinn peut causer l’impuissance. Je reçois des personnalités de l’Etat… »
Mignane Sène ne se limite pas seulement à son rôle d’époux. Il est aussi son assistant et l’aide lorsqu’elle est dans une séance de « Ndeup » ou lorsqu’elle se livre au traitement d’un patient. Sokhna Camara traite, si on l’en croit, plusieurs maladies. « Je traite le rap (quand une personne est habitée par un Djinn le poussant à entrer en transe), la stérilité, le cancer, ces jeunes qui piquent une crise dans les écoles. Mais je traite aussi des gens qui ont une épouse ou une petite amie Djinn ou l’inverse parce que cela existe. Vous savez, le Djinn peut même causer l’impuissance chez un homme ».
Comment parvient-elle à traiter ce genre de maladie ? C’est son secret qu’elle ne livre à personne. On insiste. Elle accepte de lever un petit coin du voile : « le Ndeup est un moyen de soigner un malade. Ndeup veut dire retourner. C’est la raison qui est bouleversée par le fait d’un Djinn. Ainsi, il faut faire les éloges du Djinn pour délivrer la personne. Mais, en fin de compte, tout le mérite revient à Dieu ».
Alors qu’elle dévoilait ses petits secrets, une dame est entrée pour déposer un bol contenant de la graisse. Un chat surgi de nulle part, vient laper là-dedans, avant de disparaître comme il était venu. Pas du tout perturbée par cette intrusion, Sokhna Camara poursuit pour parler de la clientèle qui la sollicite. « J’ai des clients qui viennent de l’intérieur du Sénégal, et même de l’étranger (Etats -Unis, Europe etc). Je reçois même des personnalités de l’Etat, mais c’est à des moments précis parce qu’elles ne viennent pas me consulter en plein jour », nous confie-t-elle. Cependant, elle ne veut aucunement donner un nom, encore moins le genre de maladies ou les préoccupations qui les conduisent à elle. Seulement, ce ne sont pas uniquement les personnalités de l’Etat qui viennent la voir, il y a également des lutteurs. Là également, elle se dit très sollicitée et refuse de donner un quelconque nom.
« Ces animaux-là ne sont pas des animaux, ce sont mes amis »
Dans sa demeure en apparence ordinaire, cette arrière petite-fille de Meïssa Waly Dione vit avec plusieurs sortes d’animaux. Des animaux domestiques, mais aussi des animaux sauvages. Pourtant, Sokhna Camara ne veut pas qu’on les appelle ainsi. « Les gens les appellent des animaux, mais en réalité, ce sont mes amis et ils apparaissent sous différentes formes. Je ne sais pas si tu comprends ce que je veux dire. Parfois ils ont besoin de moi et ils m’appellent et là on reste ensemble. Ils m’aident aussi dans mon travail. Par exemple, quand quelqu’un vient me voir pour une consultation, s’ils ne sont pas d’accord, j’éconduis le visiteur et il attendra un autre jour. Vous savez on dit même que j’ai une chèvre qui parle, mais c’est parce que les gens ne comprennent rien. Est-ce que vous avez une fois vu une chèvre parler ? Cela n’existe pas ».
Après que ses « amis » lui ont donné toute cette « capacité » à soigner les malades, Sokhna Camara se dit en devoir d’organiser des séances de « tour » pour faire plaisir à ses ancêtres Djinn qui lui ont donné le pouvoir de soigner des personnes qui sont au bord de l’agonie.
Des séances de « tour » chaque année pour « sauver le pays »
Mais il lui arrive aussi parfois d’organiser d’autres séances, chaque année, au cours desquelles elle égorge trois bœufs. « C’est pour sauver le pays », nous assure-t-elle. Cela, à l’instar de ses camarades de Prometra, après avoir senti un mal venir.
Seulement, ces pratiques mystiques ne sont pas de tout repos. Un nuit, nous a-t-elle raconté, alors qu’elle était dans la chambre avec son mari, avec dans un coin un petit espace pour célébrer ses ancêtres, la demeure a pris feu subitement. Et pourtant, rien ne leur est arrivé. Mais c’est à ce moment que le « pouvoir » lui est parvenu, comme par magie. Extraordinaire !
Alassane DRAME l'asquotidien