Wal fadjri : La question de la suppression du deuxième tour de l'élection présidentielle a été agitée par des jeunes libéraux. Peut-on savoir votre position sur ce sujet ?
Samba Diouldé THIAM : Je dois dire que les modifications incessantes de la Constitution font désordre à mes yeux. J'ai déjà dit, dans d'autres circonstances et je le répète, je suis absolument hostile à la modification des deux tours qui organisent l'élection présidentielle. C'est une affaire extrêmement sérieuse et il est important que les Sénégalais accordent à l'élection présidentielle toute l'attention qu'il faut, qu'ils se mobilisent dans leur diversité, dans la diversité de leur opinion, de leur choix et qu'ils donnent à cette occasion, la pleine mesure de leur engagement pour le Sénégal. Une fois que notre président est choisi par une majorité dans les conditions tout à fait transparentes qui n'appellent pas du tout de remise en cause, le président est élu. Non seulement il a la légalité mais aussi la légitimité pour conduire notre pays. Et il doit se mettre au travail, faire des résultats c'est pourquoi nous élisons des présidents de la République. Puisque le pouvoir politique suprême ne se donne qu'à travers des élections, il est donc important que l'organisation de ces élections soit un moment de grand consensus du peuple sénégalais. Si nous sommes divisés sur les conditions pour élire notre président, il est évident que nous resterons divisés sur tout le reste. C'est pourquoi il me paraît absolument indispensable de laisser élire le président de la République à deux tours. Pour qu'au premier tour, s'il n'a pas la majorité absolue qu'on aille au deuxième tour où il y aura deux candidats qui vont conquérir le suffrage des Sénégalais et l'un d'entre les deux l'emportera forcément. Et si la question était portée à l'Assemblée nationale, n'ayant que ma voix, cette voix-là s'exprimerait contre une telle mesure visant à nous ramener en arrière. Ce serait une régression politique, démocratique que de faire élire le président de la République à un tour. Le Sénégal ne peut pas regarder vers d'autres pays qui ne lui arrivent même pas au coude sur le plan d'un certain nombre de règles démocratiques pour dire je vais m'inspirer d'un Tartampillon. Il faut arrêter ! Cela ne me paraît pas honorable pour notre pays et pour notre démocratie.
Wal fadjri : Avec l'annonce de la réunification de la grande famille libérale n'y a-t-il pas de risque pour les alliés d'être obligés de se fondre dans le Pdsl ?
Samba Diouldé THIAM : Les alliés ne sont pas des libéraux. S'ils se transforment en libéraux, ils cessent d'être des alliés et deviennent des militants du Pds. Et les alliés qui refusent de se transformer en libéraux oubien ils pensent qu'ils peuvent continuer avec le président et son parti, ils continuent ou le président pense qu'il ne peut plus continuer avec eux et l'alliance s'arrête. Je pense que la question est relativement claire. Les libéraux, c'est dans le Pds et les divisions dans le Pds c'est là qu'il faut remettre de l'ordre. (…) Mais c'est leur affaire de régler ce problème-là, ils n'ont pas besoin de moi ni pour réfléchir avec eux pour ce qu'ils ont à faire ni même pour participer à organiser ce qu'il y a lieu de faire. Mon parti est un allié, nous sommes à côté. Mais, si nous devons continuer avec eux l'aventure de l'alliance, il ne faudrait pas du tout qu'ils soient faibles. Mais faut-il encore une fois que le parti soit centré autour de la défense des intérêts du pays, que le Pds se mobilise et se structure pour construire le pays selon une vision. Cette vision peut plaire ou pas mais si c'est simplement pour régler leur problème de famille, leur petite cuisine de Pds, cela n'a aucun intérêt pour moi. Je ne suis pas au Pds, j'ai connu le président Abdoulaye Wade politiquement en 1978 quand le Parti africain pour l'indépendance (Pai) a pris contact avec lui pour la première fois. Ce n'est pas aujourd'hui que je connais Wade. Il est président depuis dix ans, je n'ai pas pensé devoir le rejoindre, ce n'est pas aujourd'hui que nous le ferons. Nous pouvons aller ensemble avec lui si nous nous reconnaissons dans ce qui se fait. Mais si nous cessons de nous reconnaître dans ce qui se fait, nous tirons la révérence. Si lui-même estime que nous sommes encombrants, il tire la révérence en nous disant : ‘partez’. Si nous avons suffisamment de signaux clairs d'ailleurs, nous n'attendrons pas qu'on nous dise de partir, nous partirons. Nous sommes dans cette disposition, nous sommes des alliés loyaux. Nous ne demandons aucune faveur. Ce qui nous importe, c'est de servir le Sénégal.
Wal fadjri : Sur beaucoup de questions, le Pds n'a pas la même vision que certains de ses alliés. C'est votre cas. Qu’est-ce qui, selon vous, explique cette mésentente ?
Samba Diouldé THIAM : Etre allié, c'est que chacun porte une réflexion sinon c'est appartenir au même parti. Or quand on appartient au même parti, on salue le général et on se met au garde-à-vous. Au Pds, quand le président Wade parle, ils embouchent tous la même trompette. Nous, nous sommes des alliés du président Wade, nous regardons les problèmes à travers notre expérience. Nous ne disons pas que nous détenons la vérité mais nous prétendons dire à Wade comment nous décryptons les signaux que les Sénégalais nous envoient. Nous sommes avec Wade pour servir les Sénégalais et non pour le servir lui. Et le propos que nous tenons est notre manière de servir les Sénégalais en faisant parvenir à Wade à travers notre position, ce que nous ressentons. Qu'il en tienne compte ou pas ! Tant qu'il nous laisse la liberté de dire notre sentiment, nous continuerons à avancer avec lui. Sauf si nous observons des pratiques au niveau de l'Etat ou du pays qui appellent que nous ne puissions plus du tout servir de caution. Parce que nous ne sommes pas une caution au président Wade. Nous pensons qu’il y a des choses bien faites comme il y a beaucoup d'erreurs et ces erreurs c'est probablement parce qu'il ne traite pas suffisamment avec ses alliés. Il doit mettre ces derniers dans une position qui leur permet de lui dire honnêtement ce qu'ils pensent dans l'intérêt du Sénégal. Parce que si tout le monde dit Amen, vous êtes le meilleur, c'est que quelque part on ne vous dit pas la vérité. Et il y a beaucoup de gens qui ne disent pas la vérité à Wade. Les élections du 22 mars sont arrivées parce qu'on n’a pas dit la vérité à Wade. Les manifestations qui sont arrivées avec les coupures de courant sont survenues parce qu'on lui a dit quelque chose qui n'était pas exact. Il y a des gens qui sont à des responsabilités qui n'ont pas fait ce qu'ils devraient faire pour le conforter. Wade ne peut pas être seul, indiquer la vision et en même temps s'occuper de l'intendance et de tous ce qu'il y a lieu de faire.
Wal fadjri : Il y a eu un réaménagement gouvernemental avec des arrivées comme celle d'Aminata Tall mais aussi le départ de Cheikh Tidiane Sy. Comment décryptez-vous ce mouvement ?
Samba Diouldé THIAM : J'ai lu dans la presse que le départ de M. Sy s'explique par des raisons de santé. Si tel est le cas, je lui souhaite de recouvrer la santé (...). L'arrivée d'Aminata Tall ainsi que d'autres personnes, tout cela j'en ai la même lecture que pour la composition du bureau de l'Assemblée nationale. Le président de la République est un élu et il a déjà posé un acte, celui de sa candidature pour 2012 qui nous paraissait d'ailleurs un peu prématurée. Mais il a certainement des indicateurs que je n'ai pas et il a dit qu'il est candidat pour 2012. C'est certainement pour une mise en ordre de son parti, de sa majorité qu'il a fait cette annonce-là. (…)
Sauf que d'aucuns établissent un lien entre le départ de Cheikh Tidiane Sy et Wal fadjri : l'arrivée probable d'Idrissa Seck au poste de vice-président ?
Samba Diouldé THIAM : Je ne vois pas de lien entre Cheikh Tidiane Sy et Idrissa Seck. Je ne sais pas si c'est la condition de son départ du ministère de l'Intérieur. Je suis à la fois loin de cette cuisine présidentielle et de celle du Pds. Maintenant, la Constitution a été modifiée pour mettre en place le poste de vice-présidence qui est devenu maintenant une loi dans notre pays. J'ai exprimé mon opposition forte à la mise en place de ce dispositif dans notre Constitution. J'en ai donné les raisons. J'ai considéré que nous avions un régime présidentiel et dans ce régime il y a un Premier ministre et un gouvernement. Donc, un vice-président, je ne sais à quoi il va servir. C'est un grand ambassadeur et un grand commis de l'Etat etc. Mais, un vice-président, si nous devons en avoir, il faut que notre Constitution dispose que le vice-président est élu en même temps que le président et qu'on supprime le poste de Premier ministre. Que le président gouverne sans intermédiaire. Et cette disposition là où elle existe (Etats-Unis, Afrique du Sud), elle vise à éviter que s'il y a une interruption du mandat présidentiel qu'on aille aux élections. Parce que le vice-président continue le mandat du président jusqu'à terme.
Wal fadjri : Justement par rapport à la candidature du Chef de l'Etat, il y a eu des critiques relatives à son âge avancé.
Samba Diouldé THIAM : J'exclus le problème de l'âge dans la mesure où la Constitution de notre pays n'en fait pas un interdit. Je pense que le débat sur l'âge, c'est une question de sensibilité. Mais légalement, son âge ne s'oppose pas à ce qu'il fasse acte de sa candidature. Maintenant le président Wade ne nous a pas fait part de sa candidature en tant qu'allié. Nous avons été informé dans la presse qu'il fait acte de candidature. Eh bien, nous nous contentons de cette information jusqu'à ce que nous soyons saisis. Ou jusqu'à ce que nous apprécions nous-mêmes, le moment venu, de dire il faut soutenir celui-ci ou celui-là. En attendant nous sommes dans la majorité et continuons d'y être comme nous le sommes. Avec la personnalité, la sensibilité et la liberté de ton de notre parti. Un ton qui fait aussi dans la mesure et dans la courtoisie. Nous gardons tout à fait cette liberté-là, nous n'avons jamais été rappelé à l'ordre par notre partenaire. Parce que il faut rendre à César ce qui appartient à César, il nous prend comme nous sommes et à partir de ce moment nous continuons encore à être ses alliés et le moment venu nous dirons ce que nous avons à dire. Je le dis, l'opinion a été un peu secouée par l'annonce de cette candidature à deux ans et demi, pratiquement à mi-mandat. Je pense que cela aurait pu attendre mais le président sait mieux que moi les éléments dont il dispose.
Wal fadjri : Bien avant le réaménagement du gouvernement, il y a eu le départ de Cheikh Tidiane Gadio qui a aussi surpris beaucoup d'observateurs. Etait-ce votre cas ?
Samba Diouldé THIAM : Je voudrais dire d'abord que Cheikh Tidiane Gadio a duré dans le gouvernement est c'est quasiment une exception. C'est même l'exception dans le magistère Wade. C'est important de noter que pendant toute cette période, il a bénéficié de la confiance du président de la République. Mais comme on dit, tous les compagnonnages ont un terme. Que ce soit dans le ménage ou dans d'autres circonstances, il y a toujours un moment où un compagnonnage se termine. En politique, les compagnonnages se terminent à l'initiative de l'une ou de l'autre partie. Le président de la République choisit les gens et personne ne lui demande les raisons pour lesquelles il le fait, quand il les démet. On peut toujours supputer les raisons pour lesquelles il l'a fait mais je ne pense pas que ce soit un exercice de très grand intérêt. Il a ses raisons. En cette matière, il n'a de compte à rendre à personne. Je constate qu'il s'est séparé de Gadio. Pendant le temps de l'attelage Wade/Gadio, les Sénégalais se sont félicités du travail qui a été accompli dans le domaine diplomatique pour notre pays. Je m'en félicite également et je pense que peu importe les personnes qui sont en situation pour servir le Sénégal, l'essentiel est qu'ils fasse des résultats pour notre pays. Et chaque Sénégalais a la même dignité qu'un autre pour servir le pays et s'il a été choisi par le président de la République c'est le résultat qu'il faut juger. Et apparemment les résultats ne semblent pas avoir plaidé contre Cheikh Tidiane Gadio. Si tel n’était pas le cas, le président ne l'aurait pas gardé si longtemps. Je n'ai pas noté aussi jusqu'au moment de son départ que les Sénégalais aient eu à réagir assez vivement contre l'exercice de son mandat de ministre des Affaires étrangères.
Wal fadjri : Autre sujet d'actualité, l'affaire de la tentative de corruption d'Alex Segura…
Samba Diouldé THIAM : C'est extrêmement grave et les plus hautes autorités doivent tirer au clair cette affaire. Le Fmi et les institutions internationales aussi. Il est inadmissible que des personnes grassement payées puissent être là à recevoir des cadeaux pour fermer les yeux sur l'exercice de leurs missions. Il est inacceptable que le Sénégal agisse de cette manière et il faut que nos autorités politiques disent au peuple sénégalais que nous avons commis une faute grave et impardonnable, nous battons notre coulpe et arrêtons-là les choses. Parce que si le silence est gardé autour de cette affaire, c'est contre la notoriété du Sénégal, du Fmi et de toutes les institutions internationales. Si cela s’est réalisé, il faut en tirer toutes les conséquences possibles et imaginables et que les institutions internationales veillent sur l'intégrité de ceux qu'elles envoient en mission dans les différents pays. Que les pays qui reçoivent ces personnes aussi entretiennent des relations transparentes avec ces institutions à travers leurs représentants. Qu'on ne soudoie pas les représentants des institutions internationales pour faire de faux rapports sur l'état de nos Etats etc. Parce qu'au total, ce sont les Sénégalais qui vont payer les pots cassés.
source wal fadjri
Samba Diouldé THIAM : Je dois dire que les modifications incessantes de la Constitution font désordre à mes yeux. J'ai déjà dit, dans d'autres circonstances et je le répète, je suis absolument hostile à la modification des deux tours qui organisent l'élection présidentielle. C'est une affaire extrêmement sérieuse et il est important que les Sénégalais accordent à l'élection présidentielle toute l'attention qu'il faut, qu'ils se mobilisent dans leur diversité, dans la diversité de leur opinion, de leur choix et qu'ils donnent à cette occasion, la pleine mesure de leur engagement pour le Sénégal. Une fois que notre président est choisi par une majorité dans les conditions tout à fait transparentes qui n'appellent pas du tout de remise en cause, le président est élu. Non seulement il a la légalité mais aussi la légitimité pour conduire notre pays. Et il doit se mettre au travail, faire des résultats c'est pourquoi nous élisons des présidents de la République. Puisque le pouvoir politique suprême ne se donne qu'à travers des élections, il est donc important que l'organisation de ces élections soit un moment de grand consensus du peuple sénégalais. Si nous sommes divisés sur les conditions pour élire notre président, il est évident que nous resterons divisés sur tout le reste. C'est pourquoi il me paraît absolument indispensable de laisser élire le président de la République à deux tours. Pour qu'au premier tour, s'il n'a pas la majorité absolue qu'on aille au deuxième tour où il y aura deux candidats qui vont conquérir le suffrage des Sénégalais et l'un d'entre les deux l'emportera forcément. Et si la question était portée à l'Assemblée nationale, n'ayant que ma voix, cette voix-là s'exprimerait contre une telle mesure visant à nous ramener en arrière. Ce serait une régression politique, démocratique que de faire élire le président de la République à un tour. Le Sénégal ne peut pas regarder vers d'autres pays qui ne lui arrivent même pas au coude sur le plan d'un certain nombre de règles démocratiques pour dire je vais m'inspirer d'un Tartampillon. Il faut arrêter ! Cela ne me paraît pas honorable pour notre pays et pour notre démocratie.
Wal fadjri : Avec l'annonce de la réunification de la grande famille libérale n'y a-t-il pas de risque pour les alliés d'être obligés de se fondre dans le Pdsl ?
Samba Diouldé THIAM : Les alliés ne sont pas des libéraux. S'ils se transforment en libéraux, ils cessent d'être des alliés et deviennent des militants du Pds. Et les alliés qui refusent de se transformer en libéraux oubien ils pensent qu'ils peuvent continuer avec le président et son parti, ils continuent ou le président pense qu'il ne peut plus continuer avec eux et l'alliance s'arrête. Je pense que la question est relativement claire. Les libéraux, c'est dans le Pds et les divisions dans le Pds c'est là qu'il faut remettre de l'ordre. (…) Mais c'est leur affaire de régler ce problème-là, ils n'ont pas besoin de moi ni pour réfléchir avec eux pour ce qu'ils ont à faire ni même pour participer à organiser ce qu'il y a lieu de faire. Mon parti est un allié, nous sommes à côté. Mais, si nous devons continuer avec eux l'aventure de l'alliance, il ne faudrait pas du tout qu'ils soient faibles. Mais faut-il encore une fois que le parti soit centré autour de la défense des intérêts du pays, que le Pds se mobilise et se structure pour construire le pays selon une vision. Cette vision peut plaire ou pas mais si c'est simplement pour régler leur problème de famille, leur petite cuisine de Pds, cela n'a aucun intérêt pour moi. Je ne suis pas au Pds, j'ai connu le président Abdoulaye Wade politiquement en 1978 quand le Parti africain pour l'indépendance (Pai) a pris contact avec lui pour la première fois. Ce n'est pas aujourd'hui que je connais Wade. Il est président depuis dix ans, je n'ai pas pensé devoir le rejoindre, ce n'est pas aujourd'hui que nous le ferons. Nous pouvons aller ensemble avec lui si nous nous reconnaissons dans ce qui se fait. Mais si nous cessons de nous reconnaître dans ce qui se fait, nous tirons la révérence. Si lui-même estime que nous sommes encombrants, il tire la révérence en nous disant : ‘partez’. Si nous avons suffisamment de signaux clairs d'ailleurs, nous n'attendrons pas qu'on nous dise de partir, nous partirons. Nous sommes dans cette disposition, nous sommes des alliés loyaux. Nous ne demandons aucune faveur. Ce qui nous importe, c'est de servir le Sénégal.
Wal fadjri : Sur beaucoup de questions, le Pds n'a pas la même vision que certains de ses alliés. C'est votre cas. Qu’est-ce qui, selon vous, explique cette mésentente ?
Samba Diouldé THIAM : Etre allié, c'est que chacun porte une réflexion sinon c'est appartenir au même parti. Or quand on appartient au même parti, on salue le général et on se met au garde-à-vous. Au Pds, quand le président Wade parle, ils embouchent tous la même trompette. Nous, nous sommes des alliés du président Wade, nous regardons les problèmes à travers notre expérience. Nous ne disons pas que nous détenons la vérité mais nous prétendons dire à Wade comment nous décryptons les signaux que les Sénégalais nous envoient. Nous sommes avec Wade pour servir les Sénégalais et non pour le servir lui. Et le propos que nous tenons est notre manière de servir les Sénégalais en faisant parvenir à Wade à travers notre position, ce que nous ressentons. Qu'il en tienne compte ou pas ! Tant qu'il nous laisse la liberté de dire notre sentiment, nous continuerons à avancer avec lui. Sauf si nous observons des pratiques au niveau de l'Etat ou du pays qui appellent que nous ne puissions plus du tout servir de caution. Parce que nous ne sommes pas une caution au président Wade. Nous pensons qu’il y a des choses bien faites comme il y a beaucoup d'erreurs et ces erreurs c'est probablement parce qu'il ne traite pas suffisamment avec ses alliés. Il doit mettre ces derniers dans une position qui leur permet de lui dire honnêtement ce qu'ils pensent dans l'intérêt du Sénégal. Parce que si tout le monde dit Amen, vous êtes le meilleur, c'est que quelque part on ne vous dit pas la vérité. Et il y a beaucoup de gens qui ne disent pas la vérité à Wade. Les élections du 22 mars sont arrivées parce qu'on n’a pas dit la vérité à Wade. Les manifestations qui sont arrivées avec les coupures de courant sont survenues parce qu'on lui a dit quelque chose qui n'était pas exact. Il y a des gens qui sont à des responsabilités qui n'ont pas fait ce qu'ils devraient faire pour le conforter. Wade ne peut pas être seul, indiquer la vision et en même temps s'occuper de l'intendance et de tous ce qu'il y a lieu de faire.
Wal fadjri : Il y a eu un réaménagement gouvernemental avec des arrivées comme celle d'Aminata Tall mais aussi le départ de Cheikh Tidiane Sy. Comment décryptez-vous ce mouvement ?
Samba Diouldé THIAM : J'ai lu dans la presse que le départ de M. Sy s'explique par des raisons de santé. Si tel est le cas, je lui souhaite de recouvrer la santé (...). L'arrivée d'Aminata Tall ainsi que d'autres personnes, tout cela j'en ai la même lecture que pour la composition du bureau de l'Assemblée nationale. Le président de la République est un élu et il a déjà posé un acte, celui de sa candidature pour 2012 qui nous paraissait d'ailleurs un peu prématurée. Mais il a certainement des indicateurs que je n'ai pas et il a dit qu'il est candidat pour 2012. C'est certainement pour une mise en ordre de son parti, de sa majorité qu'il a fait cette annonce-là. (…)
Sauf que d'aucuns établissent un lien entre le départ de Cheikh Tidiane Sy et Wal fadjri : l'arrivée probable d'Idrissa Seck au poste de vice-président ?
Samba Diouldé THIAM : Je ne vois pas de lien entre Cheikh Tidiane Sy et Idrissa Seck. Je ne sais pas si c'est la condition de son départ du ministère de l'Intérieur. Je suis à la fois loin de cette cuisine présidentielle et de celle du Pds. Maintenant, la Constitution a été modifiée pour mettre en place le poste de vice-présidence qui est devenu maintenant une loi dans notre pays. J'ai exprimé mon opposition forte à la mise en place de ce dispositif dans notre Constitution. J'en ai donné les raisons. J'ai considéré que nous avions un régime présidentiel et dans ce régime il y a un Premier ministre et un gouvernement. Donc, un vice-président, je ne sais à quoi il va servir. C'est un grand ambassadeur et un grand commis de l'Etat etc. Mais, un vice-président, si nous devons en avoir, il faut que notre Constitution dispose que le vice-président est élu en même temps que le président et qu'on supprime le poste de Premier ministre. Que le président gouverne sans intermédiaire. Et cette disposition là où elle existe (Etats-Unis, Afrique du Sud), elle vise à éviter que s'il y a une interruption du mandat présidentiel qu'on aille aux élections. Parce que le vice-président continue le mandat du président jusqu'à terme.
Wal fadjri : Justement par rapport à la candidature du Chef de l'Etat, il y a eu des critiques relatives à son âge avancé.
Samba Diouldé THIAM : J'exclus le problème de l'âge dans la mesure où la Constitution de notre pays n'en fait pas un interdit. Je pense que le débat sur l'âge, c'est une question de sensibilité. Mais légalement, son âge ne s'oppose pas à ce qu'il fasse acte de sa candidature. Maintenant le président Wade ne nous a pas fait part de sa candidature en tant qu'allié. Nous avons été informé dans la presse qu'il fait acte de candidature. Eh bien, nous nous contentons de cette information jusqu'à ce que nous soyons saisis. Ou jusqu'à ce que nous apprécions nous-mêmes, le moment venu, de dire il faut soutenir celui-ci ou celui-là. En attendant nous sommes dans la majorité et continuons d'y être comme nous le sommes. Avec la personnalité, la sensibilité et la liberté de ton de notre parti. Un ton qui fait aussi dans la mesure et dans la courtoisie. Nous gardons tout à fait cette liberté-là, nous n'avons jamais été rappelé à l'ordre par notre partenaire. Parce que il faut rendre à César ce qui appartient à César, il nous prend comme nous sommes et à partir de ce moment nous continuons encore à être ses alliés et le moment venu nous dirons ce que nous avons à dire. Je le dis, l'opinion a été un peu secouée par l'annonce de cette candidature à deux ans et demi, pratiquement à mi-mandat. Je pense que cela aurait pu attendre mais le président sait mieux que moi les éléments dont il dispose.
Wal fadjri : Bien avant le réaménagement du gouvernement, il y a eu le départ de Cheikh Tidiane Gadio qui a aussi surpris beaucoup d'observateurs. Etait-ce votre cas ?
Samba Diouldé THIAM : Je voudrais dire d'abord que Cheikh Tidiane Gadio a duré dans le gouvernement est c'est quasiment une exception. C'est même l'exception dans le magistère Wade. C'est important de noter que pendant toute cette période, il a bénéficié de la confiance du président de la République. Mais comme on dit, tous les compagnonnages ont un terme. Que ce soit dans le ménage ou dans d'autres circonstances, il y a toujours un moment où un compagnonnage se termine. En politique, les compagnonnages se terminent à l'initiative de l'une ou de l'autre partie. Le président de la République choisit les gens et personne ne lui demande les raisons pour lesquelles il le fait, quand il les démet. On peut toujours supputer les raisons pour lesquelles il l'a fait mais je ne pense pas que ce soit un exercice de très grand intérêt. Il a ses raisons. En cette matière, il n'a de compte à rendre à personne. Je constate qu'il s'est séparé de Gadio. Pendant le temps de l'attelage Wade/Gadio, les Sénégalais se sont félicités du travail qui a été accompli dans le domaine diplomatique pour notre pays. Je m'en félicite également et je pense que peu importe les personnes qui sont en situation pour servir le Sénégal, l'essentiel est qu'ils fasse des résultats pour notre pays. Et chaque Sénégalais a la même dignité qu'un autre pour servir le pays et s'il a été choisi par le président de la République c'est le résultat qu'il faut juger. Et apparemment les résultats ne semblent pas avoir plaidé contre Cheikh Tidiane Gadio. Si tel n’était pas le cas, le président ne l'aurait pas gardé si longtemps. Je n'ai pas noté aussi jusqu'au moment de son départ que les Sénégalais aient eu à réagir assez vivement contre l'exercice de son mandat de ministre des Affaires étrangères.
Wal fadjri : Autre sujet d'actualité, l'affaire de la tentative de corruption d'Alex Segura…
Samba Diouldé THIAM : C'est extrêmement grave et les plus hautes autorités doivent tirer au clair cette affaire. Le Fmi et les institutions internationales aussi. Il est inadmissible que des personnes grassement payées puissent être là à recevoir des cadeaux pour fermer les yeux sur l'exercice de leurs missions. Il est inacceptable que le Sénégal agisse de cette manière et il faut que nos autorités politiques disent au peuple sénégalais que nous avons commis une faute grave et impardonnable, nous battons notre coulpe et arrêtons-là les choses. Parce que si le silence est gardé autour de cette affaire, c'est contre la notoriété du Sénégal, du Fmi et de toutes les institutions internationales. Si cela s’est réalisé, il faut en tirer toutes les conséquences possibles et imaginables et que les institutions internationales veillent sur l'intégrité de ceux qu'elles envoient en mission dans les différents pays. Que les pays qui reçoivent ces personnes aussi entretiennent des relations transparentes avec ces institutions à travers leurs représentants. Qu'on ne soudoie pas les représentants des institutions internationales pour faire de faux rapports sur l'état de nos Etats etc. Parce qu'au total, ce sont les Sénégalais qui vont payer les pots cassés.
source wal fadjri