RFI: Au premier tour, vous avez obtenu environ 19 % des suffrages, il vous faut donc trouver 31 points pour l’emporter au second tour. Est-ce que cela vous semble possible ?
Soumaïla Cissé: Vous savez, le deuxième tour, c’est une nouvelle élection. Nous repartons tous à zéro. Il ne s’agit pas d’une élection pour compléter les voix de l’un ou de l’autre, à 51. Il s’agit de repartir à zéro. Et puis, nous avons quand même des exemples. J’ai vu en Guinée le candidat arriver en tête avec 43 %, et celui qui est président aujourd’hui avait seulement 18 %. Cela veut dire que les alliances peuvent être complètement changées et qu’en 15 jours, les gens peuvent se dire « Tiens, est-ce que j’avais vraiment fait le bon choix ? Est-ce qu’on ne m’a pas intoxiqué ? » Comment se fait-il que tous les diplomates et tous les journalistes aient été intoxiqués, en croyant fermement que cette élection se jouerait au premier tour ? Ça veut dire donc qu’il y a beaucoup d’intoxication, en dessous des résultats qui ont été affichés. Aujourd’hui, ce qui est important, c’est d’avoir un deuxième tour propre, aussi propre que possible.
400 000 bulletins nuls ont été constatés lors du premier tour. C’est énorme pour 3 500 000 votants. Vous aviez immédiatement évoqué la possibilité qu’il y ait eu des fraudes. Est-ce que vous avez plus d’éléments aujourd’hui ?
J’ai beaucoup d’éléments. Je vais vous donner un exemple. Le premier août, nous avons saisi une urne, entre Sévaré et Mopti, l’urne numéro 18, du bureau de vote numéro 3. Cette urne se dirigeait tranquillement vers le cercle de Mopti pour être posée à côté des autres cadavres d’urnes. Le fait que les bulletins aient circulé dans la ville de Bamako avant le vote est un élément connu, avéré. On peut toujours se poser la question : « Est-ce que c’est suffisamment significatif pour inverser ceci, cela ? » Aucune fraude n’est tolérable, il n’y a pas de niveau de tolérance dans une élection présidentielle.
Mais tout de même, dans le cadre d’une élection, il est important de savoir si ces fraudes ont pu changer le résultat du scrutin. Est-ce que vous pensez que les fraudes ont atteint un niveau tellement significatif, que le résultat a pu être biaisé ?
Je pense qu’il y a eu une fraude organisée, quasiment scientifique. Vous savez, quand dans une ville comme Bamako, plus de 2000 bureaux de vote, vous arrivez à gagner dans tous les bureaux de vote avec quasiment le même écart, statistiquement on se pose des questions. Quand dans une ville comme Bamako, vous n’avez pas de députés, pas de maire, pas d’élus, et brusquement, par génération spontanée, vous arrivez à 60-70 % des voix dans toutes les communes, même si votre référence c’est de Gaulle, on se pose quand même des questions. Nous avons le sentiment qu’il y avait quelque chose de très bien organisé et nous en avons tous pâti, tous les candidats en ont pâti.
Vous dites « une fraude quasiment scientifique » ?
Oui, quasiment scientifique, très bien organisée, que nous essayons de démanteler. Et nous avons fait des propositions, pour que les bulletins issus du vote soient des vrais bulletins.
Qu’est-ce qui vous différencie de votre adversaire, Ibrahim Boubacar Keïta? Qu’est-ce qui, selon vous, va pousser les Maliens à voter pour vous ?
Ce moment, là, aujourd’hui, c’est un moment d’abord de l’économie. Nous avons connu une crise assez importante, nous avons réglé les problèmes militaires d’une façon solidaire avec les différents partenaires. Aujourd’hui, ce dont le Mali a besoin, c’est quelqu’un qui puisse relancer très vite l’économie du pays. Et sur ça, je pense que j’ai une longueur d’avance sur mon adversaire. La deuxième chose, c’est que je pense être beaucoup plus moderne. C’est vrai qu’on a toujours besoin de grandes valeurs, que mon concurrent essaye de mettre en avant, mais ces valeurs sont tellement ancrées dans chacun des Maliens, que les ressasser n'est que de la redite.
Vous avez le sentiment que votre adversaire a essayé de jouer du discours religieux ?
Mais il a fait plus que ça ! Il faut le voir, au départ, il ne disait pas un mot sans sortir quelque chose de religieux. Nous nous connaissons, je ne vais pas l’attaquer sur ce domaine-là. C’est un créneau pour se faire élire, mais c’est dangereux. Nous sommes tous musulmans dans ce pays, nous avons tous vu ce qui s’est passé au Mali, sous le prétexte de la religion. L’intégrisme nous a mis dans une situation dramatique. Il ne faut pas tirer sur ces cordes-là, ce sont des cordes extrêmement dangereuses. Et vraiment, je mets en garde de trop tirer sur ça.
En cas de défaite, quels sont vos projets ?
Je crois que, d’abord, il faut que la défaite soit une défaite réelle. C’est pour ça que j’exige que les élections soient transparentes. Je ne souhaite pas un « hold-up », comme ça a failli se faire il y a quelques jours. Je me suis engagé en politique, je continuerai à m’engager en politique. Les élections, ça ne doit pas être forcément l’aboutissement. Une fois élu, il faut continuer à travailler. Il faut continuer de défendre vos convictions et je continuerais à défendre mes convictions jusqu’au bout. Il ne s’agira pas de dire « Bon, maintenant j’ai échoué, je vais aller planter des choux ailleurs et c’est terminé ». Non, non, non, je continuerai le combat politique, ça je peux vous l’assurer.
Dépêche RFI
Soumaïla Cissé: Vous savez, le deuxième tour, c’est une nouvelle élection. Nous repartons tous à zéro. Il ne s’agit pas d’une élection pour compléter les voix de l’un ou de l’autre, à 51. Il s’agit de repartir à zéro. Et puis, nous avons quand même des exemples. J’ai vu en Guinée le candidat arriver en tête avec 43 %, et celui qui est président aujourd’hui avait seulement 18 %. Cela veut dire que les alliances peuvent être complètement changées et qu’en 15 jours, les gens peuvent se dire « Tiens, est-ce que j’avais vraiment fait le bon choix ? Est-ce qu’on ne m’a pas intoxiqué ? » Comment se fait-il que tous les diplomates et tous les journalistes aient été intoxiqués, en croyant fermement que cette élection se jouerait au premier tour ? Ça veut dire donc qu’il y a beaucoup d’intoxication, en dessous des résultats qui ont été affichés. Aujourd’hui, ce qui est important, c’est d’avoir un deuxième tour propre, aussi propre que possible.
400 000 bulletins nuls ont été constatés lors du premier tour. C’est énorme pour 3 500 000 votants. Vous aviez immédiatement évoqué la possibilité qu’il y ait eu des fraudes. Est-ce que vous avez plus d’éléments aujourd’hui ?
J’ai beaucoup d’éléments. Je vais vous donner un exemple. Le premier août, nous avons saisi une urne, entre Sévaré et Mopti, l’urne numéro 18, du bureau de vote numéro 3. Cette urne se dirigeait tranquillement vers le cercle de Mopti pour être posée à côté des autres cadavres d’urnes. Le fait que les bulletins aient circulé dans la ville de Bamako avant le vote est un élément connu, avéré. On peut toujours se poser la question : « Est-ce que c’est suffisamment significatif pour inverser ceci, cela ? » Aucune fraude n’est tolérable, il n’y a pas de niveau de tolérance dans une élection présidentielle.
Mais tout de même, dans le cadre d’une élection, il est important de savoir si ces fraudes ont pu changer le résultat du scrutin. Est-ce que vous pensez que les fraudes ont atteint un niveau tellement significatif, que le résultat a pu être biaisé ?
Je pense qu’il y a eu une fraude organisée, quasiment scientifique. Vous savez, quand dans une ville comme Bamako, plus de 2000 bureaux de vote, vous arrivez à gagner dans tous les bureaux de vote avec quasiment le même écart, statistiquement on se pose des questions. Quand dans une ville comme Bamako, vous n’avez pas de députés, pas de maire, pas d’élus, et brusquement, par génération spontanée, vous arrivez à 60-70 % des voix dans toutes les communes, même si votre référence c’est de Gaulle, on se pose quand même des questions. Nous avons le sentiment qu’il y avait quelque chose de très bien organisé et nous en avons tous pâti, tous les candidats en ont pâti.
Vous dites « une fraude quasiment scientifique » ?
Oui, quasiment scientifique, très bien organisée, que nous essayons de démanteler. Et nous avons fait des propositions, pour que les bulletins issus du vote soient des vrais bulletins.
Qu’est-ce qui vous différencie de votre adversaire, Ibrahim Boubacar Keïta? Qu’est-ce qui, selon vous, va pousser les Maliens à voter pour vous ?
Ce moment, là, aujourd’hui, c’est un moment d’abord de l’économie. Nous avons connu une crise assez importante, nous avons réglé les problèmes militaires d’une façon solidaire avec les différents partenaires. Aujourd’hui, ce dont le Mali a besoin, c’est quelqu’un qui puisse relancer très vite l’économie du pays. Et sur ça, je pense que j’ai une longueur d’avance sur mon adversaire. La deuxième chose, c’est que je pense être beaucoup plus moderne. C’est vrai qu’on a toujours besoin de grandes valeurs, que mon concurrent essaye de mettre en avant, mais ces valeurs sont tellement ancrées dans chacun des Maliens, que les ressasser n'est que de la redite.
Vous avez le sentiment que votre adversaire a essayé de jouer du discours religieux ?
Mais il a fait plus que ça ! Il faut le voir, au départ, il ne disait pas un mot sans sortir quelque chose de religieux. Nous nous connaissons, je ne vais pas l’attaquer sur ce domaine-là. C’est un créneau pour se faire élire, mais c’est dangereux. Nous sommes tous musulmans dans ce pays, nous avons tous vu ce qui s’est passé au Mali, sous le prétexte de la religion. L’intégrisme nous a mis dans une situation dramatique. Il ne faut pas tirer sur ces cordes-là, ce sont des cordes extrêmement dangereuses. Et vraiment, je mets en garde de trop tirer sur ça.
En cas de défaite, quels sont vos projets ?
Je crois que, d’abord, il faut que la défaite soit une défaite réelle. C’est pour ça que j’exige que les élections soient transparentes. Je ne souhaite pas un « hold-up », comme ça a failli se faire il y a quelques jours. Je me suis engagé en politique, je continuerai à m’engager en politique. Les élections, ça ne doit pas être forcément l’aboutissement. Une fois élu, il faut continuer à travailler. Il faut continuer de défendre vos convictions et je continuerais à défendre mes convictions jusqu’au bout. Il ne s’agira pas de dire « Bon, maintenant j’ai échoué, je vais aller planter des choux ailleurs et c’est terminé ». Non, non, non, je continuerai le combat politique, ça je peux vous l’assurer.
Dépêche RFI