Wal Fadjri : On note de plus en plus d’entreprises qui investissent le secteur du transfert d’argent. Cela ne constitue-t-il pas une menace pour la Poste ?
Pape Momar DIOP : Le transfert d’argent mandat, courriers et autres fait partie de nos compétences traditionnelles. D’où notre inquiétude, avec la floraison de sociétés rivales parce que nous constatons que chacun fait du transfert d’argent. Toutes les entreprises s’activent maintenant dans ce secteur. Même dans les garages de transport, les gens font du transfert d’argent. En effet, on donne de l’argent à des transporteurs se rendant dans les pays limitrophes. Même au niveau continental, nous avons constaté cette concurrence informelle. Nous reconnaissons que nous avons un régime libéral, mais cela ne doit pas faire oublier que la Poste a une mission de service public, des acquis et des emplois à préserver.
Et dans le secteur formel ?
Dans le secteur formel aussi, la concurrence est très forte. Trop de sociétés font dans le transfert d’argent. Même des entreprises qui n’avaient pas vocation à faire du transfert d’argent, s’y activent. C’est le cas de la société de téléphonie, Sonatel, qui fait du transfert d’argent avec le téléphone.
Quelles en sont les conséquences pour votre entreprise ?
Nous sommes des travailleurs et nous avons des acquis à pérenniser. Nous avons des emplois à sauvegarder et nous ne voulons pas qu’on nous envoie un plan social. Pour un syndicaliste, c’est très difficile de voir ses collègues partir par un plan social ou par un départ négocié ou quelque chose de ce genre. C’est pourquoi nous nous battons pour l’avenir de notre entreprise. Nous voulons pérenniser nos emplois. Et pour le faire, il faut que l’entreprise fonctionne. C’est la raison pour laquelle nous nous battons contre cette concurrence déloyale. Et nous demandons à l’Etat de voter des lois pour protéger la Poste contre cette concurrence déloyale formelle et informelle qui menace la survie de notre outil de travail.
Quel est le manque à gagner pour votre entreprise ?
Nous n’avons pas les chiffres, mais cela a des répercussions sur notre chiffre d’affaires. Par exemple, nous avons des acquis qui sont liés au chiffre d’affaires. Ce sont les indemnités de croissance et de motivation. Cela a été inscrit dans les accords, mais depuis que la concurrence s’est fortement installée, nous n’avons plus perçu nos indemnités. Parce que le chiffre d’affaires de la Poste s’est fortement dégradé à cause de cette concurrence. C’est pourquoi nous demandons l’assainissement du secteur des transferts d’argent afin d’assurer la sécurité des opérations et de protéger la Poste contre toute concurrence déloyale.
Dans un autre domaine, on a vu récemment que la Poste n’était plus en mesure de fournir les timbres fiscaux…
Cela n’était pas de notre faute. La Poste a une mission de service public sur l’étendue du territoire national. Et je vous renseigne sur cette affaire qu’elle achète les timbres auprès de la Direction des impôts et domaines et les revend. Le système se passe ainsi : La Poste achète des timbres, les vend et en achète à nouveau. Le temps de payer et qu’on vous livre les timbres pour encore les distribuer sur l’ensemble du pays, cela prend du temps. Cela crée aussi des ruptures qui sont inévitables pour une entreprise nationale qui a, en plus, une vocation sociale. Etant donné que la Poste fait du service public, on doit assouplir le système d’achat des timbres pour nous permettre de vendre correctement. Car il est évident qu’elle ne peut pas fonctionner comme une boutique, c’est-à-dire acheter, vendre et aussitôt acheter à nouveau. Donc, il faut un système beaucoup plus souple pour éviter à l’avenir les ruptures. D’autant que les Impôts et domaines ne peuvent pas vendre eux-mêmes les timbres fiscaux. Ils ne peuvent pas avoir partout au Sénégal des points de vente. Et les Sénégalais ont droit aux timbres, alors que les Impôts et domaines ne peuvent pas assurer cette mission de service public.
Même dans la vente des timbres, on note de la concurrence ?
Le timbre vendu à 100 francs à la Poste est revendu à 125 francs par des petits revendeurs qui profitent de la rupture des timbres. Et pour éviter cela, il faudrait impérativement assouplir le système de vente des timbres.
Où en êtes-vous avec le projet de banque postale ?
Cette banque postale est un projet en gestation. Actuellement, il y a Poste finances mais, depuis deux ans, nous avons remarqué que l’Etat se prépare à transformer de Poste finances en une banque. Nous sommes d’accord sur le principe parce que le monde évolue. En plus, le projet de bancarisation des salaires des fonctionnaires qui ont des salaires supérieurs à 100 mille francs peut nous être profitable. Cependant, notre souci majeur, c’est que l’Etat veut mettre en place une banque postale sans associer les travailleurs. Et nous voulons que l’Etat nous associe à ce projet.
Quels sont vos préalables ?
Nous voulons que la Poste soit majoritaire, avec au moins 51 % des actions. Ensuite, nous exigeons que les travailleurs soient actionnaires à hauteur de 20 % et enfin que le reste soit constitué d’une participation des Sénégalais pour que les bénéfices restent au Sénégal. Par ailleurs, nous avons un personnel de plus de deux cents agents au niveau de Poste finances, ce qui veut dire que tout ce monde ne sera pas employé dans cette banque. Qu’est-ce que l’Etat va faire du surplus de personnel ? S’ils seront reversés à la maison mère, cela va augmenter les charges de la Poste dont les finances sont mises à rude épreuve par la concurrence dans le domaine du transfert d’argent. C’est pourquoi les travailleurs demandent à être associés au travail technique qui est en train d’être fait.
Avec cette banque, ne craignez-vous une privatisation de la Poste ?
La Poste a une mission de service public. Beaucoup de bureaux ne sont pas rentables et, parfois, les recettes ne permettent pas de payer le receveur. C’est parce que l’Etat a l’obligation de donner aux Sénégalais la possibilité d’envoyer et de recevoir du courrier que beaucoup de bureaux sont ouverts un peu partout au Sénégal. C’est pourquoi, elle ne sera pas privatisée.
Propos recueillis par Charles Gaïky DIENE
Source Walfadjri
Pape Momar DIOP : Le transfert d’argent mandat, courriers et autres fait partie de nos compétences traditionnelles. D’où notre inquiétude, avec la floraison de sociétés rivales parce que nous constatons que chacun fait du transfert d’argent. Toutes les entreprises s’activent maintenant dans ce secteur. Même dans les garages de transport, les gens font du transfert d’argent. En effet, on donne de l’argent à des transporteurs se rendant dans les pays limitrophes. Même au niveau continental, nous avons constaté cette concurrence informelle. Nous reconnaissons que nous avons un régime libéral, mais cela ne doit pas faire oublier que la Poste a une mission de service public, des acquis et des emplois à préserver.
Et dans le secteur formel ?
Dans le secteur formel aussi, la concurrence est très forte. Trop de sociétés font dans le transfert d’argent. Même des entreprises qui n’avaient pas vocation à faire du transfert d’argent, s’y activent. C’est le cas de la société de téléphonie, Sonatel, qui fait du transfert d’argent avec le téléphone.
Quelles en sont les conséquences pour votre entreprise ?
Nous sommes des travailleurs et nous avons des acquis à pérenniser. Nous avons des emplois à sauvegarder et nous ne voulons pas qu’on nous envoie un plan social. Pour un syndicaliste, c’est très difficile de voir ses collègues partir par un plan social ou par un départ négocié ou quelque chose de ce genre. C’est pourquoi nous nous battons pour l’avenir de notre entreprise. Nous voulons pérenniser nos emplois. Et pour le faire, il faut que l’entreprise fonctionne. C’est la raison pour laquelle nous nous battons contre cette concurrence déloyale. Et nous demandons à l’Etat de voter des lois pour protéger la Poste contre cette concurrence déloyale formelle et informelle qui menace la survie de notre outil de travail.
Quel est le manque à gagner pour votre entreprise ?
Nous n’avons pas les chiffres, mais cela a des répercussions sur notre chiffre d’affaires. Par exemple, nous avons des acquis qui sont liés au chiffre d’affaires. Ce sont les indemnités de croissance et de motivation. Cela a été inscrit dans les accords, mais depuis que la concurrence s’est fortement installée, nous n’avons plus perçu nos indemnités. Parce que le chiffre d’affaires de la Poste s’est fortement dégradé à cause de cette concurrence. C’est pourquoi nous demandons l’assainissement du secteur des transferts d’argent afin d’assurer la sécurité des opérations et de protéger la Poste contre toute concurrence déloyale.
Dans un autre domaine, on a vu récemment que la Poste n’était plus en mesure de fournir les timbres fiscaux…
Cela n’était pas de notre faute. La Poste a une mission de service public sur l’étendue du territoire national. Et je vous renseigne sur cette affaire qu’elle achète les timbres auprès de la Direction des impôts et domaines et les revend. Le système se passe ainsi : La Poste achète des timbres, les vend et en achète à nouveau. Le temps de payer et qu’on vous livre les timbres pour encore les distribuer sur l’ensemble du pays, cela prend du temps. Cela crée aussi des ruptures qui sont inévitables pour une entreprise nationale qui a, en plus, une vocation sociale. Etant donné que la Poste fait du service public, on doit assouplir le système d’achat des timbres pour nous permettre de vendre correctement. Car il est évident qu’elle ne peut pas fonctionner comme une boutique, c’est-à-dire acheter, vendre et aussitôt acheter à nouveau. Donc, il faut un système beaucoup plus souple pour éviter à l’avenir les ruptures. D’autant que les Impôts et domaines ne peuvent pas vendre eux-mêmes les timbres fiscaux. Ils ne peuvent pas avoir partout au Sénégal des points de vente. Et les Sénégalais ont droit aux timbres, alors que les Impôts et domaines ne peuvent pas assurer cette mission de service public.
Même dans la vente des timbres, on note de la concurrence ?
Le timbre vendu à 100 francs à la Poste est revendu à 125 francs par des petits revendeurs qui profitent de la rupture des timbres. Et pour éviter cela, il faudrait impérativement assouplir le système de vente des timbres.
Où en êtes-vous avec le projet de banque postale ?
Cette banque postale est un projet en gestation. Actuellement, il y a Poste finances mais, depuis deux ans, nous avons remarqué que l’Etat se prépare à transformer de Poste finances en une banque. Nous sommes d’accord sur le principe parce que le monde évolue. En plus, le projet de bancarisation des salaires des fonctionnaires qui ont des salaires supérieurs à 100 mille francs peut nous être profitable. Cependant, notre souci majeur, c’est que l’Etat veut mettre en place une banque postale sans associer les travailleurs. Et nous voulons que l’Etat nous associe à ce projet.
Quels sont vos préalables ?
Nous voulons que la Poste soit majoritaire, avec au moins 51 % des actions. Ensuite, nous exigeons que les travailleurs soient actionnaires à hauteur de 20 % et enfin que le reste soit constitué d’une participation des Sénégalais pour que les bénéfices restent au Sénégal. Par ailleurs, nous avons un personnel de plus de deux cents agents au niveau de Poste finances, ce qui veut dire que tout ce monde ne sera pas employé dans cette banque. Qu’est-ce que l’Etat va faire du surplus de personnel ? S’ils seront reversés à la maison mère, cela va augmenter les charges de la Poste dont les finances sont mises à rude épreuve par la concurrence dans le domaine du transfert d’argent. C’est pourquoi les travailleurs demandent à être associés au travail technique qui est en train d’être fait.
Avec cette banque, ne craignez-vous une privatisation de la Poste ?
La Poste a une mission de service public. Beaucoup de bureaux ne sont pas rentables et, parfois, les recettes ne permettent pas de payer le receveur. C’est parce que l’Etat a l’obligation de donner aux Sénégalais la possibilité d’envoyer et de recevoir du courrier que beaucoup de bureaux sont ouverts un peu partout au Sénégal. C’est pourquoi, elle ne sera pas privatisée.
Propos recueillis par Charles Gaïky DIENE
Source Walfadjri