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Transport des noix d'acajou de Ziguinchor à Dakar : Les opérateurs locaux râlent contre leur obligation faite d’emprunter la voie maritime

Cette année encore, le lancement de la campagne de commercialisation des noix d’anacarde en Casamance, a été présidé par la ministre du Commerce, Mme Aminata Assome Diatta. C’était lors d’un Conseil régional de développement qui s’est tenu vendredi dernier à Ziguinchor. Mais, une fois de plus, les opérateurs économiques de la région sont sortis de cette rencontre avec de l’amertume. Et pour cause, le principal problème qui gangrène leurs activités, n’a pas été réglé : il s’agit du transport des noix de Ziguinchor à Dakar.


Rédigé par leral.net le Vendredi 20 Mai 2022 à 10:32 | | 0 commentaire(s)|

En fait, depuis plusieurs années maintenant, on leur impose de faire transporter ces noix par la voie maritime pendant que leurs homologues des autres régions de la Casamance naturelle, transportent leurs stocks par voie terrestre. Pour rappel, cette décision de faire évacuer les noix par cette voie leur a été imposée pour, dit-on, empêcher l’exportation de celles-ci par le port de Banjul, comme ils le faisaient auparavant.

Mais le hic, selon eux, c’est que les autres opérateurs des régions de Sédhiou et de Kolda, eux, transportent leurs noix par la voie terrestre jusqu’à Dakar. Cela leur permet de gagner du temps et de faire des économies.

En fait, aujourd’hui, seule la compagnie maritime COSAMA est autorisée à évacuer les noix alors qu’elle ne dispose présentement que d’un seul navire opérationnel, ce qui fait perdre énormément de temps aux opérateurs. Conséquence de cette lenteur dans l’évacuation des noix, la campagne de commercialisation qui, d’habitude, s’achève à la fin du mois de juillet, se prolonge jusqu’à décembre, au grand dam des opérateurs qui doivent continuer à louer des magasins pour conserver leurs noix. L’autre problème, c’est que les tarifs par le bateau sont très élevés comparés à ceux appliqués par les camionneurs.

Cette situation provoquée par l’imposition qui leur est faite de recourir à la voie maritime, continue de susciter la colère des opérateurs de la région. Biram Ndiaye, le responsable régional de l’Unacois/Jappo, pense que COSAMA bénéficie de complicités d’autant que cette exclusivité ne repose sur aucune loi ni arrêté et moins encore un décret présidentiel.

‘’Cela date de trois ans. Au départ, le combat était noble parce qu’il était question d’arrêter l’exportation de la noix d’acajou qui vient de Ziguinchor par la Gambie. Cela était une lutte noble dans la mesure où cela impactait sur le produit intérieur brut de notre pays. C’est comme ça que nous nous sommes engagés pour interdire l’exportation de la noix à partir de la Gambie. Mais dans la mesure où ces opérations qui se faisaient à partir de la Gambie, c’est devenu une vieille histoire, je ne vois pas pourquoi on maintient cette interdiction.

Maintenant que cette situation est dépassée, je ne vois pas pourquoi on continue cette interdiction. D’ailleurs, ce n’est pas une loi ni un arrêté ministériel ni un décret. Donc on a interdit aux transporteurs de prendre la noix de Ziguinchor à Dakar par camions alors que, parallèlement, les régions de Sédhiou et de Kolda ont la possibilité de le faire. Donc, on demande pourquoi vraiment cette interdiction touche uniquement la région de Ziguinchor
’’, peste Biram Ndiaye.

Pour le responsable de l’Unacois/Jappo, grondant comme un volcan en éruption, cette interdiction plombe leurs activités et entraîne un manque à gagner énorme pour les opérateurs

‘’Non seulement, on interdit la noix par voie terrestre mais encore, on ne permet pas aux opérateurs économiques de trouver un navire, alors qu’il y a la possibilité de trouver un navire qui va faire la liaison entre Dakar et Ziguinchor. Ça ne s’explique pas.

Des tentatives ont été menées mais à chaque fois, arrivés au niveau de l’ANAM, on nous dit qu’il faut un bateau battant pavillon Sénégal ou quelques fois, il y a des gens qui vont jusqu’à dire que le transport sur cette brèche-là, est exclusivement réservé à COSAMA, ce qui n’est pas vrai, ce qui est faux. Peut-être que si on parlait de transport de personnes, là on peut dire qu’il faut une société nationale pour des raisons de sécurité, parce que la vie humaine est très sacrée.

Mais le transport maritime est libre, c’est des chartes que le Sénégal a signées avec la CEDEAO, concernant la libre circulation des personnes et des services. On ne peut pas comprendre que cette interdiction frappe uniquement les transporteurs de Ziguinchor, alors qu’ils ont leurs licences comme COSAMA a sa licence. COSAMA fait son travail alors que les transporteurs ne peuvent pas faire le leur.

Cette situation, on l’a décriée n fois, on ne peut pas transporter par voie terrestre, on ne nous autorise pas à amener un navire, ça c’est un manque à gagner énorme que les opérateurs économiques subissent. Un exemple : l’année dernière, on avait 82 000 tonnes de noix qu’il fallait amener à Dakar mais avec cette interdiction, pratiquement jusqu’au mois de décembre, COSAMA ne parvenait pas à évacuer ce produit, alors que ce sont des opérations qui pouvaient se faire en trois mois, au moment même où les opérateurs, par le fait de COSAMA, sont en train de louer des magasins qu’ils pouvaient libérer quatre ou cinq mois avant.

Deuxième conséquence, les opérateurs ont emprunté de l’argent à la banque. Tant que le produit n’a pas quitté le Sénégal pour aller à l’extérieur, que ce soit à Hong-Kong, en Inde ou en Chine, le partenaire qui est à l’aval, ne paie pas. Il y a aussi un rythme de livraison, signé entre les opérateurs nationaux et les partenaires extérieurs. Là aussi, si le calendrier n’est pas respecté, il y a des pénalités qui sont appliqués sur nous. Et il y a la banque qui est là, qui attend, si tu ne paies pas au moment convenu, il y a des pénalités
’’, martèle-t-il.

Aujourd’hui, la question que tous les observateurs se posent, c’est celle de savoir comment est-ce que les gens se sont débrouillés pour créer cette interdiction qui n’émane pas des autorités étatiques ?

D’ailleurs, comment peut-on interdire à des privés de surcroît sénégalais, de choisir, eux-mêmes, leur moyen de transport ? Dans les autres pays de la sous-région, comme la Guinée-Bissau où le gouvernement exige que toutes les exportations des noix d’acajou se fassent à partir du port de Bissau, il n’est fait obligation à personne de faire passer les noix par voie fluviale jusqu’à Bissau.

‘’Ce qui est bizarre, nous pensons qu’il y a une complicité entre l’Exécutif régional et COSAMA. S’il y a des non-dits ou des choses qu’ils nous cachent, ils n’ont qu’à nous le dire ! », tonne encore Biram Ndiaye, le responsable régional de l’Unacois-Jappo.








Le Témoin