Une petite foule s'est rassemblée mardi sous les fenêtres du palais de justice de Tunis pour soutenir une femme de 28 ans accusée d'atteintes aux bonnes mœurs après avoir été violée par deux policiers, dans la nuit du 3 au 4 septembre dernier. A l'appel lancé sur les réseaux sociaux par des associations de défense des droits de l'homme et de simples citoyens, 500 manifestants, dont des députés du parti Ettakatol, membre de la coalition au pouvoir, ont donné de la voix. Les pancartes rivalisaient d'audace: «En niqab, voilée, maillot ou bikini, rangez vos zizis!», proclamait celle d'Asma, 25 ans, étudiante. Plus grave, le carton de Linda s'indignait: «Tunisie l'amour est un crime, le viol est un art.»«On a fait la révolution pour que la Tunisie aille mieux, explique la jeune femme de 27 ans, elle aussi étudiante. Mais là je suis déçue.» Les slogans, eux, visaient l'institution judiciaire «qui n'est pas indépendante» ainsi que les ministres du gouvernement. Le célèbre «Dégage!» a, une fois de plus, été scandé.
Coiffée d'un foulard noir et portant des lunettes de soleil, la jeune femme est arrivée peu avant 9 heures au palais de justice pour y être entendue par un juge d'instruction. «Le monde entier me soutient, je demande votre soutien», a-t-elle déclaré à l'AFP. L'audience, à en croire l'une de ses avocates, Radhia Nasraoui, n'en fut pas moins douloureuse. «Elle pleurait, ne supportait pas que nous évoquions les mots du porte-parole du ministère de l'Intérieur qui a souligné la position “immorale”, dans laquelle elle aurait été trouvée. Pour elle, c'était comme s'il remuait le couteau dans la plaie. Elle l'a dit d'une telle manière que je n'ai pas pu me retenir et moi aussi j'ai pleuré», poursuit l'avocate, qui a pourtant défendu de nombreuses victimes de tortures sous Ben Ali.
Preuves médicales à l'appui
Au terme de trois heures et demie d'audience, la jeune femme est repartie avec ses angoisses sans que le juge d'instruction, qui a décidé d'ouvrir une enquête contre elle et son compagnon, se soit prononcé sur le fond du dossier. L'affaire n'aurait peut-être pas suscité l'indignation des associations de défense des droits de l'homme, de la société civile et de citoyens tunisiens, si elle s'était limitée à une simple accusation pour flirt nocturne. Mais ceux qui ont déclaré l'avoir trouvée en compagnie de son ami dans une position «immorale», selon le porte-parole du ministère de l'Intérieur, ne sont autres que ses présumés bourreaux, des policiers.
La nuit des faits, près de Tunis, trois agents de police, en civil mais en service, interpellent le couple dans sa voiture à l'arrêt. Alors que l'un d'eux éloigne le jeune homme, les deux autres tentent dans un premier temps d'extorquer de l'argent à la jeune femme avant de la violer, l'un après l'autre, dans le véhicule de police.
En portant plainte, preuves médicales à l'appui, la victime a permis que soient arrêtés les policiers aujourd'hui sous le coup d'une instruction. Mais elle a aussi osé briser le tabou régnant autour du viol dans un pays où l'opprobre peut s'abattre sur les victimes d'abus sexuels. Elle est même allée plus loin en racontant son histoire aux médias, sous couvert d'anonymat, se disant dévastée, pensant au suicide, accablée par le viol et l'accusation infondée qui s'en est suivie.
Par Thibaut Cavaillès
Coiffée d'un foulard noir et portant des lunettes de soleil, la jeune femme est arrivée peu avant 9 heures au palais de justice pour y être entendue par un juge d'instruction. «Le monde entier me soutient, je demande votre soutien», a-t-elle déclaré à l'AFP. L'audience, à en croire l'une de ses avocates, Radhia Nasraoui, n'en fut pas moins douloureuse. «Elle pleurait, ne supportait pas que nous évoquions les mots du porte-parole du ministère de l'Intérieur qui a souligné la position “immorale”, dans laquelle elle aurait été trouvée. Pour elle, c'était comme s'il remuait le couteau dans la plaie. Elle l'a dit d'une telle manière que je n'ai pas pu me retenir et moi aussi j'ai pleuré», poursuit l'avocate, qui a pourtant défendu de nombreuses victimes de tortures sous Ben Ali.
Preuves médicales à l'appui
Au terme de trois heures et demie d'audience, la jeune femme est repartie avec ses angoisses sans que le juge d'instruction, qui a décidé d'ouvrir une enquête contre elle et son compagnon, se soit prononcé sur le fond du dossier. L'affaire n'aurait peut-être pas suscité l'indignation des associations de défense des droits de l'homme, de la société civile et de citoyens tunisiens, si elle s'était limitée à une simple accusation pour flirt nocturne. Mais ceux qui ont déclaré l'avoir trouvée en compagnie de son ami dans une position «immorale», selon le porte-parole du ministère de l'Intérieur, ne sont autres que ses présumés bourreaux, des policiers.
La nuit des faits, près de Tunis, trois agents de police, en civil mais en service, interpellent le couple dans sa voiture à l'arrêt. Alors que l'un d'eux éloigne le jeune homme, les deux autres tentent dans un premier temps d'extorquer de l'argent à la jeune femme avant de la violer, l'un après l'autre, dans le véhicule de police.
En portant plainte, preuves médicales à l'appui, la victime a permis que soient arrêtés les policiers aujourd'hui sous le coup d'une instruction. Mais elle a aussi osé briser le tabou régnant autour du viol dans un pays où l'opprobre peut s'abattre sur les victimes d'abus sexuels. Elle est même allée plus loin en racontant son histoire aux médias, sous couvert d'anonymat, se disant dévastée, pensant au suicide, accablée par le viol et l'accusation infondée qui s'en est suivie.
Par Thibaut Cavaillès