La démission annoncée du Premier ministre Cheikh Aguibou Soumaré, vient rappeler, avec acuité, toutes les difficultés que notre pays éprouve depuis huit ans à stabiliser l’action gouvernementale. Cette stabilité est pourtant la seule voie indiquée pour espérer sortir le Sénégal de l’impasse dans laquelle notre pays se trouve depuis des années maintenant. Un ministre de la république confiait tous les matins à sa femme avant de la quitter le matin : « J’y vais avec mon titre de ministre, je peux rentrer à midi avec un statut de simple citoyen à la recherche de travail. Nous sommes à la merci des humeurs très changeantes du patron ».
Les cinq premiers ministres qui ont dirigé les différents gouvernements que le président Abdoulaye Wade a mis en place depuis son installation en avril 2000, pouvaient se permettre de dire la même chose que ce ministre, à chaque fois qu’ils ont quitté leur domicile pour aller travailler. L’instabilité gouvernementale qui a caractérisé la marche du pays depuis cette date est sans précédent. Le chef de l’Etat a usé cinq Premiers ministres dans un délai de huit ans : Moustapha Niasse, Mame Madior Boye, Idrissa Seck, Macky Sall et Cheikh Adjibou Soumaré. En réalité, pour le chef de l’Etat, un Premier ministre n’a aucune importance particulière. Il est juste un élément du décor institutionnel.
Le chef de l’Etat le nomme pour sacrifier à une exigence constitutionnelle qui lui permet de mesurer sa puissance et son omnipotence dans un système qui ne laisse aucune place à aucune autre institution de la République. Un Premier ministre exerce en moyenne ses fonctions pour un délai maximal de deux ans au Sénégal. En deux ans, il n’est pas possible de travailler sérieusement des dossiers et de donner le maximum de soi. Cela est encore plus vrai dans un contexte de crises multiples et multiformes comme celui qui caractérise le Sénégal. Le Chef de l’Etat a dit un jour, alors qu’il venait à peine d’engager son premier mandat : « En fait, un Premier ministre je peux m’en passer ». Abdoulaye Wade a effectivement raison un Premier ministre ne lui sert à rien : il ne l’écoute pas, ne le laisse pas travailler et passe par-dessus sa tête pour prendre des mesures qui vont souvent à l’encontre des politiques que le chef gouvernement tente laborieusement de mettre en œuvre.
Avant l’alternance, la fonction de premier ministre était moins déstabilisée et les gouvernements avaient une durée de vie raisonnable. Personne ne parlait d’instabilité. Et pourtant, c’est le même système institutionnel et les mêmes pouvoirs pour le chef de l’Etat. Qu’est-ce qui explique toute cette instabilité gouvernementale ? L’homme Abdoulaye Wade lui-même.
Certains spécialistes ont pu voir en lui un « déconstructeur ». Avec lui tout se détériore, sitôt l’alternance réalisée, comme dans un vaste mouvement de déconstruction. « (...) La Constitution [de janvier 2001] prive de sens les institutions (...) en les laissant flotter sur le corps social sans jamais le pénétrer ». La machine s’emballe ensuite avec les laideurs d’un modèle démocratique anéanti (Parlement vassal et tripatouilleur de textes, Justice sous tutelle, phobie de l’expertise nationale, etc.). Les mauvais exemples qui étayent la théorie de la « déconstruction ne manquent pas ». Les plus récents ont trait à la volonté de mettre en place une succession monarchique à la tête de l’Etat sénégalais, heureusement rejeté par les Sénégalais, la vassalisation de la justice du pays, etc.
On peut en citer d’autres. Dans cette période de déconstruction et de menace planant sur la démocratie de notre pays, toute entreprise de restauration doit se fonder sur les leçons du passé pour mieux identifier les problèmes dont les solutions doivent constituer des réelles stratégies de sortie de crise. Le régime se montre souvent incapable d’avoir une telle approche de la politique.
Et c’est cela qui explique en partie cette terrible instabilité gouvernementale que nous vivons encore aujourd’hui, avec la démission du Premier ministre Aguibou Soumaré. Il reste au Président trois ans pour accomplir son second mandat de cinq ans. Pour chaque mandat, il aura au moins usé trois Premiers ministres qui n’auront servi à rien pour le pays, car aucun d’entre eux n’aura eu le temps, ni les moyens de conduire une politique utile pour le pays.
Abdou Latif Coulibaly lagazette.sn
Les cinq premiers ministres qui ont dirigé les différents gouvernements que le président Abdoulaye Wade a mis en place depuis son installation en avril 2000, pouvaient se permettre de dire la même chose que ce ministre, à chaque fois qu’ils ont quitté leur domicile pour aller travailler. L’instabilité gouvernementale qui a caractérisé la marche du pays depuis cette date est sans précédent. Le chef de l’Etat a usé cinq Premiers ministres dans un délai de huit ans : Moustapha Niasse, Mame Madior Boye, Idrissa Seck, Macky Sall et Cheikh Adjibou Soumaré. En réalité, pour le chef de l’Etat, un Premier ministre n’a aucune importance particulière. Il est juste un élément du décor institutionnel.
Le chef de l’Etat le nomme pour sacrifier à une exigence constitutionnelle qui lui permet de mesurer sa puissance et son omnipotence dans un système qui ne laisse aucune place à aucune autre institution de la République. Un Premier ministre exerce en moyenne ses fonctions pour un délai maximal de deux ans au Sénégal. En deux ans, il n’est pas possible de travailler sérieusement des dossiers et de donner le maximum de soi. Cela est encore plus vrai dans un contexte de crises multiples et multiformes comme celui qui caractérise le Sénégal. Le Chef de l’Etat a dit un jour, alors qu’il venait à peine d’engager son premier mandat : « En fait, un Premier ministre je peux m’en passer ». Abdoulaye Wade a effectivement raison un Premier ministre ne lui sert à rien : il ne l’écoute pas, ne le laisse pas travailler et passe par-dessus sa tête pour prendre des mesures qui vont souvent à l’encontre des politiques que le chef gouvernement tente laborieusement de mettre en œuvre.
Avant l’alternance, la fonction de premier ministre était moins déstabilisée et les gouvernements avaient une durée de vie raisonnable. Personne ne parlait d’instabilité. Et pourtant, c’est le même système institutionnel et les mêmes pouvoirs pour le chef de l’Etat. Qu’est-ce qui explique toute cette instabilité gouvernementale ? L’homme Abdoulaye Wade lui-même.
Certains spécialistes ont pu voir en lui un « déconstructeur ». Avec lui tout se détériore, sitôt l’alternance réalisée, comme dans un vaste mouvement de déconstruction. « (...) La Constitution [de janvier 2001] prive de sens les institutions (...) en les laissant flotter sur le corps social sans jamais le pénétrer ». La machine s’emballe ensuite avec les laideurs d’un modèle démocratique anéanti (Parlement vassal et tripatouilleur de textes, Justice sous tutelle, phobie de l’expertise nationale, etc.). Les mauvais exemples qui étayent la théorie de la « déconstruction ne manquent pas ». Les plus récents ont trait à la volonté de mettre en place une succession monarchique à la tête de l’Etat sénégalais, heureusement rejeté par les Sénégalais, la vassalisation de la justice du pays, etc.
On peut en citer d’autres. Dans cette période de déconstruction et de menace planant sur la démocratie de notre pays, toute entreprise de restauration doit se fonder sur les leçons du passé pour mieux identifier les problèmes dont les solutions doivent constituer des réelles stratégies de sortie de crise. Le régime se montre souvent incapable d’avoir une telle approche de la politique.
Et c’est cela qui explique en partie cette terrible instabilité gouvernementale que nous vivons encore aujourd’hui, avec la démission du Premier ministre Aguibou Soumaré. Il reste au Président trois ans pour accomplir son second mandat de cinq ans. Pour chaque mandat, il aura au moins usé trois Premiers ministres qui n’auront servi à rien pour le pays, car aucun d’entre eux n’aura eu le temps, ni les moyens de conduire une politique utile pour le pays.
Abdou Latif Coulibaly lagazette.sn