De notre correspondant à Berlin.
Un tribunal allemand a jugé, mardi, que la circoncision d'un enfant pour des motifs religieux est une blessure corporelle passible d'une condamnation. Les droits des parents en matière d'éducation et de liberté religieuse ne souffrent d'aucune atteinte s'ils doivent attendre que l'enfant soit en âge de décider lui-même de procéder ou non à une circoncision, a estimé le tribunal.
Dans un jugement qui devrait faire jurisprudence, le tribunal de grande instance de Cologne (ouest) a estimé que «le corps d'un enfant était modifié durablement et de manière irréparable par la circoncision». «Cette modification est contraire à l'intérêt de l'enfant qui doit décider plus tard par lui-même de son appartenance religieuse», selon ce jugement qui n'interdit pas cet acte à des fins médicales. «Le droit d'un enfant à son intégrité physique prime sur le droit des parents.»
Appel à légiférer
Le Conseil central des juifs d'Allemagne a vivement réagi à cette décision judiciaire, estimant qu'il s'agissait d'«une intervention insensible, gravissime et sans précédent dans les prérogatives des communautés religieuses». «La circoncision des garçons nouveaux nés est un élément essentiel de la religion juive et est pratiquée depuis des milliers d'années partout dans le monde», a insisté le président du Conseil, Dieter Graumann.
Rappelant que cette pratique est signe d'appartenance à une communauté religieuse, il a exigé que les députés allemands légifèrent sur la question pour éviter des atteintes à la liberté de culte. La communauté musulmane, qui compte plus de 4 millions de membres, n'a pas encore réagi.
La justice allemande avait été saisie du cas d'un médecin généraliste de Cologne qui avait circoncis un petit garçon de 4 ans à la demande de ses parents musulmans. Quelques jours après l'intervention, l'enfant avait dû être admis aux urgences pour des saignements. Le parquet de la ville avait alors engagé des poursuites contre le médecin.
«Fondements judéo-chrétiens» de l'Allemagne
En Allemagne, la circoncision concerne presque uniquement les juifs et les musulmans. Dans la religion juive, l'intervention est pratiquée au huitième jour sur le nouveau né mâle par un médecin ou un mohel professionnel. Désormais, plus aucun médecin ne pourra pratiquer de circoncision sans s'exposer à des poursuites.
L'affaire ne manquera pas de remonter jusqu'à la Cour constitutionnelle de Karlsruhe. Les sages devront alors trancher définitivement cette question d'autant plus délicate que les «fondements judéo-chrétiens» du pays sont inscrits dans la loi fondamentale allemande.
«Le jugement de Cologne est une expression de notre société séculaire. Mais parfois, ce n'est pas bon du tout que les juges se placent au dessus de la religion», estime le quotidien de centre gauche Süddeutsche Zeitung. Le journal estime que la circoncision n'est en rien comparable à l'excision des jeunes filles musulmanes, qui subissent des mutilations et des atteintes à «leur liberté sexuelle». Pour la Süddeutsche, les juges de Karlsruhe devront décider si la justice a vocation à devenir un «ersatz de religion».
Par Patrick Saint-Paul
Un tribunal allemand a jugé, mardi, que la circoncision d'un enfant pour des motifs religieux est une blessure corporelle passible d'une condamnation. Les droits des parents en matière d'éducation et de liberté religieuse ne souffrent d'aucune atteinte s'ils doivent attendre que l'enfant soit en âge de décider lui-même de procéder ou non à une circoncision, a estimé le tribunal.
Dans un jugement qui devrait faire jurisprudence, le tribunal de grande instance de Cologne (ouest) a estimé que «le corps d'un enfant était modifié durablement et de manière irréparable par la circoncision». «Cette modification est contraire à l'intérêt de l'enfant qui doit décider plus tard par lui-même de son appartenance religieuse», selon ce jugement qui n'interdit pas cet acte à des fins médicales. «Le droit d'un enfant à son intégrité physique prime sur le droit des parents.»
Appel à légiférer
Le Conseil central des juifs d'Allemagne a vivement réagi à cette décision judiciaire, estimant qu'il s'agissait d'«une intervention insensible, gravissime et sans précédent dans les prérogatives des communautés religieuses». «La circoncision des garçons nouveaux nés est un élément essentiel de la religion juive et est pratiquée depuis des milliers d'années partout dans le monde», a insisté le président du Conseil, Dieter Graumann.
Rappelant que cette pratique est signe d'appartenance à une communauté religieuse, il a exigé que les députés allemands légifèrent sur la question pour éviter des atteintes à la liberté de culte. La communauté musulmane, qui compte plus de 4 millions de membres, n'a pas encore réagi.
La justice allemande avait été saisie du cas d'un médecin généraliste de Cologne qui avait circoncis un petit garçon de 4 ans à la demande de ses parents musulmans. Quelques jours après l'intervention, l'enfant avait dû être admis aux urgences pour des saignements. Le parquet de la ville avait alors engagé des poursuites contre le médecin.
«Fondements judéo-chrétiens» de l'Allemagne
En Allemagne, la circoncision concerne presque uniquement les juifs et les musulmans. Dans la religion juive, l'intervention est pratiquée au huitième jour sur le nouveau né mâle par un médecin ou un mohel professionnel. Désormais, plus aucun médecin ne pourra pratiquer de circoncision sans s'exposer à des poursuites.
L'affaire ne manquera pas de remonter jusqu'à la Cour constitutionnelle de Karlsruhe. Les sages devront alors trancher définitivement cette question d'autant plus délicate que les «fondements judéo-chrétiens» du pays sont inscrits dans la loi fondamentale allemande.
«Le jugement de Cologne est une expression de notre société séculaire. Mais parfois, ce n'est pas bon du tout que les juges se placent au dessus de la religion», estime le quotidien de centre gauche Süddeutsche Zeitung. Le journal estime que la circoncision n'est en rien comparable à l'excision des jeunes filles musulmanes, qui subissent des mutilations et des atteintes à «leur liberté sexuelle». Pour la Süddeutsche, les juges de Karlsruhe devront décider si la justice a vocation à devenir un «ersatz de religion».
Par Patrick Saint-Paul