«Jour de progrès historique» pour les uns, «erreur majeure» lourde de défis sociétaux futurs pour les autres. La décision très symbolique de Barack Obama d'exprimer haut et fort son soutien au mariage homosexuel, mercredi, n'a pas fini de diviser l'Amérique. Le caractère passionnel des réactions en dit long sur la nature explosive du sujet, qui remet en cause le modèle traditionnel de la famille et défie les valeurs chrétiennes. Mitt Romney, le rival républicain d'Obama, ne s'y est pas trompé en rappelant immédiatement sa défense du mariage traditionnel «entre un homme et une femme» même s'il a parlé d'un «sujet délicat». La ligne de partage laisse présager un vrai affrontement électoral.
Atermoiements
Fidèle à son style nuancé, le président a pris le temps de raconter les atermoiements qu'il a traversés avant d'en arriver à soutenir le mariage gay, ses convictions religieuses entrant en collision avec ses idées d'égalité. C'était une manière de dire aux Américains qui ne sont pas d'accord qu'il les comprenait mais les poussait à évoluer.
Sa démarche paiera-t-elle politiquement? Certains commentateurs sont persuadés que «l'évolution d'Obama» est le fruit d'un calcul. Après la sortie de Joe Biden, soutenant le mariage homosexuel avec force, Obama aurait jugé que retarder cette clarification ne ferait qu'aliéner davantage une base libérale déjà profondément déçue par son style centriste. La perspective de remobiliser la jeunesse, très favorable au mariage gay, était alléchante. La pression mise ces derniers jours sur la Maison-Blanche par les puissants donateurs gays (parmi les dons de plus de 500.000 dollars, un sur six vient d'un homosexuel, selon leNew York Times) aurait convaincu l'équipe de campagne. Les leveurs de fonds d'Obama ont reçu un million de dollars de contributions dans les 90 minutes suivant son annonce, selon CNN.
«Un cadeau» à son adversaire
Pourtant,cette position comporte des périls évidents. «On ne sait pas comment ça va jouer», a d'ailleurs noté le chef de l'État. Même si un récent sondage Gallup donne 50 % d'Américains en faveur du mariage gay et 48 % contre, la société américaine reste très partagée. Preuve de la résistance de l'Amérique conservatrice et religieuse, quelque 30 États sur 50 ont voté des amendements constitutionnels interdisant le mariage gay. Depuis l'annonce d'Obama, des centaines d'églises chrétiennes expriment leur tristesse. Le président pourrait avoir de mauvaises surprises électorales dans certains États tests, comme l'Ohio ou la Virginie, politiquement très partagés entre républicains et démocrates, mais conservateurs en matière de valeurs.
«Si l'on considère que 10 des 16 États clés (de la présidentielle) ont des amendements constitutionnels sur le mariage gay, l'annonce du président va en faire un sujet majeur de campagne», notait hier Tony Perkins, de la Coalition des valeurs chrétiennes. «C'est un cadeau» à son adversaire, «la mobilisation massive des électeurs croyants est désormais garantie», renchérit le leader chrétien, Ralph Reed. Obama pourrait perdre des voix dans la puissante communauté catholique, dont l'archevêque de New York, Timothy Dolan, dénonce sa décision.
Son plaidoyer sera aussi mal compris dans les communautés noires et latinos, qui ont massivement voté l'amendement antimariage gay décidé mardi par la Caroline du Nord. Obama parie que le réflexe communautaire l'emportera, malgré cet écart. Mais que se passera-t-il à la marge? Question cruciale, tant l'élection s'annonce serrée.
Par Laure Mandeville
Atermoiements
Fidèle à son style nuancé, le président a pris le temps de raconter les atermoiements qu'il a traversés avant d'en arriver à soutenir le mariage gay, ses convictions religieuses entrant en collision avec ses idées d'égalité. C'était une manière de dire aux Américains qui ne sont pas d'accord qu'il les comprenait mais les poussait à évoluer.
Sa démarche paiera-t-elle politiquement? Certains commentateurs sont persuadés que «l'évolution d'Obama» est le fruit d'un calcul. Après la sortie de Joe Biden, soutenant le mariage homosexuel avec force, Obama aurait jugé que retarder cette clarification ne ferait qu'aliéner davantage une base libérale déjà profondément déçue par son style centriste. La perspective de remobiliser la jeunesse, très favorable au mariage gay, était alléchante. La pression mise ces derniers jours sur la Maison-Blanche par les puissants donateurs gays (parmi les dons de plus de 500.000 dollars, un sur six vient d'un homosexuel, selon leNew York Times) aurait convaincu l'équipe de campagne. Les leveurs de fonds d'Obama ont reçu un million de dollars de contributions dans les 90 minutes suivant son annonce, selon CNN.
«Un cadeau» à son adversaire
Pourtant,cette position comporte des périls évidents. «On ne sait pas comment ça va jouer», a d'ailleurs noté le chef de l'État. Même si un récent sondage Gallup donne 50 % d'Américains en faveur du mariage gay et 48 % contre, la société américaine reste très partagée. Preuve de la résistance de l'Amérique conservatrice et religieuse, quelque 30 États sur 50 ont voté des amendements constitutionnels interdisant le mariage gay. Depuis l'annonce d'Obama, des centaines d'églises chrétiennes expriment leur tristesse. Le président pourrait avoir de mauvaises surprises électorales dans certains États tests, comme l'Ohio ou la Virginie, politiquement très partagés entre républicains et démocrates, mais conservateurs en matière de valeurs.
«Si l'on considère que 10 des 16 États clés (de la présidentielle) ont des amendements constitutionnels sur le mariage gay, l'annonce du président va en faire un sujet majeur de campagne», notait hier Tony Perkins, de la Coalition des valeurs chrétiennes. «C'est un cadeau» à son adversaire, «la mobilisation massive des électeurs croyants est désormais garantie», renchérit le leader chrétien, Ralph Reed. Obama pourrait perdre des voix dans la puissante communauté catholique, dont l'archevêque de New York, Timothy Dolan, dénonce sa décision.
Son plaidoyer sera aussi mal compris dans les communautés noires et latinos, qui ont massivement voté l'amendement antimariage gay décidé mardi par la Caroline du Nord. Obama parie que le réflexe communautaire l'emportera, malgré cet écart. Mais que se passera-t-il à la marge? Question cruciale, tant l'élection s'annonce serrée.
Par Laure Mandeville