En choisissant la littérature comme terrain d’expression, cette jeune professionnelle en commerce international fait mentir l’adage qui veut que le talent littéraire soit l’apanage unique des lettrés.
On peut cependant supposer que, maternée dans l’univers intellectuel d’un grand père qui a régné sur l’imaginaire de millions d’africains, Ndeye Fatou Kane n’ait eu qu’à se baisser pour puiser la matière d’un premier roman prometteur. Ce serait réduire injustement ce jeune talent à la pâle imitation d’un style qui, tout pertinent qu’il soit, parle d’une autre époque.
En vérité, Ndeye Fatou Kane va quand même emprunter la langue de cette culture peul multiséculaire pour y dessiner la scène d’une tragédie moderne. Entre les arrondissements parisiens, les quartiers dakarois et les villages de Matam, elle poursuit ce combat entre la tradition et la modernité: cette quête des auteurs africains d’après-indépendance.
Ce roman qu’on aurait tort de qualifier «à l’eau de rose» est enrichi par de riches descriptions des traditions séculaires hal pulaar, des références panafricaines astucieuses, une bonne connaissance sociologique des milieux immigrés parisiens et une intrigue finement menée où le lecteur se plonge avec beaucoup de facilité.
Seul regret, c’est l’épilogue. En choisissant la tragédie, Ndeye Fatou Kane condamne la liberté du choix amoureux au profit d’une tradition élevée au pinacle.