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VIDEO – Sonia Rolland sur les traces de son grand-père, survi­vant du géno­cide rwan­dais

Rédigé par leral.net le Mercredi 14 Juin 2017 à 00:44 | | 0 commentaire(s)|

​Dans le maga­zine d'inves­ti­ga­tion "Retour aux sources", diffusé ce mardi 13 juin à 23h05 sur France 2, l'ancienne Miss France, aujourd'hui actrice et réali­sa­trice, remonte le fil de ses origines jusqu'au Rwanda, pays que ses parents ont fui préci­pi­tam­ment, mais où une partie des siens a dû faire face au dernier grand géno­cide du 20e siècle. Une enquête poignante à plus d'un titre…


Dans son appar­te­ment pari­sien, en bordure de Seine, des masques et des statuettes en bois d’ébène rajoutent de la pers­pec­tive aux pointes d’un parquet en bois blond. Art afri­cain et style hauss­man­nien coha­bitent dans la plus parfaite harmo­nie, reflet de l’âme occu­pant les lieux.

« Je suis née d’une mixité » : cette phrase, Sonia Rolland l’a souvent répé­tée, depuis qu’elle a été couron­née Miss France, à l’âge de 18 ans, en décembre 1999. D’abord, pour expliquer le hâle de sa peau, qui, dès son arri­vée en Cluny, en Bour­gogne, au milieu des années 90, évoquait son exotisme.

Mais aussi, à chaque menace d’un repli iden­ti­taire dans l’hexa­gone, pour rappe­ler que les racines de bien des Français, puisent dans des terres plus loin­taines.

Sonia, elle, est née en 1981, à Kigali, capi­tale du Rwanda. « D’un père blanc (Jacques Rolland, Français origi­naire du Sud-Ouest) et d’une mère noire (Landrada Twagi­ra­ma­riya, Rwan­daise appar­te­nant à l’eth­nie des Tutsis) », comme elle aime à résu­mer.

De ses ancêtres, pater­nels comme mater­nels, elle dit ne pas savoir grand-chose. Comme une ombre, la grande Histoire a occulté la sienne, quand, en avril 1994, les Hutus ont proclamé l’ex­ter­mi­na­tion de leurs frères Tutsis.

Préfé­rant le déra­ci­ne­ment à un sort plus inquié­tant, la famille Rolland a alors quitté l’Afrique et rejoint la France. Pour ne plus penser qu’à l’ave­nir. Pour­suivre une histoire, tronquée de ses souve­nirs… et condam­née aux non-dits, depuis le décès du père de Sonia, en 2014, puis un acci­dent cardio-vascu­laire de sa mère, quelques mois plus tard.

Si la compagne de Jalil Lespert, aidée par les équipes de "Retour aux sources", a pu lever le voile sur la petite enfance de son grand-père pater­nel, qu’elle a long­temps cru orphe­lin de nais­sance, son enquête sur ses origines s’est char­gée d’émo­tions au Rwanda.

François Rushin­ga­bigwi. C’était le nom de son grand-père mater­nel, homme « toujours très fier, très droit », qu’elle a connu, gamine, mais qu’elle n’a jamais pu ques­tion­ner sur le géno­cide rwan­dais, plus grande.

Avant de pouvoir rejoindre une tante de Sonia en Belgique, en 1996, ce grand-père, affi­lié à un dernier grand chef Tutsi, a pour­tant vu l’hor­reur de près. Son appar­te­nance à l’eth­nie des Tutsis – décla­rée supé­rieure à l’eth­nie des Hutus par les colons belges, puis ostra­ci­sée par ces mêmes colons quand elle a commencé à expri­mer des velléi­tés d’in­dé­pen­dance à la fin des années 50 – aurait dû signer son arrêt de mort. 

A 78 ans, François Rushin­ga­bigwi, ex-chauf­feur pour une société minière belge, a toute­fois échappé aux balles et aux coups de machette, qui ont fait plus d’1 million de morts en moins de 3 mois – géno­cide le plus rapide de l’his­toire du 20e siècle – au prin­temps 1994. 

C’est à Rughenri, grâce à une ancienne nounou, que Sonia en découvre la raison. Au plus fort des exac­tions, son grand-père est venu cher­cher refuge dans l’hô­pi­tal de la ville. Un certain Aaron, qu’il connais­sait, y travaillait. Malgré son appar­te­nance à l’eth­nie des Hutus, celui-ci a accepté de l’y abri­ter. Au péril de sa vie. Payant in fine les milices sangui­naires pour qu’elles n’achèvent pas le vieil homme, lorsqu’elles le décou­vrirent.

Face à Aaron, retrouvé sur un banc, comme s’il l’at­ten­dait depuis toujours, Sonia n’a pas pleuré. Rester digne est un prin­cipe chez les Rwan­dais. Elle a écouté, pris la main, remer­cié. Avant d’en­ra­ci­ner à nouveau son arbre généa­lo­gique. Boule­ver­sante.

"Retour aux sources", produit par Arnaud Poivre d'Arvor et présenté par Marie Drucker.