S’il y a un produit qui ne traîne pas dans les marchés en ce temps de ramadan, c’est bien le mil. Le commerce des mets préparés à base des dérivés du mil marche actuellement à merveille. Du commerçant de mil décortiqué au vendeur de thiakry en passant par celui de la farine de mil, tous se frottent les mains, eu égard aux bonnes recettes qu’ils tirent de ce business. C’est le cas de Saliou Diouf. Originaire de Fandène, ce septuagénaire propose du mil décortiqué, des feuilles d’hibiscus rouge (bissap), de kinkéliba, entre autres. Le vieux, installé dans l’une des allées du marché Tilène, se sert d’une tente pour se protéger contre le soleil qui avait fini de darder ses rayons, donnant ainsi une chaleur accablante difficile à supporter avec le jeûne. Une atmosphère qui n’a, en rien, amoindri les activités des gens dans ce lieu de vente grouillant de monde où les marchandages entre clients et vendeurs ont fini d’installer une ambiance indescriptible. Ici, les vendeurs n’ont pas de moment de répit. Dans presque chaque cantine et étal, des clients s’arrêtent pour faire leurs provisions, pour le repas de la rupture. Ramadan oblige, il faut faire le plein. Ce qui fait l’affaire des marchands. « Les gens viennent en masse pour acheter. Depuis le début du ramadan, les ventes se portent bien », se réjouit Saliou Diouf, qui venait de céder cinq kilogrammes de mil à une dame. Cette dernière, interrogée sur l’usage qu’elle fera de cette denrée, révèle, sous le couvert de l’anonymat, l’utiliser pour la préparation de Thiakry, qu’elle vend dans son quartier à Rebeuss. « D’habitude je ne suis pas vendeuse mais pendant le ramadan, je fais du Thiakry pour le vendre dans le quartier. En effet, avec le jeûne, les gens achètent souvent cet aliment », témoigne-t-elle.
La pauvreté booste la vente des céréales
Des propos qui renseignent sur le dévolu des populations sur ces mets. Et pour Saliou Diouf, la reconversion de bon nombre de femmes en vendeuses de bouillie de céréale pendant le ramadan est une aubaine pour eux. « J’en connais qui ne font que cela en cette période. Elles viennent ici pour se ravitailler en mil », raconte le vieux Diouf. Raison pour laquelle sa marchandise ne traine pas en ce mois béni. A l’en croire, il lui arrive de céder plus d’une dizaine de kilogrammes de mil décortiqué en une journée, alors qu’en temps normal, il peinait à trouver des clients. « Chaque jour, j’amène quinze kilogrammes de mil, et je ne descends pas avec plus de cinq kilogrammes. Vraiment les affaires vont bien en ce ramadan », laisse-t-il entendre.
Devisant avec une collègue, Sokhna Fatou Sène est, elle aussi, une vendeuse de mil. A l’image de Saliou Diouf, elle confirme la bonne santé de ce commerce. En cédant le kilogramme à 300 F CFA, elle affirme gagner sur chaque kilogramme 30 F CFA. «On se procure le mil non décortiqué à 250 F CFA le kilo, après on paye 20F au gérant du moulin pour le décorticage. Ce qui fait qu’on tire, sur chaque kilogramme, un bénéfice de 30 F CFA », explique-t-elle. Des sommes certes minimes, mais la vendeuse ne semble pas trop se plaindre, surtout avec ce mois de jeûne où ses gains s’accroissent. « Avec le ramadan, les vendeuses de céréales se multiplient. De ce fait, le mil se vend facilement. Faites un tour dans le marché, sur tous les étals, on peut retrouver des sachets de Thiakry », avance Awa Ndiaye, l’une des nombreuses vendeuses de céréales dans cet endroit.
Cette période de vaches grasses pour les marchands de céréales est toutefois due au changement de mode et à la cherté de la vie qui frappent plusieurs familles. En effet, loin de préparer chez soi la bouillie, le thiakry ou le couscous, pour assurer la rupture et le repas de l’aube, les gens, faute de moyens, se ruent vers ces offres, qui sont le plus à leur portée. Avec les sachets de 50, 100, 200 F CFA, les consommateurs ont la possibilité de se satisfaire à moindre coût, mettant ainsi fin à des habitudes propres au ramadan, qui constituaient à cuisiner à la maison ces mets. « Je me rappelle, étant toute petite, on servait juste après la rupture du ‘’Lakh’’. Et seuls les jeuneurs avaient droit à ce repas. Ce qui fait que j’étais enthousiaste à jeûner pour gouter à ces mets. Mais cela ne se fait plus », se remémore Awa Ndiaye. Et le vieux Saliou Diouf de renchérir. « Auparavant, le ‘’Fondé’’ et le ‘’Lakh’’ étaient des repas que l’on prépare dans chaque maison pendant cette période car ce sont des aliments assez solides. Les gens le prenaient à la rupture pour retarder le ndogou proprement dit, qui était à base de riz ».
« On vend bien, car les citadines ne savent pas faire le haraw »
Regrettant l’abandon de cette habitude, le vieux Diouf n’est cependant pas contre la nouvelle tendance qui fait leur affaire. Pour lui, cette propension à se procurer des céréales dans les marchés est certes un signe assez révélateur de la pauvreté, mais également une occasion pour eux de gonfler leurs gains. Des propos corroborés par Awa Ndiaye. De l’avis de cette dernière, leurs offres permettent aux familles de disposer de céréales sans trop débourser. « Deux personnes peuvent se servir à partir d’un paquet de 50 F CFA. C’est une aubaine, car il n’est pas donné à toute famille d’acheter des kilogrammes de mil, sans compter les frais de préparation comme le gaz qui coûte cher. Donc il leur est plus facile de prendre les céréales déjà préparés », a-t-elle expliqué.
Néanmoins la forte recrudescence de la vente de céréales au mois béni du ramadan est dû, selon certains, à la paresse des femmes citadines qui ne savent pas faire le « Haraw ». Un aspect avancé par Amy Sène, une autre femme qui s’active dans la vente de céréales. Avec son accent sérère, cette dame pense que si elle se frotte les mains pendant le ramadan, c’est parce que bon nombre de ménagères ignorent complètement comment faire le « Haraw », une étape indispensable pour préparer le ‘’Fondé’’, le ‘’Lakh’’ ou tout simplement le thiakry. « Les filles d’aujourd’hui ne s’occupent pas de ces aspects. C’est pour cette raison qu’elles viennent ici se procurer ces céréales. Ce n’est pas faute d’argent, mais elles sont incapables de le faire chez elles », pensent-elle.
Incapacité de préparation ou recrudescence de la pauvreté, le constat est le même partout : la vente de céréales devient un business prisé durant le mois de ramadan. Des mets très riches qui aident à résister à la faim et dont les vendeurs tirent des revenues importantes.
FATOU GAYE SECK
Le Pays au Quotidien
La pauvreté booste la vente des céréales
Des propos qui renseignent sur le dévolu des populations sur ces mets. Et pour Saliou Diouf, la reconversion de bon nombre de femmes en vendeuses de bouillie de céréale pendant le ramadan est une aubaine pour eux. « J’en connais qui ne font que cela en cette période. Elles viennent ici pour se ravitailler en mil », raconte le vieux Diouf. Raison pour laquelle sa marchandise ne traine pas en ce mois béni. A l’en croire, il lui arrive de céder plus d’une dizaine de kilogrammes de mil décortiqué en une journée, alors qu’en temps normal, il peinait à trouver des clients. « Chaque jour, j’amène quinze kilogrammes de mil, et je ne descends pas avec plus de cinq kilogrammes. Vraiment les affaires vont bien en ce ramadan », laisse-t-il entendre.
Devisant avec une collègue, Sokhna Fatou Sène est, elle aussi, une vendeuse de mil. A l’image de Saliou Diouf, elle confirme la bonne santé de ce commerce. En cédant le kilogramme à 300 F CFA, elle affirme gagner sur chaque kilogramme 30 F CFA. «On se procure le mil non décortiqué à 250 F CFA le kilo, après on paye 20F au gérant du moulin pour le décorticage. Ce qui fait qu’on tire, sur chaque kilogramme, un bénéfice de 30 F CFA », explique-t-elle. Des sommes certes minimes, mais la vendeuse ne semble pas trop se plaindre, surtout avec ce mois de jeûne où ses gains s’accroissent. « Avec le ramadan, les vendeuses de céréales se multiplient. De ce fait, le mil se vend facilement. Faites un tour dans le marché, sur tous les étals, on peut retrouver des sachets de Thiakry », avance Awa Ndiaye, l’une des nombreuses vendeuses de céréales dans cet endroit.
Cette période de vaches grasses pour les marchands de céréales est toutefois due au changement de mode et à la cherté de la vie qui frappent plusieurs familles. En effet, loin de préparer chez soi la bouillie, le thiakry ou le couscous, pour assurer la rupture et le repas de l’aube, les gens, faute de moyens, se ruent vers ces offres, qui sont le plus à leur portée. Avec les sachets de 50, 100, 200 F CFA, les consommateurs ont la possibilité de se satisfaire à moindre coût, mettant ainsi fin à des habitudes propres au ramadan, qui constituaient à cuisiner à la maison ces mets. « Je me rappelle, étant toute petite, on servait juste après la rupture du ‘’Lakh’’. Et seuls les jeuneurs avaient droit à ce repas. Ce qui fait que j’étais enthousiaste à jeûner pour gouter à ces mets. Mais cela ne se fait plus », se remémore Awa Ndiaye. Et le vieux Saliou Diouf de renchérir. « Auparavant, le ‘’Fondé’’ et le ‘’Lakh’’ étaient des repas que l’on prépare dans chaque maison pendant cette période car ce sont des aliments assez solides. Les gens le prenaient à la rupture pour retarder le ndogou proprement dit, qui était à base de riz ».
« On vend bien, car les citadines ne savent pas faire le haraw »
Regrettant l’abandon de cette habitude, le vieux Diouf n’est cependant pas contre la nouvelle tendance qui fait leur affaire. Pour lui, cette propension à se procurer des céréales dans les marchés est certes un signe assez révélateur de la pauvreté, mais également une occasion pour eux de gonfler leurs gains. Des propos corroborés par Awa Ndiaye. De l’avis de cette dernière, leurs offres permettent aux familles de disposer de céréales sans trop débourser. « Deux personnes peuvent se servir à partir d’un paquet de 50 F CFA. C’est une aubaine, car il n’est pas donné à toute famille d’acheter des kilogrammes de mil, sans compter les frais de préparation comme le gaz qui coûte cher. Donc il leur est plus facile de prendre les céréales déjà préparés », a-t-elle expliqué.
Néanmoins la forte recrudescence de la vente de céréales au mois béni du ramadan est dû, selon certains, à la paresse des femmes citadines qui ne savent pas faire le « Haraw ». Un aspect avancé par Amy Sène, une autre femme qui s’active dans la vente de céréales. Avec son accent sérère, cette dame pense que si elle se frotte les mains pendant le ramadan, c’est parce que bon nombre de ménagères ignorent complètement comment faire le « Haraw », une étape indispensable pour préparer le ‘’Fondé’’, le ‘’Lakh’’ ou tout simplement le thiakry. « Les filles d’aujourd’hui ne s’occupent pas de ces aspects. C’est pour cette raison qu’elles viennent ici se procurer ces céréales. Ce n’est pas faute d’argent, mais elles sont incapables de le faire chez elles », pensent-elle.
Incapacité de préparation ou recrudescence de la pauvreté, le constat est le même partout : la vente de céréales devient un business prisé durant le mois de ramadan. Des mets très riches qui aident à résister à la faim et dont les vendeurs tirent des revenues importantes.
FATOU GAYE SECK
Le Pays au Quotidien