Prison, trahison, diffamation, tentative d’assassinat (politiquement parlant), toutes ces stratégies n’ont rien enlevé de son abnégation à lutter et à continuer son combat de longue haleine. Il a pratiquement ratissé sur toutes les générations (anciens combattants, indépendantistes…) pour grossir les rangs de son parti. Au faîte de sa popularité, l’homme détenait tous les pouvoirs pour sombrer le pays dans la guerre civile. Ce qu’il a toujours refusé. Pourtant, toute une armée de jeunes dévoués à sa cause, était donc prête à obéir à ses ordres. A chaque fois, il en appelle au calme et exhorte ses militants de ne point agir sous l’emprise de la passion. Ses méthodes et ses stratégies d’opposant étaient souvent d’une grande noblesse. Il incarnait le modèle d’une opposition saine (bien que rigoureuse). Abandonné par ses plus fidèles lieutenants mais aussi les plus brillants de son entourage tels le professeur Sérigne Diop, Ngom… la liste est longue ; il n’a jamais douté d’une fin heureuse de sa longue traversée du désert. Même quant il était sûr de sa victoire (tronquée), il optait pour le dialogue voire la compromission qu’à la rébellion, ne préférant pas aller au palais en marchant sur des cadavres. Ce fanatique de la voie des urnes, avait fini par convaincre tout le peuple de sa bonne foi. Bref, tous ces facteurs ont fait de lui un opposant hors pair. Voilà un personnage qui a fasciné tout un pays, plus encore l’Afrique entière. Ses talents de charmeur étaient d’une rare dimension. On peinait à lui trouver un alter ego : Gandhi, Mandela, Dr King…que sais-je encore ? Son parcours était tout simplement exceptionnel.
Son arrivée au pouvoir constituait un « événement mondial ». Comme Gandhi, il a « réussi » son combat sans faire couler le sang. Comme le Dr King, il s’est toujours armé de patience et d’endurance. Sa victoire n’était pas que sénégalaise mais aussi et surtout africaine. Il vient de prouver que dans le continent noir, on pouvait prendre le pouvoir sans prendre d’armes. Quelle leçon !
Aussi, tout juste après son installation au palais, son comportement témoignait d’une grandeur d’âme. Il a commencé par pardonné à ses ennemis d’hier (certainement pour ne pas alimenter la tension dans son régime nouvellement élu) et à rappeler auprès de lui ses anciens compagnons « égarés », ceux qui croyaient plus à sa prophétie. Durant les premiers mois, ses projets herculéens qui traversaient les frontières du Sénégal, faisaient rêver toute l’Afrique (la grande muraille verte, l’axe Dakar-Rabat, le rail transafricain de 8000 km…).
Mais hélas, le pouvoir à ses réalités. En quelques années, le régime de l’alternance commence à montrer ses limites. Le premier gouvernement arc-en-ciel (qui réunissait toutes les couches sociales: partis politiques, société civile, technocrates…) était trop « métissé » pour s’inscrire en droite ligne avec les visions du président. Petit à petit, ces différentes groupuscules se détachent du pouvoir jusqu’à ce qu’il ne reste que des « wadistes » autour de Wade. Et contre toute attente, c’est là que surgit la plus sombre histoire de l’alternance : la guerre des frères. Avec l’affaire Idrissa Seck, le pays était au bord du gouffre. Désormais, le président n’a qu’une idée en tête : sauver sa peau d’abord et avant tout (ensuite advienne que pourra). Il vient de perdre son plus fidèle disciple, le meilleur également. Idy, celui qu’il aimait tant présenter au monde entier comme son fils, son « produit » donc sa fierté. Et depuis, il semble que la peur a gagné le cœur du « vieux ». Il n’a plus confiance en personne. Alors, à l’image du joueur de poker, les remaniements se succèdent de même que les premiers ministres. Mais l’ « affaire Idy » a hanté son esprit, n’ayant pas trouvé le bon successeur, il consacre une bonne partie de son temps à manœuvrer à la fois pour et contre ce dernier (au détriment du Sénégal et de l’Afrique). Ce couple politique finit par ternir l’image du pays dans sa longue et incessante distraction du public.
En toute évidence, c’est à la suite de cette histoire d’amour et de haine, que le président commence à perdre une bonne partie de sa crédibilité nationale et internationale. De cette épreuve, naquît une autre histoire qui, toute aussi que la première, alimenta et alimente encore toutes sortes de suspicions. Il s’agit de l’intrusion de la famille du président, de façon publique, dans les affaires de l’Etat : une grande première au Sénégal. D’aucuns disent, n’ayant plus confiance à personne, il a fait appel à son fils. Est-ce une raison ? Ce qui est sûr, c’est de cette question que dépendra le bilan final du Wadisme pour ne pas dire son héritage politique. Voilà comment un homme qui était adulé tel un seigneur par son peuple il y’a juste quelques années, finit par susciter toutes sortes d’interrogations.
Lettre ouverte à Wade.
Cher président,
Senghor disait qu’il ne faut point s’accrocher au pouvoir. Cette phrase, vous l’avez sans doute entendue avant nous et vous l’avez comprise mieux que nous, afin.... Mais comme la répétition est pédagogique, tolérez-donc notre audace. C’est au nom de l’esprit libéral (celui dont vous vous êtes porté garant) que cette modeste missive vous est adressée. Sauvez donc votre parti et au-delà, bien entendu, votre patrie en partant tout court.
Fort heureusement pour vous, le champ politique sénégalais est quasiment « vide » : vide, pour plusieurs ordres de raisons. D’une part, il existe à coup sûr chez « l’opposition traditionnelle » une absence réelle d’un leader de votre pointure, d’où toutes les supputations concernant la candidature unique de BENNO. BENNO, un mouvement qui ne répond pas à son nom (unité) et dont le paysage est globalement composé de trois tendances : les socialistes, les marxistes et la société civile. Aucun des trois groupes ne constitue une menace pour le pouvoir. Les socialistes sont les mieux positionnés dans ce trio mais leur passé, trop lourd, est une barrière pour leur retour. D’autre part, la « nouvelle opposition » est le résultat d’une frustration. Et on ne peut pas fonder un parti politique (viable) sur une telle base. Cette opposition dite ici nouvelle est non seulement sans idéologies (lignes politiques claires) mais elle est, en partie, formée par d’anciens libéraux animés par des intérêts crypto personnels en général.
Finalement, vous avez réussi là où vos prédécesseurs ont échoué. Senghor et Diouf avaient en face d’eux de véritables opposants dont le grand Cheich Anta Diop, Majmout Diop… et vous-même d’ailleurs (quoique sous Senghor, il faille nuancer, vue la nature de son régime). Pour votre cas, le hasard a fait que vous êtes tombé sur des « adversaires tièdes » ; également, vos manœuvres politiques ont contribué à neutraliser certains prétendants susceptibles d’être dangereux. Roublard, fin stratège, bête politique … tous ces noms en disent long sur votre expérience cinquantenaire (au moins). Si en politique, il faut savoir feindre et feinter, vous avez jusqu’ici bien appliqué cette loi machiavélique.
Mais à plus de 80 ans, vous conviendrez avec tout sénégalais que c’est, somme toute, « abusé ». C’est vraiment avoir la boulimie du pouvoir que de vouloir se présenter une fois de trop. Trop c’est trop, n’est-ce-pas ? Alors cher président, il faut taper le fer pendant qu’il est encore chaud. Partez par la grande porte avant que la petite ne soit ouverte par le peuple. Vous n’avez plus rien à prouver, votre seul grand chantier, sans doute le dernier, c’est de mettre fin à la « monarchie rampante » (si elle existe réellement). Les suspicions à l’égard de votre fils doivent être définitivement élucidées. Karim ne peut en aucun cas s’appuyer sur les leviers du pouvoir pour s’imposer. Il n’a qu’à descendre dans l’arène s’il le souhaite, c’est tout. Il ne faut pas que l’on puisse tutoyer les sénégalais de la sorte. Cette longue marche vers la démocratie est aujourd’hui notre seule et unique fierté. Hier, vous en étiez le symbole ; aujourd’hui, vous en êtes le garant. En définitive, nous disons en chœur : cher président, répondez à l’appel de TIken Jah Fakoli : « quitte le pouvoir… ».
Malao Kanté
CRHI NICE.
Son arrivée au pouvoir constituait un « événement mondial ». Comme Gandhi, il a « réussi » son combat sans faire couler le sang. Comme le Dr King, il s’est toujours armé de patience et d’endurance. Sa victoire n’était pas que sénégalaise mais aussi et surtout africaine. Il vient de prouver que dans le continent noir, on pouvait prendre le pouvoir sans prendre d’armes. Quelle leçon !
Aussi, tout juste après son installation au palais, son comportement témoignait d’une grandeur d’âme. Il a commencé par pardonné à ses ennemis d’hier (certainement pour ne pas alimenter la tension dans son régime nouvellement élu) et à rappeler auprès de lui ses anciens compagnons « égarés », ceux qui croyaient plus à sa prophétie. Durant les premiers mois, ses projets herculéens qui traversaient les frontières du Sénégal, faisaient rêver toute l’Afrique (la grande muraille verte, l’axe Dakar-Rabat, le rail transafricain de 8000 km…).
Mais hélas, le pouvoir à ses réalités. En quelques années, le régime de l’alternance commence à montrer ses limites. Le premier gouvernement arc-en-ciel (qui réunissait toutes les couches sociales: partis politiques, société civile, technocrates…) était trop « métissé » pour s’inscrire en droite ligne avec les visions du président. Petit à petit, ces différentes groupuscules se détachent du pouvoir jusqu’à ce qu’il ne reste que des « wadistes » autour de Wade. Et contre toute attente, c’est là que surgit la plus sombre histoire de l’alternance : la guerre des frères. Avec l’affaire Idrissa Seck, le pays était au bord du gouffre. Désormais, le président n’a qu’une idée en tête : sauver sa peau d’abord et avant tout (ensuite advienne que pourra). Il vient de perdre son plus fidèle disciple, le meilleur également. Idy, celui qu’il aimait tant présenter au monde entier comme son fils, son « produit » donc sa fierté. Et depuis, il semble que la peur a gagné le cœur du « vieux ». Il n’a plus confiance en personne. Alors, à l’image du joueur de poker, les remaniements se succèdent de même que les premiers ministres. Mais l’ « affaire Idy » a hanté son esprit, n’ayant pas trouvé le bon successeur, il consacre une bonne partie de son temps à manœuvrer à la fois pour et contre ce dernier (au détriment du Sénégal et de l’Afrique). Ce couple politique finit par ternir l’image du pays dans sa longue et incessante distraction du public.
En toute évidence, c’est à la suite de cette histoire d’amour et de haine, que le président commence à perdre une bonne partie de sa crédibilité nationale et internationale. De cette épreuve, naquît une autre histoire qui, toute aussi que la première, alimenta et alimente encore toutes sortes de suspicions. Il s’agit de l’intrusion de la famille du président, de façon publique, dans les affaires de l’Etat : une grande première au Sénégal. D’aucuns disent, n’ayant plus confiance à personne, il a fait appel à son fils. Est-ce une raison ? Ce qui est sûr, c’est de cette question que dépendra le bilan final du Wadisme pour ne pas dire son héritage politique. Voilà comment un homme qui était adulé tel un seigneur par son peuple il y’a juste quelques années, finit par susciter toutes sortes d’interrogations.
Lettre ouverte à Wade.
Cher président,
Senghor disait qu’il ne faut point s’accrocher au pouvoir. Cette phrase, vous l’avez sans doute entendue avant nous et vous l’avez comprise mieux que nous, afin.... Mais comme la répétition est pédagogique, tolérez-donc notre audace. C’est au nom de l’esprit libéral (celui dont vous vous êtes porté garant) que cette modeste missive vous est adressée. Sauvez donc votre parti et au-delà, bien entendu, votre patrie en partant tout court.
Fort heureusement pour vous, le champ politique sénégalais est quasiment « vide » : vide, pour plusieurs ordres de raisons. D’une part, il existe à coup sûr chez « l’opposition traditionnelle » une absence réelle d’un leader de votre pointure, d’où toutes les supputations concernant la candidature unique de BENNO. BENNO, un mouvement qui ne répond pas à son nom (unité) et dont le paysage est globalement composé de trois tendances : les socialistes, les marxistes et la société civile. Aucun des trois groupes ne constitue une menace pour le pouvoir. Les socialistes sont les mieux positionnés dans ce trio mais leur passé, trop lourd, est une barrière pour leur retour. D’autre part, la « nouvelle opposition » est le résultat d’une frustration. Et on ne peut pas fonder un parti politique (viable) sur une telle base. Cette opposition dite ici nouvelle est non seulement sans idéologies (lignes politiques claires) mais elle est, en partie, formée par d’anciens libéraux animés par des intérêts crypto personnels en général.
Finalement, vous avez réussi là où vos prédécesseurs ont échoué. Senghor et Diouf avaient en face d’eux de véritables opposants dont le grand Cheich Anta Diop, Majmout Diop… et vous-même d’ailleurs (quoique sous Senghor, il faille nuancer, vue la nature de son régime). Pour votre cas, le hasard a fait que vous êtes tombé sur des « adversaires tièdes » ; également, vos manœuvres politiques ont contribué à neutraliser certains prétendants susceptibles d’être dangereux. Roublard, fin stratège, bête politique … tous ces noms en disent long sur votre expérience cinquantenaire (au moins). Si en politique, il faut savoir feindre et feinter, vous avez jusqu’ici bien appliqué cette loi machiavélique.
Mais à plus de 80 ans, vous conviendrez avec tout sénégalais que c’est, somme toute, « abusé ». C’est vraiment avoir la boulimie du pouvoir que de vouloir se présenter une fois de trop. Trop c’est trop, n’est-ce-pas ? Alors cher président, il faut taper le fer pendant qu’il est encore chaud. Partez par la grande porte avant que la petite ne soit ouverte par le peuple. Vous n’avez plus rien à prouver, votre seul grand chantier, sans doute le dernier, c’est de mettre fin à la « monarchie rampante » (si elle existe réellement). Les suspicions à l’égard de votre fils doivent être définitivement élucidées. Karim ne peut en aucun cas s’appuyer sur les leviers du pouvoir pour s’imposer. Il n’a qu’à descendre dans l’arène s’il le souhaite, c’est tout. Il ne faut pas que l’on puisse tutoyer les sénégalais de la sorte. Cette longue marche vers la démocratie est aujourd’hui notre seule et unique fierté. Hier, vous en étiez le symbole ; aujourd’hui, vous en êtes le garant. En définitive, nous disons en chœur : cher président, répondez à l’appel de TIken Jah Fakoli : « quitte le pouvoir… ».
Malao Kanté
CRHI NICE.