i["Tonton, voilà, Dakar et le Sénégal sont dans une situation quasi insurrectionnelle, (rappelons qu'au moment des faits, la capitale sénégalaise connaissait des émeutes dans tous les quartiers en raison des trop nombreuses coupures de courant), ça brûle de tous les côtés, ... ça va très très mal... L'armée française est là pour quelque chose"... ]i Cette interview de Robert Bourgi a déclenché les dénégations les plus virulentes de la part de Karim Wade qui prétend que c'est tout simplement faux, sur l'air du "c'est pas moi c'est lui qui a commencé" (ce que Bourgi nie à son tour) et depuis, les noms d'oiseaux fusent entre les deux. Le directeur du cabinet du fils du Président Wade, Bachir Diwara, n'a pas hésité à insulter Robert Bourgi en le traitant de "traître, de pourriture, et d'homme capable de vendre son âme au diable". Question langage diplomatique, on repassera. A l'heure où la situation à Dakar est toujours tendue, les coupures toujours aussi nombreuses, et où le Président de la République n'a toujours pas daigné sortir de son silence, la confession de Robert Bourgi est significative et révélatrice d'un lâchage en bonne et due forme. Il semble tout de même assez évident que Robert Bourgi, en vieux briscard de la politique "françafricaine" ne se serait sans doute pas permis un tel aveu si il n'y avait été autorisé d'une part, et d'autre part si la dérive politique quelque peu monarchique du père et fils Wade avait l'assentiment de la France. D'autre part, on peut aussi s'interroger, en partant du postulat que les déclarations de l'avocat au barreau de Paris sont vraies, sur cette réaction du fils Wade au moment des émeutes et de cette panique qui l'aurait poussé à demander à Bourgi d'intercéder auprès des autorités françaises. b[Panique qui l'aurait fait préférer la réponse militaire fut-elle celle d'un autre pays, et donc la répression, plutôt que le dialogue et des solutions au mal être de ses concitoyens. ]b Karim Wade, est le ministre le plus impopulaire que le Sénégal ait jamais connu, et dans le numéro 2634 de Jeune Afrique, il est décrit comme un "superministre" (de l'air, de la terre et de la mer), mais aussi comme un affairiste, un banquier, surnommé "monsieur 15% par de nombreux entrepreneurs, et qui mine de rien place ses hommes à des postes stratégiques" tout en niant être intéressé par la Présidence du Sénégal. Un homme que certains de ses collaborateurs dépeignent comme "belliqueux, ombrageux, impitoyable dans la guerre" mais également comme quelqu'un dont "le comportement rappelle bien souvent celui d'un fils gâté à qui, il le sait, son père ne refusera rien". b[Cet aspect du caractère du fils du président Abdoulaye Wade ajouté au silence de son père, et à la déclaration de Robert Bourgi est particulièrement inquiétante. ]b Les Sénégalais ont pu constater que des émeutes pouvaient faire reculer le pouvoir et l'obliger à retirer un projet de loi anti-constitutionnel, c'est donc un rapport de force qui s'est engagé à la faveur des dernières manifestations entre le peuple, et son dirigeant et non un dialogue démocratique. b[Tous ces éléments mis bout à bout, la désinvolture et la rapidité avec lesquelles Bourgi à lâché son ami, les mauvaises décisions de Abdoulaye Wade, son silence, comme le fait que dorénavant les sénégalais savent qu'en cas de rapport de force, ils peuvent gagner, ont effectivement ouvert une boîte de Pandore. ]b La présence de l'armée et des forces de police qui perdure, tout comme la rumeur de la venue de mercenaires à la solde du gouvernement, mais surtout cette réaction de panique d'un homme qui se précipiterait au téléphone pour implorer l'aide militaire d'un pays dont il a pourtant demandé le départ des forces armées, tout cela réuni fait craindre le pire au Sénégal pour les mois qui viennent dans la perspective d'une présidentielle 2012 qui s'annonce houleuse.