I/ Article 27 : « La durée du mandat du Président de la République est de cinq ans. Le mandat est renouvelable une seule fois.
Cette disposition ne peut être révisée que par voie référendaire.»
Alinéa 1er : “La durée du mandat du Président de la République est de cinq ans. Le mandat est renouvelable une seule fois. ”
Second alinéa : “Cette disposition ne peut être révisée que par voie référendaire. ”
II/ Article 104 : « Le Président de la République en fonction poursuit son mandat jusqu’à son terme.
Toutes les autres dispositions de la présente constitution lui sont applicables.»
Alinéa 1er :“Le Président de la République en fonction poursuit son mandat jusqu’à son terme.”
Second alinéa : “Toutes les autres dispositions de la présente constitution lui sont applicables.”
L’annonce de la candidature (effet d’annonce) n’est pas la candidature (dépôt selon la procédure électorale).
Le chargé d’enseignement à la faculté de Droit de l’UCAD, Mody GADIAGA campe bien le décor lorsqu’il écrit : « A la lecture de ces deux dispositions, il apparaît clairement que l’article 104 apporte une dérogation à l’article 27 en extirpant du champ d’application de celui-ci, le mandat que le président de la République tenait de l’élection de 2000. Mais alors, le véritable problème est de délimiter l’exacte étendue de cette dérogation. L’article 104 a-t-il entendu soustraire le premier mandat du président de la République à l’emprise de l’article 27 dans la totalité de sa disposition ou seulement pour une partie de celle-ci ? Autrement dit, la dérogation posée par l’article 104 visait-elle seulement à permettre au président de la République de poursuivre son mandat jusqu’à son terme initial (sept ans), ou visait-elle aussi à retarder la mise en œuvre du principe de la limitation du nombre de mandats jusqu’à l’expiration de celui qui était en cours (2007) ? Telle est la seule question à trancher ».
C’est tout là que se situe justement le nœud gordien.
L’article 27, alinéa 1er traite à la fois de la question de la durée du mandat et de celle bien distincte du nombre de mandats (deux notions à ne pas confondre).
L’article 104 prend en considération la transition entre la Constitution du 7 mars 1963 et celle du 22 janvier 2001.
Le Président WADE a été élu pour la première fois en 2000 pour un mandat de 7 ans sur la base de l’ancienne constitution datant du 7 mars 1963 qui ne limitait pas les mandats. Un an après son accession à la magistrature suprême, le Président WADE fait limiter (promulgation de la nouvelle Constitution) le nombre de mandats présidentiels à deux en 2001 par la loi n°2001-03 de la Constitution du 22 janvier 2001 issue du référendum du 07 janvier 2001.
Ainsi, La Constitution du Sénégal, adoptée en 2001, limite le nombre de mandats présidentiels à deux. Une limitation qui, pour la première fois dans l’Histoire du Sénégal, ne peut être révisée que par une loi référendaire (un verrou juridique qui embastille les députés et sénateurs prompts à adopter tout projet de loi de l’Exécutif).
L'esprit de la Constitution de 2001 est d'éviter que les Présidents de la République s’éternisent pour de longues années au pouvoir comme Léopold Sédar SENGHOR (1960-1980) et Abdou DIOUF (1981-2000). Dorénavant, tout Président de la République du Sénégal n’a droit qu’à deux mandats dont le quantum maximal est de dix ans (deux mandats de 5 ans chacun).Toutefois, il faut signaler qu’une révision constitutionnelle intervenue en juillet 2008 a ramené la durée du mandat à 7 ans, comme dans l’ancienne Constitution du 7 mars 1963. Autrement dit, le quantum maximal est présentement à l’état du dispositif constitutionnel sénégalais, de 14 ans (deux mandats de 7 ans chacun).
Quand il est énoncé dans l’article 104 que “le président de la République en fonction poursuit son mandat jusqu’à son terme”, on fait allusion à la durée du mandat qui est de sept ans sous l’empire de l’ancienne Constitution au moment de l’accession au pouvoir en 2000, alors que la nouvelle Constitution du 22 janvier 2001 la fixe à cinq ans (article 27 alinéa 1). Cela veut dire tout simplement qu’on laisse le Président de la République (en l’occurrence Monsieur Abdoulaye WADE) poursuivre son mandat de sept ans jusqu’à son terme, sans tenir compte de l’alinéa 1er de l’article 27 (qui pose le mandat de 5 ans). Donc il s’agit bien de durée de mandat et non de nombre de mandats (deux notions à ne pas confondre, encore une fois). La question de la durée du mandat est tout à fait indépendante de celle du nombre de mandats, les deux questions n’ayant aucun rapport logique, aucun lien de dépendance nécessaire. Et suivant le juriste Mody GADIAGA : « il n’est pas possible sur le fondement d’un choix unique, de trancher à la fois les deux questions ; c’est par des choix séparés que l’on se prononce successivement sur l’une et sur l’autre. En conséquence, la dérogation posée à l’article 104 ne vise, dans l’article 27, que la seule partie de cette disposition avec laquelle elle a un rapport logique, c’est-à-dire la partie relative à la durée du mandat qui était alors en cours. En effet, la poursuite du mandat alors en cours n’a, à l’évidence, rien à voir avec le nombre de mandats. La Constitution de 2001 a seulement voulu que le mandat, qui était en cours au jour de son adoption, fût mené à son terme initial, sans exclure celui-ci du décompte du nombre de mandats pouvant être brigués. Ce mandat-là ayant déjà été renouvelé une fois en 2007, il ne peut certainement plus l’être ». La disposition transitoire dispose nettement que le Président de la République en exercice continue son mandat jusqu’à terme, c’est-à-dire sept ans, mais en précisant, dans la disposition qui suit, que toutes les autres dispositions s’appliquent à lui.
Autrement dit, la limitation du nombre de mandats s’applique à lui. Le Président de la République en fonction poursuit son mandat jusqu’à son terme (7 ans sur lesquels il a été élu en 2000 avec la Constitution du 7 mars 1963). Ainsi, on fait bénéficier exceptionnellement le principe de la non-rétroactivité du mandat : car il serait juridiquement aberrant que le Président WADE, élu pour 7 ans sous l’empire de l’ancienne Constitution de 1963 par le vote citoyen, puisse se voir imposer l’affliction non élective d’un mandat réduit à 5 ans, en étant amputé de 2 ans. C’est dans ce sens qu’il faut lire cette disposition transitoire du premier alinéa de l’article 104.
Cette transition entre deux Constitutions signifie que, exceptionnellement, la loi nouvelle du nouveau mandat (mandat de 5 ans suivant l’article 27 alinéa 1er de la nouvelle Constitution du 22 janvier 2001) ne va pas s’appliquer au mandat de 7 ans en cours déjà entamé sous l’empire de la loi ancienne (Constitution du 7 mars 1963). Donc, on ne va pas faire rétroagir le mandat de 7 ans prévu par la constitution de 1963 pour se conformer à l’exigence du mandat de 5 ans tel que prévu par la nouvelle constitution de 2001. Voilà la lecture limpide qu’il faut retenir sans possibilité de flou appelant un recours aux méthodes d’interprétation du juge sur ce premier alinéa de l’article 104.
Maintenant, il y a un second alinéa à l’article 104 qui dispose que, en dehors de ce principe de non-rétroactivité du mandat de 7 ans, toutes les autres dispositions de la présente Constitution de 2001 sont applicables au Président de la République en exercice, c’est-à-dire que le Président WADE qui bénéficie d’un mandat non rétroactif de 7 ans prévu dans l’ancienne Constitution de 1963 est soumis et se voit appliquer tous les autres articles de la nouvelle Constitution (exception non comprise donc de la rétroactivité du mandat de 5 ans de la Constitution de 2001). Et précisément parmi tous ces autres articles de la nouvelle Constitution figure la limitation du nombre de mandats présidentiels à deux (article 27 alinéa 2).
Telle est la logique de la science et de la technique juridiques. Seule la durée du mandat a été constitutionnellement réglée et tout le reste appliqué comme tel au président en fonction.
Cette précision est apportée pour circonscrire l’exception accordée sur la durée et non sur le nombre de mandats. En effet, hormis cette exception sur la durée, toutes les autres dispositions sont précisées être applicables au Président de la République en fonction. La limite du nombre de mandats à deux (2) fait partie de ces dispositions. Il est important de préciser qu’aucune disposition ne dit que le Président de la République en fonction fait exception à cette limite du nombre de mandats. Donc dans l’entendement du Constituant sénégalais, il n’y a pas une exception à la limite du nombre de mandats, cause pour laquelle il ne s’est pas prononcé sur cette question qui ne relève pas d’une difficulté ou d’une incompréhension. Pour lui, le mandat de 7 ans sous l’empire de l’ancienne Constitution du 7 mars 1963 doit être considéré comme un premier mandat et être comptabilisé dans le décompte de la nouvelle Constitution en son article 27 alinéa 2. C’est exactement ce que disent les articles 27 et 104 combinés de la Constitution de 2001. La Loi est donc claire. L’actuel Président de la République du Sénégal ne peut y déroger.
Faisons un peu un cas d’école de politique-fiction, l’hypothèse suivante : si chaque Président de la République qui arrive révise la Constitution et passe à pertes et profits son premier mandat en cours, se disant qu’il a droit maintenant à deux nouveaux mandats, le premier entamé ne comptant pas parce que instauré par la Constitution d’avant référendum, pour se trouver avec trois mandats s’il est réélu alors que le nombre de mandats est fixé à deux dans la nouvelle Constitution, dans quelle démocratie on serait ? C’est absurde, pouvoiriste et irresponsable. Le Président de la République comme les députés ne peuvent réviser que ce qui est révisable et dans les conditions prévues par la loi.
L’esprit de ces dispositions est fondamental dans notre système démocratique afin d’éviter que le pouvoir ne soit pas assumé de manière illimitée dans le temps par un président de la République. Il est inacceptable d’user de subterfuges pour contourner l’esprit des dispositions constitutionnelles. Le président de la République doit se conformer à cet esprit qui donne force à la loi. Le Président de la République est ultimement celui qui a piloté et inspiré le projet de révision constitutionnelle avec l’appui d’experts dans la matière constitutionnelle. Ce serait une contradiction avec l’esprit de l’article 27.
Le débat suscité par le changement de la durée du mandat du président de 5 à 7 ans a montré que le texte constitutionnel n’est pas parfait en ce qu’il peut comporter des ambiguïtés pour qui ne veut pas tenir compte de l’esprit du texte. Il faut donc verrouiller la durée du mandat tout comme pour le nombre de mandats en agitant le spectre de la loi référendaire ou, pourquoi pas, en imposant que ni la durée ni le nombre de mandats ne pourront faire l’objet d’une quelconque révision, comme la nature laïque de la République. Car la pratique des Chefs d’Etat ou tout simplement la tortuosité de la nature humaine ont montré qu’on ne se gêne pas pour exploiter la moindre imperfection, quitte à discréditer davantage l’inamovibilité de certaines dispositions. C’est le cas en Afrique où le vent en poupe est cette tendance à la suppression de la limitation des mandats. C’est l’image écornée du rapport des leaders politiques africains avec le pouvoir. Il y a cette volonté de confisquer le pouvoir de manière indéfinie.
Même les éclaircissements des rédacteurs de la constitution qui rappellent l’esprit dans lequel ils ont élaboré le texte sont désavoués par le Président de la République. Il serait irresponsable de cautionner un troisième mandat interdit par la Constitution qui serait une contradiction, une reculade. Abdoulaye WADE oublie-t-il qu’au Niger TANDIAN avait voulu s’octroyer un troisième mandat avant de se voir démis par l’armée et assigné depuis lors en résidence surveillée ?
En France, qui nous sert de repère, le Président de la République Nicolas SARKOZY a constitutionnalisé sa promesse faite en 2003 en tant que candidat, à savoir le principe de la clause limitative de mandat. L’article 6 issu de la révision constitutionnelle du 23 juillet 2008 dispose dorénavant : « Nul ne peut être élu plus de deux fois consécutivement ». Ce qui a le mérite d’être clair et de verrouiller le risque d’une plausible troisième candidature en France.
Par ailleurs, si on peut être réservé quant à la neutralité objective des juristes renommés que sont les professeurs Pape Demba SY et El Hadji MBODJI, respectivement secrétaire général du parti politique UDF/ Mboolomi et co-rédacteur de la Constitution de 2001 d’une part et d’autre part membre militant de l’AFP, on ne peut pas suspecter de parti pris un apolitique en la personne du Professeur Mouhamadou Mounirou SY, également co-rédacteur de la constitution de 2001, qui a révélé lors d’une manifestation publique que la Constitution de 2001 n'autorise pas une troisième candidature du Président WADE et que ce dernier « ne voulait pas faire plus de deux mandats, lors de la rédaction de la Constitution du 22 janvier 2001 ». Quid, également du juriste Ahmet NDIAYE (Docteur en Droit de l’Université Montpellier I ; Maître-Assistant Associé à l’UCAD) qui reproche au Constituant sénégalais de n’avoir pas pleinement garanti tout son dispositif de verrouillage pour empêcher toute velléité de briguer un troisième mandat à la candidature à l’élection présidentielle, à l’exemple de la France.
On ne peut croire que ces experts (Professeur Pape Demba SY ; Professeur Mouhamadou Mounirou SY ; Me Madické NIANG, mandataire du Président WADE pour le compte de la Commission chargée de rédiger la Constitution de 2001 et autres) ont sciemment élaboré le texte avec la pleine conscience que cela peut donner trois mandats au Président de la République. L’expérience africaine de la pratique du pouvoir aurait dû inciter le Constituant sénégalais à être plus vigilant, à ne pas tomber dans les travers de l’euphorie de l’Alternance en accordant un blanc-seing de bonne moralité politique à la classe politique mais à renforcer davantage son verrouillage objectivement scientifique. De plus, c’est faire une insulte à l’intelligentsia de la science constitutionnelle que de faire prospérer l’idée selon laquelle les propos de praticiens du droit de renom [Mouhamadou Mounirou SY, El Hadji MBODJI, Pape Demba SY, Babacar GUEYE, Ameth NDIAYE, Mody GADIAGA et tant d’autres] sont une « grosse erreur » de constitutionnalistes qui « distillent des informations mal fondées en interprétant maladroitement la Constitution (…) et d’avoir intégré le premier mandat de 7 ans sous l’empire de l’ancienne Constitution » (l’avocat Maître Abdoulaye BABOU) ou encore ils « ne font pas du Droit ou bien, ils ne fondent pas leurs arguments sur le Droit mais plutôt sur la politique » et ne sont pas « sérieux » (le Premier Ministre Souleymane Ndéné NDIAYE).
Le Professeur Babacar GUEYE est persuadé qu'il n'y aura pas d'élection en 2012. Pour lui, ceci est dans l’ordre du possible en votant une loi à l’Assemblée nationale pour que ce mandat de 5 ans passe à 7 ans. De cette manière, il n’y aura pas d’élections en 2012.
En 2008, l’article 27 de la Constitution a été modifié pour ramener le mandat présidentiel de 5 ans à 7 ans et, vu la personnalité controversée du Président Abdoulaye WADE à vouloir conserver le pouvoir, le locataire du Palais présidentiel pourrait être tenté de se faire appliquer ce mandat de 7 ans pour préparer ses arrières et sa dévolution monarchique. L’option retenue par le régime libéral du Président WADE pour contourner la voie référendaire dressée sur son chemin par le texte fondamental déploie des conséquences manifestement néfastes pour la candidature de leur tête de file en 2012.
La candidature du Président WADE en 2012 a déjà reçu une sentence d’irrecevabilité de par la propension exaltante du Président WADE à s’épancher dans les médias occidentaux, reflet d’un complexe jamais caché mais qui va lui être fatal. Ainsi, le Président WADE, lui-même, lors d'une conférence de presse accordée le 1er mars 2007 à un journaliste français indiquait déjà qu'il ne pourrait se représenter comme candidat pour 2012 car la Constitution de 2001 le lui interdit : "Non, j'y peux rien parce que j'ai bloqué le nombre de mandat à deux. Donc ce n'est pas possible. Donc je ne peux pas me représenter. Je le dis sérieusement, je ne me représenterais pas".
Cette bande sonore est un « aveu » particulier même s’il ne peut pas être rangé dans la catégorie des modes opératoires d’aveux légaux circonscrits (l’aveu judiciaire et l’aveu extrajudiciaire) tel qu’ils sont conditionnés pour être acceptés. On peut toutefois le ranger dans la catégorie des présomptions simples et de la catégorie du commencement de preuve, et même du témoignage (audition du journaliste, par exemple).
Dans quelles conditions les nouvelles technologies telles que la télévision, la radiodiffusion, internet, les appels et messagerie téléphoniques ou la vidéoconférence, le numérique entre autres peuvent-elles être admises comme moyens de preuve ou utilisées pour entendre un témoin?
D’abord, ce sont des modes modernes de communication comme preuve. Ainsi, ces procédés de preuve nouveaux (captation, enregistrement ou transmission) font partie aujourd’hui de l’admissibilité comme moyen de preuve. Le parquet a toujours eu recours aux services des opérateurs de téléphonie mobile pour sanctionner des infractions. Il en est de même des moyens audiovisuels et des moyens écrits avec des décisions de justice à foison.
Actuellement, l’arsenal juridique sénégalais s’est bonifié avec la loi de 2008 sur la cybercriminalité.
Le prétexte de tout ceci, c’est pour étayer que la bande sonore en date du 1er mars 2007 relative à l’interview accordée par le Président WADE entre bien en droite ligne dans les procédés de droit comme mode de preuve. De plus, le concerné (le Président WADE) a accepté le principe de l’interview télévisée (consentement libre et éclairé) et ne peut pas ignorer que ses propos sont enregistrés et diffusés dans le public (rien n’a été fait à son insu), puisqu’il s’est présenté comme une personne publique dans un lieu public (rejet de tout argument à titre privé ou confidentiel). En définitive, le procédé est légal et loyal, la bande sonore est recevable comme moyen de preuve pour l’irrecevabilité de sa déclaration de candidature en vue de l’élection présidentielle de 2012.
Le Président WADE a alors objectivement un sérieux problème, une grande difficulté; le référendum qu’il est obligé d’organiser, suivant l’alinéa 3 de l’article 27. Et briguer un troisième mandat sans réviser l’alinéa 2 de l’article 27 par une loi référendaire, ne pas le réviser ou le réviser par une loi parlementaire, serait de la part du président Wade une violation flagrante et bonapartiste de la Constitution dont il est le principal maître d’ouvrage. Une troisième investiture serait donc une "violation" de la Constitution, la préparation d’un coup d’Etat constitutionnel. Mais disons plutôt que c’est un coup d’Etat hors Constitution ou anti-constitutionnel car ce coup de forcing n’est plus juridique mais politique ou politicien, un coup de force pour arracher un pouvoir constitutionnel auquel il n’a pas droit. Le cas Tandja au Niger est plein d’enseignement.
Au surplus, il y a un problème de morale politique : c’est le problème d'âge. On risque de réélire un président de la République qui aura presque 90 ans, avec des risques incommensurables pour la vie de la Nation.
La question qui se pose est celle-ci : comment les cinq sages vont interpréter les dispositions de la Constitution à ce sujet en cas de saisine?
Une question très délicate que le Conseil Constitutionnel devrait trancher. Ces derniers peuvent même faire recours aux actes préparatoires de la Constitution et même auditionner la commission ad hoc qui a rédigé la Constitution pour s’imprégner de sa pensée et l’esprit de la loi, en cas de nécessité.
Quoi qu'il en soit, la question de la validité ou non de la candidature du Président WADE sera tranchée après le dépôt officiel des candidatures par le Conseil Constitutionnel. Les candidats à la présidentielle de 2012 peuvent déposer un recours devant le Conseil Constitutionnel pour invalider la candidature Du Président WADE. Mais pour Ibrahima SENE du parti politique, le PIT, "WADE a verrouillé" le Conseil Constitutionnel en nommant récemment à sa tête un nouveau président, Cheikh Tidiane DIAKHATE, présenté comme favorable au chef de l'Etat sénégalais, alors que le PS voit en cette nomination le symbole de la domestication d’une certaine frange de la justice avec le contentieux des listes de la Coalition Sopi forcloses à Ndindy et de Ndoulo, le contentieux de Mbane, de Louga, entre autres dans lesquels la Cour d’Appel de Dakar, clé de voûte des élections locales, avait manifesté son parti pris révoltant pour la coalition du régime libéral avec comme président de cette cour d’Appel de Dakar un certain… Cheikh Tidiane DIAKHATE! On ne peut rien donc attendre de ces mêmes juges promus et chargés de trancher les questions constitutionnelles. S’ils ne déclarent pas leur incompétence, ils s’attachent aveuglément à une interprétation littérale étriquée de la lettre aux dépens de l’esprit de la loi pour s’adonner à des forfaitures indignes de la robe de magistrat. Les Cinq Sages du Conseil Constitutionnel ne porteront ni initiative ni rappel à l’ordre au Président de la République pour faire respecter l’esprit d’une disposition aussi simple que la limitation impérative des deux mandats. Ils regardent donc le Président de la République déclarer sa candidature pour un troisième mandat sans lever le petit doigt. Ils attendent sûrement d’être saisis pour se déclarer incompétents ou valider la candidature du Président de la République. Leur silence bruissant de paroles s’apparente à un prélude de déni de justice, comme il est de jurisprudence dans cette haute juridiction. Ce n'est pas ce Conseil Constitutionnel dans sa composition actuelle de chiffes molles qui dira objectivement le Droit selon lequel le sieur Abdoulaye WADE ne peut pas se présenter en 2012, parce que « rattrapé par les hivernages », pour reprendre l’expression persifleuse d’un atypique et spécieux avocat sénégalais.
En conclusion, la candidature du Président WADE à la présidentielle de 2012 pourrait être recevable, à la condition que ce dernier se conforme aux dispositions de l’alinéa 3 de l’article 27 qui est formel et sans appel, en révisant l’alinéa 2 de l’article 27 (qui limite le nombre de mandats à deux) par un référendum et seulement un référendum sur la délimitation du nombre de mandats. S’il gagne ce référendum, la recevabilité de sa candidature est certaine, et il pourra briguer un troisième mandat à la présidentielle de 2012. Ainsi, la seule voie de droit qui est ouverte et offerte au camp de la majorité présidentielle semble être la voie référendaire. Pour briguer un troisième mandat il est impératif pour le Président WADE de solliciter, pour la quatrième fois, le peuple souverain sénégalais en lui demandant la possibilité de passer outre le verrouillage constitutionnel limitant le nombre de mandats à deux. Cette impasse ou faille juridique pourra être fermée par l’opposition si elle dame le pion au camp présidentiel en remportant la présidentielle et en prenant exemple sur la France (révision constitutionnelle du 23 juillet 2008, cf. page 5 in fine et page 6 in limine litis de la présente contribution) qui a systématiquement verrouillé un tel cas de figure.
Laissons Serigne Moustapha SY des moustarchidatines parapher cette apport contributif par ses sages propos : «il est dangereux pour un homme d’Etat de s’accrocher au pouvoir alors que Dieu a sonné sa fin ».
Clarté Egalité
Cette disposition ne peut être révisée que par voie référendaire.»
Alinéa 1er : “La durée du mandat du Président de la République est de cinq ans. Le mandat est renouvelable une seule fois. ”
Second alinéa : “Cette disposition ne peut être révisée que par voie référendaire. ”
II/ Article 104 : « Le Président de la République en fonction poursuit son mandat jusqu’à son terme.
Toutes les autres dispositions de la présente constitution lui sont applicables.»
Alinéa 1er :“Le Président de la République en fonction poursuit son mandat jusqu’à son terme.”
Second alinéa : “Toutes les autres dispositions de la présente constitution lui sont applicables.”
L’annonce de la candidature (effet d’annonce) n’est pas la candidature (dépôt selon la procédure électorale).
Le chargé d’enseignement à la faculté de Droit de l’UCAD, Mody GADIAGA campe bien le décor lorsqu’il écrit : « A la lecture de ces deux dispositions, il apparaît clairement que l’article 104 apporte une dérogation à l’article 27 en extirpant du champ d’application de celui-ci, le mandat que le président de la République tenait de l’élection de 2000. Mais alors, le véritable problème est de délimiter l’exacte étendue de cette dérogation. L’article 104 a-t-il entendu soustraire le premier mandat du président de la République à l’emprise de l’article 27 dans la totalité de sa disposition ou seulement pour une partie de celle-ci ? Autrement dit, la dérogation posée par l’article 104 visait-elle seulement à permettre au président de la République de poursuivre son mandat jusqu’à son terme initial (sept ans), ou visait-elle aussi à retarder la mise en œuvre du principe de la limitation du nombre de mandats jusqu’à l’expiration de celui qui était en cours (2007) ? Telle est la seule question à trancher ».
C’est tout là que se situe justement le nœud gordien.
L’article 27, alinéa 1er traite à la fois de la question de la durée du mandat et de celle bien distincte du nombre de mandats (deux notions à ne pas confondre).
L’article 104 prend en considération la transition entre la Constitution du 7 mars 1963 et celle du 22 janvier 2001.
Le Président WADE a été élu pour la première fois en 2000 pour un mandat de 7 ans sur la base de l’ancienne constitution datant du 7 mars 1963 qui ne limitait pas les mandats. Un an après son accession à la magistrature suprême, le Président WADE fait limiter (promulgation de la nouvelle Constitution) le nombre de mandats présidentiels à deux en 2001 par la loi n°2001-03 de la Constitution du 22 janvier 2001 issue du référendum du 07 janvier 2001.
Ainsi, La Constitution du Sénégal, adoptée en 2001, limite le nombre de mandats présidentiels à deux. Une limitation qui, pour la première fois dans l’Histoire du Sénégal, ne peut être révisée que par une loi référendaire (un verrou juridique qui embastille les députés et sénateurs prompts à adopter tout projet de loi de l’Exécutif).
L'esprit de la Constitution de 2001 est d'éviter que les Présidents de la République s’éternisent pour de longues années au pouvoir comme Léopold Sédar SENGHOR (1960-1980) et Abdou DIOUF (1981-2000). Dorénavant, tout Président de la République du Sénégal n’a droit qu’à deux mandats dont le quantum maximal est de dix ans (deux mandats de 5 ans chacun).Toutefois, il faut signaler qu’une révision constitutionnelle intervenue en juillet 2008 a ramené la durée du mandat à 7 ans, comme dans l’ancienne Constitution du 7 mars 1963. Autrement dit, le quantum maximal est présentement à l’état du dispositif constitutionnel sénégalais, de 14 ans (deux mandats de 7 ans chacun).
Quand il est énoncé dans l’article 104 que “le président de la République en fonction poursuit son mandat jusqu’à son terme”, on fait allusion à la durée du mandat qui est de sept ans sous l’empire de l’ancienne Constitution au moment de l’accession au pouvoir en 2000, alors que la nouvelle Constitution du 22 janvier 2001 la fixe à cinq ans (article 27 alinéa 1). Cela veut dire tout simplement qu’on laisse le Président de la République (en l’occurrence Monsieur Abdoulaye WADE) poursuivre son mandat de sept ans jusqu’à son terme, sans tenir compte de l’alinéa 1er de l’article 27 (qui pose le mandat de 5 ans). Donc il s’agit bien de durée de mandat et non de nombre de mandats (deux notions à ne pas confondre, encore une fois). La question de la durée du mandat est tout à fait indépendante de celle du nombre de mandats, les deux questions n’ayant aucun rapport logique, aucun lien de dépendance nécessaire. Et suivant le juriste Mody GADIAGA : « il n’est pas possible sur le fondement d’un choix unique, de trancher à la fois les deux questions ; c’est par des choix séparés que l’on se prononce successivement sur l’une et sur l’autre. En conséquence, la dérogation posée à l’article 104 ne vise, dans l’article 27, que la seule partie de cette disposition avec laquelle elle a un rapport logique, c’est-à-dire la partie relative à la durée du mandat qui était alors en cours. En effet, la poursuite du mandat alors en cours n’a, à l’évidence, rien à voir avec le nombre de mandats. La Constitution de 2001 a seulement voulu que le mandat, qui était en cours au jour de son adoption, fût mené à son terme initial, sans exclure celui-ci du décompte du nombre de mandats pouvant être brigués. Ce mandat-là ayant déjà été renouvelé une fois en 2007, il ne peut certainement plus l’être ». La disposition transitoire dispose nettement que le Président de la République en exercice continue son mandat jusqu’à terme, c’est-à-dire sept ans, mais en précisant, dans la disposition qui suit, que toutes les autres dispositions s’appliquent à lui.
Autrement dit, la limitation du nombre de mandats s’applique à lui. Le Président de la République en fonction poursuit son mandat jusqu’à son terme (7 ans sur lesquels il a été élu en 2000 avec la Constitution du 7 mars 1963). Ainsi, on fait bénéficier exceptionnellement le principe de la non-rétroactivité du mandat : car il serait juridiquement aberrant que le Président WADE, élu pour 7 ans sous l’empire de l’ancienne Constitution de 1963 par le vote citoyen, puisse se voir imposer l’affliction non élective d’un mandat réduit à 5 ans, en étant amputé de 2 ans. C’est dans ce sens qu’il faut lire cette disposition transitoire du premier alinéa de l’article 104.
Cette transition entre deux Constitutions signifie que, exceptionnellement, la loi nouvelle du nouveau mandat (mandat de 5 ans suivant l’article 27 alinéa 1er de la nouvelle Constitution du 22 janvier 2001) ne va pas s’appliquer au mandat de 7 ans en cours déjà entamé sous l’empire de la loi ancienne (Constitution du 7 mars 1963). Donc, on ne va pas faire rétroagir le mandat de 7 ans prévu par la constitution de 1963 pour se conformer à l’exigence du mandat de 5 ans tel que prévu par la nouvelle constitution de 2001. Voilà la lecture limpide qu’il faut retenir sans possibilité de flou appelant un recours aux méthodes d’interprétation du juge sur ce premier alinéa de l’article 104.
Maintenant, il y a un second alinéa à l’article 104 qui dispose que, en dehors de ce principe de non-rétroactivité du mandat de 7 ans, toutes les autres dispositions de la présente Constitution de 2001 sont applicables au Président de la République en exercice, c’est-à-dire que le Président WADE qui bénéficie d’un mandat non rétroactif de 7 ans prévu dans l’ancienne Constitution de 1963 est soumis et se voit appliquer tous les autres articles de la nouvelle Constitution (exception non comprise donc de la rétroactivité du mandat de 5 ans de la Constitution de 2001). Et précisément parmi tous ces autres articles de la nouvelle Constitution figure la limitation du nombre de mandats présidentiels à deux (article 27 alinéa 2).
Telle est la logique de la science et de la technique juridiques. Seule la durée du mandat a été constitutionnellement réglée et tout le reste appliqué comme tel au président en fonction.
Cette précision est apportée pour circonscrire l’exception accordée sur la durée et non sur le nombre de mandats. En effet, hormis cette exception sur la durée, toutes les autres dispositions sont précisées être applicables au Président de la République en fonction. La limite du nombre de mandats à deux (2) fait partie de ces dispositions. Il est important de préciser qu’aucune disposition ne dit que le Président de la République en fonction fait exception à cette limite du nombre de mandats. Donc dans l’entendement du Constituant sénégalais, il n’y a pas une exception à la limite du nombre de mandats, cause pour laquelle il ne s’est pas prononcé sur cette question qui ne relève pas d’une difficulté ou d’une incompréhension. Pour lui, le mandat de 7 ans sous l’empire de l’ancienne Constitution du 7 mars 1963 doit être considéré comme un premier mandat et être comptabilisé dans le décompte de la nouvelle Constitution en son article 27 alinéa 2. C’est exactement ce que disent les articles 27 et 104 combinés de la Constitution de 2001. La Loi est donc claire. L’actuel Président de la République du Sénégal ne peut y déroger.
Faisons un peu un cas d’école de politique-fiction, l’hypothèse suivante : si chaque Président de la République qui arrive révise la Constitution et passe à pertes et profits son premier mandat en cours, se disant qu’il a droit maintenant à deux nouveaux mandats, le premier entamé ne comptant pas parce que instauré par la Constitution d’avant référendum, pour se trouver avec trois mandats s’il est réélu alors que le nombre de mandats est fixé à deux dans la nouvelle Constitution, dans quelle démocratie on serait ? C’est absurde, pouvoiriste et irresponsable. Le Président de la République comme les députés ne peuvent réviser que ce qui est révisable et dans les conditions prévues par la loi.
L’esprit de ces dispositions est fondamental dans notre système démocratique afin d’éviter que le pouvoir ne soit pas assumé de manière illimitée dans le temps par un président de la République. Il est inacceptable d’user de subterfuges pour contourner l’esprit des dispositions constitutionnelles. Le président de la République doit se conformer à cet esprit qui donne force à la loi. Le Président de la République est ultimement celui qui a piloté et inspiré le projet de révision constitutionnelle avec l’appui d’experts dans la matière constitutionnelle. Ce serait une contradiction avec l’esprit de l’article 27.
Le débat suscité par le changement de la durée du mandat du président de 5 à 7 ans a montré que le texte constitutionnel n’est pas parfait en ce qu’il peut comporter des ambiguïtés pour qui ne veut pas tenir compte de l’esprit du texte. Il faut donc verrouiller la durée du mandat tout comme pour le nombre de mandats en agitant le spectre de la loi référendaire ou, pourquoi pas, en imposant que ni la durée ni le nombre de mandats ne pourront faire l’objet d’une quelconque révision, comme la nature laïque de la République. Car la pratique des Chefs d’Etat ou tout simplement la tortuosité de la nature humaine ont montré qu’on ne se gêne pas pour exploiter la moindre imperfection, quitte à discréditer davantage l’inamovibilité de certaines dispositions. C’est le cas en Afrique où le vent en poupe est cette tendance à la suppression de la limitation des mandats. C’est l’image écornée du rapport des leaders politiques africains avec le pouvoir. Il y a cette volonté de confisquer le pouvoir de manière indéfinie.
Même les éclaircissements des rédacteurs de la constitution qui rappellent l’esprit dans lequel ils ont élaboré le texte sont désavoués par le Président de la République. Il serait irresponsable de cautionner un troisième mandat interdit par la Constitution qui serait une contradiction, une reculade. Abdoulaye WADE oublie-t-il qu’au Niger TANDIAN avait voulu s’octroyer un troisième mandat avant de se voir démis par l’armée et assigné depuis lors en résidence surveillée ?
En France, qui nous sert de repère, le Président de la République Nicolas SARKOZY a constitutionnalisé sa promesse faite en 2003 en tant que candidat, à savoir le principe de la clause limitative de mandat. L’article 6 issu de la révision constitutionnelle du 23 juillet 2008 dispose dorénavant : « Nul ne peut être élu plus de deux fois consécutivement ». Ce qui a le mérite d’être clair et de verrouiller le risque d’une plausible troisième candidature en France.
Par ailleurs, si on peut être réservé quant à la neutralité objective des juristes renommés que sont les professeurs Pape Demba SY et El Hadji MBODJI, respectivement secrétaire général du parti politique UDF/ Mboolomi et co-rédacteur de la Constitution de 2001 d’une part et d’autre part membre militant de l’AFP, on ne peut pas suspecter de parti pris un apolitique en la personne du Professeur Mouhamadou Mounirou SY, également co-rédacteur de la constitution de 2001, qui a révélé lors d’une manifestation publique que la Constitution de 2001 n'autorise pas une troisième candidature du Président WADE et que ce dernier « ne voulait pas faire plus de deux mandats, lors de la rédaction de la Constitution du 22 janvier 2001 ». Quid, également du juriste Ahmet NDIAYE (Docteur en Droit de l’Université Montpellier I ; Maître-Assistant Associé à l’UCAD) qui reproche au Constituant sénégalais de n’avoir pas pleinement garanti tout son dispositif de verrouillage pour empêcher toute velléité de briguer un troisième mandat à la candidature à l’élection présidentielle, à l’exemple de la France.
On ne peut croire que ces experts (Professeur Pape Demba SY ; Professeur Mouhamadou Mounirou SY ; Me Madické NIANG, mandataire du Président WADE pour le compte de la Commission chargée de rédiger la Constitution de 2001 et autres) ont sciemment élaboré le texte avec la pleine conscience que cela peut donner trois mandats au Président de la République. L’expérience africaine de la pratique du pouvoir aurait dû inciter le Constituant sénégalais à être plus vigilant, à ne pas tomber dans les travers de l’euphorie de l’Alternance en accordant un blanc-seing de bonne moralité politique à la classe politique mais à renforcer davantage son verrouillage objectivement scientifique. De plus, c’est faire une insulte à l’intelligentsia de la science constitutionnelle que de faire prospérer l’idée selon laquelle les propos de praticiens du droit de renom [Mouhamadou Mounirou SY, El Hadji MBODJI, Pape Demba SY, Babacar GUEYE, Ameth NDIAYE, Mody GADIAGA et tant d’autres] sont une « grosse erreur » de constitutionnalistes qui « distillent des informations mal fondées en interprétant maladroitement la Constitution (…) et d’avoir intégré le premier mandat de 7 ans sous l’empire de l’ancienne Constitution » (l’avocat Maître Abdoulaye BABOU) ou encore ils « ne font pas du Droit ou bien, ils ne fondent pas leurs arguments sur le Droit mais plutôt sur la politique » et ne sont pas « sérieux » (le Premier Ministre Souleymane Ndéné NDIAYE).
Le Professeur Babacar GUEYE est persuadé qu'il n'y aura pas d'élection en 2012. Pour lui, ceci est dans l’ordre du possible en votant une loi à l’Assemblée nationale pour que ce mandat de 5 ans passe à 7 ans. De cette manière, il n’y aura pas d’élections en 2012.
En 2008, l’article 27 de la Constitution a été modifié pour ramener le mandat présidentiel de 5 ans à 7 ans et, vu la personnalité controversée du Président Abdoulaye WADE à vouloir conserver le pouvoir, le locataire du Palais présidentiel pourrait être tenté de se faire appliquer ce mandat de 7 ans pour préparer ses arrières et sa dévolution monarchique. L’option retenue par le régime libéral du Président WADE pour contourner la voie référendaire dressée sur son chemin par le texte fondamental déploie des conséquences manifestement néfastes pour la candidature de leur tête de file en 2012.
La candidature du Président WADE en 2012 a déjà reçu une sentence d’irrecevabilité de par la propension exaltante du Président WADE à s’épancher dans les médias occidentaux, reflet d’un complexe jamais caché mais qui va lui être fatal. Ainsi, le Président WADE, lui-même, lors d'une conférence de presse accordée le 1er mars 2007 à un journaliste français indiquait déjà qu'il ne pourrait se représenter comme candidat pour 2012 car la Constitution de 2001 le lui interdit : "Non, j'y peux rien parce que j'ai bloqué le nombre de mandat à deux. Donc ce n'est pas possible. Donc je ne peux pas me représenter. Je le dis sérieusement, je ne me représenterais pas".
Cette bande sonore est un « aveu » particulier même s’il ne peut pas être rangé dans la catégorie des modes opératoires d’aveux légaux circonscrits (l’aveu judiciaire et l’aveu extrajudiciaire) tel qu’ils sont conditionnés pour être acceptés. On peut toutefois le ranger dans la catégorie des présomptions simples et de la catégorie du commencement de preuve, et même du témoignage (audition du journaliste, par exemple).
Dans quelles conditions les nouvelles technologies telles que la télévision, la radiodiffusion, internet, les appels et messagerie téléphoniques ou la vidéoconférence, le numérique entre autres peuvent-elles être admises comme moyens de preuve ou utilisées pour entendre un témoin?
D’abord, ce sont des modes modernes de communication comme preuve. Ainsi, ces procédés de preuve nouveaux (captation, enregistrement ou transmission) font partie aujourd’hui de l’admissibilité comme moyen de preuve. Le parquet a toujours eu recours aux services des opérateurs de téléphonie mobile pour sanctionner des infractions. Il en est de même des moyens audiovisuels et des moyens écrits avec des décisions de justice à foison.
Actuellement, l’arsenal juridique sénégalais s’est bonifié avec la loi de 2008 sur la cybercriminalité.
Le prétexte de tout ceci, c’est pour étayer que la bande sonore en date du 1er mars 2007 relative à l’interview accordée par le Président WADE entre bien en droite ligne dans les procédés de droit comme mode de preuve. De plus, le concerné (le Président WADE) a accepté le principe de l’interview télévisée (consentement libre et éclairé) et ne peut pas ignorer que ses propos sont enregistrés et diffusés dans le public (rien n’a été fait à son insu), puisqu’il s’est présenté comme une personne publique dans un lieu public (rejet de tout argument à titre privé ou confidentiel). En définitive, le procédé est légal et loyal, la bande sonore est recevable comme moyen de preuve pour l’irrecevabilité de sa déclaration de candidature en vue de l’élection présidentielle de 2012.
Le Président WADE a alors objectivement un sérieux problème, une grande difficulté; le référendum qu’il est obligé d’organiser, suivant l’alinéa 3 de l’article 27. Et briguer un troisième mandat sans réviser l’alinéa 2 de l’article 27 par une loi référendaire, ne pas le réviser ou le réviser par une loi parlementaire, serait de la part du président Wade une violation flagrante et bonapartiste de la Constitution dont il est le principal maître d’ouvrage. Une troisième investiture serait donc une "violation" de la Constitution, la préparation d’un coup d’Etat constitutionnel. Mais disons plutôt que c’est un coup d’Etat hors Constitution ou anti-constitutionnel car ce coup de forcing n’est plus juridique mais politique ou politicien, un coup de force pour arracher un pouvoir constitutionnel auquel il n’a pas droit. Le cas Tandja au Niger est plein d’enseignement.
Au surplus, il y a un problème de morale politique : c’est le problème d'âge. On risque de réélire un président de la République qui aura presque 90 ans, avec des risques incommensurables pour la vie de la Nation.
La question qui se pose est celle-ci : comment les cinq sages vont interpréter les dispositions de la Constitution à ce sujet en cas de saisine?
Une question très délicate que le Conseil Constitutionnel devrait trancher. Ces derniers peuvent même faire recours aux actes préparatoires de la Constitution et même auditionner la commission ad hoc qui a rédigé la Constitution pour s’imprégner de sa pensée et l’esprit de la loi, en cas de nécessité.
Quoi qu'il en soit, la question de la validité ou non de la candidature du Président WADE sera tranchée après le dépôt officiel des candidatures par le Conseil Constitutionnel. Les candidats à la présidentielle de 2012 peuvent déposer un recours devant le Conseil Constitutionnel pour invalider la candidature Du Président WADE. Mais pour Ibrahima SENE du parti politique, le PIT, "WADE a verrouillé" le Conseil Constitutionnel en nommant récemment à sa tête un nouveau président, Cheikh Tidiane DIAKHATE, présenté comme favorable au chef de l'Etat sénégalais, alors que le PS voit en cette nomination le symbole de la domestication d’une certaine frange de la justice avec le contentieux des listes de la Coalition Sopi forcloses à Ndindy et de Ndoulo, le contentieux de Mbane, de Louga, entre autres dans lesquels la Cour d’Appel de Dakar, clé de voûte des élections locales, avait manifesté son parti pris révoltant pour la coalition du régime libéral avec comme président de cette cour d’Appel de Dakar un certain… Cheikh Tidiane DIAKHATE! On ne peut rien donc attendre de ces mêmes juges promus et chargés de trancher les questions constitutionnelles. S’ils ne déclarent pas leur incompétence, ils s’attachent aveuglément à une interprétation littérale étriquée de la lettre aux dépens de l’esprit de la loi pour s’adonner à des forfaitures indignes de la robe de magistrat. Les Cinq Sages du Conseil Constitutionnel ne porteront ni initiative ni rappel à l’ordre au Président de la République pour faire respecter l’esprit d’une disposition aussi simple que la limitation impérative des deux mandats. Ils regardent donc le Président de la République déclarer sa candidature pour un troisième mandat sans lever le petit doigt. Ils attendent sûrement d’être saisis pour se déclarer incompétents ou valider la candidature du Président de la République. Leur silence bruissant de paroles s’apparente à un prélude de déni de justice, comme il est de jurisprudence dans cette haute juridiction. Ce n'est pas ce Conseil Constitutionnel dans sa composition actuelle de chiffes molles qui dira objectivement le Droit selon lequel le sieur Abdoulaye WADE ne peut pas se présenter en 2012, parce que « rattrapé par les hivernages », pour reprendre l’expression persifleuse d’un atypique et spécieux avocat sénégalais.
En conclusion, la candidature du Président WADE à la présidentielle de 2012 pourrait être recevable, à la condition que ce dernier se conforme aux dispositions de l’alinéa 3 de l’article 27 qui est formel et sans appel, en révisant l’alinéa 2 de l’article 27 (qui limite le nombre de mandats à deux) par un référendum et seulement un référendum sur la délimitation du nombre de mandats. S’il gagne ce référendum, la recevabilité de sa candidature est certaine, et il pourra briguer un troisième mandat à la présidentielle de 2012. Ainsi, la seule voie de droit qui est ouverte et offerte au camp de la majorité présidentielle semble être la voie référendaire. Pour briguer un troisième mandat il est impératif pour le Président WADE de solliciter, pour la quatrième fois, le peuple souverain sénégalais en lui demandant la possibilité de passer outre le verrouillage constitutionnel limitant le nombre de mandats à deux. Cette impasse ou faille juridique pourra être fermée par l’opposition si elle dame le pion au camp présidentiel en remportant la présidentielle et en prenant exemple sur la France (révision constitutionnelle du 23 juillet 2008, cf. page 5 in fine et page 6 in limine litis de la présente contribution) qui a systématiquement verrouillé un tel cas de figure.
Laissons Serigne Moustapha SY des moustarchidatines parapher cette apport contributif par ses sages propos : «il est dangereux pour un homme d’Etat de s’accrocher au pouvoir alors que Dieu a sonné sa fin ».
Clarté Egalité
Dix ans de gestion des affaires et de management des hommes : Wade, le pape de l'incompétence
Homme d’idées et d’initiatives pour qui «voyager, c’est gouverner», universitaire défaillant dans l’exercice juste et démocratique du pouvoir, Abdoulaye Wade apparaît aujourd’hui comme un chef d’Etat incompétent eu égard à la déception infligée aux Sénégalais dans la gestion des affaires du pays. Dix ans après son avènement, on se rend compte que l’homme élu avec espoir le 19 mars 2000 est à la fois mauvais gestionnaire et piètre manager. La décomposition du tissu industriel national, la montée en flèche de la pauvreté, la promotion d’une caste d’entrepreneurs féodaux et une nette volonté de confisquer le pouvoir au profit d’un fils encore plus incompétent, ont transformé le Sénégal en une République prédatrice au service d’une entreprise de patrimonialisation mafieuse. Dix ans après, on se rend compte que Me Wade est une véritable fiction sur qui il ne fallait pas compter.
De quoi Abdoulaye Wade n’est-il pas le nom ? De mille et une choses. Disons, de mille et une qualités : compétence, sérieux, probité, moralité, sagesse, patriotisme, justice, équité…A côté de telles vertus qui structurent l’action des (rares) véritables hommes d’Etat qui essaiment à travers le monde, le Président sénégalais fait piètre figure parce qu’il est à l’autre bout de cette échelle des valeurs, là où s’entrechoquent les antithèses négatives.
En quoi le Président Wade peut-il revendiquer de la compétence, en dehors de son domaine réservé, celui de l’agitation intellectuelle et idéologique permanente ? Son titre de gloire suprême revendiqué en dix ans de pouvoir, c’est l’érection d’autoroutes urbaines et d’autres infrastructures à Dakar, principalement. Or, avec seulement le tiers des moyens colossaux alloués à l’Anoci, la tête la plus brûlée de la haute Fonction publique nationale n’aurait pas fait moins bien que ces murs de Berlin qui ont corrompu le visage de la capitale, distendu les liens sociaux et physiques à coup de béton armé, et démultiplié la consommation de carburant de milliers de propriétaires de véhicules. La malédiction avec Wade est que même dans ce secteur stratégique des infrastructures, le favoritisme, la gabegie et la dissimulation ont brouillé un bilan qui aurait pu être défendu. Mais lorsqu’il ferme les yeux sur des détournements évidents de plusieurs milliards de francs Cfa, en comptant sur la lassitude collective, peut-on lui reconnaître un minimum de sagesse ? L’Anoci était une affaire de famille, l’absolution du divin occupant du Palais l’a «résolue» comme telle.
UN HOMME INJUSTE
De quoi Wade n’est-il pas le nom ? De l’équité. Face au méga scandale financier et technique dont l’Anoci de Karim Wade s’est rendu coupable, des Sénégalais bon teint ont été jetés en prison à partir d’incriminations fallacieuses, alors que les pires pratiques de responsables libéraux et affiliés sont couvertes et absoutes, du sommet de l’Etat aux collectivités locales. Normal, car le Président traîne un très inquiétant déficit de légitimité et d’autorité sur ce plan-là. Ses mensonges retentissants à propos de deux affaires emblématiques d’une gouvernance calamiteuse sifflotent encore aux oreilles des Sénégalais : les 7 milliards de francs reçus de mystérieux «amis taïwanais», et l’origine des fonds pour la réfection de l’avion présidentiel (au fait, il est où cet appareil ?). Pour ce double écart qui méritait la destitution comme la moindre des sanctions, le Premier des Sénégalais est le dernier donneur de leçons à qui ses sujets prêteraient attention.
Que sait faire le Président Wade ? Faire respecter la Justice ? Cela lui est impossible en pratique. Opposant, il était le héraut de la jeunesse, l’idole par qui s’exprimaient les déceptions et frustrations de centaines de milliers de Sénégalais, le réceptacle de violences urbaines suscitées ou spontanées. Président, il couvre de la puissance du pouvoir le feuilleton macabre de jeunes gens qui meurent comme des petits cafards dans les commissariats du pays ; il gracie une horde de meurtriers condamnés par la…Justice, ceux de l’affaire Me Sèye, ceux du banditisme perpétré contre des sièges de journaux ; il se bouche les oreilles sur l’enrichissement honteux de ses parents, proches et amis. Des débuts d’enquête contre certains de ses proches pris dans le traquenard de l’argent sale, comme dans cette affaire dévoilée par le Centif ? Cela lui est intolérable. La complicité militante de magistrats carriéristes et sans état d’âme lui sert de paratonnerre.
DELINQUANCE CONSTITUTIONNELLE
De quoi Wade n’est-il pas le nom ? De la parole donnée. Comme son sosie de France, il nous promettait une République irréprochable, une démocratie exemplaire. Dix ans après, la Constitution de janvier 2001 est devenue un monstre au service de ses ambitions en attendant d’autres agressions décisives d’ici à la Présidentielle annoncée de 2012. La délinquance constitutionnelle est passée par là.
De quoi Wade n’est-il pas le nom ? De la justice sociale. Comme Sarkozy avec le pouvoir d’achat des Français, il nous a fait miroiter le kilogramme de riz à 60 francs Cfa, mais le principe derrière cet engagement était plus noble : permettre à chaque Sénégalais d’accéder à un niveau de vie correct. Mais après une décennie de gouvernance, Wade s’est trouvé d’autres amis et centres d’intérêt qui l’ont éloigné du peuple. Son pouvoir vit au rythme de la privatisation des terres et des airs, sous un processus encore inachevé de patrimonialisation de l’Etat et des moyens de production. Cette option mafieuse qui met sur la touche les leviers traditionnels du contrôle d’Etat a libéré dans la nature de petits charognards sans dessein pour le pays autre que celui d’accumuler à l’infini les prébendes au-dessus des misères du plus grand nombre. Pour leur promotion, ces nouveaux caporaux d’industrie ont nécessairement procédé comme les bourgeois des anciens royaumes de France : acheter au prix fort des «charges» qui leur donnent en retour le droit de s’enrichir en toute tranquillité. Wade, Pca de l’entreprise familiale Sénégal, a créé de toutes pièces cette nomenclature irréductiblement affairiste qu’il entend pérenniser comme poste avancé de la base sociale conservatrice et réactionnaire d’un régime d’accaparement. Sa stratégie est claire : garder le pays pour les siens le temps qu’il faut. A tout prix. Quoi qu’il faille lui en coûter. A-t-il perdu la tête ? Non, cynisme, simplement. Les Drh de sa trempe, aveuglés par la puissance de leur position managériale, sont ceux qui installent les pires climats sociaux dans leur entreprise. Le Sénégal en fait l’expérience en dépit d’une stabilité qui obéit à des mécanismes plus socio-traditionnels que politiques.
LE PIRE DES ENTRAINEURS
De quoi Wade est-il capable ? Un plan Jaxaay avec ses maisons de misère malgré un budget officiel de 52 milliards de francs, un pèlerinage à la Mecque conduit en toute opacité, des inondations cauchemardesques dont il découvre l’horreur et la persistance un samedi après-midi, en hélicoptère ; de l’électricité fuyante dans un secteur où 750 milliards de francs auraient été injectés… La Suneor (ex-Sonacos) presque cédée au franc symbolique à l’un des porteurs d’eau du prince héritier, les Ics déchiquetées en quatre ans d’exercice avant d’être remises dans le circuit, la Sar affaiblie et remariée à des capitalistes arabes, les mines d’or du Sud-est du pays cadenassées dans une nébulosité absolue, Air Sénégal international cassée pour laisser place à Sénégal Airlines, le monde rural instrumenté pour un dessein inavouable à travers un syndicat d’Etat… Et pour l’histoire, une statue nord-coréenne à 15 milliards de francs pour la renaissance de l’Afrique, à la gloire du maître. Que sait faire et bien faire notre Président ?
De quoi Wade n’est-il pas le nom ? De la cohérence. De la rationalité. Théoricien des gouvernements laminoir, des ministres kleenex, des conseillers fantoches, des Dg bas de gamme, tous corvéables à quelques exceptions, le Président sénégalais apparaît objectivement comme ce piètre entraîneur qui, à force de volonté négative, rétrograde son équipe en première division de district, soit à une dizaine d’échelons de l’élite dite Ligue 1. Sa théorie molle sur des joueurs (ministres) changeables à souhait et tout le temps est une faille essentielle dans ses capacités managériales. Un bon manager peut-il favoriser à ce point l’instabilité de son groupe de performance ?
UNE SANTE EN QUESTION
De quoi Wade n’est-il pas le nom ? De la bonne santé. Il n’y a pas de doute : le Président a atteint le fond du trou le jour où il a lâché sur la radio La Voix de l’Amérique qu’il ne connaît pas qui est Babacar Gaye, son ci-devant Directeur de cabinet politique. Les propagandistes libéraux ont vite fait de passer à la page suivante, mais l’histoire retiendra que le président de la République du Sénégal a dit un jour ignorer le nom de son plus proche collaborateur. Un peu comme si Sarkozy disait sur France inter qu’il ne connaît pas Claude Guéant. Où que Obama ne reconnaissait plus Rahm Emanuel. Wade est-il en bonne santé ? Ses fans disent oui. Mais que n’eût-il clos le débat, à son avantage en plus, en autorisant la publication de son bulletin médical pour respecter une promesse faite, même pas au peuple sénégalais, mais à un journaliste de la chaîne de télé France 24 au cours de l’émission Le Talk de Paris ? Si le flou perdure si lourdement à ce sujet, il faut croire qu’il y a anguille sous roche. Où faut-il alors ranger ses incohérences verbales sur la Bande verte sahélienne lors d’un séjour au Tchad il y a quelques semaines ? Comment analyser son idée de faire islamiser Haïti par les mourides…? Dernière nouvelle : A Brazzaville pour les festivités du cinquantenaire de l’Indépendance du Congo, un coup de fatigue bien senti a empêché sa présence au dîner de gala des chefs d’Etat hôtes de Denis Sassou Nguesso…
De quoi Abdoulaye Wade est-il le nom ? De l’égoïsme. De son plaisir personnel, celui des siens et de ses affidés. Le plaisir trouvé ailleurs qui l’éloigne du pays une bonne partie de l’année. Pour voir ses militants. Et peut-être pour se soigner à l’abri des indiscrétions. A ses yeux, «voyager, c’est gouverner». Cet homme est une véritable fiction. En plus d’être incompétent. Qui l’eût cru ?
Par Momar DIENG - momar@lequotidien.snmomar@lequotidien.sn
Homme d’idées et d’initiatives pour qui «voyager, c’est gouverner», universitaire défaillant dans l’exercice juste et démocratique du pouvoir, Abdoulaye Wade apparaît aujourd’hui comme un chef d’Etat incompétent eu égard à la déception infligée aux Sénégalais dans la gestion des affaires du pays. Dix ans après son avènement, on se rend compte que l’homme élu avec espoir le 19 mars 2000 est à la fois mauvais gestionnaire et piètre manager. La décomposition du tissu industriel national, la montée en flèche de la pauvreté, la promotion d’une caste d’entrepreneurs féodaux et une nette volonté de confisquer le pouvoir au profit d’un fils encore plus incompétent, ont transformé le Sénégal en une République prédatrice au service d’une entreprise de patrimonialisation mafieuse. Dix ans après, on se rend compte que Me Wade est une véritable fiction sur qui il ne fallait pas compter.
De quoi Abdoulaye Wade n’est-il pas le nom ? De mille et une choses. Disons, de mille et une qualités : compétence, sérieux, probité, moralité, sagesse, patriotisme, justice, équité…A côté de telles vertus qui structurent l’action des (rares) véritables hommes d’Etat qui essaiment à travers le monde, le Président sénégalais fait piètre figure parce qu’il est à l’autre bout de cette échelle des valeurs, là où s’entrechoquent les antithèses négatives.
En quoi le Président Wade peut-il revendiquer de la compétence, en dehors de son domaine réservé, celui de l’agitation intellectuelle et idéologique permanente ? Son titre de gloire suprême revendiqué en dix ans de pouvoir, c’est l’érection d’autoroutes urbaines et d’autres infrastructures à Dakar, principalement. Or, avec seulement le tiers des moyens colossaux alloués à l’Anoci, la tête la plus brûlée de la haute Fonction publique nationale n’aurait pas fait moins bien que ces murs de Berlin qui ont corrompu le visage de la capitale, distendu les liens sociaux et physiques à coup de béton armé, et démultiplié la consommation de carburant de milliers de propriétaires de véhicules. La malédiction avec Wade est que même dans ce secteur stratégique des infrastructures, le favoritisme, la gabegie et la dissimulation ont brouillé un bilan qui aurait pu être défendu. Mais lorsqu’il ferme les yeux sur des détournements évidents de plusieurs milliards de francs Cfa, en comptant sur la lassitude collective, peut-on lui reconnaître un minimum de sagesse ? L’Anoci était une affaire de famille, l’absolution du divin occupant du Palais l’a «résolue» comme telle.
UN HOMME INJUSTE
De quoi Wade n’est-il pas le nom ? De l’équité. Face au méga scandale financier et technique dont l’Anoci de Karim Wade s’est rendu coupable, des Sénégalais bon teint ont été jetés en prison à partir d’incriminations fallacieuses, alors que les pires pratiques de responsables libéraux et affiliés sont couvertes et absoutes, du sommet de l’Etat aux collectivités locales. Normal, car le Président traîne un très inquiétant déficit de légitimité et d’autorité sur ce plan-là. Ses mensonges retentissants à propos de deux affaires emblématiques d’une gouvernance calamiteuse sifflotent encore aux oreilles des Sénégalais : les 7 milliards de francs reçus de mystérieux «amis taïwanais», et l’origine des fonds pour la réfection de l’avion présidentiel (au fait, il est où cet appareil ?). Pour ce double écart qui méritait la destitution comme la moindre des sanctions, le Premier des Sénégalais est le dernier donneur de leçons à qui ses sujets prêteraient attention.
Que sait faire le Président Wade ? Faire respecter la Justice ? Cela lui est impossible en pratique. Opposant, il était le héraut de la jeunesse, l’idole par qui s’exprimaient les déceptions et frustrations de centaines de milliers de Sénégalais, le réceptacle de violences urbaines suscitées ou spontanées. Président, il couvre de la puissance du pouvoir le feuilleton macabre de jeunes gens qui meurent comme des petits cafards dans les commissariats du pays ; il gracie une horde de meurtriers condamnés par la…Justice, ceux de l’affaire Me Sèye, ceux du banditisme perpétré contre des sièges de journaux ; il se bouche les oreilles sur l’enrichissement honteux de ses parents, proches et amis. Des débuts d’enquête contre certains de ses proches pris dans le traquenard de l’argent sale, comme dans cette affaire dévoilée par le Centif ? Cela lui est intolérable. La complicité militante de magistrats carriéristes et sans état d’âme lui sert de paratonnerre.
DELINQUANCE CONSTITUTIONNELLE
De quoi Wade n’est-il pas le nom ? De la parole donnée. Comme son sosie de France, il nous promettait une République irréprochable, une démocratie exemplaire. Dix ans après, la Constitution de janvier 2001 est devenue un monstre au service de ses ambitions en attendant d’autres agressions décisives d’ici à la Présidentielle annoncée de 2012. La délinquance constitutionnelle est passée par là.
De quoi Wade n’est-il pas le nom ? De la justice sociale. Comme Sarkozy avec le pouvoir d’achat des Français, il nous a fait miroiter le kilogramme de riz à 60 francs Cfa, mais le principe derrière cet engagement était plus noble : permettre à chaque Sénégalais d’accéder à un niveau de vie correct. Mais après une décennie de gouvernance, Wade s’est trouvé d’autres amis et centres d’intérêt qui l’ont éloigné du peuple. Son pouvoir vit au rythme de la privatisation des terres et des airs, sous un processus encore inachevé de patrimonialisation de l’Etat et des moyens de production. Cette option mafieuse qui met sur la touche les leviers traditionnels du contrôle d’Etat a libéré dans la nature de petits charognards sans dessein pour le pays autre que celui d’accumuler à l’infini les prébendes au-dessus des misères du plus grand nombre. Pour leur promotion, ces nouveaux caporaux d’industrie ont nécessairement procédé comme les bourgeois des anciens royaumes de France : acheter au prix fort des «charges» qui leur donnent en retour le droit de s’enrichir en toute tranquillité. Wade, Pca de l’entreprise familiale Sénégal, a créé de toutes pièces cette nomenclature irréductiblement affairiste qu’il entend pérenniser comme poste avancé de la base sociale conservatrice et réactionnaire d’un régime d’accaparement. Sa stratégie est claire : garder le pays pour les siens le temps qu’il faut. A tout prix. Quoi qu’il faille lui en coûter. A-t-il perdu la tête ? Non, cynisme, simplement. Les Drh de sa trempe, aveuglés par la puissance de leur position managériale, sont ceux qui installent les pires climats sociaux dans leur entreprise. Le Sénégal en fait l’expérience en dépit d’une stabilité qui obéit à des mécanismes plus socio-traditionnels que politiques.
LE PIRE DES ENTRAINEURS
De quoi Wade est-il capable ? Un plan Jaxaay avec ses maisons de misère malgré un budget officiel de 52 milliards de francs, un pèlerinage à la Mecque conduit en toute opacité, des inondations cauchemardesques dont il découvre l’horreur et la persistance un samedi après-midi, en hélicoptère ; de l’électricité fuyante dans un secteur où 750 milliards de francs auraient été injectés… La Suneor (ex-Sonacos) presque cédée au franc symbolique à l’un des porteurs d’eau du prince héritier, les Ics déchiquetées en quatre ans d’exercice avant d’être remises dans le circuit, la Sar affaiblie et remariée à des capitalistes arabes, les mines d’or du Sud-est du pays cadenassées dans une nébulosité absolue, Air Sénégal international cassée pour laisser place à Sénégal Airlines, le monde rural instrumenté pour un dessein inavouable à travers un syndicat d’Etat… Et pour l’histoire, une statue nord-coréenne à 15 milliards de francs pour la renaissance de l’Afrique, à la gloire du maître. Que sait faire et bien faire notre Président ?
De quoi Wade n’est-il pas le nom ? De la cohérence. De la rationalité. Théoricien des gouvernements laminoir, des ministres kleenex, des conseillers fantoches, des Dg bas de gamme, tous corvéables à quelques exceptions, le Président sénégalais apparaît objectivement comme ce piètre entraîneur qui, à force de volonté négative, rétrograde son équipe en première division de district, soit à une dizaine d’échelons de l’élite dite Ligue 1. Sa théorie molle sur des joueurs (ministres) changeables à souhait et tout le temps est une faille essentielle dans ses capacités managériales. Un bon manager peut-il favoriser à ce point l’instabilité de son groupe de performance ?
UNE SANTE EN QUESTION
De quoi Wade n’est-il pas le nom ? De la bonne santé. Il n’y a pas de doute : le Président a atteint le fond du trou le jour où il a lâché sur la radio La Voix de l’Amérique qu’il ne connaît pas qui est Babacar Gaye, son ci-devant Directeur de cabinet politique. Les propagandistes libéraux ont vite fait de passer à la page suivante, mais l’histoire retiendra que le président de la République du Sénégal a dit un jour ignorer le nom de son plus proche collaborateur. Un peu comme si Sarkozy disait sur France inter qu’il ne connaît pas Claude Guéant. Où que Obama ne reconnaissait plus Rahm Emanuel. Wade est-il en bonne santé ? Ses fans disent oui. Mais que n’eût-il clos le débat, à son avantage en plus, en autorisant la publication de son bulletin médical pour respecter une promesse faite, même pas au peuple sénégalais, mais à un journaliste de la chaîne de télé France 24 au cours de l’émission Le Talk de Paris ? Si le flou perdure si lourdement à ce sujet, il faut croire qu’il y a anguille sous roche. Où faut-il alors ranger ses incohérences verbales sur la Bande verte sahélienne lors d’un séjour au Tchad il y a quelques semaines ? Comment analyser son idée de faire islamiser Haïti par les mourides…? Dernière nouvelle : A Brazzaville pour les festivités du cinquantenaire de l’Indépendance du Congo, un coup de fatigue bien senti a empêché sa présence au dîner de gala des chefs d’Etat hôtes de Denis Sassou Nguesso…
De quoi Abdoulaye Wade est-il le nom ? De l’égoïsme. De son plaisir personnel, celui des siens et de ses affidés. Le plaisir trouvé ailleurs qui l’éloigne du pays une bonne partie de l’année. Pour voir ses militants. Et peut-être pour se soigner à l’abri des indiscrétions. A ses yeux, «voyager, c’est gouverner». Cet homme est une véritable fiction. En plus d’être incompétent. Qui l’eût cru ?
Par Momar DIENG - momar@lequotidien.snmomar@lequotidien.sn