La taxe sur les transactions financières (TTF), aussi appelée « Robin des bois » ou Tobin, du nom de l'économiste qui l'a imaginée dans les années 1970, devait entrer en vigueur au 1er janvier 2016 en Europe. Mais elle semble, sinon enterrée, du moins s'éloigner de plus en plus.
Pourtant, le chef de l'Etat et son premier ministre ont été rappelés à l'ordre par 140 députés de leurs propres rangs, qui ont signé une lettre jeudi demandant à ce « que notre pays conserve intacte l'ambition initiale du projet qui inclut “toutes les transactions financières” ». Parmi ces derniers figurent entre autres l'ancien premier ministre Jean-Marc-Ayrault, Karine Berger, Aurélie Filippetti, Elisabeth Guigou, François Lamy…
CHANTAGE À LA DÉLOCALISATION
Cette lettre a été largement partagée pendant le week-end, alors que les 11 pays européens désireux de créer un tel impôt ne sont pas parvenus à se mettre d'accord le 9 décembre dernier à Bruxelles.
Lancée au lendemain de la crise financière de 2008, l'idée de la TTF était de prélever 0,1 % sur les échanges d'actions et 0,01 % sur les produits dérivés. Ceux-là, destinés à assurer leurs acheteurs contre des risques financiers (de change, de taux…), ont connu ces dernières années une croissance exponentielle.
Une banque française, BNP Paribas, en est un des champions européens, voire mondiaux. Et l'ensemble du secteur a brandi la menace des délocalisations si la taxe s'appliquait en l'état.
Lire notre enquête : Comment les lobbies détricotent la taxe sur les transactions financières
LES SOCIALISTES DEMANDENT DES COMPTES
La taxe, qui ne visait pas à « tuer » l'activité bancaire, mais à l'encadrer (en rendant moins intéressants les échanges les plus spéculatifs), avait aussi pour object de redistribuer une partie de ces profits (environ 35 milliards d'euros par an si l'on incluait tous les produits dérivés dans l'assiette taxable) vers le développement humanitaire, les projets écologiques et la recherche sur les maladies, comme le sida.
Les associations militant pour cette taxe (Aides, Oxfam et Attac, notamment) ont rappelé que cette mesure devait au départ, selon les vœux de François Hollande, entrer en vigueur… en 2013. Elle se sont également félicité de l'initiative des députés, demandant au président de la République de « recadrer [le ministre des finances] Michel Sapin ».
Dans leur lettre de jeudi, les socialistes signataires expliquent :
« C'est la France qui a proposé de réduire l'assiette d'une telle taxe, la limitant aux actions et aux contrats d'assurance contre le risque de défaut de paiement [CDS – credit default swap], soit 3 % des produits dérivés. Cette proposition réduirait largement le rendement de cette taxe, le rendant encore plus limité que la taxe française créée en 2012. »
LES RENONCEMENTS DE BERCY
Le projet de loi de finances 2015 table sur un rendement de 700 millions d'euros pour la version française de la taxe Tobin, en vigueur depuis trois ans. Loin des premières estimations qui tablaient sur un rendement de l'ordre de 1,5 milliard d'euros annuel.
En cause, un torpillage en règle de l'assiette taxable : alors que la taxe aurait pu être renforcée par la taxation du trading haute fréquence, c'est aussi un gouvernement Hollande qui l'a fait échouer en France. Bercy a fait pression sur sa majorité et son rapporteur, Christian Eckert, a depuis été nommé secrétaire d'Etat au budget.
Lire : Trading haute fréquence, l'histoire d'un renoncement
Même les autorités britanniques ont été plus ambitieuses dans leur décision de taxer le secteur bancaire : le stamp duty (« droit de timbre ») rapporte quelque 3 milliards d'euros par an, grâce à une large assiette de 0,5 % sur tous les échanges d'actions, contre 700 millions d'euros pour la taxe française (entrée en vigueur en 2012).
Hongkong, Singapour ou encore Taïwan ont également mis en place, à des degrés divers, une telle taxation de leur place financière.
En savoir plus sur http://www.lemonde.fr/les-decodeurs/article/2014/12/22/comment-la-taxe-sur-les-transactions-financieres-est-torpillee-par-la-france_4539162_4355770.html#vGftpsFrk9UkkxJV.99
Pourtant, le chef de l'Etat et son premier ministre ont été rappelés à l'ordre par 140 députés de leurs propres rangs, qui ont signé une lettre jeudi demandant à ce « que notre pays conserve intacte l'ambition initiale du projet qui inclut “toutes les transactions financières” ». Parmi ces derniers figurent entre autres l'ancien premier ministre Jean-Marc-Ayrault, Karine Berger, Aurélie Filippetti, Elisabeth Guigou, François Lamy…
CHANTAGE À LA DÉLOCALISATION
Cette lettre a été largement partagée pendant le week-end, alors que les 11 pays européens désireux de créer un tel impôt ne sont pas parvenus à se mettre d'accord le 9 décembre dernier à Bruxelles.
Lancée au lendemain de la crise financière de 2008, l'idée de la TTF était de prélever 0,1 % sur les échanges d'actions et 0,01 % sur les produits dérivés. Ceux-là, destinés à assurer leurs acheteurs contre des risques financiers (de change, de taux…), ont connu ces dernières années une croissance exponentielle.
Une banque française, BNP Paribas, en est un des champions européens, voire mondiaux. Et l'ensemble du secteur a brandi la menace des délocalisations si la taxe s'appliquait en l'état.
Lire notre enquête : Comment les lobbies détricotent la taxe sur les transactions financières
LES SOCIALISTES DEMANDENT DES COMPTES
La taxe, qui ne visait pas à « tuer » l'activité bancaire, mais à l'encadrer (en rendant moins intéressants les échanges les plus spéculatifs), avait aussi pour object de redistribuer une partie de ces profits (environ 35 milliards d'euros par an si l'on incluait tous les produits dérivés dans l'assiette taxable) vers le développement humanitaire, les projets écologiques et la recherche sur les maladies, comme le sida.
Les associations militant pour cette taxe (Aides, Oxfam et Attac, notamment) ont rappelé que cette mesure devait au départ, selon les vœux de François Hollande, entrer en vigueur… en 2013. Elle se sont également félicité de l'initiative des députés, demandant au président de la République de « recadrer [le ministre des finances] Michel Sapin ».
Dans leur lettre de jeudi, les socialistes signataires expliquent :
« C'est la France qui a proposé de réduire l'assiette d'une telle taxe, la limitant aux actions et aux contrats d'assurance contre le risque de défaut de paiement [CDS – credit default swap], soit 3 % des produits dérivés. Cette proposition réduirait largement le rendement de cette taxe, le rendant encore plus limité que la taxe française créée en 2012. »
LES RENONCEMENTS DE BERCY
Le projet de loi de finances 2015 table sur un rendement de 700 millions d'euros pour la version française de la taxe Tobin, en vigueur depuis trois ans. Loin des premières estimations qui tablaient sur un rendement de l'ordre de 1,5 milliard d'euros annuel.
En cause, un torpillage en règle de l'assiette taxable : alors que la taxe aurait pu être renforcée par la taxation du trading haute fréquence, c'est aussi un gouvernement Hollande qui l'a fait échouer en France. Bercy a fait pression sur sa majorité et son rapporteur, Christian Eckert, a depuis été nommé secrétaire d'Etat au budget.
Lire : Trading haute fréquence, l'histoire d'un renoncement
Même les autorités britanniques ont été plus ambitieuses dans leur décision de taxer le secteur bancaire : le stamp duty (« droit de timbre ») rapporte quelque 3 milliards d'euros par an, grâce à une large assiette de 0,5 % sur tous les échanges d'actions, contre 700 millions d'euros pour la taxe française (entrée en vigueur en 2012).
Hongkong, Singapour ou encore Taïwan ont également mis en place, à des degrés divers, une telle taxation de leur place financière.
En savoir plus sur http://www.lemonde.fr/les-decodeurs/article/2014/12/22/comment-la-taxe-sur-les-transactions-financieres-est-torpillee-par-la-france_4539162_4355770.html#vGftpsFrk9UkkxJV.99