Tellement inattendu que Cheikh Ndao prit immédiatement la Tarbiya de la part de Cheikh Al Islam et fit partie des premiers érudits, formés à Médina Baye et diplômés dans la traduction et l’exégèse du Coran au cours d’un Mettel.
Cheikh Ndao, gestionnaire de la Ziar de Baye Niass
Etant particulièrement doué en comptabilité, Cheikh Ndao décida de proposer ses services à Baye Niass qui l’orienta immédiatement vers Serigne Aliou Cissé et, avec ce dernier, pour régler, au nom de Baye Niass, les problèmes d’héritage selon le Droit islamique. Cheikh Ndao sera plus tard agréé pour cette fonction par la Cour d’appel.
Cheikh Ndao avait observé que Baye Niass dans son salon recevait les talibés venus verser leurs adiyas. Le saint homme plaçait sous son oreiller, sans les compter, les sommes qu’il recevait et, les distribuait, sans les compter, au fur et à mesure et presque immédiatement, aux visiteurs venus le solliciter. Et le lendemain, les dépenses alimentaires pour la famille de Baye Niass étaient difficiles à assurer, faute d’argent. Cheikh Ndao s’en ouvrit à Serigne Aliou Cissé et lui fit la proposition d’organiser à la mosquée de Médina, la collecte des adiyas de la ziarra à compter de 1955.
Serigne Aliou Cissé l’invita à venir avec lui présenter la proposition à Baye Niass qui l’accepta aussitôt. L’organisation fut annoncée et mise en place à la Grande mosquée et connut aussitôt, un certain succès qui, malheureusement, fut très éphémère. Car des gens continuaient à venir réclamer des sommes d’argent au comité de collecte, sous prétexte que c’était de la part de Baye Niass. Le bilan de cette collecte fut décevant mais encourageant. Car, pour une fois, on avait centralisé la collecte des adiyas et un comité composé de Serigne Aliou Cissé et Cheikh Ndao, avait réussi à organiser cette collecte.
L’année suivante la proposition de Cheikh Ndao, validée par Baye Niass, était que personne ne pouvait retirer de l’argent auprès du comité de collecte, sauf instruction écrite de la main de Baye Niass. Autant dire que les sollicitations se réduisirent comme peau de chagrin. Et la somme totale collectée lors de la Ziarra de 1956, s’éleva à 2 003 190 FCfa, entièrement versée dans un compte ouvert, spécialement à l’agence locale de la Banque de l’Afrique Occidentale (BAO). Dès 1958, les sommes collectées lors de la Ziarra atteignaient 4 271 525 FCfa, soit plus du double de 1956 et 6 096 115 FCfa, dix ans plus tard en 1966. Sur la période où Elhadj Cheikh Ndao a établi le bilan des sommes collectées lors des Ziarra, en trente-cinq ans de 1956 à 1991, la somme totale collectée la plus élevée, a été 10 050 000 FCfa atteinte en 1987, soit 12 ans après le rappel à Allah, de Baye Niass. Elhadj Cheikh Ndao a laissé une comptabilité rigoureuse de toutes les sommes reçues de 1956 à 1991.
Introduction des lampes dans les Gamous
Les Maoulouds de Baye Niass, depuis la fondation de Médina Baye en 1930 jusqu’à la fin de la Deuxième Guerre mondiale, se tenaient sous une petite tente dressée sur la place de Médina, située entre la demeure de Baye Niass et la Grande mosquée. Mais, presque en prolongement de l’abri fixe, situé devant l’entrée de la demeure de Baye Niass et, dont le toit était en crintin (tiges de bambous tressées). Il n’y avait pas beaucoup de monde qui venait au Gamou. Cette tente du Maouloud était éclairée par la faible lueur d’une lampe tempête. Et Baye Niass était assis sur une petite chaise entouré des fidèles. Seules les quelques personnes assises autour de lui, pouvaient voir son visage faiblement éclairé par la lampe tempête.
Au Maouloud de 1947, Elhadj Cheikh Ndao, qui avait vu chez les quelques Européens de la ville de Kaolack, des lampes à gaz du type COLEMAN plus éclairantes, décida de s’en procurer deux pour les installer une sous la tente du Maouloud et une autre, à l’endroit où les femmes préparaient les repas du soir du Maouloud. Dès que Baye Niass pénétra dans l’espace qui lui était réservé sous la tente, une immense clameur s’éleva de la foule qui pour la première fois, pouvait voir clairement son visage dans la nuit noire. Alors, il se retourna visiblement ravi et demanda d’appeler l’auteur de cette lumière intense, Cheikh Ndao qui se tenait modestement à l’écart.
En se rapprochant de Baye Niass, il reçut pour instruction d’apporter une autre lampe pour éclairer la Grande mosquée. Elhadj Cheikh Ndao se rendit sur le champ auprès du commerçant européen qui lui avait vendu les deux lampes à gaz, où il arriva aux environs de minuit, le réveilla en pleine nuit, pour lui demander presque sur le ton d’un ordre, de lui vendre une autre lampe à gaz. L’Européen lui dit que le magasin était fermé et qu’après avoir ouvert, il ne restait qu’une seule lampe à gaz. Elhadj Cheikh Ndao l’acheta immédiatement et regagna vite Médina Baye pour illuminer la Grande mosquée. C’est à la fin du Maouloud à l’aube, que Baye Niass, dans ses prières et son sermon de clôture, dit : « Ki lééral goudi gui, Yalla dina lééral mbiram » (Celui qui a éclairé cette nuit, Allah éclairera ses actions). Lorsque l’un des fils de Elhadj Cheikh Ndao, né après le Maouloud de 1947, est devenu Directeur général de la Compagnie nationale d’électricité du Sénégal et a posé un nouvel éclairage de la tente du Maouloud de Médina Baye, les gens y ont vu une réalisation de la prophétie de Baye Niass.
La tribune du Gamou
Puisque El hadj Cheikh Ndao était un visionnaire, il a été le premier initiateur de la pose d’une estrade pour le Gamou de Baye Niass. En effet, voyant que, quand Baye Niass faisait le Gamou, il était assis sur un banc, presqu’au même niveau que les talibés et que la foule s’agrandissait, ceux qui sont éloignés ne pouvaient pas le voir, Cheikh Ndao a fait fabriquer une table en bois et y a placé le banc sur lequel Baye Niass s’asseyait et du coup, devenait visible de très loin. Plus tard, au début des années 1950, c’est l’armée française qui venait installer une tribune sous la tente et mettait en service un groupe électrogène pour éclairer les lieux du Maouloud. Cette table en bois et ce banc ont été récupérés et transférés au domicile de El hadj Cheikh Ndao.
Organisation de l’accueil des fidèles pour le Gamou
El Hadj Cheikh Ndao a été souvent délégué par Baye Niass pour convertir des gens à l’Islam, pour accueillir et loger des hôtes de Baye Niass en toutes occasions et en particulier au cours du Maouloud, phénomène qui continue toujours avec ses descendants dans sa maison de Kaolack.
Cheikh Ndao représentant de Baye Niass auprès des autorités coloniales
El hadj Cheikh Ndao était l’envoyé spécial de Baye Niass auprès des autorités de l’administration coloniale locale. Il le représentait à presque toutes les manifestations officielles où Baye Niass était empêché. Il en était son conseiller pour les relations avec le pouvoir et les confréries nationales et étrangères.
L’épisode des photos de présidents à la tribune du Gamou
Après l’indépendance, au Maouloud d’août 1961, des photos de Chefs d’Etat et de Gouvernement d’Afrique de l’Ouest, d’Egypte et d’Indonésie étaient accrochées sur les piliers de la tente, sans la photo officielle du président de la République du Sénégal, Léopold Sédar Senghor. Elhadj Cheikh Ndao répara immédiatement cette erreur, en allant chercher et faire poser la photo officielle de Senghor entre celle de Nkrumah du Ghana et de Nasser d’Egypte. Cela, avant l’arrivée de la délégation officielle du Gouvernement, composée du Ministre Amadou Cissé Dia et du Gouverneur du Sine-Saloum René Ndiaye.
Le récital des Corans, Baye donne le nom de salmane à Cheikh Ndao
A ce titre Baye Niass lui avait donné le surnom de SALMAN AL FARISI, du nom du compagnon prestigieux du Prophète (Psl), artisan de la stratégie qui conduisit à la victoire de la bataille des Fossés ou bataille de la Tranchée. Salman était aussi un prince de l’Empire Perse, par allusion à la descendance aristocratique des Beuleup et Bour Saloum. Ce surnom fait également allusion à son intelligence à trouver des solutions aux problèmes.
Rejet du titre de Bour Kahone
Dans ce même registre, une forte délégation des dignitaires de l’Institution Pencum Saloum vint offrir à Cheikh Ndao, son intronisation à Kahone comme Bour Saloum, en tant que prétendant légitime dans la lignée des ayants-droit. L’honneur fut décliné par Cheikh Ndao, prétextant que ce titre, bien qu’honorifique, entraînait des pratiques païennes contraires à ses convictions religieuses et que « Yalla rekaye bour !» (Il n’y a qu’un seul Roi, ALLAH).
C’est grâce à Elhadj Cheikh Ndao que Djibril Samb est devenu le Beuk Neek et chauffeur de Baye Niass, le père de Djibril Samb était le patron de Cheikh Ndao à l’office de commercialisation de l’arachide.
Elhadj Cheikh Ndao a activement participé à l’inhumation de Baye Niass, le lundi 28 juillet 1975, à 3h du matin, à la mosquée de Médina Baye.
Ses activités économiques
El hadj Cheikh Ndao a commencé une brève carrière aux Chemins de fer, où il s’occupait des achats des stères de bois de combustible destiné aux locomotives à vapeur. Ensuite, il devint traitant dans l’arachide à Kaolack puis, au moment de l’indépendance, entra sur concours à l’Office de Commercialisation Agricole (OCA), transformé plus tard en Office national de Coopération et d’Assistance au Développement (ONCAD). Il y termina sa carrière comme responsable des exportations par bateau de graines décortiquées au Port de Kaolack.
Ses activités politiques
Elhadj Cheikh Ndao n’a jamais milité dans une formation politique, mais était un farouche partisan de la SFIO, par fidélité à Baye Niass, et a soutenu Senghor dès la fusion avec Lamine Guèye dans l’UPS. Il a aussi appuyé Valdiodio Ndiaye qui était son neveu, sans prendre parti lors du conflit avec Mamadou Dia.
Son penchant pour Sékou Touré à cause de son anti-colonialisme, avait fait dire à Moustapha Niasse que Elhadj Cheikh Ndao était un « révolutionnaire ».
L’épisode du couvre-feu de mai 68
Le jeudi 30 mai 1968, suite aux émeutes de Dakar, quand le pouvoir a décrété le couvre-feu et l’interdiction de tout rassemblement de cinq personnes, les populations croyaient à une interdiction de la prière du vendredi. Le vendredi 31 mai, Baye Niass est sorti comme d’habitude de son domicile et se retrouva nez à nez avec le Gouverneur du Sine-Saloum Ibrahima Faye ; croyant que celui-ci était venu pour la prière du vendredi, Baye Niass l’entraîna avec lui jusqu’à la mosquée, traversant la place de Médina-Baye avec une présence impressionnante de forces de sécurité.
Dès la fin de la prière et, avant même le sermon et les prières de Baye Niass, Elhadj Cheikh Ndao se leva précipitamment et debout à l’intérieur de la mosquée,lança aux fidèles d’un ton ferme et à haute et intelligible voix : « yêna ngima degguë nioune nieup nègne aar Baye, même bougnouye fétal bou kène daw! » (Vous qui m’entendez, organisons tous la protection de Baye, même si on tire sur nous que personne ne fuie !).
Sa lettre à Brejnev, Kurt Waldeim et Nixon sur le conflit Israélo-Palestinien
A la cessation des hostilités de la Guerre du Kippour en 1973, il écrivit aux Présidents Senghor (Sénégal), Nixon (USA), Brejnev (URSS) et à Kurt Waldheim, alors Secrétaire Général de l’ONU, quatre lettres portant sur des esquisses de solutions à la crise Israélo-arabe. Les lettres furent ouvertes au Bureau de Poste de Kaolack et transmises à la Brigade de Sûreté de la Police nationale de la ville. Elhadj Cheikh Ndao fut aussitôt convoqué à la Police pour être entendu sur le contenu et les motivations des lettres toutes identiques. Les autorités voulaient savoir si Elhadj Cheikh Ndao était de connivence avec une puissance ennemie ou s’il était instrumentalisé.
A l’époque, les prises de position de Baye Niass étaient incendiaires contre le sionisme.La réponse du patron de l’ONU est encore détenue par ses enfants. D’ailleurs, cette correspondance de Elhadj Cheikh Ndao eut les faveurs du journal "Sud Quotidien" qui, quelques années plus tard, publia un article intitulé « Elhadj Cheikh Ndao, le visionnaire ! ».
Création d’une plateforme de sages Kaolackois
Elhadj Cheikh NDAO fut membre fondateur d’une association regroupant les principaux notables de la ville de Kaolack et dont le but était de défendre les intérêts des populations Kaolackoises. Les critères d’adhésion à cette association étaient notamment les suivants :
Etre résident et titulaire d’un titre foncier dans la ville de Kaolack
Etre âgé de plus de soixante ans
N’avoir jamais fait l’objet d’une condamnation par la justice
Avoir au moins un fils occupant un rang éminent dans le pays
Etre suffisamment connu dans la ville de Kaolack au point qu’un Facteur puisse aisément retrouver votre domicile, rien qu’en lisant votre nom
Cette association en saisissant directement le Chef de l’Etat, a eu, entre autres, à son actif, le déplacement de la Gare routière de Kaolack selon les vœux de la population. Elhadj Cheikh Ndao fut porté à la tête de l’Association des Parents d’élèves et sut gérer les crises scolaires avec habileté.
Ses derniers jours ?
Elhadj Cheikh Ndao a été hospitalisé dans une clinique de Kaolack le mercredi 8 novembre 1995 pour une bronchite et rappelé à ALLAH le lendemain lundi 13 novembre, après la prière du Fadjr qu’il venait d’accomplir. Il avait 81 ans.
Voulant être présent aux obsèques d’Elhadj Cheikh Ndao, le Khalife Elhadj Abdoulaye Ibrahim Niass fit retarder les obsèques de 24 heures. C’est le Khalife Elhadj Abdoulaye Niass qui a dirigé la prière mortuaire le lendemain mardi 14 novembre, après la prière de takoussane et, s’est déplacé jusqu’à la maison mortuaire pour prononcer l’oraison funèbre du défunt, en présence du Gouverneur Bocar Diallo, porteur des condoléances écrites du président de la République Abdou Diouf, devant toute sa famille et une très nombreuse assistance.
Place stratégique auprès des fils et muqadams de Baye
Elhadj Cheikh Ndao a connu les fils de Baye Niass dans leur plus jeune âge pendant qu’ils étaient au Daara et les couvrait de cadeaux quand ils venaient lui rendre visite. C’est lui qui a convoyé Seyda Mariama Niass à son domicile conjugal d’Elhadj Omar Kane à Dakar. Ils l’appelaient presque tous Baye Cheikh Ndao, en tant que époux de leur Badjène (tante paternelle). En effet, Elhadj Cheikh Ndao a épousé Mame Khady Niass, fille d’Elhadj Abdoulaye Niass, sœur de Serigne Mbaye Niass, donc demi-sœur de Baye Niass.
Il était des organisateurs de la Fayda et le dénominateur commun admis par tous, tenu en haute estime par tous les membres de la Famille niassène, entouré de respect durant sa vie et regretté après sa mort.
Cheikh Ndao, gestionnaire de la Ziar de Baye Niass
Etant particulièrement doué en comptabilité, Cheikh Ndao décida de proposer ses services à Baye Niass qui l’orienta immédiatement vers Serigne Aliou Cissé et, avec ce dernier, pour régler, au nom de Baye Niass, les problèmes d’héritage selon le Droit islamique. Cheikh Ndao sera plus tard agréé pour cette fonction par la Cour d’appel.
Cheikh Ndao avait observé que Baye Niass dans son salon recevait les talibés venus verser leurs adiyas. Le saint homme plaçait sous son oreiller, sans les compter, les sommes qu’il recevait et, les distribuait, sans les compter, au fur et à mesure et presque immédiatement, aux visiteurs venus le solliciter. Et le lendemain, les dépenses alimentaires pour la famille de Baye Niass étaient difficiles à assurer, faute d’argent. Cheikh Ndao s’en ouvrit à Serigne Aliou Cissé et lui fit la proposition d’organiser à la mosquée de Médina, la collecte des adiyas de la ziarra à compter de 1955.
Serigne Aliou Cissé l’invita à venir avec lui présenter la proposition à Baye Niass qui l’accepta aussitôt. L’organisation fut annoncée et mise en place à la Grande mosquée et connut aussitôt, un certain succès qui, malheureusement, fut très éphémère. Car des gens continuaient à venir réclamer des sommes d’argent au comité de collecte, sous prétexte que c’était de la part de Baye Niass. Le bilan de cette collecte fut décevant mais encourageant. Car, pour une fois, on avait centralisé la collecte des adiyas et un comité composé de Serigne Aliou Cissé et Cheikh Ndao, avait réussi à organiser cette collecte.
L’année suivante la proposition de Cheikh Ndao, validée par Baye Niass, était que personne ne pouvait retirer de l’argent auprès du comité de collecte, sauf instruction écrite de la main de Baye Niass. Autant dire que les sollicitations se réduisirent comme peau de chagrin. Et la somme totale collectée lors de la Ziarra de 1956, s’éleva à 2 003 190 FCfa, entièrement versée dans un compte ouvert, spécialement à l’agence locale de la Banque de l’Afrique Occidentale (BAO). Dès 1958, les sommes collectées lors de la Ziarra atteignaient 4 271 525 FCfa, soit plus du double de 1956 et 6 096 115 FCfa, dix ans plus tard en 1966. Sur la période où Elhadj Cheikh Ndao a établi le bilan des sommes collectées lors des Ziarra, en trente-cinq ans de 1956 à 1991, la somme totale collectée la plus élevée, a été 10 050 000 FCfa atteinte en 1987, soit 12 ans après le rappel à Allah, de Baye Niass. Elhadj Cheikh Ndao a laissé une comptabilité rigoureuse de toutes les sommes reçues de 1956 à 1991.
Introduction des lampes dans les Gamous
Les Maoulouds de Baye Niass, depuis la fondation de Médina Baye en 1930 jusqu’à la fin de la Deuxième Guerre mondiale, se tenaient sous une petite tente dressée sur la place de Médina, située entre la demeure de Baye Niass et la Grande mosquée. Mais, presque en prolongement de l’abri fixe, situé devant l’entrée de la demeure de Baye Niass et, dont le toit était en crintin (tiges de bambous tressées). Il n’y avait pas beaucoup de monde qui venait au Gamou. Cette tente du Maouloud était éclairée par la faible lueur d’une lampe tempête. Et Baye Niass était assis sur une petite chaise entouré des fidèles. Seules les quelques personnes assises autour de lui, pouvaient voir son visage faiblement éclairé par la lampe tempête.
Au Maouloud de 1947, Elhadj Cheikh Ndao, qui avait vu chez les quelques Européens de la ville de Kaolack, des lampes à gaz du type COLEMAN plus éclairantes, décida de s’en procurer deux pour les installer une sous la tente du Maouloud et une autre, à l’endroit où les femmes préparaient les repas du soir du Maouloud. Dès que Baye Niass pénétra dans l’espace qui lui était réservé sous la tente, une immense clameur s’éleva de la foule qui pour la première fois, pouvait voir clairement son visage dans la nuit noire. Alors, il se retourna visiblement ravi et demanda d’appeler l’auteur de cette lumière intense, Cheikh Ndao qui se tenait modestement à l’écart.
En se rapprochant de Baye Niass, il reçut pour instruction d’apporter une autre lampe pour éclairer la Grande mosquée. Elhadj Cheikh Ndao se rendit sur le champ auprès du commerçant européen qui lui avait vendu les deux lampes à gaz, où il arriva aux environs de minuit, le réveilla en pleine nuit, pour lui demander presque sur le ton d’un ordre, de lui vendre une autre lampe à gaz. L’Européen lui dit que le magasin était fermé et qu’après avoir ouvert, il ne restait qu’une seule lampe à gaz. Elhadj Cheikh Ndao l’acheta immédiatement et regagna vite Médina Baye pour illuminer la Grande mosquée. C’est à la fin du Maouloud à l’aube, que Baye Niass, dans ses prières et son sermon de clôture, dit : « Ki lééral goudi gui, Yalla dina lééral mbiram » (Celui qui a éclairé cette nuit, Allah éclairera ses actions). Lorsque l’un des fils de Elhadj Cheikh Ndao, né après le Maouloud de 1947, est devenu Directeur général de la Compagnie nationale d’électricité du Sénégal et a posé un nouvel éclairage de la tente du Maouloud de Médina Baye, les gens y ont vu une réalisation de la prophétie de Baye Niass.
La tribune du Gamou
Puisque El hadj Cheikh Ndao était un visionnaire, il a été le premier initiateur de la pose d’une estrade pour le Gamou de Baye Niass. En effet, voyant que, quand Baye Niass faisait le Gamou, il était assis sur un banc, presqu’au même niveau que les talibés et que la foule s’agrandissait, ceux qui sont éloignés ne pouvaient pas le voir, Cheikh Ndao a fait fabriquer une table en bois et y a placé le banc sur lequel Baye Niass s’asseyait et du coup, devenait visible de très loin. Plus tard, au début des années 1950, c’est l’armée française qui venait installer une tribune sous la tente et mettait en service un groupe électrogène pour éclairer les lieux du Maouloud. Cette table en bois et ce banc ont été récupérés et transférés au domicile de El hadj Cheikh Ndao.
Organisation de l’accueil des fidèles pour le Gamou
El Hadj Cheikh Ndao a été souvent délégué par Baye Niass pour convertir des gens à l’Islam, pour accueillir et loger des hôtes de Baye Niass en toutes occasions et en particulier au cours du Maouloud, phénomène qui continue toujours avec ses descendants dans sa maison de Kaolack.
Cheikh Ndao représentant de Baye Niass auprès des autorités coloniales
El hadj Cheikh Ndao était l’envoyé spécial de Baye Niass auprès des autorités de l’administration coloniale locale. Il le représentait à presque toutes les manifestations officielles où Baye Niass était empêché. Il en était son conseiller pour les relations avec le pouvoir et les confréries nationales et étrangères.
L’épisode des photos de présidents à la tribune du Gamou
Après l’indépendance, au Maouloud d’août 1961, des photos de Chefs d’Etat et de Gouvernement d’Afrique de l’Ouest, d’Egypte et d’Indonésie étaient accrochées sur les piliers de la tente, sans la photo officielle du président de la République du Sénégal, Léopold Sédar Senghor. Elhadj Cheikh Ndao répara immédiatement cette erreur, en allant chercher et faire poser la photo officielle de Senghor entre celle de Nkrumah du Ghana et de Nasser d’Egypte. Cela, avant l’arrivée de la délégation officielle du Gouvernement, composée du Ministre Amadou Cissé Dia et du Gouverneur du Sine-Saloum René Ndiaye.
Le récital des Corans, Baye donne le nom de salmane à Cheikh Ndao
A ce titre Baye Niass lui avait donné le surnom de SALMAN AL FARISI, du nom du compagnon prestigieux du Prophète (Psl), artisan de la stratégie qui conduisit à la victoire de la bataille des Fossés ou bataille de la Tranchée. Salman était aussi un prince de l’Empire Perse, par allusion à la descendance aristocratique des Beuleup et Bour Saloum. Ce surnom fait également allusion à son intelligence à trouver des solutions aux problèmes.
Rejet du titre de Bour Kahone
Dans ce même registre, une forte délégation des dignitaires de l’Institution Pencum Saloum vint offrir à Cheikh Ndao, son intronisation à Kahone comme Bour Saloum, en tant que prétendant légitime dans la lignée des ayants-droit. L’honneur fut décliné par Cheikh Ndao, prétextant que ce titre, bien qu’honorifique, entraînait des pratiques païennes contraires à ses convictions religieuses et que « Yalla rekaye bour !» (Il n’y a qu’un seul Roi, ALLAH).
C’est grâce à Elhadj Cheikh Ndao que Djibril Samb est devenu le Beuk Neek et chauffeur de Baye Niass, le père de Djibril Samb était le patron de Cheikh Ndao à l’office de commercialisation de l’arachide.
Elhadj Cheikh Ndao a activement participé à l’inhumation de Baye Niass, le lundi 28 juillet 1975, à 3h du matin, à la mosquée de Médina Baye.
Ses activités économiques
El hadj Cheikh Ndao a commencé une brève carrière aux Chemins de fer, où il s’occupait des achats des stères de bois de combustible destiné aux locomotives à vapeur. Ensuite, il devint traitant dans l’arachide à Kaolack puis, au moment de l’indépendance, entra sur concours à l’Office de Commercialisation Agricole (OCA), transformé plus tard en Office national de Coopération et d’Assistance au Développement (ONCAD). Il y termina sa carrière comme responsable des exportations par bateau de graines décortiquées au Port de Kaolack.
Ses activités politiques
Elhadj Cheikh Ndao n’a jamais milité dans une formation politique, mais était un farouche partisan de la SFIO, par fidélité à Baye Niass, et a soutenu Senghor dès la fusion avec Lamine Guèye dans l’UPS. Il a aussi appuyé Valdiodio Ndiaye qui était son neveu, sans prendre parti lors du conflit avec Mamadou Dia.
Son penchant pour Sékou Touré à cause de son anti-colonialisme, avait fait dire à Moustapha Niasse que Elhadj Cheikh Ndao était un « révolutionnaire ».
L’épisode du couvre-feu de mai 68
Le jeudi 30 mai 1968, suite aux émeutes de Dakar, quand le pouvoir a décrété le couvre-feu et l’interdiction de tout rassemblement de cinq personnes, les populations croyaient à une interdiction de la prière du vendredi. Le vendredi 31 mai, Baye Niass est sorti comme d’habitude de son domicile et se retrouva nez à nez avec le Gouverneur du Sine-Saloum Ibrahima Faye ; croyant que celui-ci était venu pour la prière du vendredi, Baye Niass l’entraîna avec lui jusqu’à la mosquée, traversant la place de Médina-Baye avec une présence impressionnante de forces de sécurité.
Dès la fin de la prière et, avant même le sermon et les prières de Baye Niass, Elhadj Cheikh Ndao se leva précipitamment et debout à l’intérieur de la mosquée,lança aux fidèles d’un ton ferme et à haute et intelligible voix : « yêna ngima degguë nioune nieup nègne aar Baye, même bougnouye fétal bou kène daw! » (Vous qui m’entendez, organisons tous la protection de Baye, même si on tire sur nous que personne ne fuie !).
Sa lettre à Brejnev, Kurt Waldeim et Nixon sur le conflit Israélo-Palestinien
A la cessation des hostilités de la Guerre du Kippour en 1973, il écrivit aux Présidents Senghor (Sénégal), Nixon (USA), Brejnev (URSS) et à Kurt Waldheim, alors Secrétaire Général de l’ONU, quatre lettres portant sur des esquisses de solutions à la crise Israélo-arabe. Les lettres furent ouvertes au Bureau de Poste de Kaolack et transmises à la Brigade de Sûreté de la Police nationale de la ville. Elhadj Cheikh Ndao fut aussitôt convoqué à la Police pour être entendu sur le contenu et les motivations des lettres toutes identiques. Les autorités voulaient savoir si Elhadj Cheikh Ndao était de connivence avec une puissance ennemie ou s’il était instrumentalisé.
A l’époque, les prises de position de Baye Niass étaient incendiaires contre le sionisme.La réponse du patron de l’ONU est encore détenue par ses enfants. D’ailleurs, cette correspondance de Elhadj Cheikh Ndao eut les faveurs du journal "Sud Quotidien" qui, quelques années plus tard, publia un article intitulé « Elhadj Cheikh Ndao, le visionnaire ! ».
Création d’une plateforme de sages Kaolackois
Elhadj Cheikh NDAO fut membre fondateur d’une association regroupant les principaux notables de la ville de Kaolack et dont le but était de défendre les intérêts des populations Kaolackoises. Les critères d’adhésion à cette association étaient notamment les suivants :
Etre résident et titulaire d’un titre foncier dans la ville de Kaolack
Etre âgé de plus de soixante ans
N’avoir jamais fait l’objet d’une condamnation par la justice
Avoir au moins un fils occupant un rang éminent dans le pays
Etre suffisamment connu dans la ville de Kaolack au point qu’un Facteur puisse aisément retrouver votre domicile, rien qu’en lisant votre nom
Cette association en saisissant directement le Chef de l’Etat, a eu, entre autres, à son actif, le déplacement de la Gare routière de Kaolack selon les vœux de la population. Elhadj Cheikh Ndao fut porté à la tête de l’Association des Parents d’élèves et sut gérer les crises scolaires avec habileté.
Ses derniers jours ?
Elhadj Cheikh Ndao a été hospitalisé dans une clinique de Kaolack le mercredi 8 novembre 1995 pour une bronchite et rappelé à ALLAH le lendemain lundi 13 novembre, après la prière du Fadjr qu’il venait d’accomplir. Il avait 81 ans.
Voulant être présent aux obsèques d’Elhadj Cheikh Ndao, le Khalife Elhadj Abdoulaye Ibrahim Niass fit retarder les obsèques de 24 heures. C’est le Khalife Elhadj Abdoulaye Niass qui a dirigé la prière mortuaire le lendemain mardi 14 novembre, après la prière de takoussane et, s’est déplacé jusqu’à la maison mortuaire pour prononcer l’oraison funèbre du défunt, en présence du Gouverneur Bocar Diallo, porteur des condoléances écrites du président de la République Abdou Diouf, devant toute sa famille et une très nombreuse assistance.
Place stratégique auprès des fils et muqadams de Baye
Elhadj Cheikh Ndao a connu les fils de Baye Niass dans leur plus jeune âge pendant qu’ils étaient au Daara et les couvrait de cadeaux quand ils venaient lui rendre visite. C’est lui qui a convoyé Seyda Mariama Niass à son domicile conjugal d’Elhadj Omar Kane à Dakar. Ils l’appelaient presque tous Baye Cheikh Ndao, en tant que époux de leur Badjène (tante paternelle). En effet, Elhadj Cheikh Ndao a épousé Mame Khady Niass, fille d’Elhadj Abdoulaye Niass, sœur de Serigne Mbaye Niass, donc demi-sœur de Baye Niass.
Il était des organisateurs de la Fayda et le dénominateur commun admis par tous, tenu en haute estime par tous les membres de la Famille niassène, entouré de respect durant sa vie et regretté après sa mort.