Avenue Blaise Diagne, non loin de la gare routière de Petersen. Il est 12H30 en ce mardi de juillet. Sur cette portion de cette grande avenue menant au centre ville, l’ombre est rare. Ecrasé de soleil, le site fourmille d’échoppes. Sous les vrombissements de véhicules et un ciel menaçant, la va et vient es frénétique entre boutiques, magasins et étals. Sur le flanc gauche de cette voie qui mène à Sandaga (marché central Dakarois), est niché « Keur Sérigne bi », un point de vente de médicaments sortis du circuit légal de commercialisation.
A l’intérieur de cette maison historique ça grouille de monde. Des « pharmaciens » âgés de 20 à 70 ans sont installés de part et d’autre, sous 2 hangars qui servent de décor. An milieu est plantée une bâtisse d’un âge avancé. Des restaurants complètent le tableau. Difficile de croire à l’existence d’un commerce de produits pharmaceutiques. Mais il suffit de s’approcher d’une vingtaine de mètres de cet édifice, pour qu’on vous serve le mot de bienvenue : « Loo beug, garapp ? » (Qu’est ce que vous cherchez, des médicaments ?) « On est bien à « Keur Sérigne bi » », s’interroge-t-on ? Non ! réplique avec méfiance Amina, une vendeuse de 21 ans. Et pourtant, dès qu’elle est convaincue que son interlocuteur est là pour chercher des médicaments, elle répond : « Ici y’a du tout, que voulez vous donc ? », fini-t-elle par lâcher avec enthousiasme. C’est qu’ici la prudence est devenue instinctive. Une attitude qui s’explique par l’interdiction depuis 2009, par l’Etat sénégalais, de la vente de médicaments dans cette demeure. Les multiples arrestations opérées par la police sur le personnel de la demeure de Serigne Modou Moustapha Mbacké, fils ainé de Serigne Touba, ont rendu tout le monde méfiant. Dame Ndiaye, 38 ans, vendeur de produits cosmétiques sur les lieux depuis 1999 confirme : « Des policiers débarquent ici de jour comme de nuit. Il y’a 2 jours, 6 vendeurs ont été arrêtés, dont 2 déférés. Ils arrivent ici en tenues civiles, pour faire diversion. Qu’ils laissent les gens travailler ». Dame Ndiaye n’a pas fini son plaidoyer que deux garçons qui se font passer pour des clients coupent la conversation pour lui souffler quelques mots. « Ils viennent de me chuchoter que tu es journaliste », me transmet-t-il. Une méfiance à laquelle les rafles de la police ne sont pas étrangères. Elles dissuadent d’ailleurs les vendeurs d’achalander leurs produits qui s’écoulent désormais de manière discrète. Mais ne détenant pas leurs produits entre les mains, les vendeurs ne courent pas de gros risques. Ici, ça se passe comme chez les dealers. Les médicaments sont hors de la vue du client qui ne les découvre que si l’acheteur décide de débourser la somme d’argent conclue après négociation sur le prix d’achat.
Même si de nos jours l’afflux des acheteurs a légèrement baissé, la clientèle est restée fidèle à la maison du marabout Cheikh Bombaly. Le ravitaillement en médicaments de ce haut lieu de fraude est assuré pour l’essentiel par les détournements de médicaments des structures sanitaires publiques ou des Ipm, l’importation frauduleuse de médicaments en provenance de la sous région… Le succès de « Keur Serigne Bi » tient à l’accessibilité financière des produits et surtout à la possibilité de vente en micro détail. « Si les revendeurs achètent un médicament à 1000 F, c’est pour le revendre à 3000 Fr, alors qu’au niveau des pharmacies privées autorisées, ce même médicament coûte entre 5000 et 6000 Fcfa », explique Dame Ndiaye. Ce qui attire naturellement les acheteurs. « Il y’à même des médecins issus des hôpitaux tel que le Dantec et de l’hôpital principal qui viennent ici se procurer de médicaments car, c’est plus abordable », ajoute t-il.
Quid de la qualité des médicaments ou de la conservation dans des conditions inadéquates des médicaments ? Trois vendeurs assis sur l’aille droite de la devanture de ce sanctuaire, lancent discrètement n’avoir jamais eu la notification d’effets indésirables médicamenteux suite à la prise des médicaments vendus ici. N’est ce pas demba Sy ? : « J’ai 2 femmes, chacune a pendant toute la durée de ses grossesses, utilisé les médicaments de « Keur Sérigne bi ». Et elles n’ont jamais eu de complications », affirme, cet acheteur proche de la quarantaine, venu se procurer une importante quantité de médicament pour son enfant de 14 ans, ignorant que « 35% des médicaments vendus dans la rue ont une teneur en principe actif faible (sous dosés) et 20% sans valeur théorique ». A ses débuts, « Keur Serigne bi » ne dispensait que du paracétamol et de l’aspirine qui à moindre coût, mais avec le temps, ce commerce a pris de l’ampleur avec l’intérêt que les acheteurs accordent à cette activité hors la loi.
Aliou Kane (Stagiaire)
A l’intérieur de cette maison historique ça grouille de monde. Des « pharmaciens » âgés de 20 à 70 ans sont installés de part et d’autre, sous 2 hangars qui servent de décor. An milieu est plantée une bâtisse d’un âge avancé. Des restaurants complètent le tableau. Difficile de croire à l’existence d’un commerce de produits pharmaceutiques. Mais il suffit de s’approcher d’une vingtaine de mètres de cet édifice, pour qu’on vous serve le mot de bienvenue : « Loo beug, garapp ? » (Qu’est ce que vous cherchez, des médicaments ?) « On est bien à « Keur Sérigne bi » », s’interroge-t-on ? Non ! réplique avec méfiance Amina, une vendeuse de 21 ans. Et pourtant, dès qu’elle est convaincue que son interlocuteur est là pour chercher des médicaments, elle répond : « Ici y’a du tout, que voulez vous donc ? », fini-t-elle par lâcher avec enthousiasme. C’est qu’ici la prudence est devenue instinctive. Une attitude qui s’explique par l’interdiction depuis 2009, par l’Etat sénégalais, de la vente de médicaments dans cette demeure. Les multiples arrestations opérées par la police sur le personnel de la demeure de Serigne Modou Moustapha Mbacké, fils ainé de Serigne Touba, ont rendu tout le monde méfiant. Dame Ndiaye, 38 ans, vendeur de produits cosmétiques sur les lieux depuis 1999 confirme : « Des policiers débarquent ici de jour comme de nuit. Il y’a 2 jours, 6 vendeurs ont été arrêtés, dont 2 déférés. Ils arrivent ici en tenues civiles, pour faire diversion. Qu’ils laissent les gens travailler ». Dame Ndiaye n’a pas fini son plaidoyer que deux garçons qui se font passer pour des clients coupent la conversation pour lui souffler quelques mots. « Ils viennent de me chuchoter que tu es journaliste », me transmet-t-il. Une méfiance à laquelle les rafles de la police ne sont pas étrangères. Elles dissuadent d’ailleurs les vendeurs d’achalander leurs produits qui s’écoulent désormais de manière discrète. Mais ne détenant pas leurs produits entre les mains, les vendeurs ne courent pas de gros risques. Ici, ça se passe comme chez les dealers. Les médicaments sont hors de la vue du client qui ne les découvre que si l’acheteur décide de débourser la somme d’argent conclue après négociation sur le prix d’achat.
Même si de nos jours l’afflux des acheteurs a légèrement baissé, la clientèle est restée fidèle à la maison du marabout Cheikh Bombaly. Le ravitaillement en médicaments de ce haut lieu de fraude est assuré pour l’essentiel par les détournements de médicaments des structures sanitaires publiques ou des Ipm, l’importation frauduleuse de médicaments en provenance de la sous région… Le succès de « Keur Serigne Bi » tient à l’accessibilité financière des produits et surtout à la possibilité de vente en micro détail. « Si les revendeurs achètent un médicament à 1000 F, c’est pour le revendre à 3000 Fr, alors qu’au niveau des pharmacies privées autorisées, ce même médicament coûte entre 5000 et 6000 Fcfa », explique Dame Ndiaye. Ce qui attire naturellement les acheteurs. « Il y’à même des médecins issus des hôpitaux tel que le Dantec et de l’hôpital principal qui viennent ici se procurer de médicaments car, c’est plus abordable », ajoute t-il.
Quid de la qualité des médicaments ou de la conservation dans des conditions inadéquates des médicaments ? Trois vendeurs assis sur l’aille droite de la devanture de ce sanctuaire, lancent discrètement n’avoir jamais eu la notification d’effets indésirables médicamenteux suite à la prise des médicaments vendus ici. N’est ce pas demba Sy ? : « J’ai 2 femmes, chacune a pendant toute la durée de ses grossesses, utilisé les médicaments de « Keur Sérigne bi ». Et elles n’ont jamais eu de complications », affirme, cet acheteur proche de la quarantaine, venu se procurer une importante quantité de médicament pour son enfant de 14 ans, ignorant que « 35% des médicaments vendus dans la rue ont une teneur en principe actif faible (sous dosés) et 20% sans valeur théorique ». A ses débuts, « Keur Serigne bi » ne dispensait que du paracétamol et de l’aspirine qui à moindre coût, mais avec le temps, ce commerce a pris de l’ampleur avec l’intérêt que les acheteurs accordent à cette activité hors la loi.
Aliou Kane (Stagiaire)