Il a la taille élancée, le teint noir, les cheveux cendrés par la fatigue, traînant le pied lourd d’une enflure. Il baisse la tête et sort difficilement son «bonsoir» d’une mauvaise humeur. Par une randonnée, à pied, sanctionnée par un souffle de… 10 000 m de Haïlé Gebré Sélassié, Kéba Diop, souffre encore de son record. Le 4 novembre 2007, cet aîné de sa «grande famille» affiche une mine flétrie par une interminable traversée terrestre Ziguinchor-Dakar.
Agonise même après moult maladies, arrestations et condamnations. Le voilà puni pour être resté dans son pays, le Sénégal, qu’il avait quitté pour l’Eldorado des temps anciens de la Côte d’Ivoire. Orphelin de père en 2000, lorsque son «idole», son «ami», locataire de sa maison, permanence «provisoire» de son parti (le Pds), prit le pouvoir. L’espoir ! Alors Kéba Diop, «père» de son foyer, se sent obligé de couver sa génitrice, dont il est «le seul soutien». Abidjan lui arrache son ex-épouse et ses quatre enfants.
Dans une lettre qu’il a adressée au directeur de Cabinet politique du président de la République, Babacar Gaye, il détaillait ceci : «L’aîné de mes enfants a son baccalauréat et avec ses frères, ils veut me rejoindre, mais la situation ne le leur permet pas. J’ai deux épouses et cinq enfants à Ziguinchor et à Bignona. J’ai toujours travaillé pour soutenir ma famille d’ici et d’Abidjan.» N’empêche, le destin l’éloigna du Sud et l’air frais de l’Ouest l’accueille, malade, alité dans des hôpitaux, croupissant dans les ténèbres de Rebeuss. Il y a un an lorsqu’il sortit fraîchement de prison, il se présenta à notre rédaction, avec le visage d’un misérable quinquagénaire, quadragénaire… On ne sait pas trop.
Il ne cesse, par moments, de montrer ses pieds fragiles et d’afficher son rictus de douleur. Cet homme qui s’est immolé, hier, a choisi ainsi de faire témoigner la République et ses symboles, le Palais présidentiel et le Building administratif, pour - il ne cesse de le rabâcher - «réclamer justice». D’après le site Nettali.net, selon des témoignages recueillis sur place, la scène a surpris même les gendarmes qui montaient la garde devant les grilles du Palais de la République. Kéba Diop s’est aspergé d’un liquide inflammable pour ensuite actionner un briquet.
Transformé en torche humaine, Kéba Diop a voulu se diriger vers les gardes rouges. Mais, les flammes ont ralenti sa course. C’est grâce l’intervention d’un policier et d’un taximan qui a utilisé son extincteur que les flammes seront maîtrisées. Kéba Diop sera transporté en urgence par les sapeurs-pompiers à l’hôpital Principal de Dakar, situé à deux cents mètres environ du Palais présidentiel.
«WADE OU LA MORT»
«J’ai perdu mon foyer, mes magasins de commerce, mon honneur, ma dignité», sanglotait-il dans sa lettre au président de la République, datée du 15 septembre 2008. Et s’annonce le désespoir. D’un bout d’homme qui a le cœur meurtri et qui contraste désormais, d’avec la gaillardise des labeurs d’Abidjan.
Le journal Le Quotidien avait pourtant tiré la sonnette d’alarme dans son édition du 19 mai 2008, relatant ses déboires. «Kéba Diop, disait-on, est à Dakar où il cherche, par tous les moyens, à rencontrer le chef de l’Etat, Me Abdoulaye Wade, pour lui réclamer l’argent que lui doivent des responsables libéraux de Bignona. Ces derniers avaient pris en location sa maison pour en faire une permanence. Mais, depuis le mois de mai de l’année dernière, il ne voit plus la couleur de son argent. En plus, ses locataires gardent toujours la clé des locaux par-devers eux.»
L’homme court, en effet, depuis des mois, derrière le million de francs Cfa que le Parti démocratique sénégalais (Pds) lui doit pour la location de sa maison, qui sert de siège à la Fédération départementale de ce parti à Bignona, en Casamance. Après onze jours de marche, c’est un comité d’accueil composé de la Police et du préfet qu’il trouve à Rufisque. Là, Kéba Diop explique qu’il a subi toutes sortes de tortures avant de se voir proposer par le chef de l’exécutif départemental, une enveloppe de 500 mille francs pour rebrousser chemin. Son refus d’empocher l’argent qui aurait été remis par Babacar Gaye, directeur de Cabinet politique du président de la République et Mamadou Lamine Keïta, ministre de la Jeunesse, est catégorique, exigeant toujours d’être reçu par Me Abdoulaye Wade.
Le Palais aurait finalement accédé à sa demande, puisqu’une lettre du président de la République, datée du 11 mars 2008, lui sera remise. Dans laquelle Me Wade l’assure : «J’ai pris connaissance de votre courrier m’informant que vous avez des problèmes avec les structures locales du Parti démocratique sénégalais à Bignona. J’ai décidé de vous recevoir et j’ai instruit mes collaborateurs de prendre les mesures idoines pour un règlement définitif de ce problème.» Mais depuis, aucune audience ne viendra sanctionner cette promesse, qui sera plutôt une prise en charge par le directeur de Cabinet politique, qui précise que M. Diop a bénéficié d’une assistance financière (voir ailleurs).
LE PLAN EXECUTE DEVANT LA PRESIDENCE
Après plusieurs tentatives – avertissements - de suicide, l’homme a mis sa menace à exécution, au mois de juin dernier, en s’introduisant dans la cour du Palais présidentiel. C’est alors qu’il a ingurgité le contenu d’une bouteille de diluant. Seule l’intervention des sapeurs-pompiers a permis in extremis de l’évacuer. Il se trouvait, selon sa famille, au service des Urgences de l’hôpital Principal de Dakar.
«Un témoin relate une scène fort insolite : il a vu un des 8X8 qui jalonnent d’habitude le cortège du chef de l’Etat, foncer vers les marches du Palais. Ses passagers en sont descendus pour empoigner la personne qui arpentait ces marches» (Le Quotidien du 19 mai 2008).
Le porte-parole du président de la République, Me El Hadji Amadou Sall, joint alors au téléphone, avait d’ailleurs donné une autre version des faits. Considérant que nos «informations sont fausses», il affirme que personne, à aucun moment de la journée, n’a pu pénétrer dans l’enceinte du Palais. Mais, il précise que, dans la matinée comme dans l’après-midi, c’est au niveau du poste de police que l’individu a été interpellé, à chaque fois par les sapeurs-pompiers. Mieux, il s’agit du même individu qui, après un premier passage le matin, est revenu à 16 h et a été, cette fois-ci, «définitivement écarté» du Palais.
LE «DEFICIENT MENTAL» SURPREND LE PALAIS
Assurément, les nombreuses menaces médiatisées ont été prises par le Palais avec des pincettes. Car, Kéba Diop était décrit par les libéraux, comme un «déficient mental». Pourtant, il avait tenté au mois de juin de mettre fin à sa vie en avalant des barbituriques. Ultime rebondissement dans cette affaire, Kéba Diop, par ailleurs, poursuivi par sa banque pour des dettes qu’il y a contractées, décide de mettre à exécution sa menace. Le journal Le Matin avait analysé la démarche de M. Diop, par le fait que «sa marche ne lui a pas servi à grand-chose dans ce projet, puisque les portes du Palais lui sont restées fermées après plusieurs tentatives. D’ailleurs, celles-ci lui ont valu un séjour en détention assorti d’une condamnation en sursis. Mais une telle épreuve n’a pas du tout ébranlé M. Diop, qui estime avoir été victime d’arnaque de la part de la Fédération du Pds de Bignona qui occupe sa maison sans pour autant s’acquitter de la contrepartie financière». Il reste que le porte-parole du chef de l’Etat n’a pas voulu, cependant, confirmer que l’auteur de cette double tentative d’intrusion était bien Kéba Diop. Il s’est contenté de parler d’«un individu paraissant ne pas jouir de toutes ses facultés mentales».
source le quotidien
Agonise même après moult maladies, arrestations et condamnations. Le voilà puni pour être resté dans son pays, le Sénégal, qu’il avait quitté pour l’Eldorado des temps anciens de la Côte d’Ivoire. Orphelin de père en 2000, lorsque son «idole», son «ami», locataire de sa maison, permanence «provisoire» de son parti (le Pds), prit le pouvoir. L’espoir ! Alors Kéba Diop, «père» de son foyer, se sent obligé de couver sa génitrice, dont il est «le seul soutien». Abidjan lui arrache son ex-épouse et ses quatre enfants.
Dans une lettre qu’il a adressée au directeur de Cabinet politique du président de la République, Babacar Gaye, il détaillait ceci : «L’aîné de mes enfants a son baccalauréat et avec ses frères, ils veut me rejoindre, mais la situation ne le leur permet pas. J’ai deux épouses et cinq enfants à Ziguinchor et à Bignona. J’ai toujours travaillé pour soutenir ma famille d’ici et d’Abidjan.» N’empêche, le destin l’éloigna du Sud et l’air frais de l’Ouest l’accueille, malade, alité dans des hôpitaux, croupissant dans les ténèbres de Rebeuss. Il y a un an lorsqu’il sortit fraîchement de prison, il se présenta à notre rédaction, avec le visage d’un misérable quinquagénaire, quadragénaire… On ne sait pas trop.
Il ne cesse, par moments, de montrer ses pieds fragiles et d’afficher son rictus de douleur. Cet homme qui s’est immolé, hier, a choisi ainsi de faire témoigner la République et ses symboles, le Palais présidentiel et le Building administratif, pour - il ne cesse de le rabâcher - «réclamer justice». D’après le site Nettali.net, selon des témoignages recueillis sur place, la scène a surpris même les gendarmes qui montaient la garde devant les grilles du Palais de la République. Kéba Diop s’est aspergé d’un liquide inflammable pour ensuite actionner un briquet.
Transformé en torche humaine, Kéba Diop a voulu se diriger vers les gardes rouges. Mais, les flammes ont ralenti sa course. C’est grâce l’intervention d’un policier et d’un taximan qui a utilisé son extincteur que les flammes seront maîtrisées. Kéba Diop sera transporté en urgence par les sapeurs-pompiers à l’hôpital Principal de Dakar, situé à deux cents mètres environ du Palais présidentiel.
«WADE OU LA MORT»
«J’ai perdu mon foyer, mes magasins de commerce, mon honneur, ma dignité», sanglotait-il dans sa lettre au président de la République, datée du 15 septembre 2008. Et s’annonce le désespoir. D’un bout d’homme qui a le cœur meurtri et qui contraste désormais, d’avec la gaillardise des labeurs d’Abidjan.
Le journal Le Quotidien avait pourtant tiré la sonnette d’alarme dans son édition du 19 mai 2008, relatant ses déboires. «Kéba Diop, disait-on, est à Dakar où il cherche, par tous les moyens, à rencontrer le chef de l’Etat, Me Abdoulaye Wade, pour lui réclamer l’argent que lui doivent des responsables libéraux de Bignona. Ces derniers avaient pris en location sa maison pour en faire une permanence. Mais, depuis le mois de mai de l’année dernière, il ne voit plus la couleur de son argent. En plus, ses locataires gardent toujours la clé des locaux par-devers eux.»
L’homme court, en effet, depuis des mois, derrière le million de francs Cfa que le Parti démocratique sénégalais (Pds) lui doit pour la location de sa maison, qui sert de siège à la Fédération départementale de ce parti à Bignona, en Casamance. Après onze jours de marche, c’est un comité d’accueil composé de la Police et du préfet qu’il trouve à Rufisque. Là, Kéba Diop explique qu’il a subi toutes sortes de tortures avant de se voir proposer par le chef de l’exécutif départemental, une enveloppe de 500 mille francs pour rebrousser chemin. Son refus d’empocher l’argent qui aurait été remis par Babacar Gaye, directeur de Cabinet politique du président de la République et Mamadou Lamine Keïta, ministre de la Jeunesse, est catégorique, exigeant toujours d’être reçu par Me Abdoulaye Wade.
Le Palais aurait finalement accédé à sa demande, puisqu’une lettre du président de la République, datée du 11 mars 2008, lui sera remise. Dans laquelle Me Wade l’assure : «J’ai pris connaissance de votre courrier m’informant que vous avez des problèmes avec les structures locales du Parti démocratique sénégalais à Bignona. J’ai décidé de vous recevoir et j’ai instruit mes collaborateurs de prendre les mesures idoines pour un règlement définitif de ce problème.» Mais depuis, aucune audience ne viendra sanctionner cette promesse, qui sera plutôt une prise en charge par le directeur de Cabinet politique, qui précise que M. Diop a bénéficié d’une assistance financière (voir ailleurs).
LE PLAN EXECUTE DEVANT LA PRESIDENCE
Après plusieurs tentatives – avertissements - de suicide, l’homme a mis sa menace à exécution, au mois de juin dernier, en s’introduisant dans la cour du Palais présidentiel. C’est alors qu’il a ingurgité le contenu d’une bouteille de diluant. Seule l’intervention des sapeurs-pompiers a permis in extremis de l’évacuer. Il se trouvait, selon sa famille, au service des Urgences de l’hôpital Principal de Dakar.
«Un témoin relate une scène fort insolite : il a vu un des 8X8 qui jalonnent d’habitude le cortège du chef de l’Etat, foncer vers les marches du Palais. Ses passagers en sont descendus pour empoigner la personne qui arpentait ces marches» (Le Quotidien du 19 mai 2008).
Le porte-parole du président de la République, Me El Hadji Amadou Sall, joint alors au téléphone, avait d’ailleurs donné une autre version des faits. Considérant que nos «informations sont fausses», il affirme que personne, à aucun moment de la journée, n’a pu pénétrer dans l’enceinte du Palais. Mais, il précise que, dans la matinée comme dans l’après-midi, c’est au niveau du poste de police que l’individu a été interpellé, à chaque fois par les sapeurs-pompiers. Mieux, il s’agit du même individu qui, après un premier passage le matin, est revenu à 16 h et a été, cette fois-ci, «définitivement écarté» du Palais.
LE «DEFICIENT MENTAL» SURPREND LE PALAIS
Assurément, les nombreuses menaces médiatisées ont été prises par le Palais avec des pincettes. Car, Kéba Diop était décrit par les libéraux, comme un «déficient mental». Pourtant, il avait tenté au mois de juin de mettre fin à sa vie en avalant des barbituriques. Ultime rebondissement dans cette affaire, Kéba Diop, par ailleurs, poursuivi par sa banque pour des dettes qu’il y a contractées, décide de mettre à exécution sa menace. Le journal Le Matin avait analysé la démarche de M. Diop, par le fait que «sa marche ne lui a pas servi à grand-chose dans ce projet, puisque les portes du Palais lui sont restées fermées après plusieurs tentatives. D’ailleurs, celles-ci lui ont valu un séjour en détention assorti d’une condamnation en sursis. Mais une telle épreuve n’a pas du tout ébranlé M. Diop, qui estime avoir été victime d’arnaque de la part de la Fédération du Pds de Bignona qui occupe sa maison sans pour autant s’acquitter de la contrepartie financière». Il reste que le porte-parole du chef de l’Etat n’a pas voulu, cependant, confirmer que l’auteur de cette double tentative d’intrusion était bien Kéba Diop. Il s’est contenté de parler d’«un individu paraissant ne pas jouir de toutes ses facultés mentales».
source le quotidien