Voilà des gens qui n’ont aucune notion de fidélité encore moins d’engagement ou de reconnaissance. Pour eux, seul l’intérêt du moment compte. Ils se lient à une nouvelle famille religieuse à chaque fois leur serigne, à qui ils ont soi-disant confié leur destin, tourne le dos à ce bas-monde. Il faut s’appeler Wade pour méconnaître de façon aussi flagrante les règles de fonctionnement du mouridisme et de l’acte d’allégeance, au point d’adopter un comportement aussi irrespectueux envers les khalifes de Touba. Depuis le rappel à Dieu du dernier fils de Bamba, qui a vu Abdoulaye Wade poser les pieds chez Serigne Saliou, comme il le faisait avant, avec les caméras de la RTS ? Wade a tourné la page, tout simplement, parce que cette famille ne l’intéresse plus, de la même manière que la famille de Serigne Bara ne l’intéressait pas du vivant de Serigne Saliou. Ce que les Wade cherchent chez un serigne, ce n’est ni la religion, encore moins la spiritualité, mais le pouvoir, et rien d’autre. La preuve, si un autre khalife venait à succéder à Serigne Bara (que Dieu lui prête longue vie), Abdoulaye Wade et son fils changeraient de serigne dans la minute qui suit, pour faire allégeance au nouveau venu. Pour ce qui est de Karim, on a l’impression qu’il vient à peine de prendre connaissance de l’existence du mouridisme. C’est seulement à 40 ans que les Sénégalais découvrent sa « mouridité », ce qui est loin d’être un événement, pour valoir une couverture par ce que certains osent appeler une télévision. Cette « transhumance familiale confrérique » ou « nomadisme maraboutique » initiée par Abdoulaye Wade, semble malheureusement amuser les Sénégalais. Des gens comme lui ont fait du nom de Serigne Fallou, un fonds de commerce, dont ils usent et abusent à longueur de journée. Comment Abdoulaye Wade, contemporain de Serigne Fallou, dont il n’a jamais reçu la moindre consigne explicite, peut prétendre tirer son pouvoir de ce dernier ? De qui se moque-t-on réellement ? Serigne Bara, s’adressant à Karim, faisait certainement de l’ironie. Une chose est sûre : le sage Serigne Fallou Mbacké, de son vivant, s’est bien gardé de donner une quelconque consigne à l’endroit de celui qui déclarait ne jamais marcher sur des cadavres pour accéder au pouvoir, tout en étant prêt à faire appel à l’armée pour renverser le pouvoir d’alors. Il serait intéressant d’interpeller les archives du Sénégal à ce sujet. Ce don de la manipulation de l’opinion et des faits historiques, Abdoulaye Wade a partiellement réussi à le transmettre à son fils, un novice, qui s’avère cependant dix fois moins talentueux que le père en matière d’expression, de charisme ou de séduction. Le pauvre, qui le soir lit à l’envers son manuel d’apprenti politicien, se croit capable de pouvoir « tout retourner, valoriser et tirer à son avantage ». Seulement, il y a des choses qui sautent aux yeux. Rien qu’à le voir s’exprimer, l’on devine que monsieur, qui est dans un rôle, s’efforce d’appliquer avec maladresse les instructions de ses conseillers en communication. Excusez ma grossièreté mais on n’en a rien à « foutre » de savoir si Karim Wade est mouride, tidiane, layène ou peut-être même franc-maçon, étant donné que les fils, pour la plupart, suivent la « religion » de leur père, pourvu que ce dernier croie en quelque chose. De nos jours, il est devenu politiquement correct, pour ne pas dire à la mode, d’affirmer publiquement sa « mouridité ». A cause d’Abdoulaye Wade, les Mourides sont insultés sur les forums, leur confrérie, assimilée à une secte, et les plus braves d’entre eux, réduits à de piètres vendeurs à la sauvette. C’est aussi à cause d’Abdoulaye Wade, que beaucoup pensent que les deniers de l’Etat servent à financer les travaux dans la ville sainte de Touba. Il appartient aux intellectuels mourides de sortir de leur mutisme pour siffler la fin de la récréation et dénoncer sans réserve cette instrumentalisation de la confrérie à des fins purement politiques, car Serigne Touba se passerait volontiers d’un maçon dormant ou radié, qui ne fait que conforter l’assertion de Machiavel selon laquelle « il n'est pas nécessaire à un prince d'avoir toutes les bonnes qualités … mais il lui est indispensable de paraître les avoir. »
Momar Mbaye
mbayemomar@yahoo.fr
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