Abdou Diouf: "Il n'y a pas lieu de suspendre la Côte d'Ivoire de telle ou telle instance continentale. Car cette formule laisse supposer que l'exécutif sortant demeure l'interlocuteur avec lequel il convient de traiter. Pour ma part, je n'envisage pas une suspension de l'OIF. A l'inverse, je demande à Alassane Ouattara, chef d'Etat légitime, de désigner le nouveau représentant de son pays au sein de l'Organisation."
Invité de l'Institut français des relations internationales (Ifri), l'ancien président sénégalais Abdou Diouf, secrétaire général de l'Organisation internationale de la Francophonie (OIF), a livré hier soir, à la faveur d'un dîner-débat, une analyse claire et ferme de l'imbroglio ivoirien. Diagnostic d'autant plus probant qu'il émane d'un des rares "sages" de l'Afrique d'aujourd'hui. Mais aussi d'un ténor politique qui, chef d'Etat sortant vaincu à la régulière dans les urnes, sut en 2000 s'effacer sans barguigner devant son rival Abdoulaye Wade, résistant au passage aux injonctions de quelques barons de son parti.
Ne pas rééditer le schéma zimbabwéen
Selon ce "disciple" du défunt Léopold Sédar Senghor, il n'y a pas en Côte d'Ivoire d'autre issue que le départ du sortant Laurent Gbagbo. Seuls, estime le patron de la Francophonie, les modalités de sa retraite et son statut futur peuvent faire l'objet de négociations. "Pas question, insiste-t-il, de rééditer le schéma zimbabwéen." Référence à la côte mal taillée imposée voilà peu dans l'ex-Rhodésie du Sud, qui permit au vieux satrape Robert Mugabe de sauver son fauteuil présidentiel, tout en offrant à la figure de proue de l'opposition, Morgan Tsvangirai, la très ingrate mission de chef de gouvernement.
En inversant le verdict des urnes, pourtant incontestable et certifié, conformément à l'accord de paix de Ouagadougou (2007), par les Nations unies, le Conseil constitutionnel, organe aux ordres du clan Gbagbo, a commis à ses yeux une "forfaiture".
De même, Abdou Diouf approuve les sanctions individuelles et ciblées décidées par l'Union européenne à l'encontre de divers membres du "premier cercle" de Laurent Gbagbo. "A mon sens, précise-t-il, il n'y a pas lieu de suspendre la Côte d'Ivoire de telle ou telle instance continentale. Car cette formule laisse supposer que l'exécutif sortant demeure l'interlocuteur avec lequel il convient de traiter. Pour ma part, je n'envisage pas une suspension de l'OIF. A l'inverse, je demande à Alassane Ouattara, chef d'Etat légitime, de désigner le nouveau représentant de son pays au sein de l'Organisation."
S'il déplore la posture de l'armée ivoirienne, du moins de sa haute hiérarchie, celui qui fut le Premier ministre puis le successeur de Senghor relève que la troupe aurait quant à elle voté majoritairement en faveur de Ouattara. Ainsi émet-il l'hypothèse d'un mouvement qui pourrait aboutir à l'éviction simultanée de Gbagbo et des "généraux félons."
La théorie du complot néo-colonial récusée
Par ailleurs, "M. Francophonie" récuse la rhétorique très en vogue dans l'entourage de Gbagbo, selon laquelle ce dernier serait la victime d'un vaste complot néo-colonial ou impérialiste. A cet égard, il juge essentielle la réprobation explicite de l'Union africaine et de la Communauté économique des Etats d'Afrique de l'Ouest (Cedeao). Reste que, sur la scène internationale, confesse-t-il, "trois pays m'inquiètent" : la Russie, qui n'a rallié que tardivement, et à reculons, le désaveu du Conseil de sécurité de l'Onu, la Chine, et plus encore l'Angola, ultime soutien de poids du putschiste institutionnel Laurent Gbagbo. S'agissant de celui-ci, l'hôte de l'Ifri tend à adhérer à la thèse qui veut que le fondateur du Front populaire ivoirien serait moins réfractaire au scénario d'un retrait assorti de garanties que la coterie des faucons qui l'entourent, à commencer par sa première épouse Simone.
Faut-il craindre, au-delà d'une période d'indignation consensuelle, que le primat de la Realpolitik conduise la "communauté internationale" -ou ce qui en tient lieu- à tolérer le fait accompli abidjanais ? "Impossible, rétorque Abdou Diouf. Jamais on n'acceptera cela. A cet égard, conclut-il, j'irai jusqu'à parier ma veste et ma chemise."
Invité de l'Institut français des relations internationales (Ifri), l'ancien président sénégalais Abdou Diouf, secrétaire général de l'Organisation internationale de la Francophonie (OIF), a livré hier soir, à la faveur d'un dîner-débat, une analyse claire et ferme de l'imbroglio ivoirien. Diagnostic d'autant plus probant qu'il émane d'un des rares "sages" de l'Afrique d'aujourd'hui. Mais aussi d'un ténor politique qui, chef d'Etat sortant vaincu à la régulière dans les urnes, sut en 2000 s'effacer sans barguigner devant son rival Abdoulaye Wade, résistant au passage aux injonctions de quelques barons de son parti.
Ne pas rééditer le schéma zimbabwéen
Selon ce "disciple" du défunt Léopold Sédar Senghor, il n'y a pas en Côte d'Ivoire d'autre issue que le départ du sortant Laurent Gbagbo. Seuls, estime le patron de la Francophonie, les modalités de sa retraite et son statut futur peuvent faire l'objet de négociations. "Pas question, insiste-t-il, de rééditer le schéma zimbabwéen." Référence à la côte mal taillée imposée voilà peu dans l'ex-Rhodésie du Sud, qui permit au vieux satrape Robert Mugabe de sauver son fauteuil présidentiel, tout en offrant à la figure de proue de l'opposition, Morgan Tsvangirai, la très ingrate mission de chef de gouvernement.
En inversant le verdict des urnes, pourtant incontestable et certifié, conformément à l'accord de paix de Ouagadougou (2007), par les Nations unies, le Conseil constitutionnel, organe aux ordres du clan Gbagbo, a commis à ses yeux une "forfaiture".
De même, Abdou Diouf approuve les sanctions individuelles et ciblées décidées par l'Union européenne à l'encontre de divers membres du "premier cercle" de Laurent Gbagbo. "A mon sens, précise-t-il, il n'y a pas lieu de suspendre la Côte d'Ivoire de telle ou telle instance continentale. Car cette formule laisse supposer que l'exécutif sortant demeure l'interlocuteur avec lequel il convient de traiter. Pour ma part, je n'envisage pas une suspension de l'OIF. A l'inverse, je demande à Alassane Ouattara, chef d'Etat légitime, de désigner le nouveau représentant de son pays au sein de l'Organisation."
S'il déplore la posture de l'armée ivoirienne, du moins de sa haute hiérarchie, celui qui fut le Premier ministre puis le successeur de Senghor relève que la troupe aurait quant à elle voté majoritairement en faveur de Ouattara. Ainsi émet-il l'hypothèse d'un mouvement qui pourrait aboutir à l'éviction simultanée de Gbagbo et des "généraux félons."
La théorie du complot néo-colonial récusée
Par ailleurs, "M. Francophonie" récuse la rhétorique très en vogue dans l'entourage de Gbagbo, selon laquelle ce dernier serait la victime d'un vaste complot néo-colonial ou impérialiste. A cet égard, il juge essentielle la réprobation explicite de l'Union africaine et de la Communauté économique des Etats d'Afrique de l'Ouest (Cedeao). Reste que, sur la scène internationale, confesse-t-il, "trois pays m'inquiètent" : la Russie, qui n'a rallié que tardivement, et à reculons, le désaveu du Conseil de sécurité de l'Onu, la Chine, et plus encore l'Angola, ultime soutien de poids du putschiste institutionnel Laurent Gbagbo. S'agissant de celui-ci, l'hôte de l'Ifri tend à adhérer à la thèse qui veut que le fondateur du Front populaire ivoirien serait moins réfractaire au scénario d'un retrait assorti de garanties que la coterie des faucons qui l'entourent, à commencer par sa première épouse Simone.
Faut-il craindre, au-delà d'une période d'indignation consensuelle, que le primat de la Realpolitik conduise la "communauté internationale" -ou ce qui en tient lieu- à tolérer le fait accompli abidjanais ? "Impossible, rétorque Abdou Diouf. Jamais on n'acceptera cela. A cet égard, conclut-il, j'irai jusqu'à parier ma veste et ma chemise."