La traque des biens mal acquis des dignitaires de l’ancien régime libéral se heurte à une rude polémique portant sur la légalité des cadeaux et dons reçus par les fonctionnaires de l’Etat. Entre cadeaux donnés à un fonctionnaire et bakchichs perçus par agent un agent de l’Etat, la frontière est trop ténue. Mais, au Sénégal, il existe une vaste zone d’incertitude, car, à l’heure actuelle, aucune loi ne statue sur les cadeaux devant être reçus par des fonctionnaires de l’Etat. Rien de surprenant donc de voir l’ancien premier ministre Souleymane Ndéné Ndiaye s’engouffrer dans la brèche. Il dit : « je n’ai pas besoin de détourner de l’argent. Le président de la République Abdoulaye Wade me donnait de l’argent tous les trois mois ». En ce qui concerne ses véhicules, il dit : « des amis qui connaissent ma passion pour les grosses cylindrées, m’offrent des voitures ». La rhétorique empruntée par Ndéné Ndiaye avait déjà été utilisée par Abdoulaye Baldé. En campagne pour les élections locales de 2009, Baldé devait faire face à la critique de ses adversaires sur l’immensité de sa fortune. Le secrétaire général de la Présidence d’alors et directeur exécutif de l’Anoci sonne la réplique. « On me reproche de gaspiller beaucoup d’argent, mais c’est parce que je suis généreux. Je peux offrir cent millions sans problème. Ce n’est pas l’argent de l’Etat, c’est mon propre argent que mes amis arabes me donnent et que j’offre à mes frères », avoue-t-il, le mardi 10 mars 2009. Dans la même veine, le président sortant, Me Abdoulaye Wade adopte la même ligne de défense pour revendiquer la paternité des véhicules récupérés par l’Etat à la faveur du changement de régime. Mais, cette plaidoirie présente de grosses faiblesses. D’abord, elle révèle une confusion terrible entre la personne privée et le représentant de l’Etat du Sénégal. Entre intérêt privé et intérêt général. En effet, c’est à la faveur de leurs hautes fonctions étatiques que ces personnes ont pu bénéficier de ces importants cadeaux. Dans l’opposition, Abdoulaye Wade a connu les affres de la conjoncture économique au point d’initier la marche bleue pour contourner les meetings onéreux. Aussi, les nouveaux riches de l’alternance étaient pour une grande partie des travailleurs modestes. Mais grâce à leurs responsabilités publiques, ils ont amassé une fortune immense des quatre coins de la planète.
Aujourd’hui, cet ancien président, ainsi que ses collaborateurs ne peuvent plus recevoir autant de cadeaux en nature et en voitures venant de leurs amis. Cette situation fait peser un fort soupçon de corruption car ces cadeaux laissent présager des faveurs en retour. Selon Mamadou Mbodj du Forum Civil : « Des autorités justifient de façon naïve la provenance de leurs avoirs par des dons qu’ils ont reçus d’amis établis à l’étranger. Or, quand le cadeau est suivi d’une faveur en retour, il y a forcément corruption ». Il précise que le caractère illicite du don dépend de deux variables. « Quand la proportion de la transaction entre le cadeau reçu et la faveur demandée est important, il y a forcément corruption. Et cette transaction peut être différée dans le temps », précise-t-il. Par conséquent, si la justice parvient à établir la preuve d’un service rendu à ces donateurs par le bénéficiaire du don, le caractère illicite de l’opération est prouvée. Même si les échanges se déroulent dans un espace temporel décalé.
Pour éviter ces travers, beaucoup de pays démocratiques exigent de leurs fonctionnaires de ne pas recevoir de cadeaux dépassant certaines valeurs. C’est le cas de la France où le président François Hollande, dans une charte de déontologie, demande à ses ministres de refuser de « donner suite à toute invitation pour un séjour privé qui émanerait d’un gouvernement étranger ou de personnes physiques ou morales dont l’activité est en relation avec leur département ministériel. » Quant aux cadeaux, le président français demande à ses collaborateurs de les « remettre à l’Etat dès que leur valeur dépassera 150 euros (Ndlr : environ 100 000 CFA) ». Dans ce même souci de veiller à la bonne gouvernance, l’Organisation des nations unies (Onu) demande à ses fonctionnaires de « déclarer obligatoirement tous cadeaux ou faveurs reçus de source gouvernementale ou non gouvernementale dont la valeur totale est égale ou supérieure à 250 dollars (Ndlr : 125 000 f CFA) ». Ces montants auxquels font référence la France et l’Onu sont dérisoires comparés aux milliards en jeu dans le cas du Sénégal.
En plus de cette collusion, d’intérêts, la justification fournie par les anciens dignitaires soulève d’autres anomalies relatives à la fiscalisation de ces biens. « Au-delà de la justice, les anciens dignitaires du régime peuvent être poursuivis par l’administration fiscale. Car les dons sont soumis à l’impôt », renseigne Mouhamadou Mbodj. A la lumière de cela, les anciens dignitaires peuvent subir des sanctions sévères pour fraude fiscale. Afin de lutter efficacement contre l’enrichissement illicite, M Mbodj, propose des lois capables de déterminer une somme plafond au-delà de laquelle les fonctionnaires doivent verser les cadeaux au Trésor public. Pour ce faire il estime que toutes les forces sociales doivent impérativement soutenir les actes entreprises par le nouveau régime. « Les mesures prises par le président Macky Sall sont révolutionnaires. Lors de la campagne il avait promis des audits, mais il est allé plus loin. Il faut mettre de l’ordre dans l’occupation des charges publiques. Actuellement, tous les jeunes, les organisations et les forces vives doivent soutenir ces mesures. Car, cela va même dissuader les alliés de Macky à reproduire les mêmes pratiques », soutient-il.
SOURCE:lagazette.sn
Baye Makébé SARR
Aujourd’hui, cet ancien président, ainsi que ses collaborateurs ne peuvent plus recevoir autant de cadeaux en nature et en voitures venant de leurs amis. Cette situation fait peser un fort soupçon de corruption car ces cadeaux laissent présager des faveurs en retour. Selon Mamadou Mbodj du Forum Civil : « Des autorités justifient de façon naïve la provenance de leurs avoirs par des dons qu’ils ont reçus d’amis établis à l’étranger. Or, quand le cadeau est suivi d’une faveur en retour, il y a forcément corruption ». Il précise que le caractère illicite du don dépend de deux variables. « Quand la proportion de la transaction entre le cadeau reçu et la faveur demandée est important, il y a forcément corruption. Et cette transaction peut être différée dans le temps », précise-t-il. Par conséquent, si la justice parvient à établir la preuve d’un service rendu à ces donateurs par le bénéficiaire du don, le caractère illicite de l’opération est prouvée. Même si les échanges se déroulent dans un espace temporel décalé.
Pour éviter ces travers, beaucoup de pays démocratiques exigent de leurs fonctionnaires de ne pas recevoir de cadeaux dépassant certaines valeurs. C’est le cas de la France où le président François Hollande, dans une charte de déontologie, demande à ses ministres de refuser de « donner suite à toute invitation pour un séjour privé qui émanerait d’un gouvernement étranger ou de personnes physiques ou morales dont l’activité est en relation avec leur département ministériel. » Quant aux cadeaux, le président français demande à ses collaborateurs de les « remettre à l’Etat dès que leur valeur dépassera 150 euros (Ndlr : environ 100 000 CFA) ». Dans ce même souci de veiller à la bonne gouvernance, l’Organisation des nations unies (Onu) demande à ses fonctionnaires de « déclarer obligatoirement tous cadeaux ou faveurs reçus de source gouvernementale ou non gouvernementale dont la valeur totale est égale ou supérieure à 250 dollars (Ndlr : 125 000 f CFA) ». Ces montants auxquels font référence la France et l’Onu sont dérisoires comparés aux milliards en jeu dans le cas du Sénégal.
En plus de cette collusion, d’intérêts, la justification fournie par les anciens dignitaires soulève d’autres anomalies relatives à la fiscalisation de ces biens. « Au-delà de la justice, les anciens dignitaires du régime peuvent être poursuivis par l’administration fiscale. Car les dons sont soumis à l’impôt », renseigne Mouhamadou Mbodj. A la lumière de cela, les anciens dignitaires peuvent subir des sanctions sévères pour fraude fiscale. Afin de lutter efficacement contre l’enrichissement illicite, M Mbodj, propose des lois capables de déterminer une somme plafond au-delà de laquelle les fonctionnaires doivent verser les cadeaux au Trésor public. Pour ce faire il estime que toutes les forces sociales doivent impérativement soutenir les actes entreprises par le nouveau régime. « Les mesures prises par le président Macky Sall sont révolutionnaires. Lors de la campagne il avait promis des audits, mais il est allé plus loin. Il faut mettre de l’ordre dans l’occupation des charges publiques. Actuellement, tous les jeunes, les organisations et les forces vives doivent soutenir ces mesures. Car, cela va même dissuader les alliés de Macky à reproduire les mêmes pratiques », soutient-il.
SOURCE:lagazette.sn
Baye Makébé SARR