N’eût été le froid, on se serait cru au Sénégal, à Touba particulièrement, tant les personnes venues célébrer le grand Magal dans la capitale économique des Etats-Unis, étaient nombreuses. Plusieurs centaines de personnes ont fait le déplacement. Des jeunes vêtus de « Baye Lahat », des vieux, des femmes, des Américains, blancs comme noirs, il y avait du tout dans l’enceinte de l’église. Tout ce beau monde endimanché était venu commémorer, dans la foi et la ferveur, le Magal. Au rez-de-chaussée, loin de la ferveur religieuse, c’est le célèbre « Berndel ». Thiakri, poulets rôtis, méchoui, arachides bouillies, salées ou non, oranges, entre autres fruits, « daxine » (un plat à base de riz et d’arachide), bref, l’art culinaire du Sénégal a tout simplement été exporté au pays de l’Oncle Sam pour les besoins du Magal. Le tout sous le regard de Martin Luther King Jr dont la photo placardée, semble indiquer la voix : « We shall overdose ». C’est que pour cette édition, la nouvelle équipe du Mouride islamique community in America (Mica) n’a pas lésiné sur les moyens pour réussir le pari de l’organisation. Au premier étage, on voit les images de Cheikh Ahmadou Bamba, fondateur du mouridisme, trôner majestueusement dans une salle de l’église où bibles et khassaides sont disposés côte à côte sans que cela ne choque personne. Serigne Moustapha Diop et Imam Boubakar Dabo, les têtes de file de Mica, deux jeunes intellectuels très respectés dans la communauté, reçoivent leurs hôtes des autres confréries. La famille Sy de Tivaoune était représentée. On a noté aussi sur les lieux la présence de Yaye Dara, célèbre animatrice d’émission radio sur le tidianisme forçant admiration et respect de tous. La famille de Cheikh Oumar Foutiyou Tall, les Tidianes de Brooklyn, les Layennes n’ont pas été en reste. Tous ont répondu à l’appel de la communauté mouride qui célébrait le grand Magal. C’était le Sénégal en miniature. Pour les fervents disciples de Serigne Touba vivant aux Etats-Unis, Magal rime avec férié. Il n’est pas question de bosser. L’heure était plutôt à revisiter l’œuvre du fondateur du mouridisme. Toute la nuit, on a chanté Cheikh Ahmadou Bamba, vanté Khadimou Rassoulou. En lieu et place des habituels « Alléluia », l’église a résonné au rythme de « La Illaha Ilallah », mais aussi au son des khassaides. Ce qui peut sembler surprenant, voire cocasse, compte tenu de l’islamophobie qui prévaut depuis le 11 septembre 2001. Mais, dans ce pays où tout se discute sauf la liberté, que des musulmans se réunissent dans une église est simplement un fait banal. Auparavant dans la matinée, un récital du Coran a été organisé dans la maison de Khadimou Rassoulou, propriété des mourides, mais très exiguë pour recevoir des milliers de personnes. Le Consul général, Cheikh Niang, qui y était au nom de l’Etat n’a pas manqué de magnifier le dynamisme et le sens des responsabilités de la communauté. C’est dire que New York a eu aussi son Magal, une cérémonie colorée, riche en enseignements. Si le dialogue islamo-chrétien en est à l’étape de discours au Sénégal, ici, le concept a été tout simplement matérialisé car Mourides, Tidianes, Layennes se sont retrouvés durant toute une soirée dans une église pour prier Allah.
Amadou BA
Source: L'as
Amadou BA
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