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Macky-Mbow : Qui piégera l'autre ?

Ils travaillent en apparence en parfaite intelligence. Mais, au fond, ce que vise l'un n'est pas forcément en phase avec ce que souhaite l'autre. Le vieux Président de la CNRI travaille à une réforme en profondeur de la Constitution. Laquelle, au finish, sera marquée du sceau des Assises nationales qu'il a dirigées en 2008. Là où le jeune Président de la République n'entend pas se laisser dépouiller et veut d'une Constitution fortement inspirée des orientations du Yonou Yokoute, son programme politique. Le piège s'ouvre, béant. Et, indubitablement, l'un des deux se fera avoir.


Rédigé par leral.net le Samedi 27 Juillet 2013 à 22:07 | | 1 commentaire(s)|

Macky-Mbow : Qui piégera l'autre ?
Edgar Faure l'avait dit : ce ne sont pas les girouettes qui tournent, c'est le vent. Et, vraisemblablement, Macky Sall ne veut pas passer pour une "girouette". Il ne veut point donner l'impression de "tourner" au gré des circonstances. Mais il se laisse tout de même emporter par le vent. Ainsi, alors que les Assises nationales étaient lancées en juin 2008 à un moment où il était pratiquement en rupture de ban chez les libéraux, il évita soigneusement de s'approcher des initiateurs pour ne pas fâcher davantage son mentor Wade. Le vent lui avait indiqué de s'en éloigner. Puis, dans l'entre-deux tours en 2012, le vent lui indiqua de s'en approcher pour bénéficier de cette plateforme commune à l'opposition, aux mouvements citoyens et à la société civile. Et maintenant qu'il est revêtu de son manteau de président de la République et veut garder jalousement et le pouvoir et ses prérogatives, le vent, encore lui, lui indique de prendre une distance critique avec les Assisards. Les mandataires que sont Mbow et compagnie n'ayant visiblement pas la même compréhension du travail de la Commission nationale de réforme des institutions (CNRI) que leur mandant Macky Sall. Est-ce qu'il est question d'une refonte totale de la Constitution ? Auquel cas, on aura droit à une refondation d'où émergera une nouvelle République. Ou faut-il plutôt procéder à des modifications, fussent-elles profondes, de l'actuelle Constitution en y extirpant toutes les dispositions qui faisaient le lit des dérives wadiennes ? Ou s'agit-il enfin, pour faire neuf, de recourir à la mouture issue des Assises édulcorées par les orientations du programme Yonou Yokoute ? Voilà donc trois scenarii qui verront Macky Sall et les Assisards reprendre de plus belle leur jeu de ruses qui remonte, en vérité, à l'entre-deux tours de la présidentielle 2012.

Macky et les Assisards : à malin, malin et demi

Quand Amadou Makhtar Mbow et compagnie lancèrent les Assises nationales en juin 2008 , Macky Sall, giflé, baffé et martyrisé par les lycaons de Wade, se débattait comme un beau diable pour ne pas se laisser enterrer vivant. Et, pourtant, il se garda bien de chercher refuge chez les Assisards. Une manière sûrement de ne pas prêter le flanc face à son ancien mentor qui l'avait déjà pris en grippe et qui aurait très certainement justifié la chasse à courre dont il était l'objet par sa collusion avec l'ennemi. Mais une manière aussi pour le président de l'Assemblée d'alors de prendre sa défense, seul et stoïque, pour ne rien devoir par la suite à personne. Et surtout pas aux Assisards. Puis, vint le second tour de la présidentielle. Et Macky Sall, qui était bien conscient qu'il avait fait le plein de voix avec ses 26%, savait pertinemment qu'il avait enfin besoin du soutien et de l'apport du peuple des Assises pour espérer venir à bout de l'ogre Wade. Lequel, avec ses 32,82%, était certes en ballottage défavorable avec à peu près 63% des suffrages à toute l'opposition réunie, mais tenait encore une chance de rebondir face à un challenger qui n'était ni Niasse ni Tanor, ces grandes figures de l'opposition, mais simplement un de ses fils spirituels. Qui plus est le nain politique Macky Sall qu'il avait "fabriqué de toutes pièces". Groggy, le vieux tenait encore sur ses appuis au point que le champion "apériste" avait impérativement besoin de se renforcer pour espérer le déboulonner. Aussi Amadou Makhtar Mbow, président du comité de pilotage des Assises nationales, sera-t-il la première personnalité à laquelle Macky Sall rendra visite. La rencontre entre les deux hommes a lieu au domicile même du Président des Assises, au Point E, et dure environ 45 minutes en présence du Général Mouhamadou Mansour Seck, Mansour Cama et Ndella Ndiaye, tous membres influents du comité de pilotage des Assises nationales. Prié de dire s’il comptait sur l’appui des signataires des conclusions des Assises nationales à l'issue de la rencontre, Macky Sall avance sans sourciller: ‘’Naturellement, puisque nous sommes partie prenante des Assises. C’est quelque part un des candidats appartenant aux Assises nationales qui va au second tour. Il est donc normal que nous puissions solliciter l’appui de tous. C’est le deuxième combat’’. Oubliés, ces rapports on ne peut plus distants avec les Assisards. Il s'engageait à faire cause commune avec le peuple des Assises, à faire sien le premier combat engagé par Mbow et compagnie depuis 2008 et à lancer donc, avec eux, le "deuxième combat". Bref, il avait su trouver les mots juste pour rallier à sa cause l'opposition, les mouvements citoyens, la société civile et, surtout, l'intégralité des 12 candidats malheureux du premier tour. C'était clair : Wade ne pouvait aucunement tenir face à cette déferlante "assisarde". Bref, Macky avait été bien malin et avait bien manœuvré pour que tous travaillent à son triomphe. Et ce fut naturellement le cas au soir du 25 mars 2012 où - c'est du jamais vu - il tripla pratiquement son score du premier tour et envoya carrément Wade au tapis avec ...65% des suffrages. Son pouvoir était désormais ...assise. Et les "Assises" ...debout. Puisque, après l’élimination des ténors de Bennoo Siggil Senegaal, les Assises nationales et la Charte de la bonne gouvernance qui en sortira, étaient remises au goût du jour grâce au triomphe de Macky Sall. Du moins, c'est ce que pensaient Mbow et compagnie jusqu'à ce que le successeur de Wade ne commence à émettre quelques réserves sur la fameuse charte de gouvernance démocratique. La principale de ses réserves : pas question pour l'"apériste" en chef de se démettre de ses habits de chef de parti. A ses yeux, rien ne s'oppose à ce qu'il porte allègrement et sa tunique de chef de parti, donc d'une partie du peuple et son manteau de chef d'Etat, donc de tout le peuple.
En somme, entre Macky et les Assisards, c'est comme à malin, malin et demi. Le premier s'est servi de l'échelle des Assises pour parvenir au sommet. Alors que les Assisards, pour leur part, espéraient la mise en œuvre rapide de la Charte de gouvernance avec son accession au pouvoir. Que nneni ! Macky cherche plutôt à gagner du temps comme l'a fait d'ailleurs remarquer Mame Adama Guèye à "Opinion" sur Walf. "La commission chargée de réfléchir sur les réformes institutionnelles est une manière pour Macky Sall de fuir devant ses responsabilités", a plaidé l'avocat.

Saleh à la manœuvre

Pis, Macky et les Assisards s'adonnent à un jeu de ruse. La preuve, en tant que Chef de l’Etat ayant créé la CNRI qui est à la tâche, Macky Sall ne s'est pas gêner de se prononcer sur le « cumul des fonctions de Chef de l’Etat et de Chef de Parti ». Voudrait-il exercer une douce pression sur la CNRI et empiéter publiquement sur ses travaux qu'il ne s'y prendrait pas autrement. Visiblement, il a voulu fixer intelligemment des limites à Mbow et son équipe. Tout le contraire de son conseiller politique Mahmouth Saleh qui a lui carrément mis les pieds dans le plat avec sa sortie au vitriol contre les membres de la CNRI. En somme, une attaque en règle contre la CNRI lors de sa récente tournée politique au Nord du Sénégal. Appelant la structure dirigée par Mbow à se « conformer à la feuille de route » que le Chef de l’Etat lui avait transmise dans sa mission d’organiser des consultations pour la réforme des Institutions, Saleh se fait la voix de son maître et exprime, plus clairement que Macky n'aurait pu le faire, son souhait. A savoir que la CNRI se contente simplement de l'esquisse de Constitution issue des Assises en l'édulcorant avec les orientations du programme Yonou Yokoute. Là où les Assisards, en soumettant la question aux consultations citoyennes, comme en 2008, pourraient finalement limiter la marge de manœuvre de Macky Sall sur une Constitution qui serait finalement d'émanation populaire. Et, comme dans tout jeu de ruse, Saleh, décidément l'éminence grise de Macky, s'est porté au devant. Comme lorsqu'il s'était agi de liquider Idrissa Seck avec cette fameuse et fumeuse histoire de coup d'Etat "rampant" puis "debout". Bref, quand Saleh monte au front, c'est que Macky a décidé de sortir l'artillerie lourde. En revanche, l'on ne peut soupçonner le Doyen Mbow qui s'est engagé à diriger les Assises puis la CNRI, sans arrière pensée et juste pour mettre son expérience au service du pays, de verser dans des calculs politiques. Mais sans doute pensait-il que Macky croyait sincèrement à la Charte de gouvernement et qu'il ne songerait jamais à faire primer les orientations de Yonou Yokoute sur les conclusions des Assises. Mais, apparemment, c'est bien le cas. Alors, qui entre Macky et Mbow arrivera-t-il à arracher le plus de concessions à l'autre ? C'est là toute la question. Et tout l'enjeu des agissements, des gesticulations et des vociférations de ses inconditionnels comme Mahmout Saleh et le député Abdou Mbow.

Momar DIONGUE (Nouvel Horizon)



1.Posté par beidaw le 28/07/2013 04:04 | Alerter
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qui va lire un truc aussi long ? on dirait une encyclopédie en huit volumes.

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