« Le monde occidental redécouvre la richesse de cette culture », analyse pour 20 Minutes Didier Mandin, coorganisateur de la Natural Hair Academy, qui se positionne comme « l’événement incontournable de la beauté noire en France et en Europe ».
Se positionner pour se tailler la part du lion
« De nombreux événements apparaissent, disparaissent et réapparaissent. Autour du cheveu comme la NHA ou Boucles d’Ebène, mais aussi de la mode, des accessoires ou encore de la musique », estime-t-il. Le marché de la beauté ethnique fait sa révolution depuis 2010 aux Etats-Unis, depuis 2015 en France. Les grandes marques de cosmétique se jettent à l’eau. Mixa, Dop, L’Oréal propose des produits destinés aux afro-caribéennes et s’appuient sur des égéries telles que la blogueuse Fatou N’Diaye, les mannequins Noémie Lenoir ou Sonia Rolland. Mais aujourd’hui, ce sont toutes les sphères de la mode qui connaissent ce véritable boom.
Et comme tous les marchés en expansion, il attire et donne envie aux entrepreneurs de se positionner pour tenter de se tailler la part du lion. La Natural Hair Academy, lancée il y a six ans, a dès lors voulu être un rendez-vous entre les marques et acheteurs. « On veut que la NHA soit un moment de conscience et de fun. Mais dès le départ, nous avons souhaité nous présenter comme un pop-up store pour que les marques puissent se présenter et exposer leurs nouveautés. » Business is business.
Une guerre entre petites marques et mastodontes
Au parc Floral, où était cette année organisé le salon, se croisaient marques encore peu connues et mastodontes américains, qui ont fait se déplacer pour l’occasion le haut de l’organigramme. Courtney Adeleye, fondatrice et directrice générale de The Mane Choice, Yannick Cheffre à la tête d’Activilong, un des leaders du marché capillaire.
Preuve s’il en est de l’importance du salon, où sont également organisés des conférences et des cours animés pour certaines par les marques elles-mêmes. Avec leurs produits vendus à tarifs préférentiels pendant l’événement, évidemment.
Et ça marche. L’organisation revendique une fréquentation de 6.000 participants, qui se sont arrachés les places vendues 25 euros l’unité.
« Ce salon gagne en notoriété d’année en année donc on voulait voir ce que ça donnait + », racontent Johanna et Suzy, venues pour la première fois cette année. C’est la curiosité et la volonté de découvrir de nouvelles marques, pour elles comme pour leurs enfants qui ont motivé ces deux jeunes, qui repartent avec des sacs remplis de produits capillaires. Elles se sont déjà donné rendez-vous l’année prochaine.
Mais au-delà du business, d’autres y voient une opportunité de mettre l’acceptation du cheveu naturel au cœur du débat.
Un débat qui ne devrait pas en être un ?
A l’image d’Aline Tacite, cofondatrice du salon Boucles d’Ébène, dédié à l’industrie de la beauté noire et naturelle. Au départ la volonté des organisatrices de ce salon était « de sensibiliser les femmes sur les conséquences du défrisage du cheveu et de les informer sur les alternatives avec des professionnels de la coiffure mais aussi des sociologues. Mais finalement, on parle très peu du cheveu mais de l’image que l’on perçoit de soi et de celle perçue par les autres. »
Et les conclusions de ces débats sont sans appel. « On devrait arborer ses cheveux au naturel », tranche-t-elle.
Un pas que certains, hommes comme femmes, ont encore du mal à franchir. « Ils ne savent pas dompter, aimer leurs cheveux. Certains sont attirés par cette mode du naturel mais d’autres sont victimes du ‘syndrome Beyoncé’ (comprendre, se lisser les cheveux) et toujours sous l’influence des mannequins occidentaux. »
Porter ses cheveux au naturel « c’est un droit à la différence et à l’indifférence. Ca ne devrait pas être un sujet qui prête à débat ou à interprétation, avance Taj, coiffeur. Est-ce qu’on demande aux autres de se justifier ? »