Monsieur le Ministre, Dakar et les localités desservies par le système du Lac de Guiers sont en proie à une pénurie d’eau depuis ce week-end. Quels en sont les tenants et les aboutissants ?
Nous sommes en présence d’une perte de production consécutive à l’arrêt de l’usine de Keur Momar Sarr pour des travaux de renouvellement de son dispositif de protection. Il n’existe pas une pénurie totale d’eau potable à Dakar et dans les localités desservies par les conduites du Lac de Guiers. Il y a simplement une perte de la capacité de production de l’usine de Keur Momar Sarr.
Ce volume représente près de 40% du volume quotidien produit par l’ensemble du système d’alimentation en eau potable de Dakar. Outre les usines de Keur Momar Sarr et Ngnith, installées sur le Lac de Guiers, ce système est composé des forages du Littoral Nord, de Pout Sud, de Pout Kirène, de Kelle-Kébémer et de Dakar.
En conséquence, pour la gestion de cet arrêt, le Gouvernement a instruit les sociétés d’eau à mettre en œuvre une campagne de communication. L’opinion a ainsi pu se comprendre qu’il n’y a aucune panne. La gestion de ces travaux comporte également des mesures d’atténuation. En relation avec la Sones, qui réalise ces travaux pour l’Etat du Sénégal, la Sde a mobilisé une centaine de camions citernes pour les quartiers les plus touchés par cette perte de production. Nous sommes à l’écoute des consommateurs.
Il est difficile de parler de Keur Momar Sarr sans penser à cette conduite cassée, en 2013. Sommes-nous à l’abri d’une crise de cette ampleur ?
Le dispositif de protection de l’usine de Keur Momar Sarr était fortement exposé à des dysfonctionnements, dont le plus retentissant a été la cassure de la conduite en «Y» en 2013. Il y a aussi les fuites à circonscrire et qui peuvent dégénérer. Nous ne pouvions plus continuer à faire tourner cette usine hautement stratégique, tout en sachant que nous risquions l’irréparable. Nous avons choisi l’intervention préventive.
Cette volonté politique a-t-elle été effectivement traduite en actions et de manière efficace ?
Le Gouvernement a décidé de renouveler entièrement le système de protection. Les points sur lesquels nous devions intervenir ont été retenus à partir d’un diagnostic minutieux, notamment l’inexistence de ressources de substitution suffisantes pour alimenter les populations en cas d’arrêt des usines ; l’absence de pièces de secours pour des équipements dont l’avarie peut provoquer l’arrêt d’un ouvrage stratégique, avec comme conséquence, un manque à produire important dans le système ; l’absence d’un transformateur de secours à la station de Mékhé (16MVA) ; l’absence de débimètres (appareils de mesure du débit de secours) au niveau de la station de Mékhé; fragilité de la pièce de raccordement du dispositif anti-bélier de KMS en acier (partie «Y» et partie «W») ; l’arrêt partiel ou total de l’usine de Ngnith suite à la vétusté des groupes motopompes et électrogènes ; des arrêts brusques de l’usine de Keur Momar Sarr suite à l’instabilité de son alimentation électrique.
Ainsi est né le Programme de sécurisation des ouvrages névralgiques, sur un financement de 6,5 milliards Cfa de l’Agence Française de Développement (Afd). Nous avons procédé aux interventions suivantes : le renforcement du système de protection de Keur Momar Sarr ; la fourniture de deux groupes motopompes à l’usine de Ngnith ; la fourniture d’un groupe électrogène à l’usine de Ngnith; le renforcement de la protection cathodique de la première conduite du Lac de Guiers (ALG1); la fourniture et la pose d’un deuxième transformateur au surpresseur de Mékhé; la fourniture de 2 débitmètres de secours au surpresseur de Mékhé ; le renouvellement de la conduite de refoulement vers le réservoir des Madeleines (Dakar) sur 1 kilomètre.
A cette étape-ci, la Sones procède au raccordement d’un nouveau dispositif de protection à l’usine de Keur Momar Sarr. La capacité est doublée : six ballons (300.000 litres de capacité) contre trois ballons dans l’ancien dispositif (150.000 litres). Nous interviendrons encore sur d’autres points pour parachever cette remise à neuf des points stratégiques de nos ouvrages de production.
Ces interventions sont vitales pour le système d’alimentation en eau potable de Dakar. Le Gouvernement attache un intérêt particulier à la continuité du service public de l’eau potable. Mais il n’y a pas que Dakar ! Le Programme Eau potable et Assainissement du Millénaire (PEPAM), avec une production supplémentaire cumulée de 56,5 millions de litres par jour, a nettement amélioré l’accès à l’eau potable à Thiès, Louga, Saint-Louis, Kaolack, Tambacounda, Bakel, Ziguinchor, Fatick, Mbour, Diourbel et Kolda. Des villes comme Ndioum, Foundiougne, Linguère, Khombole, Gossas, Kaffrine et Oussouye, ont bénéficié d’un forage de secours. Depuis les indépendances, elles n’en comptaient qu’un seul. Nous sommes en train de réparer cette injustice et de parer aux risques hydriques élevés dans ces localités. Voilà notre projet d’accès équitable à l’eau potable.
Vous évoquez le cas de Foundiougne. Parlons aussi de Kédougou. Qu’en est-il de la solution au goût salé de l’eau à Foundiougne et de la faiblesse de la production pour Kédougou ?
J’ai déjà dit que nous avons réalisé un deuxième forage très productif à Foundiougne. Malheureusement, cet ouvrage produit une eau au goût salé à cause d’un phénomène naturel compréhensible. La procédure d’acquisition d’une station de désalinisation mobile est en cours. Pour Kédougou, la situation de la nappe est fortement dépendante du niveau du fleuve. Le niveau baisse de manière drastique. Nous avons fait des forages. Malheureusement, à cause du très fort rabattement de la nappe, nous n’avons pas toujours eu la production escomptée. C’est une contrainte naturelle, objective. Nous ne baissons pas les bras pour autant. Nous venons de confier l’équipement d’un forage à la SDE. Cependant, le Gouvernement milite pour une solution durable. Faute de barrage sur le fleuve Gambie, nous sommes contraints de prendre l’eau à une dizaine de kilomètres, précisément dans la localité d’Itato. Une canalisation transportera l’eau brute à Kédougou pour son traitement et son injection dans le réseau pour la consommation.
Au-delà de cette pénurie programmée, beaucoup de zones, notamment à Dakar, sont tous les jours confrontées à un problème d’approvisionnement correct en eau. Ces réparations règleront-elles ces difficultés ?
Au-delà de cette priorité, le Gouvernement a remis à neuf deux groupes motopompes de l’usine de Ngnith, réalisée en 1971. Du coup, la capacité de production de cette usine est passée de 40 millions de litres à 47 millions de litres d’eau potable par jour. Convenez avec moi que des ressources additionnelles ont pu ainsi être mobilisées, de l’ordre de 7 millions de litres par jour. Le Gouvernement s’attèle à l’augmentation de la production. Bayakh, par exemple, aura un impact positif sur Rufisque et ses environs, qui font face à une demande décuplée par la poussée immobilière de ces dernières années. Les forages produiront, dès cette année 2018, 20 millions de litres par jour. La production pourra être doublée, avec la finalisation du programme, qui comportera globalement 16 forages et une station sur l’axe Bayakh-Diender-Thieudème. Au total, depuis 2014, la Sones a réalisé 60 forages pour Dakar et en a réhabilité 7.
Des forages sont régulièrement annoncés, mais la question de la demande persiste. L’impact social de vos travaux est-il réel ?
Depuis 2014, pas moins de 100 millions de litres d’eau par jour ont été mobilisés dans les différentes phases d’urgence. Toutes ces réalisations ont permis d’améliorer la disponibilité de l’eau dans plusieurs quartiers de Dakar : Nord Foire, Ouest Foire, CPI, Cité Alternance, Scat Urbam, Grand Yoff, Liberté 6 extension, Mixta, Keur Damel, Socabeg, Cité Léopold Sédar Senghor, Hlm Grand Yoff, une partie de l’Unité 26 des Parcelles Assainies et Toubab Dialaw. Le coût global de ces investissements s’élève à près de 13 milliards FCfa sur la période 2013 à 2017. Nous faisons toujours des efforts pour que les Parcelles Assainies aient une production suffisante. L’année dernière, nous y avons réalisé deux forages, dont l’eau de l’un a une forte teneur en fer. Nous déployons les mêmes efforts pour Toubab Dialao, situé en hauteur, Yenne, Diamniadio, Sébikotane, Bargny, etc.
Quelles assurances pouvez-vous donner aux Sénégalais pour dépasser cette situation ?
Keur Momar Sarr touche particulièrement la capitale. Dakar représente plus de 70% des besoins en eau potable du périmètre de l’hydraulique urbain, soit une production située entre 350 millions de litres et 375 millions de litres par jour, selon la période. De ce fait, nous avons opté pour la planification, à l’horizon 2035, voire 2050. Un schéma directeur de mobilisation des ressources a été élaboré. Dans le cadre de cette vision, nous avons deux projets phares que la Sones est en train de réaliser : la troisième usine de traitement de Keur Momar Sarr et la première usine de dessalement d’eau de mer des Mamelles. La première a une capacité quotidienne de 100 millions de litres et la deuxième, une capacité de 50 millions de litres, extensible à 100 millions de litres. Il est intéressant de rappeler que le Sénégal a réalisé près de 300.000 branchements sociaux, soit la moitié des abonnements.
Quel est le volume des fonds que l’Etat du Sénégal a injectés dans le secteur depuis lors ?
Depuis 2012, le Sénégal a rompu avec quinze années de retards d’investissements. Cette rupture fondamentale a engendré des investissements cumulés de plus de 500 milliards FCfa. A eux seuls, les projets KMS3 et Dessalement, coûteront 411 milliards FCFA. Retenez que depuis la première réforme de l’hydraulique urbaine, de 1996 à 2013, les investissements cumulés ont été de l’ordre de 266 milliards FCfa.
Vous êtes également en charge de la distribution. Qu’en est-il de la privatisation annoncée du secteur, avec les contrats d’affermage ?
Le secteur ne fait pas l’objet d’une privatisation actuellement. L’option de privatiser la distribution est mise en œuvre depuis 1996, avec la première réforme. Le patrimoine reste dans le giron public. C’est une constante. Ce patrimoine est confié à la Sones. L’exploitation revient à la Sde. Vingt-deux ans après la première, nous assistons simplement à la mise en œuvre de la deuxième réforme, avec la fin du contrat d’affermage. La validité de ce contrat est définie dans le temps. Cette année, il a été remis en jeu dans une procédure de sélection par appel d’offres international. Cette procédure est en cours. Un comité a été mis sur pied pour piloter cette réforme. Le Gouvernement a des attentes sur l’amélioration des conditions d’accès des populations à l’eau potable et à la qualité du service. Au final, le prix de l’eau devrait baisser. Nous avons le devoir de renforcer la fonction sociale du secteur. Le Sénégal a réalisé les Objectifs du Millénaire pour le Développement. Nous devons faire plus et mieux.
Des remous, allant de la marche à la grève de zèle, ont été notés chez les travailleurs de la Sde. Le dialogue a-t-il été noué ?
Le Ministère de l’Hydraulique et de l’Assainissement est toujours ouvert au dialogue, conformément à la ligne directrice du Gouvernement. Nous sommes ouverts à la négociation avec toutes les composantes du secteur sur ce qui peut faire l’objet de négociations. Je le précise bien ! Il y a des questions comme la revalorisation salariale, qui relèvent de la compétence de la future société d’exploitation, qui sera une institution privée. Le Gouvernement n’est pas l’employeur des travailleurs de la SDE ou de quelque autre société d’exploitation que ce soit. Toutefois, les pouvoirs publics veillent à la préservation des intérêts des travailleurs. Dans ce cadre, nous avons trouvé un accord sur la représentation du personnel au Conseil d’Administration de la société d’exploitation.
L’accélération du rythme d’implantation de forages en milieu rural est une option claire du Gouvernement. Comment sont-ils gérés, d’autant que dans bien des localités, les populations sont à couteaux tirés avec l’Ofor ?
Après près d’une trentaine d’années de mise en œuvre de la politique d’hydraulique rurale, les dysfonctionnements restent très importants : dégradation prématurée des ouvrages, niveaux de prix pratiqués souvent au-dessus des capacités financières des populations, qualité de l’eau et absence de transparence dans la gestion des ressources financières générées par la vente de l’eau. Ces dysfonctionnements sont essentiellement liés à la gestion communautaire, assurée par les Associations d’Usagers de Forages (Asufor). Ce mode de gestion ne garantit pas la durabilité des ouvrages.
L’Etat est fermement déterminé à assainir la gestion des ouvrages en milieu rural. C’est le passage obligé vers une meilleure qualité de service pour les populations situées dans les zones d’influence de ces infrastructures.
Quel est le niveau d’exécution de cette réforme et quel en est l’impact sur le service de l’eau potable en milieu rural ?
Afin d’assurer une bonne desserte, nous avons posé 1150 kilomètres de conduite dans les régions de Thiès, Fatick et Saint-Louis. En termes de résultats obtenus, nous pouvons noter que la qualité de l’eau s’est nettement améliorée. Les problèmes de continuité du service ont pour l’essentiel été résolus. Le Gouvernement a également décidé de favoriser une meilleure accessibilité financière de l’eau. C’est un aspect important. De ce fait, les tarifs fixés par arrêtés interministériels sont situés entre 250 et 275 FCfa le mètre cube. Ces tarifs sont pour la plupart en deçà des tarifs moyens appliqués par les Asufor, particulièrement pour les abonnés domestiques, qui représentent 80% du volume total des consommations d’eau. Mieux, la volonté des pouvoirs publics est de conforter cette tendance. Donc, les prix pourraient encore être revus à la baisse. En ce qui concerne les relations entre l’Ofor et les populations, une stratégie de communication a été déroulée dans le cadre d’un dialogue constructif. En dépit de cet esprit d’ouverture et des avancées dans la gouvernance de l’hydraulique rurale, quelques réticences sont notées de la part de quelques Asufor.
Combien de forages avez-vous construits et dans quelles zones ? Où en est le programme que vous avez initié ?
Environ 600 forages et des centaines d’ouvrages en «marteaux fond de trou» ont été réalisés depuis 2012 dans les zones rurales, notamment dans les régions du Centre et du Sud-Est. Ces ouvrages nous ont permis d’atteindre, dès 2013, les Objectifs du Millénaire pour le Développement. Aujourd’hui, grâce au Pudc 1, 2 et 3 et au Pepam-Ue, le taux global d’accès à l’eau en milieu rural a atteint 91,3% et le taux d’accès par adduction, 79,1%. La phase 3 du Pudc, financé à hauteur de 60 milliards par Exim Bank Chine, est en cours de mise en œuvre. Dans les 251 systèmes d’adduction d’eau prévus, plus d’une centaine est déjà réalisée.
Nous sommes en présence d’une perte de production consécutive à l’arrêt de l’usine de Keur Momar Sarr pour des travaux de renouvellement de son dispositif de protection. Il n’existe pas une pénurie totale d’eau potable à Dakar et dans les localités desservies par les conduites du Lac de Guiers. Il y a simplement une perte de la capacité de production de l’usine de Keur Momar Sarr.
Ce volume représente près de 40% du volume quotidien produit par l’ensemble du système d’alimentation en eau potable de Dakar. Outre les usines de Keur Momar Sarr et Ngnith, installées sur le Lac de Guiers, ce système est composé des forages du Littoral Nord, de Pout Sud, de Pout Kirène, de Kelle-Kébémer et de Dakar.
En conséquence, pour la gestion de cet arrêt, le Gouvernement a instruit les sociétés d’eau à mettre en œuvre une campagne de communication. L’opinion a ainsi pu se comprendre qu’il n’y a aucune panne. La gestion de ces travaux comporte également des mesures d’atténuation. En relation avec la Sones, qui réalise ces travaux pour l’Etat du Sénégal, la Sde a mobilisé une centaine de camions citernes pour les quartiers les plus touchés par cette perte de production. Nous sommes à l’écoute des consommateurs.
Il est difficile de parler de Keur Momar Sarr sans penser à cette conduite cassée, en 2013. Sommes-nous à l’abri d’une crise de cette ampleur ?
Le dispositif de protection de l’usine de Keur Momar Sarr était fortement exposé à des dysfonctionnements, dont le plus retentissant a été la cassure de la conduite en «Y» en 2013. Il y a aussi les fuites à circonscrire et qui peuvent dégénérer. Nous ne pouvions plus continuer à faire tourner cette usine hautement stratégique, tout en sachant que nous risquions l’irréparable. Nous avons choisi l’intervention préventive.
Cette volonté politique a-t-elle été effectivement traduite en actions et de manière efficace ?
Le Gouvernement a décidé de renouveler entièrement le système de protection. Les points sur lesquels nous devions intervenir ont été retenus à partir d’un diagnostic minutieux, notamment l’inexistence de ressources de substitution suffisantes pour alimenter les populations en cas d’arrêt des usines ; l’absence de pièces de secours pour des équipements dont l’avarie peut provoquer l’arrêt d’un ouvrage stratégique, avec comme conséquence, un manque à produire important dans le système ; l’absence d’un transformateur de secours à la station de Mékhé (16MVA) ; l’absence de débimètres (appareils de mesure du débit de secours) au niveau de la station de Mékhé; fragilité de la pièce de raccordement du dispositif anti-bélier de KMS en acier (partie «Y» et partie «W») ; l’arrêt partiel ou total de l’usine de Ngnith suite à la vétusté des groupes motopompes et électrogènes ; des arrêts brusques de l’usine de Keur Momar Sarr suite à l’instabilité de son alimentation électrique.
Ainsi est né le Programme de sécurisation des ouvrages névralgiques, sur un financement de 6,5 milliards Cfa de l’Agence Française de Développement (Afd). Nous avons procédé aux interventions suivantes : le renforcement du système de protection de Keur Momar Sarr ; la fourniture de deux groupes motopompes à l’usine de Ngnith ; la fourniture d’un groupe électrogène à l’usine de Ngnith; le renforcement de la protection cathodique de la première conduite du Lac de Guiers (ALG1); la fourniture et la pose d’un deuxième transformateur au surpresseur de Mékhé; la fourniture de 2 débitmètres de secours au surpresseur de Mékhé ; le renouvellement de la conduite de refoulement vers le réservoir des Madeleines (Dakar) sur 1 kilomètre.
A cette étape-ci, la Sones procède au raccordement d’un nouveau dispositif de protection à l’usine de Keur Momar Sarr. La capacité est doublée : six ballons (300.000 litres de capacité) contre trois ballons dans l’ancien dispositif (150.000 litres). Nous interviendrons encore sur d’autres points pour parachever cette remise à neuf des points stratégiques de nos ouvrages de production.
Ces interventions sont vitales pour le système d’alimentation en eau potable de Dakar. Le Gouvernement attache un intérêt particulier à la continuité du service public de l’eau potable. Mais il n’y a pas que Dakar ! Le Programme Eau potable et Assainissement du Millénaire (PEPAM), avec une production supplémentaire cumulée de 56,5 millions de litres par jour, a nettement amélioré l’accès à l’eau potable à Thiès, Louga, Saint-Louis, Kaolack, Tambacounda, Bakel, Ziguinchor, Fatick, Mbour, Diourbel et Kolda. Des villes comme Ndioum, Foundiougne, Linguère, Khombole, Gossas, Kaffrine et Oussouye, ont bénéficié d’un forage de secours. Depuis les indépendances, elles n’en comptaient qu’un seul. Nous sommes en train de réparer cette injustice et de parer aux risques hydriques élevés dans ces localités. Voilà notre projet d’accès équitable à l’eau potable.
Vous évoquez le cas de Foundiougne. Parlons aussi de Kédougou. Qu’en est-il de la solution au goût salé de l’eau à Foundiougne et de la faiblesse de la production pour Kédougou ?
J’ai déjà dit que nous avons réalisé un deuxième forage très productif à Foundiougne. Malheureusement, cet ouvrage produit une eau au goût salé à cause d’un phénomène naturel compréhensible. La procédure d’acquisition d’une station de désalinisation mobile est en cours. Pour Kédougou, la situation de la nappe est fortement dépendante du niveau du fleuve. Le niveau baisse de manière drastique. Nous avons fait des forages. Malheureusement, à cause du très fort rabattement de la nappe, nous n’avons pas toujours eu la production escomptée. C’est une contrainte naturelle, objective. Nous ne baissons pas les bras pour autant. Nous venons de confier l’équipement d’un forage à la SDE. Cependant, le Gouvernement milite pour une solution durable. Faute de barrage sur le fleuve Gambie, nous sommes contraints de prendre l’eau à une dizaine de kilomètres, précisément dans la localité d’Itato. Une canalisation transportera l’eau brute à Kédougou pour son traitement et son injection dans le réseau pour la consommation.
Au-delà de cette pénurie programmée, beaucoup de zones, notamment à Dakar, sont tous les jours confrontées à un problème d’approvisionnement correct en eau. Ces réparations règleront-elles ces difficultés ?
Au-delà de cette priorité, le Gouvernement a remis à neuf deux groupes motopompes de l’usine de Ngnith, réalisée en 1971. Du coup, la capacité de production de cette usine est passée de 40 millions de litres à 47 millions de litres d’eau potable par jour. Convenez avec moi que des ressources additionnelles ont pu ainsi être mobilisées, de l’ordre de 7 millions de litres par jour. Le Gouvernement s’attèle à l’augmentation de la production. Bayakh, par exemple, aura un impact positif sur Rufisque et ses environs, qui font face à une demande décuplée par la poussée immobilière de ces dernières années. Les forages produiront, dès cette année 2018, 20 millions de litres par jour. La production pourra être doublée, avec la finalisation du programme, qui comportera globalement 16 forages et une station sur l’axe Bayakh-Diender-Thieudème. Au total, depuis 2014, la Sones a réalisé 60 forages pour Dakar et en a réhabilité 7.
Des forages sont régulièrement annoncés, mais la question de la demande persiste. L’impact social de vos travaux est-il réel ?
Depuis 2014, pas moins de 100 millions de litres d’eau par jour ont été mobilisés dans les différentes phases d’urgence. Toutes ces réalisations ont permis d’améliorer la disponibilité de l’eau dans plusieurs quartiers de Dakar : Nord Foire, Ouest Foire, CPI, Cité Alternance, Scat Urbam, Grand Yoff, Liberté 6 extension, Mixta, Keur Damel, Socabeg, Cité Léopold Sédar Senghor, Hlm Grand Yoff, une partie de l’Unité 26 des Parcelles Assainies et Toubab Dialaw. Le coût global de ces investissements s’élève à près de 13 milliards FCfa sur la période 2013 à 2017. Nous faisons toujours des efforts pour que les Parcelles Assainies aient une production suffisante. L’année dernière, nous y avons réalisé deux forages, dont l’eau de l’un a une forte teneur en fer. Nous déployons les mêmes efforts pour Toubab Dialao, situé en hauteur, Yenne, Diamniadio, Sébikotane, Bargny, etc.
Quelles assurances pouvez-vous donner aux Sénégalais pour dépasser cette situation ?
Keur Momar Sarr touche particulièrement la capitale. Dakar représente plus de 70% des besoins en eau potable du périmètre de l’hydraulique urbain, soit une production située entre 350 millions de litres et 375 millions de litres par jour, selon la période. De ce fait, nous avons opté pour la planification, à l’horizon 2035, voire 2050. Un schéma directeur de mobilisation des ressources a été élaboré. Dans le cadre de cette vision, nous avons deux projets phares que la Sones est en train de réaliser : la troisième usine de traitement de Keur Momar Sarr et la première usine de dessalement d’eau de mer des Mamelles. La première a une capacité quotidienne de 100 millions de litres et la deuxième, une capacité de 50 millions de litres, extensible à 100 millions de litres. Il est intéressant de rappeler que le Sénégal a réalisé près de 300.000 branchements sociaux, soit la moitié des abonnements.
Quel est le volume des fonds que l’Etat du Sénégal a injectés dans le secteur depuis lors ?
Depuis 2012, le Sénégal a rompu avec quinze années de retards d’investissements. Cette rupture fondamentale a engendré des investissements cumulés de plus de 500 milliards FCfa. A eux seuls, les projets KMS3 et Dessalement, coûteront 411 milliards FCFA. Retenez que depuis la première réforme de l’hydraulique urbaine, de 1996 à 2013, les investissements cumulés ont été de l’ordre de 266 milliards FCfa.
Vous êtes également en charge de la distribution. Qu’en est-il de la privatisation annoncée du secteur, avec les contrats d’affermage ?
Le secteur ne fait pas l’objet d’une privatisation actuellement. L’option de privatiser la distribution est mise en œuvre depuis 1996, avec la première réforme. Le patrimoine reste dans le giron public. C’est une constante. Ce patrimoine est confié à la Sones. L’exploitation revient à la Sde. Vingt-deux ans après la première, nous assistons simplement à la mise en œuvre de la deuxième réforme, avec la fin du contrat d’affermage. La validité de ce contrat est définie dans le temps. Cette année, il a été remis en jeu dans une procédure de sélection par appel d’offres international. Cette procédure est en cours. Un comité a été mis sur pied pour piloter cette réforme. Le Gouvernement a des attentes sur l’amélioration des conditions d’accès des populations à l’eau potable et à la qualité du service. Au final, le prix de l’eau devrait baisser. Nous avons le devoir de renforcer la fonction sociale du secteur. Le Sénégal a réalisé les Objectifs du Millénaire pour le Développement. Nous devons faire plus et mieux.
Des remous, allant de la marche à la grève de zèle, ont été notés chez les travailleurs de la Sde. Le dialogue a-t-il été noué ?
Le Ministère de l’Hydraulique et de l’Assainissement est toujours ouvert au dialogue, conformément à la ligne directrice du Gouvernement. Nous sommes ouverts à la négociation avec toutes les composantes du secteur sur ce qui peut faire l’objet de négociations. Je le précise bien ! Il y a des questions comme la revalorisation salariale, qui relèvent de la compétence de la future société d’exploitation, qui sera une institution privée. Le Gouvernement n’est pas l’employeur des travailleurs de la SDE ou de quelque autre société d’exploitation que ce soit. Toutefois, les pouvoirs publics veillent à la préservation des intérêts des travailleurs. Dans ce cadre, nous avons trouvé un accord sur la représentation du personnel au Conseil d’Administration de la société d’exploitation.
L’accélération du rythme d’implantation de forages en milieu rural est une option claire du Gouvernement. Comment sont-ils gérés, d’autant que dans bien des localités, les populations sont à couteaux tirés avec l’Ofor ?
Après près d’une trentaine d’années de mise en œuvre de la politique d’hydraulique rurale, les dysfonctionnements restent très importants : dégradation prématurée des ouvrages, niveaux de prix pratiqués souvent au-dessus des capacités financières des populations, qualité de l’eau et absence de transparence dans la gestion des ressources financières générées par la vente de l’eau. Ces dysfonctionnements sont essentiellement liés à la gestion communautaire, assurée par les Associations d’Usagers de Forages (Asufor). Ce mode de gestion ne garantit pas la durabilité des ouvrages.
L’Etat est fermement déterminé à assainir la gestion des ouvrages en milieu rural. C’est le passage obligé vers une meilleure qualité de service pour les populations situées dans les zones d’influence de ces infrastructures.
Quel est le niveau d’exécution de cette réforme et quel en est l’impact sur le service de l’eau potable en milieu rural ?
Afin d’assurer une bonne desserte, nous avons posé 1150 kilomètres de conduite dans les régions de Thiès, Fatick et Saint-Louis. En termes de résultats obtenus, nous pouvons noter que la qualité de l’eau s’est nettement améliorée. Les problèmes de continuité du service ont pour l’essentiel été résolus. Le Gouvernement a également décidé de favoriser une meilleure accessibilité financière de l’eau. C’est un aspect important. De ce fait, les tarifs fixés par arrêtés interministériels sont situés entre 250 et 275 FCfa le mètre cube. Ces tarifs sont pour la plupart en deçà des tarifs moyens appliqués par les Asufor, particulièrement pour les abonnés domestiques, qui représentent 80% du volume total des consommations d’eau. Mieux, la volonté des pouvoirs publics est de conforter cette tendance. Donc, les prix pourraient encore être revus à la baisse. En ce qui concerne les relations entre l’Ofor et les populations, une stratégie de communication a été déroulée dans le cadre d’un dialogue constructif. En dépit de cet esprit d’ouverture et des avancées dans la gouvernance de l’hydraulique rurale, quelques réticences sont notées de la part de quelques Asufor.
Combien de forages avez-vous construits et dans quelles zones ? Où en est le programme que vous avez initié ?
Environ 600 forages et des centaines d’ouvrages en «marteaux fond de trou» ont été réalisés depuis 2012 dans les zones rurales, notamment dans les régions du Centre et du Sud-Est. Ces ouvrages nous ont permis d’atteindre, dès 2013, les Objectifs du Millénaire pour le Développement. Aujourd’hui, grâce au Pudc 1, 2 et 3 et au Pepam-Ue, le taux global d’accès à l’eau en milieu rural a atteint 91,3% et le taux d’accès par adduction, 79,1%. La phase 3 du Pudc, financé à hauteur de 60 milliards par Exim Bank Chine, est en cours de mise en œuvre. Dans les 251 systèmes d’adduction d’eau prévus, plus d’une centaine est déjà réalisée.