« Je voulais que cette journée soit inoubliable. Et puis mon chat de 14 ans est mort deux jours avant mon mariage. Et cela a tout gâché. Tout le monde a cru que j’étais émue aux larmes alors que je pleurais mon chat. »
Comme Lucile, combien de mariés, coincés dans le décorum de ces journées hors du commun, n’ont jamais osé avouer qu’ils avaient autre chose dans la tête que « C’est le plus beau jour de ma vie » ? Dans la cérémonie du mariage, nous sommes prisonniers d’un fantasme : celui d’une journée magique qui couronne un amour merveilleux. C’est ainsi que nous en rêvions enfant, c’est ainsi que se terminent (ou commencent ?) les belles histoires et c’est ainsi que l’imaginaire collectif nous l’a transmis depuis des générations. Pas question de ne pas être à la hauteur des futurs souvenirs que nous sommes en train de nous fabriquer.
Pourtant, il suffit d’un rien pour que notre conte de fées personnel déraille. Un parent proche absent, une fâcherie avec un ami, une simple contrariété suffisent à ternir notre fête intérieure.
Quatre personnes ont accepté de nous confier ce qu’elles avaient vraiment en tête ce jour-là. Certains gardent le souvenir amusé de leur pied de nez aux conventions, d’autres la mémoire d’un engagement angoissant. Des histoires tristes parfois, mais tendres toujours.
Mon enfant à naître
Je pense à notre enfant qui va naître, explique Pierre qui s'est marié le 23 mars 2002
« Nacera et moi, nous étions en couple depuis onze ans et nous avions déjà deux enfants et un troisième en route. Je n’ai jamais été partisan du mariage, c’est mon côté libertaire, je n’ai pas besoin d’un contrat et du regard de la société sur mes amours. Et puis l’idée de cette célébration m’est venue pour affirmer notre stabilité, notre entente, notre bonheur. J’avais envie que les gens que j’aime reconnaissent notre histoire. J’ai donc fait ma demande très solennellement et Nacera m’a répondu : “Je vais y réfléchir.” J’ai attendu quinze jours avant qu’elle me dise oui. Nous nous sommes mariés à Saint-Martin-de-Ré où nous avons une maison. Le soleil était resplendissant. Nacera était enceinte de sept mois. Ce fut une journée de célébration de l’amour. Une journée de plénitude. Moi, je pensais à notre chance, à notre bonheur, à cet enfant qui allait naître et à qui j’étais heureux d’offrir des parents mariés. J’étais tellement fier de ma femme. Quand elle est arrivée devant la mairie et que les gens ont découvert cette robe qui laissait voir son ventre, nos amis sont restés abasourdis, émerveillés, ou les deux. Ce fut une journée radieuse et inoubliable. »
Mes doutes
Je vais le quitter. Jeanne raconte ses doutes lors de son mariage, le 8 novembre 1997
« Lorsque je rencontre Jérôme, nous avons 20 ans. Neuf ans après, nous sommes devenus adultes ensemble. C’est mon meilleur ami et j’ai une infinie tendresse pour lui. Mais je ne l’aime plus. Nous avons déjà failli nous séparer, mais lorsqu’il s’est effondré en larmes en me demandant si je l’aimais encore, j’ai perdu tout courage et répondu oui. Du coup, il m’a demandée en mariage. J’ai à nouveau dit oui. Pourquoi ai-je accepté ? Par affection pour Jérôme. Pour faire plaisir à nos parents. Pour faire comme mes copines. Par manque de détermination, par besoin de sécurité et peur de me retrouver seule. Ce jour-là, j’ai le mariage de rêve : la petite église, la robe, le château, les familles, les amis. Et pourtant, j’ai le sentiment d’une imposture. Quand je dis “Oui, je le veux”, j’essaie de me convaincre que je le veux vraiment. Mais, au fond de moi, je suis déchirée en deux. Je regarde Jérôme : il est mon frère, mon ami. Ni mon amoureux, ni mon mari. Je l’ai quitté un an plus tard.
Aujourd’hui, nous avons tous les deux refait notre vie et nous sommes heureux, chacun de notre côté. Mais dans le mensonge de ce mariage, j’ai perdu une famille que j’adorais et mon meilleur ami. C’est juste un affreux gâchis. »
Comme Lucile, combien de mariés, coincés dans le décorum de ces journées hors du commun, n’ont jamais osé avouer qu’ils avaient autre chose dans la tête que « C’est le plus beau jour de ma vie » ? Dans la cérémonie du mariage, nous sommes prisonniers d’un fantasme : celui d’une journée magique qui couronne un amour merveilleux. C’est ainsi que nous en rêvions enfant, c’est ainsi que se terminent (ou commencent ?) les belles histoires et c’est ainsi que l’imaginaire collectif nous l’a transmis depuis des générations. Pas question de ne pas être à la hauteur des futurs souvenirs que nous sommes en train de nous fabriquer.
Pourtant, il suffit d’un rien pour que notre conte de fées personnel déraille. Un parent proche absent, une fâcherie avec un ami, une simple contrariété suffisent à ternir notre fête intérieure.
Quatre personnes ont accepté de nous confier ce qu’elles avaient vraiment en tête ce jour-là. Certains gardent le souvenir amusé de leur pied de nez aux conventions, d’autres la mémoire d’un engagement angoissant. Des histoires tristes parfois, mais tendres toujours.
Mon enfant à naître
Je pense à notre enfant qui va naître, explique Pierre qui s'est marié le 23 mars 2002
« Nacera et moi, nous étions en couple depuis onze ans et nous avions déjà deux enfants et un troisième en route. Je n’ai jamais été partisan du mariage, c’est mon côté libertaire, je n’ai pas besoin d’un contrat et du regard de la société sur mes amours. Et puis l’idée de cette célébration m’est venue pour affirmer notre stabilité, notre entente, notre bonheur. J’avais envie que les gens que j’aime reconnaissent notre histoire. J’ai donc fait ma demande très solennellement et Nacera m’a répondu : “Je vais y réfléchir.” J’ai attendu quinze jours avant qu’elle me dise oui. Nous nous sommes mariés à Saint-Martin-de-Ré où nous avons une maison. Le soleil était resplendissant. Nacera était enceinte de sept mois. Ce fut une journée de célébration de l’amour. Une journée de plénitude. Moi, je pensais à notre chance, à notre bonheur, à cet enfant qui allait naître et à qui j’étais heureux d’offrir des parents mariés. J’étais tellement fier de ma femme. Quand elle est arrivée devant la mairie et que les gens ont découvert cette robe qui laissait voir son ventre, nos amis sont restés abasourdis, émerveillés, ou les deux. Ce fut une journée radieuse et inoubliable. »
Mes doutes
Je vais le quitter. Jeanne raconte ses doutes lors de son mariage, le 8 novembre 1997
« Lorsque je rencontre Jérôme, nous avons 20 ans. Neuf ans après, nous sommes devenus adultes ensemble. C’est mon meilleur ami et j’ai une infinie tendresse pour lui. Mais je ne l’aime plus. Nous avons déjà failli nous séparer, mais lorsqu’il s’est effondré en larmes en me demandant si je l’aimais encore, j’ai perdu tout courage et répondu oui. Du coup, il m’a demandée en mariage. J’ai à nouveau dit oui. Pourquoi ai-je accepté ? Par affection pour Jérôme. Pour faire plaisir à nos parents. Pour faire comme mes copines. Par manque de détermination, par besoin de sécurité et peur de me retrouver seule. Ce jour-là, j’ai le mariage de rêve : la petite église, la robe, le château, les familles, les amis. Et pourtant, j’ai le sentiment d’une imposture. Quand je dis “Oui, je le veux”, j’essaie de me convaincre que je le veux vraiment. Mais, au fond de moi, je suis déchirée en deux. Je regarde Jérôme : il est mon frère, mon ami. Ni mon amoureux, ni mon mari. Je l’ai quitté un an plus tard.
Aujourd’hui, nous avons tous les deux refait notre vie et nous sommes heureux, chacun de notre côté. Mais dans le mensonge de ce mariage, j’ai perdu une famille que j’adorais et mon meilleur ami. C’est juste un affreux gâchis. »