Deux déclarations le même jour, l’une du président de la République, l’autre du ministre chargé de la Sécurité publique ouvrent de sombres perspectives sécuritaires et économiques pour le Sénégal.Quelle est la réalité de la crise économique et sécuritaire qui menace le Sénégal ? Comment, malgré le plan « Sénégal émergent » et la diplomatie qui s’est déployée autour de la paix et de la sécurité en Afrique, une attaque terroriste est dans le domaine du possible, comme l’affirme un ancien chef d’État-major général des armées, avec une série de conférences tournant toutes autour de la sécurité dans le continent ?
LE PRÉSIDENT MACKY Macky Sall et le ministre de l’Intérieur et de la Sécurité publique ont tenu le même jour (le 11 février) deux discours différents sur le contenu mais attirant l’attention des Sénégalais sur les difficultés économiques et sécuritaires qui laissent planer de gros nuages sur le pays. En conseil des ministres, d’abord, et en marge de la rencontre des chefs d’État-major général des armées de terre ensuite, ensuite, Macky Sall et Abdoulaye Daouda Diallo ont évoqué des dossiers sensibles qui méritent une réflexion plus aiguë. Les difficultés économiques pressenties avec les « variations du cours du baril de pétrole » et le « raffermissement du dollar par rapport à l’euro » et la « baisse du taux d’intérêt sur les marchés financiers » nécessitent une intelligence économique apte à favoriser une « stratégie d’ajustement budgétaire » certes pas aussi négative que certains veulent le percevoir : le Sénégal peut tirer son épingle du jeu, comme récemment avec la baisse décidée sur le carburant, lubrifiants et autres liquéfiants. Sauf que si le dollar se renforce, le gain devient moindre, sinon nul et l’ajustement envisagé pourrait aller vers la baisse réelle du pouvoir d’achat, in fine vers la récession, comme le soutenait le lendemain jeudi Adama Gaye sur les réseaux sociaux.
De son côté, le ministre de l’Intérieur et de la Sécurité publique (Mint/Sp-11 février), avant le général Mansour Seck (13 février) a fini de convaincre l’opinion que la menace terroriste est réelle au Sénégal : en assujettissant désormais toute ouverture de mosquée et de daara (école coranique) à la signature de l’autorité en charge de la sécurité publique, le tout nouveau marié Abdoulaye Daouda Diallo rappelle le dynamisme des bailleurs religieux dans leur prosélytisme extrémiste : l’intervention empressée de bailleurs barbus auprès de populations démunies, sous le couvert du religieux, se fait en effet dans le domaine de l’appui à l’alimentation en eau potable (noria, machine d’exhaure) et dans le financement de mosquées où prêchent souvent des extrémistes. La résistance au projet pourtant consensuel des daaras modernes trouve partiellement son explication dans les financements occultes qui disparaîtraient avec l’application des mesures contenues dans la volonté du pouvoir de mieux surveiller ces niches.
Et mon général de sauter à pieds joints dans le plat, sans parachute ni précaution lapidaire (Cf. « Le Populaire » du 13 février 2015, page 7). Au cours d’un colloque tournant autour de : « Gestion macroéconomique, sécurité, cohésion sociale et intégration dans le Pse», le général Mansour Seck déflore un secret connu de tous, le peu d’efficacité des services de renseignement militaire sénégalais. Militaire jusqu’au bout des ongles, mon général se veut aussi sociologue, fin connaisseur des populations sénégalaises : «La guerre au terrorisme, c’est d’abord une guerre du renseignement. Mais aussi c’est savoir ce qui se passe dans la société, quelles que soient les sources de mécontentement et légalement contrôler et sanctionner selon les règles».
Pourtant, depuis près de trois ans qu’il est arrivé au pouvoir avec la crise malienne, le président Macky Sall appuie sur la diplomatie pour viser le tout sécuritaire ; jamais, de mémoire d’observateurs, Dakar n’aura abrité autant de rencontres internationales axées autour de la sécurité et du développement. Surtout que le contexte continental s’y prête depuis le Printemps arabe de 2009-2010 et la déstabilisation du continent avec l’assassinat du colonel Mouamar Khadaffi. Ainsi, pendant quatre jours (9-13 février) s’est tenu le troisième sommet des chefs d’état-major des armées de terre de 40 pays africains, avec les inévitables États-Unis, et la réunion du Comité de pilotage du Plan d’action contre le terrorisme (Pact), avec l’appui de la France, cherchant tous deux à contribuer à la recherche de la paix et de la stabilité du continent.
La hantise sécuritaire s’est vérifiée au Sénégal avec la crise malienne qui coïncidait avec l’accession du président Macky Sall à la magistrature suprême et la diplomatie de paix et de sécurité enclenchée conséquemment. Depuis, le Sénégal est devenu terre de recherche de solutions sécuritaire pour le vieux continent : de la mi-décembre 2014 avec le forum sur la paix et le développement à la rencontre des ministres des Affaires étrangères de l’Union monétaire ouest-africaine (12-13), le Sénégal a multiplié les rencontres et offert des facilités d’intervention technique dans des zones ouest-africaines de tension.
Le forum des 15 et 16 décembre avait été co-organisé par le Sénégal (ministère des Affaires étrangères), l‘Union africaine et la France (ministère de La Défense), en association avec l’IPS du Dr Cheikh Tidiane Gadio ; il avait été proposé par le Sommet de l’Élysée de Chefs d’État et de Gouvernement Afrique/France des 6 et 7 décembre 2013 à Paris. Curieuse position d’une puissance coloniale ayant deux fers au feu, comme prouvé récemment avec des supplétifs européens arrêtés par l’armée camerounaise et dont la diplomatie française avait exigé le rapatriement sans condition.
L’intervention du général Mansour Seck devrait peut-être aider à allier cette diplomatie dynamique au renseignement militaire, ce que Dakar essaie de faire avec l’équipement de l’Armée pour mieux surveiller un espace donné, dans une zone de conflits cependant trop vaste pour ses capacités, allant de Nouakchott à Djibouti.
Pathé MBODJE, M. Sc, Journaliste, sociologue
LE PRÉSIDENT MACKY Macky Sall et le ministre de l’Intérieur et de la Sécurité publique ont tenu le même jour (le 11 février) deux discours différents sur le contenu mais attirant l’attention des Sénégalais sur les difficultés économiques et sécuritaires qui laissent planer de gros nuages sur le pays. En conseil des ministres, d’abord, et en marge de la rencontre des chefs d’État-major général des armées de terre ensuite, ensuite, Macky Sall et Abdoulaye Daouda Diallo ont évoqué des dossiers sensibles qui méritent une réflexion plus aiguë. Les difficultés économiques pressenties avec les « variations du cours du baril de pétrole » et le « raffermissement du dollar par rapport à l’euro » et la « baisse du taux d’intérêt sur les marchés financiers » nécessitent une intelligence économique apte à favoriser une « stratégie d’ajustement budgétaire » certes pas aussi négative que certains veulent le percevoir : le Sénégal peut tirer son épingle du jeu, comme récemment avec la baisse décidée sur le carburant, lubrifiants et autres liquéfiants. Sauf que si le dollar se renforce, le gain devient moindre, sinon nul et l’ajustement envisagé pourrait aller vers la baisse réelle du pouvoir d’achat, in fine vers la récession, comme le soutenait le lendemain jeudi Adama Gaye sur les réseaux sociaux.
De son côté, le ministre de l’Intérieur et de la Sécurité publique (Mint/Sp-11 février), avant le général Mansour Seck (13 février) a fini de convaincre l’opinion que la menace terroriste est réelle au Sénégal : en assujettissant désormais toute ouverture de mosquée et de daara (école coranique) à la signature de l’autorité en charge de la sécurité publique, le tout nouveau marié Abdoulaye Daouda Diallo rappelle le dynamisme des bailleurs religieux dans leur prosélytisme extrémiste : l’intervention empressée de bailleurs barbus auprès de populations démunies, sous le couvert du religieux, se fait en effet dans le domaine de l’appui à l’alimentation en eau potable (noria, machine d’exhaure) et dans le financement de mosquées où prêchent souvent des extrémistes. La résistance au projet pourtant consensuel des daaras modernes trouve partiellement son explication dans les financements occultes qui disparaîtraient avec l’application des mesures contenues dans la volonté du pouvoir de mieux surveiller ces niches.
Et mon général de sauter à pieds joints dans le plat, sans parachute ni précaution lapidaire (Cf. « Le Populaire » du 13 février 2015, page 7). Au cours d’un colloque tournant autour de : « Gestion macroéconomique, sécurité, cohésion sociale et intégration dans le Pse», le général Mansour Seck déflore un secret connu de tous, le peu d’efficacité des services de renseignement militaire sénégalais. Militaire jusqu’au bout des ongles, mon général se veut aussi sociologue, fin connaisseur des populations sénégalaises : «La guerre au terrorisme, c’est d’abord une guerre du renseignement. Mais aussi c’est savoir ce qui se passe dans la société, quelles que soient les sources de mécontentement et légalement contrôler et sanctionner selon les règles».
Pourtant, depuis près de trois ans qu’il est arrivé au pouvoir avec la crise malienne, le président Macky Sall appuie sur la diplomatie pour viser le tout sécuritaire ; jamais, de mémoire d’observateurs, Dakar n’aura abrité autant de rencontres internationales axées autour de la sécurité et du développement. Surtout que le contexte continental s’y prête depuis le Printemps arabe de 2009-2010 et la déstabilisation du continent avec l’assassinat du colonel Mouamar Khadaffi. Ainsi, pendant quatre jours (9-13 février) s’est tenu le troisième sommet des chefs d’état-major des armées de terre de 40 pays africains, avec les inévitables États-Unis, et la réunion du Comité de pilotage du Plan d’action contre le terrorisme (Pact), avec l’appui de la France, cherchant tous deux à contribuer à la recherche de la paix et de la stabilité du continent.
La hantise sécuritaire s’est vérifiée au Sénégal avec la crise malienne qui coïncidait avec l’accession du président Macky Sall à la magistrature suprême et la diplomatie de paix et de sécurité enclenchée conséquemment. Depuis, le Sénégal est devenu terre de recherche de solutions sécuritaire pour le vieux continent : de la mi-décembre 2014 avec le forum sur la paix et le développement à la rencontre des ministres des Affaires étrangères de l’Union monétaire ouest-africaine (12-13), le Sénégal a multiplié les rencontres et offert des facilités d’intervention technique dans des zones ouest-africaines de tension.
Le forum des 15 et 16 décembre avait été co-organisé par le Sénégal (ministère des Affaires étrangères), l‘Union africaine et la France (ministère de La Défense), en association avec l’IPS du Dr Cheikh Tidiane Gadio ; il avait été proposé par le Sommet de l’Élysée de Chefs d’État et de Gouvernement Afrique/France des 6 et 7 décembre 2013 à Paris. Curieuse position d’une puissance coloniale ayant deux fers au feu, comme prouvé récemment avec des supplétifs européens arrêtés par l’armée camerounaise et dont la diplomatie française avait exigé le rapatriement sans condition.
L’intervention du général Mansour Seck devrait peut-être aider à allier cette diplomatie dynamique au renseignement militaire, ce que Dakar essaie de faire avec l’équipement de l’Armée pour mieux surveiller un espace donné, dans une zone de conflits cependant trop vaste pour ses capacités, allant de Nouakchott à Djibouti.
Pathé MBODJE, M. Sc, Journaliste, sociologue