Originaire de la région du Sud précisément à Mandégane, dans la communauté rurale de Balingore, Mme Guiraud née Aïda Goudiaby, est une femme très engagée dans la gestion de sa cité. Très médiatisée, la dame Guiraud est de plus en plus sollicitée par la presse pour expliquer son secret quant à la gestion de la cité Mixta en tant que déléguée de quartier.
Née de parents originaires de la Casamance (mère de Kolda et père de Bignona), Aïda Guiraud est native de la Patte-d’oie Builders. Avec ses dreads locks, de teint clair et d’une taille élancée, elle a été rendue célèbre grâce à son engagement dans sa zone de résidence.
Durant son enfance, Aïda Guiraud a vu son père Mamina Goudiaby être affecté dans la région de Diourbel comme Commandant de compagnie avec toute sa famille. Après le départ de ses parents pour la Gambie elle est confiée à son oncle. Car son papa a été appelé en renfort pour défendre les intérêts de la Gambie lors du putsch de Kukoi Samba Sagna contre le gouvernement de Daouda Kairaba Diawara, le 24 avril 1981.
Ainsi, de famille en famille, elle apprend à se forger afin d’être une personne responsable dans le futur. En tant qu’aînée de sa famille, elle devait réussir pour soutenir ses parents. Et comme si c’était aujourd’hui, la dame se souvient de son long trajet pour aller suivre les cours.
«Je faisais des kilomètres à pied pour aller à l’école. Et dans la journée, nous mangions des arachides grillées et du pain. On apprenait nos leçons avant de rentrer chez le tuteur à cause de l’absence d’électricité chez nous », se rappelle-t-elle.
A cette époque, les élèves ne souffraient pas seulement du long trajet mais aussi des conditions de vie difficiles pour s’épanouir. Mme Guiraud a fait ses études primaires, celles du collège et du lycée jusqu’à la seconde dans la région de Diourbel. Raison pour laquelle, elle se considère comme « baol baol ». Brillante fille dans sa jeunesse, elle obtient le Bac avec mention en 1991 et fut orientée à l’UGB au l’UER d’anglais.
« Elle a eu son bac avec mention en 1991. Ils étaient au nombre de 5 personnes . Ils devaient finir leurs études au Canada avec les bourses offertes par le gouvernement», se souvient encore Néné Coulibaly, sa maman.
Aïda et ses camarades ont été contraintes de poursuivre leurs études à l’université Gaston Berger de Saint-Louis. Avec sa première bourse elle est parvenue à offrir un cadeau à sa mère. Un présent qui témoigne de ses sentiments et de son estime pour sa maman.
« Elle m’a payé un téléviseur alors qu’elle était étudiante à Saint-Louis avec son premier rappel. A cette époque on voyait rarement les écrans. Et j’ai gardé jalousement ce petit écran car c’était un grand souvenir », a expliqué sa mère.
Après l’obtention de son diplôme, elle décroche un contrat de travail dans plusieurs entreprises, dont le bureau Véritas, Air Afrique, Breda et Safec avant de partir avec son mari au moyen-Orient.
Si Aïda Goudiaby est aujourd’hui connue et aimée dans la cité Mixta et qu’elle administre en qualité de déléguée de quartier, c’est grâce à son engagement et non pour ses diplômes ou postes qu’elle a eu à occuper. Sa mission n’est rien d’autre que de faire régner la paix et la tranquillité dans son quartier.
Cependant, la Cité Mixta est devenue tristement célèbre ces derniers temps, à causes des affaires de mœurs et/ou de délinquance.
Mme Guiraud est l’une des rares femmes déléguées du pays.
Au cours de son parcours universitaire Aïda Goudiaby s’est investie dans la politique et dans les associations féminines. Convaincue du leadership féminin, elle commence par militer au Parti socialiste du Sénégal et membre de la jeunesse socialiste du temps d’Abdoulaye Wilane à l’UGB.
Elle fait partie des premiers habitants de la cité Mixta. Active durant des années pour leur bien-être, c’est avec les problèmes de la cité qu’elle va intégrer le « syndic de copropriété ». Un comité mis sur pied pour la bonne marche de la cité Mixta. Ce regroupement des habitants de la cité avait comme mission d’être une sentinelle afin de mettre fin à certaines pratiques immorales.
Même si Aida Guiraud est récompensée par son acte de bravoure, elle ne voulait toutefois pas être déléguée de quartier. Mais avec son sens de l’écoute, elle est sollicitée par les habitants afin d’intervenir et d’apaiser les tensions. Ce qui a fait qu’elle est choisie par la population et les « Syndics » de copropriétés. Et comme la majorité l’emporte toujours, elle finit par endosser la responsabilité de déléguée de quartier.
«Je n’ai plus de vie de famille. Je suis interpellée même en pleine nuit pour régler les conflits. J’ai un mari qui me comprend et me soutient. Mais il arrive des jours où la situation lui dépasse. Car je me réveille tout le temps en pleine nuit pour intervenir», confie-t-elle.
Sa fille aînée, Ramata, n’est pas d’avis sur les interventions de sa mère à des « heures de crimes ». Malgré son instinct protecteur, Ramata voit sa maman disparaître dans l’obscurité. Elle pense que celle-ci se soucie plus des problèmes des autres que de sa propre sécurité.
« Elle peut passer toute la nuit à intervenir dehors. J’ai peur souvent de la voir partir avec des inconnus en pleine nuit. La plupart du temps c’est autour de 2 heures du matin qu’elle franchit la porte. Il m’arrive de lui interdire de sortir, mais elle est engagée. Et pour lui montrer ma colère je lui lance des pics (un jour ces gens risquent de te tabasser). Et le matin certains reviennent encore pour la réveiller afin qu’elle s’occupe d’un voisin qui dérange », a raconté Ramata sa fille aînée.
Mère de famille, elle essaye d’allier le travail et l’éducation de ses enfants.
Selon sa mère Néné Coulibaly, Aïda Guiraud est une femme qui a su mélanger culture et modernisation. Car son père Mamina et elle, ont toujours veillé sur l’éducation de leurs enfants. Une éducation stricte, inculquée aux enfants et transmise de génération en génération.
Cette éducation qu’à reçu Aïda, fait la fierté de sa mère. Ainsi, elle essaye d’inculquer les mêmes valeurs à ses enfants en jouant le rôle de mère moderne et africaine à la fois. Selon la jeune fille Ramata qui vient d’obtenir elle aussi son bac avec mention, sa maman est loin d’être une femme moderne car très sévère dans son éducation.
Contrairement à sa mère, Ramata elle est restée très discrète dans la cité. Néanmoins, elle et sa mère sont très proche. Entre elles, il n’y a pas de tabou. Elles discutent de tous les sujets de conversation. Une complicité qui amène Ramata de jouer à son tour le rôle d’aînée de la famille. Et en cas d’absence de sa maman lors de ses interventions, elle s’occupe de la cuisine et des tâches ménagères. Sans oublier les sorties pour aller danser avec elle.
Pour Halimatou Diallo qui a son commerce dans la cité Mixta, madame Guiraud est comme une maman. Gérante d’une boutique de légumes depuis des années, elle a fait la connaissance de cette dame depuis la cité Keur Damel. Elle peint madame Guiraud comme une femme souriante et aimable. Cette dernière qualifie Aïda à son tour d’une battante, même avant qu’elles se retrouvent à la cité Mixta.
«Dans cette cité, tous les habitants connaissent madame Guiraud. Elle est l’une des rares femmes qui se bat pour le bien être de la communauté. Je pense qu’elle aime cette cité plus que nous les résidents. Et pourtant, il y a des hommes qui peuvent jouer ce rôle», explique Halimatou Diallo.
Même si elle loue le courage de madame Guiraud, Halimatou se soucie pour la déléguée de quartier. Car selon elle, la responsable de la cité «prend trop de risques en sortant la nuit», affirme-t-elle.
Un engagement social qui suscite l’intérêt des jeunes de la cité
Avec le conflit de génération, les jeunes n’approuvent pas trop le syndic et la responsable de quartier. Et pourtant, certains pensent que la dame Guiraud s’investit énormément dans le bien être de la cité.
Ainsi, certains reprochent à Aïda Guiraud de ne pas associer la jeunesse à la gestion de la cité. Ce qui fait que les jeunes ne ratent pas l’occasion de critiquer sa manière de gérer. Selon eux, madame Guiraud est au devant de toutes les scènes. Cependant, elle peut compter sur le soutien de certains jeunes résidents.
«C’est une femme qui se bat pour cette cité. A chaque fois, c’est elle qui est interpellée pour les conflits dans cette cité. Je sais que Mixta ne lui appartient pas, mais elle aime cette localité plus que tout le monde. Elle s’est investie plus que les autres alors qu’elle n’était pas encore déléguée de quartier», a expliqué Cissé, un jeune résident.
Le jeune Cissé pense que la dame est la première à montrer son intérêt pour les habitants. Surtout aux membres du syndic pour la bonne marche de Mixta. Même s’il reconnait son amour et son engagement pour la cause de la cité. Il invite madame la déléguée à rencontrer les jeunes pour lui faciliter son travail.
«Nous avons du respect pour cette dame qui se bat corps et âme pour la cité. Mais elle doit intégrer les jeunes dans la gestion. Mes amis et moi avons des idées pour soutenir sa cause. Mais nous avons peur de la manière dont elle nous recevra. Nous aimerions mieux connaitre cette dame. Et nous envisageons de mettre sur pied une association de jeunes. Avec cette démarche, les jeunes peuvent se connaitre afin de se joindre à son combat quotidien», ajoute ce jeune résident.
Une proposition qui semble être bien accueillie par la déléguée de quartier qui reste très ouverte. « Qu’ils viennent vers moi je leur ouvrirai les portes. Nous travaillerons pour la bonne marche de la cité et le respect des résidents qui est mon combat de tous les jours. Je suis très accessible et suis ouverte à toutes les propositions tendant à faire de la résidence la meilleure des cités », réplique Aïda Guiraud.
Même si les habitants de cette cité vivent dans des appartements fermés, le souhait de certains est de voir leur responsable nouer plus de proximité avec eux. Une démarche qui consistera à créer des relations entre la dame et les résidents.
« Je suis en phase avec tous les propriétaires résidents, les jeunes et les enfants », se défend la déléguée avant de poursuivre, « J’achète des maillots de foot, je distribue fréquemment des sachets de chocolats au jardin pour les enfants. Je les fais participer à des compétitions en payant la caution avec d’autres quartiers. Et ma générosité n’a pas de limites pour tout le monde, si les moyens sont là », a-t-elle expliqué.
Toutefois, la déléguée met en garde:« les jeunes qui viennent des autres quartiers et sèment la panique ici ne peuvent pas m’aimer et c’est le cadet de mes soucis. Ils veulent nous faire vivre l’enfer et nous résidents avons dépensé des dizaines de millions pour vivre tranquille avec nos familles. Nous nous battrons jusqu’à la dernière énergie pour faire de notre résidence un havre de paix sécurisé, propre et calme», prévient Mme Guiraud.
Malgré le fait qu’elle soit présentée comme celle qui est devant la scène à la cité, elle admet qu’elle ne parviendra pas à réussir seule sa mission, sans le soutien de ses proches et des résidents. «Je remercie mes parents, mon époux, ma grande famille, les résidents de Mixta, les agents de sécurité des ASP qui sont là pour notre sécurité et l’Amicale des femmes de Mixta AFERP», conclut Aida Guiraud.
Source Senenews