Naquit, alors, une ère d’incivisme et d’indiscipline durant laquelle tout, hélas, a été désacralisé, démythifié. Paradoxalement, même ceux qui étaient censés mettre un frein à ce laisser-aller étaient de la partie. Rien, désormais, n’était sacré. Et on laissa faire jusqu’en haut lieu. Même le Palais de la République fut banalisé au point que les tamtams et les tambours accompagnant le folklore des « militants » y firent leur entrée.
Des phénomènes aussi ubuesques les uns que les autres nous taraudent l’esprit.
Dés qu’un ministre quitte l’attelage gouvernemental sa famille, ses collaborateurs et ses « militants » sont plongés dans un deuil où la douleur est incommensurable. Certains, manifestant leur mécontentement, vont jusqu’à bruler le drapeau national !!!! Une hérésie sans commune mesure. Et cela se passe chez nous, au SENEGAL.
Un jour, un chauffeur de car ndiaga ndiaye, par un acte d’incivisme notoire, tua un gendarme d’une escorte officielle. Il avait refusé de se rabattre sur le bas côté de la route, comme indiqué par la flèche du cortège. Bien évidemment il fut jugé et une peine de cinq ans de prison fut prononcée à son encontre. Alors, tous les chauffeurs et transporteurs en commun se mirent en grève, arguant que la peine était trop sévère. Les autorités gérèrent la situation en tenant compte de la réaction des chauffeurs et transporteurs. Alors que leur camarade venait de commettre un homicide volontaire !!! Ailleurs c’eût été la peine de mort. On imagine facilement qu’après des faits similaires le ver se soit tranquillement installé dans le fruit.
L’impunité s’installait progressivement et atteignit des niveaux et des degrés indicibles.
26 septembre 2002, Le « JOOLA », qui plus est le bateau qui faisait la liaison Dakar- Ziguinchor, sombra avec 1953 passagers. Seules 64 personnes échappèrent au naufrage. Même le « Titanic » fit moins de victimes.
Comment en était-on arrivé à cette catastrophe ? Et pourquoi les gens n’ont-ils pu être secourus à temps ?
Colère, révolte, deuil………
Il fallut quand même répondre aux questions posées par le commun des mortels.
Il apparut très clairement, en résumé, pour ne pas rouvrir les plaies, que ces raisons ont conduit à cette catastrophe qui a battu tous les records Guinness : indiscipline, incivisme, non observation des normes sécuritaires………… L’équipage, après avoir atteint le nombre de passagers autorisés, recevait encore des voyageurs et des bagages. Les images avant naufrage ont montré, à l’escale de Carabane, le bateau naviguant sur le côté. Dans l’insouciance générale.
Au cours du voyage marquant la reprise de la navigation du « JOOLA », la traversée Dakar Ziguinchor se serait faite avec un moteur ; alors qu’il en fallait deux pour être dans les normes sécuritaires. Et il y avait, à bord, deux ministres de la République. Dont celui en charge des Transports !!!
Il y eut, alors, un répit à cette joyeuse pagaille. Et un concept, INTROSPECTION, fut dépoussiéré afin que nos concitoyens changent leurs manières de faire.
Mais qui dit introspection, dit voyage à l’intérieur de soi-même. Et voyager à l’intérieur de soi-même en toute objectivité requiert un courage que tout le monde n’a pas.
Il est vrai que les Sénégalais s’y essayèrent réellement, mais c’est exigeait beaucoup d’eux. Car tant qu’on indexait l’autre c’était facile. Mais si on se découvre, comme faisant partie des éléments du désordre et de l’incivisme, on a vite fait de changer de décor. Les choses en restèrent là. Et les Sénégalais retrouvèrent rapidement leur jeu favori.
Novembre 2007. Pour des raisons de sécurité, d’hygiène et de fluidité de la circulation dans notre capitale les autorités avaient pris des mesures concernant les marchands ambulants. Non seulement ces derniers refusèrent de se plier à la loi, mais ils mirent Dakar en sac, brulant tout sur leur passage.
Les autorités finirent par revenir sur leur décision. Et ceux dont on avait la preuve qu’ils ont brûlé et saccagé ne furent point inquiétés.
On n’a pas besoin de dire qu’à partir de ce jour les digues avaient sauté.
La marche de notre pays fut secouée par des évènements aussi préoccupants les uns que les autres. Mais les autorités les ont gérés en ne tenant, malheureusement, compte que de la donne politique au détriment de celle citoyenne.
D’ailleurs, en revisitant l’histoire politique du Sénégal, à partir des indépendances, nous avons trouvé les premiers indices de cet état de fait qui risque de retarder notre marche vers le développement.
Les indépendances acquises en 1960 avaient conduit, dans l’euphorie, l’élite africaine de l’époque à prendre en main les destinées de nos pays jusque là administrés par des puissances coloniales. Cette élite privilégiée était adulée par des populations dont le seul soulagement, pour le grand nombre, était d’être sorti des exactions liées à la colonisation. Au SENEGAL des chansons furent composées en l’honneur de ces « héros » d’une indépendance, comme pour la plupart des pays de l’ex A.O.F, négociée. Or l’ancienne puissance coloniale avait déjà formaté « ses cadres » pour qu’ils continuent à servir ses intérêts. C’est dans ce contexte que de nouveaux concepts virent le jour. A l’instar des slogans comme « moom sa bopp », « moom sa rééw », du reste très nobles, des concepts aussi pernicieux les uns que les autres naquirent. Dans l’insouciance la plus totale.
BOROM REEWMI
Le Président de la République, dépositaire du suffrage des sénégalais, émanation de la volonté du peuple, allait échapper totalement à celui-là. Du simple fait que le concept de borom reewmi signifie « le maître du pays » et non autre chose qui corresponde à la fonction de Chef de l’Etat. Les cadres de l’administration dans ce cas se considèrent comme des roitelets. Le Président SENGHOR avait, incidemment, un jour, demandé aux membres de son entourage de lui donner la signification exacte du mot POUVOIR en Wolof. Et tous, sans se concerter, ont trouvé la définition suivante : NGUUR (Royauté). Il prit sa tête entre les mains et dit : « Alors là, c’est le comble ». Comment pouvez-vous habituer des gens que vous avez élus à se considérer comme des rois ? Au point de les amener à y croire parfaitement ? En de telles situations vous acceptez qu’ils pillent l’économie du pays. Qu’ils hypothèquent l’avenir de vos propres enfants. Car un roi ne rend pas compte. N’est-t-il pas tout comme un maître absolu ? C’est pourquoi personne n’a crié au scandale quand, dans les années 1970, en période de sécheresse, donc de mauvaise ou pas de récolte du tout, on saupoudrait les paysans et les exposait au soleil. Parce qu’ils ne pouvaient pas rembourser leurs dettes de semences. Certains sont morts par suite de ces saupoudrages, d’autres ont traîné des maladies handicapantes. Cela n’a choqué personne. Et on ne parla même pas des gens qui sont morts de faim pendant ces mêmes années. Sans être cynique c’est, en quelque sorte, un retour de bâton ; car on ne fait pas d’un serviteur un roi. Dans la langue de Shakespeare, Fonctionnaire signifie civil servant.
MAG DU FECC YALNAA DEE
Dans notre culture les vieillards sont des sages. Et ne commettent ni bassesse, ni impair, en somme aucune turpitude. Encore moins des actes considérés comme irresponsables. Ce sont nos repères. On se tourne vers eux quand les problèmes de la vie nous amènent à nous détourner du droit chemin. Mais il est arrivé un moment où dans l’imagination populaire on pouvait penser qu’un sage puisse se permettre de danser ! Comment ? Si cela en valait vraiment la peine. Ca alors ! Et les repères disparaissent du coup. La porte ouverte à tout. Car, si ceux qui devaient mettre un frein à une inconduite sont de la partie, c’est la dérive
LEKET’U NEEN DU NAX BEY
En milieu rural quand on veut attraper une chèvre (ou un bouc) on lui montre une calebasse où il y a du mil ou un autre aliment dont elle serait friande. La chèvre s’approche avec méfiance parce qu’elle ne sait si c’est un piège ou une aubaine pour elle. Jusqu’au moment où on l’attrape. Il arrive que certaines personnes se comportent comme cette chèvre (donc comme un animal). Pour peu qu’on leur fasse miroiter une friandise ou une situation mirobolante. Parce que comme pour la chèvre, la chose reste virtuelle .Rien ne doit amener un homme à jouer à ce jeu ou à s’y faire prendre
NJERIN LOO FEKKE
Ce concept ancré, comme les précédents, dans l’inconscient des Sénégalais fait que chacun fait ce qu’il veut, où il veut comme il veut, quand il veut pourvu seulement qu’il y trouve son propre compte. Nonobstant le malaise, le danger ou toute autre nuisance qu’il fait à autrui, à son environnement, à son pays.
Parce que tout simplement il se dit peu, ou pas du tout, intéressé à une chose qui ne lui profite pas en tant qu’individu. Le poète SENGHOR disait : « Quand on se marie on se multiplie par deux. Quand on fait des enfants on ne meurt plus ».Pour rappeler à ces individus mentionnés plus haut qu’ils ne pensent même pas à leurs enfants qui continueront à porter leur nom. On doit, au contraire, faire en sorte que nos enfants ne vivent pas les situations pénibles que nous avons eu à vivre bien que nos parents aient consentis des sacrifices pour nous. On doit s’ériger en modèle pour nos enfants, tout en leur donnant une bonne éducation. Et ne pas vivre la situation que James BROWN décrit dans The Soul of a black man:
« It’s so hard when a father is trying to get respect from his own son. »
« Quel triste spectacle que de voir un père qui quémande le respect de son propre fils »
Etant entendu que la liste des concepts qui nuisent à nos valeurs n’est pas, à ce stade, exhaustive, nous avons, tout de même, une histoire où les exemples de courage, d’abnégation et d’altruisme font légion .Dans la sagesse seereer on dit : « O kiin daawre fo mbataakiin. O kiin yiif ‘o fo laaw » .Autrement dit : « Ce qui fait la force de l’homme ce n’est pas son animalité, mais son esprit et son cœur ».D’où l’homme qui transcende les attractions néfastes du moment pour se projeter dans le futur. Et dans notre culture, cela ne date pas d’aujourd’hui. Tout comme ce fait d’Histoire qu’on ne raconte pas souvent : En 1890, lors de la chute de Ségou, ALBOURY NDIAYE, subira, volontairement, une canonnade durant deux heures de temps, en tant que roi du DJOLOF en exil, en vue de protéger le repli d’AHMADOU sur le MACINA .Préservant, ainsi, l’héritage d’ELHADJ OMAR TALL.
Les SENEGALAIS se glorifient, pourtant, de ces faits, entre autres noblesse de cœur et esprit chevaleresque. Il leur resterait, tout simplement, à s’en inspirer dans tous les actes qu’ils posent et qui engagent leur pays et leurs enfants.
Aujourd’hui, malheureusement, dans l’élite politique, une nouvelle race de sans foi ni loi, cherche à se pré positionner en mettant entre parenthèses l’étique et la déontologie. La pratique de la politique au Sénégal continue d’étonner et de surprendre. Parce que le pouvoir politique, compte tenu des informations distillées par les média, ne sert que des intérêts égoïstes. Un examen de l’actualité confirme le caractère inadapté des politiques des gouvernements connus entre 1960 et 2O11. Qui n’ont pas pu évoluer en fonction des espoirs et des espérances des populations. L’enrichissement illicite et la corruption se développent en même temps que s’aggrave, sans mesure, la précarité et la peur.
Notre pratique politique est devenue, au terme de 51 années, une véritable usine à enrichissement illicite. Où une gent de sans loi et de sans foi gouverne, avec férocité et cynisme, une société fortement stabilisée par le registre religieux et traditionnel. Cependant, le recours à l’indignation et au dépit reste une alerte maximale.
Comment comprendre que l’impunité soit désormais érigée en règle ?
Il se trouve, aussi, que certains parmi ceux qui briguent, aujourd’hui, le pouvoir d’Etat, sont des générateurs avérés de la précarité et de la peur dans lesquelles plonge le plus grand nombre des populations sénégalaises. Les acteurs politiques actuels ont mis en panne, dans leur immense majorité, la Nation Sénégal. Car ils sont devenus, presque tous, du fait de l’enrichissement sans cause, des rentiers. La plus part de ceux issus des régimes de Senghor, Diouf et Wade disposent de patrimoines obtenus par le biais de la corruption, de la concussion et du détournement de deniers publics.
D’ailleurs, le ridicule, selon toute vraisemblance, ne tue plus au Sénégal mais….enrichit.
Nous notons, pour nous en désoler, que le recours aux média, sans rigueur et sans mesure, est devenu, aujourd’hui, la règle pour tous les acteurs politiques.
Elhadj Hamidou KASSE qu’on ne présente plus aux sénégalais, avait, en parlant de la presse, dans l’OFFICE n°204 du samedi 17 décembre 2005, sorti des idées qui ont, encore, aujourd’hui leur pertinence. « Les média ne sont plus simplement des relais qui collectent et diffusent l’information, ils sont devenus de puissants instruments de façonnement des consciences. »
Robert MENARD de RSF déclare dans le Walf Grand’Place du jeudi 15 décembre 2005 : « Le pluralisme de l’information renforce la démocratie quand la presse est responsable. Quand la presse jette de l’huile sur le feu, le pluralisme de l’information est la pire des choses pour un pays ». Parce que « La presse a un devoir d’exactitude, un devoir d’impartialité, un devoir d’objectivité, d’honnêteté, au moins » poursuit-il.
Mais notre nation, le SENEGAL, rejette tout système de pertinence politique qui l’oblige à plonger dans une piscine sans eau. Parce que notre pays entend rester une terre de croyance, de traditions et de civilisations. Bien que les agressions se multiplient !
Le Sénégal ne se limite, guère, au pré positionnement électoraliste. Mais se préoccupe, particulièrement, de son futur, de celui de sa jeunesse, de ses femmes. Pensons à créer des conditions d’une existence décente. Car les forces de destruction déciment, sans mesure, les peuples dépourvus de paratonnerre citoyen.
Abdou Aziz Gaye
Des phénomènes aussi ubuesques les uns que les autres nous taraudent l’esprit.
Dés qu’un ministre quitte l’attelage gouvernemental sa famille, ses collaborateurs et ses « militants » sont plongés dans un deuil où la douleur est incommensurable. Certains, manifestant leur mécontentement, vont jusqu’à bruler le drapeau national !!!! Une hérésie sans commune mesure. Et cela se passe chez nous, au SENEGAL.
Un jour, un chauffeur de car ndiaga ndiaye, par un acte d’incivisme notoire, tua un gendarme d’une escorte officielle. Il avait refusé de se rabattre sur le bas côté de la route, comme indiqué par la flèche du cortège. Bien évidemment il fut jugé et une peine de cinq ans de prison fut prononcée à son encontre. Alors, tous les chauffeurs et transporteurs en commun se mirent en grève, arguant que la peine était trop sévère. Les autorités gérèrent la situation en tenant compte de la réaction des chauffeurs et transporteurs. Alors que leur camarade venait de commettre un homicide volontaire !!! Ailleurs c’eût été la peine de mort. On imagine facilement qu’après des faits similaires le ver se soit tranquillement installé dans le fruit.
L’impunité s’installait progressivement et atteignit des niveaux et des degrés indicibles.
26 septembre 2002, Le « JOOLA », qui plus est le bateau qui faisait la liaison Dakar- Ziguinchor, sombra avec 1953 passagers. Seules 64 personnes échappèrent au naufrage. Même le « Titanic » fit moins de victimes.
Comment en était-on arrivé à cette catastrophe ? Et pourquoi les gens n’ont-ils pu être secourus à temps ?
Colère, révolte, deuil………
Il fallut quand même répondre aux questions posées par le commun des mortels.
Il apparut très clairement, en résumé, pour ne pas rouvrir les plaies, que ces raisons ont conduit à cette catastrophe qui a battu tous les records Guinness : indiscipline, incivisme, non observation des normes sécuritaires………… L’équipage, après avoir atteint le nombre de passagers autorisés, recevait encore des voyageurs et des bagages. Les images avant naufrage ont montré, à l’escale de Carabane, le bateau naviguant sur le côté. Dans l’insouciance générale.
Au cours du voyage marquant la reprise de la navigation du « JOOLA », la traversée Dakar Ziguinchor se serait faite avec un moteur ; alors qu’il en fallait deux pour être dans les normes sécuritaires. Et il y avait, à bord, deux ministres de la République. Dont celui en charge des Transports !!!
Il y eut, alors, un répit à cette joyeuse pagaille. Et un concept, INTROSPECTION, fut dépoussiéré afin que nos concitoyens changent leurs manières de faire.
Mais qui dit introspection, dit voyage à l’intérieur de soi-même. Et voyager à l’intérieur de soi-même en toute objectivité requiert un courage que tout le monde n’a pas.
Il est vrai que les Sénégalais s’y essayèrent réellement, mais c’est exigeait beaucoup d’eux. Car tant qu’on indexait l’autre c’était facile. Mais si on se découvre, comme faisant partie des éléments du désordre et de l’incivisme, on a vite fait de changer de décor. Les choses en restèrent là. Et les Sénégalais retrouvèrent rapidement leur jeu favori.
Novembre 2007. Pour des raisons de sécurité, d’hygiène et de fluidité de la circulation dans notre capitale les autorités avaient pris des mesures concernant les marchands ambulants. Non seulement ces derniers refusèrent de se plier à la loi, mais ils mirent Dakar en sac, brulant tout sur leur passage.
Les autorités finirent par revenir sur leur décision. Et ceux dont on avait la preuve qu’ils ont brûlé et saccagé ne furent point inquiétés.
On n’a pas besoin de dire qu’à partir de ce jour les digues avaient sauté.
La marche de notre pays fut secouée par des évènements aussi préoccupants les uns que les autres. Mais les autorités les ont gérés en ne tenant, malheureusement, compte que de la donne politique au détriment de celle citoyenne.
D’ailleurs, en revisitant l’histoire politique du Sénégal, à partir des indépendances, nous avons trouvé les premiers indices de cet état de fait qui risque de retarder notre marche vers le développement.
Les indépendances acquises en 1960 avaient conduit, dans l’euphorie, l’élite africaine de l’époque à prendre en main les destinées de nos pays jusque là administrés par des puissances coloniales. Cette élite privilégiée était adulée par des populations dont le seul soulagement, pour le grand nombre, était d’être sorti des exactions liées à la colonisation. Au SENEGAL des chansons furent composées en l’honneur de ces « héros » d’une indépendance, comme pour la plupart des pays de l’ex A.O.F, négociée. Or l’ancienne puissance coloniale avait déjà formaté « ses cadres » pour qu’ils continuent à servir ses intérêts. C’est dans ce contexte que de nouveaux concepts virent le jour. A l’instar des slogans comme « moom sa bopp », « moom sa rééw », du reste très nobles, des concepts aussi pernicieux les uns que les autres naquirent. Dans l’insouciance la plus totale.
BOROM REEWMI
Le Président de la République, dépositaire du suffrage des sénégalais, émanation de la volonté du peuple, allait échapper totalement à celui-là. Du simple fait que le concept de borom reewmi signifie « le maître du pays » et non autre chose qui corresponde à la fonction de Chef de l’Etat. Les cadres de l’administration dans ce cas se considèrent comme des roitelets. Le Président SENGHOR avait, incidemment, un jour, demandé aux membres de son entourage de lui donner la signification exacte du mot POUVOIR en Wolof. Et tous, sans se concerter, ont trouvé la définition suivante : NGUUR (Royauté). Il prit sa tête entre les mains et dit : « Alors là, c’est le comble ». Comment pouvez-vous habituer des gens que vous avez élus à se considérer comme des rois ? Au point de les amener à y croire parfaitement ? En de telles situations vous acceptez qu’ils pillent l’économie du pays. Qu’ils hypothèquent l’avenir de vos propres enfants. Car un roi ne rend pas compte. N’est-t-il pas tout comme un maître absolu ? C’est pourquoi personne n’a crié au scandale quand, dans les années 1970, en période de sécheresse, donc de mauvaise ou pas de récolte du tout, on saupoudrait les paysans et les exposait au soleil. Parce qu’ils ne pouvaient pas rembourser leurs dettes de semences. Certains sont morts par suite de ces saupoudrages, d’autres ont traîné des maladies handicapantes. Cela n’a choqué personne. Et on ne parla même pas des gens qui sont morts de faim pendant ces mêmes années. Sans être cynique c’est, en quelque sorte, un retour de bâton ; car on ne fait pas d’un serviteur un roi. Dans la langue de Shakespeare, Fonctionnaire signifie civil servant.
MAG DU FECC YALNAA DEE
Dans notre culture les vieillards sont des sages. Et ne commettent ni bassesse, ni impair, en somme aucune turpitude. Encore moins des actes considérés comme irresponsables. Ce sont nos repères. On se tourne vers eux quand les problèmes de la vie nous amènent à nous détourner du droit chemin. Mais il est arrivé un moment où dans l’imagination populaire on pouvait penser qu’un sage puisse se permettre de danser ! Comment ? Si cela en valait vraiment la peine. Ca alors ! Et les repères disparaissent du coup. La porte ouverte à tout. Car, si ceux qui devaient mettre un frein à une inconduite sont de la partie, c’est la dérive
LEKET’U NEEN DU NAX BEY
En milieu rural quand on veut attraper une chèvre (ou un bouc) on lui montre une calebasse où il y a du mil ou un autre aliment dont elle serait friande. La chèvre s’approche avec méfiance parce qu’elle ne sait si c’est un piège ou une aubaine pour elle. Jusqu’au moment où on l’attrape. Il arrive que certaines personnes se comportent comme cette chèvre (donc comme un animal). Pour peu qu’on leur fasse miroiter une friandise ou une situation mirobolante. Parce que comme pour la chèvre, la chose reste virtuelle .Rien ne doit amener un homme à jouer à ce jeu ou à s’y faire prendre
NJERIN LOO FEKKE
Ce concept ancré, comme les précédents, dans l’inconscient des Sénégalais fait que chacun fait ce qu’il veut, où il veut comme il veut, quand il veut pourvu seulement qu’il y trouve son propre compte. Nonobstant le malaise, le danger ou toute autre nuisance qu’il fait à autrui, à son environnement, à son pays.
Parce que tout simplement il se dit peu, ou pas du tout, intéressé à une chose qui ne lui profite pas en tant qu’individu. Le poète SENGHOR disait : « Quand on se marie on se multiplie par deux. Quand on fait des enfants on ne meurt plus ».Pour rappeler à ces individus mentionnés plus haut qu’ils ne pensent même pas à leurs enfants qui continueront à porter leur nom. On doit, au contraire, faire en sorte que nos enfants ne vivent pas les situations pénibles que nous avons eu à vivre bien que nos parents aient consentis des sacrifices pour nous. On doit s’ériger en modèle pour nos enfants, tout en leur donnant une bonne éducation. Et ne pas vivre la situation que James BROWN décrit dans The Soul of a black man:
« It’s so hard when a father is trying to get respect from his own son. »
« Quel triste spectacle que de voir un père qui quémande le respect de son propre fils »
Etant entendu que la liste des concepts qui nuisent à nos valeurs n’est pas, à ce stade, exhaustive, nous avons, tout de même, une histoire où les exemples de courage, d’abnégation et d’altruisme font légion .Dans la sagesse seereer on dit : « O kiin daawre fo mbataakiin. O kiin yiif ‘o fo laaw » .Autrement dit : « Ce qui fait la force de l’homme ce n’est pas son animalité, mais son esprit et son cœur ».D’où l’homme qui transcende les attractions néfastes du moment pour se projeter dans le futur. Et dans notre culture, cela ne date pas d’aujourd’hui. Tout comme ce fait d’Histoire qu’on ne raconte pas souvent : En 1890, lors de la chute de Ségou, ALBOURY NDIAYE, subira, volontairement, une canonnade durant deux heures de temps, en tant que roi du DJOLOF en exil, en vue de protéger le repli d’AHMADOU sur le MACINA .Préservant, ainsi, l’héritage d’ELHADJ OMAR TALL.
Les SENEGALAIS se glorifient, pourtant, de ces faits, entre autres noblesse de cœur et esprit chevaleresque. Il leur resterait, tout simplement, à s’en inspirer dans tous les actes qu’ils posent et qui engagent leur pays et leurs enfants.
Aujourd’hui, malheureusement, dans l’élite politique, une nouvelle race de sans foi ni loi, cherche à se pré positionner en mettant entre parenthèses l’étique et la déontologie. La pratique de la politique au Sénégal continue d’étonner et de surprendre. Parce que le pouvoir politique, compte tenu des informations distillées par les média, ne sert que des intérêts égoïstes. Un examen de l’actualité confirme le caractère inadapté des politiques des gouvernements connus entre 1960 et 2O11. Qui n’ont pas pu évoluer en fonction des espoirs et des espérances des populations. L’enrichissement illicite et la corruption se développent en même temps que s’aggrave, sans mesure, la précarité et la peur.
Notre pratique politique est devenue, au terme de 51 années, une véritable usine à enrichissement illicite. Où une gent de sans loi et de sans foi gouverne, avec férocité et cynisme, une société fortement stabilisée par le registre religieux et traditionnel. Cependant, le recours à l’indignation et au dépit reste une alerte maximale.
Comment comprendre que l’impunité soit désormais érigée en règle ?
Il se trouve, aussi, que certains parmi ceux qui briguent, aujourd’hui, le pouvoir d’Etat, sont des générateurs avérés de la précarité et de la peur dans lesquelles plonge le plus grand nombre des populations sénégalaises. Les acteurs politiques actuels ont mis en panne, dans leur immense majorité, la Nation Sénégal. Car ils sont devenus, presque tous, du fait de l’enrichissement sans cause, des rentiers. La plus part de ceux issus des régimes de Senghor, Diouf et Wade disposent de patrimoines obtenus par le biais de la corruption, de la concussion et du détournement de deniers publics.
D’ailleurs, le ridicule, selon toute vraisemblance, ne tue plus au Sénégal mais….enrichit.
Nous notons, pour nous en désoler, que le recours aux média, sans rigueur et sans mesure, est devenu, aujourd’hui, la règle pour tous les acteurs politiques.
Elhadj Hamidou KASSE qu’on ne présente plus aux sénégalais, avait, en parlant de la presse, dans l’OFFICE n°204 du samedi 17 décembre 2005, sorti des idées qui ont, encore, aujourd’hui leur pertinence. « Les média ne sont plus simplement des relais qui collectent et diffusent l’information, ils sont devenus de puissants instruments de façonnement des consciences. »
Robert MENARD de RSF déclare dans le Walf Grand’Place du jeudi 15 décembre 2005 : « Le pluralisme de l’information renforce la démocratie quand la presse est responsable. Quand la presse jette de l’huile sur le feu, le pluralisme de l’information est la pire des choses pour un pays ». Parce que « La presse a un devoir d’exactitude, un devoir d’impartialité, un devoir d’objectivité, d’honnêteté, au moins » poursuit-il.
Mais notre nation, le SENEGAL, rejette tout système de pertinence politique qui l’oblige à plonger dans une piscine sans eau. Parce que notre pays entend rester une terre de croyance, de traditions et de civilisations. Bien que les agressions se multiplient !
Le Sénégal ne se limite, guère, au pré positionnement électoraliste. Mais se préoccupe, particulièrement, de son futur, de celui de sa jeunesse, de ses femmes. Pensons à créer des conditions d’une existence décente. Car les forces de destruction déciment, sans mesure, les peuples dépourvus de paratonnerre citoyen.
Abdou Aziz Gaye