L’importance de l’âge... Certes, en ce qui concerne le monde du travail et l’environnement professionnel en général, l’exigence de « modernisme » et le besoin du « neuf » poussent les chefs d’entreprise et les cabinets de chasseurs de têtes à privilégier les moins de quarante ans, malgré l’atout maître que constituent « l’expérience et le vécu » pour les seniors.
Mais, c’est sur la scène politique qu’un phénomène inédit se déroule sous nos yeux : l’irruption de trentenaires et de quadras dans le cercle restreint des figures politiques qui comptent. Cela a été entièrement démontré lors des dernières élections locales qui ont vu l’émergence de jeunes leaders, certains charismatiques, beaucoup inconnus au bataillon, d’autres engagés à l’extrême jusqu’à la virulence, mais tous ambitieux. Même s’il est latent, le conflit de générations freine les perspectives de beaucoup de partis politiques, notamment en ce qui concerne l’originalité dans le discours. « Y en a marre de tous ces vieux ! », marmonne un jeune fraîchement élu conseiller municipal dans une commune d’arrondissement de Dakar. Les jeunes qui avaient, pour la première fois, le droit de vote lors du dernier scrutin sont nés en...1990, deux ans après les fameuses élections de 1988 et leur lot de violences et d’affaires politico-judiciaires. Si près, si loin...
Le rythme du renouvellement des élites au sein des appareils freine, à n’en pas douter, l’adaptation du discours de la classe politique au vécu des jeunes, largement majoritaires au sein de la population. Or, ces jeunes ont de nouveaux modèles qui ne cadrent pas avec les discours post-indépendances pas plus qu’ils ne comprennent pas souvent le langage des collecteurs de suffrages habituels. Ou du moins, ils ne s’y identifient pas. Tous les grands acteurs de la scène politique locale sont nés avant les indépendances, à la notable exception de l’ancien Premier ministre et patron de « Yakaar » et Talla Sylla, secrétaire général de l’Alliance Jëf-Jël. Ce qu’ils veulent, c’est du « neuf », du clinquant, des choses qui incarnent l’avenir. Il n’y a qu’à voir la composition du bureau des « Assises nationales » pour se rendre compte d’une situation qui a maintenant presque force de loi : on met les plus anciens devant, c’est cela la règle !
Au milieu des années 2000, les moins de 25 ans représentaient plus de 60% de la population, selon les statistiques officielles. Beaucoup de nos institutions ne sont pas encore sorties de cette sorte de « paternalisme », alors que les individus deviennent de plus en plus autonomes.
CARRIÉRISME POLITIQUE
Paradoxalement, dans les pays au niveau de vie élevé, ce sont les anciens qui crient à la discrimination anti-vieux. Certes, les organisations de jeunesse restent des éléments déterminants dans les partis politiques, surtout en matière d’organisation et de mobilisation, mais c’est la portion congrue qui leur est souvent réservée. D’où cet incompressible besoin de changement qui traverse toutes les familles politiques. Voir autre chose. Le changement. Le président Wade n’est-il pas arrivé au pouvoir avec la jeunesse comme fer de lance. Cependant, depuis 2000, une confiance accrue est accordée aux jeunes cadres pour manager d’importantes structures étatiques ou privées. Mais, dans le champ politique, la nouvelle génération peine à convaincre beaucoup de figures historiques à se mettre à la rédaction de leurs mémoires. Résultat : là où les jeunes ne trouvent pas un cadre d’expression à leurs aspirations, ils vont le chercher dans la société civile qui devient, par ailleurs, de plus en plus un moyen pour intégrer le corpus politique et briguer les suffrages de leurs concitoyens. Naturellement, les « jeunesses politiques » n’ont pas toujours servi que de « chair à canon », si l’on ose dire, ou de « colleurs d’affiches ». Chaque année, les fameux « porteurs de pancartes », ceux qui réclamaient « l’indépendance tout de suite » au général De Gaulle lors de son mémorable discours de Dakar, en 1958, aiment célébrer l’anniversaire de leur bravade à « l’homme du 18 juin ». Ils étaient tout jeunes à l’époque. En mai 1968, avec l’appui des syndicats, ce sont essentiellement de jeunes lycéens et étudiants qui ont ébranlé le régime du président Senghor. Bis repetita en 1988, avec les événements post-électoraux qui ont vu des milliers de jeunes sénégalais secouer le vieux cocotier socialiste, alors au pouvoir depuis 1960. C’est dire leur place dans l’évolution politique du Sénégal.
Mamadou Ablaye Ndiaye et Alpha Amadou Sy, écrivains, philosophes, coauteurs de « Africanisme et théorie du projet social » et de « Conquêtes de la citoyenneté », Essais politiques sur l’alternance, soulignent « un fait majeur qui prend corps dans notre société. Une initiative citoyenne s’arrache de plus en plus à l’autorité politique et qui dispose d’une logique parallèle à celle politique. De plus en plus, on discerne et on essaie de développer des initiatives non pas à partir du centre, mais à partir de noyaux autres que le centre politique. Cette dynamique présage de moments heureux pour cette citoyenneté émergente. » Emergence des jeunes. Interrogé par le journaliste-écrivain Malick Diagne, les deux auteurs relèvent néanmoins « le progrès des hommes politiques du point de vue de leurs discours, en voulant être en phase avec cette citoyenneté. On les voit dans les champs avec des chapeaux, des grands boubous. Dans des concerts de rap. Renouvellement de l’image, mais aussi renouvellement de la personnalité politique sous l’onde de choc d’une citoyenneté avisée qui jette un regard critique sur ses actes et qui l’interpelle. Il est indéniable que la presse a joué un rôle d’avant- garde dans cette mutation. L’espace politique cède de la place à l’espace citoyen. Et c’est un événement heureux. » Place donc aux jeunes ?
Le carriérisme en cours dans les partis politiques sénégalais n’est pas pour faciliter l’émergence de nouvelles têtes. Le renouvellement de l’élite dirigeante se fait souvent au forceps avec, très souvent, des déchirures au bout. Rares sont les formations politiques qui voient leur secrétaire général se faire battre à des élections ou lors d’un congrès et (se) remettre dans les rangs en tant que « simple » militant. Après la victoire de la coalition « Bennoo Siggil Senegaal » dans d’importantes collectivités locales, en mars 2009, au moment de la désignation des maires et autres présidents de Conseil régional ou de communauté rurale, le conflit de génération était patent. Ainsi, du jeune Abdoulaye Wilane, nouveau maire socialiste de Kaffrine, qui a du ferrailler avec l’une des plus anciennes figures politiques féminines, Mme Mata Sy Diallo. Jusqu’au bout, l’octogénaire Pds Aly Kébé a disputé l’hôtel de ville de Kébémer à son « frère » de parti, le questeur de l’Assemblée nationale, Lamine Thiam. Le secrétaire général de la Présidence de la République, Abdoulaye Baldé, aime rappeler que, lycéen, l’ancien ministre Robert Sagna qu’il vient de déboulonner était déjà l’édile de la capitale du Sud. Dans la commune dakaroise de Fann Point E-Amitié, c’est un jeune pharmacien, le Dr Malick Diop, qui a obtenu gain de cause sur des cadors de la vie politique nationale. Mais, c’est surtout à Saint-Louis que « la nouvelle vague » a déferlé. Face à pas moins de cinq ministres, le patron du Fsd/Bj, Cheikh Bamba Dièye, est parvenu à devenir le maire de la vieille ville.
C’est que la classe politique sénégalaise accouche toujours dans la douleur dans ses recompositions, d’autant que beaucoup de partis sont avant tout le moteur d’un projet personnel. C’est l’éternelle équation de la démocratie interne. Le Pds, aujourd’hui au pouvoir, a vécu, en 1978, la douleur de voir un groupe de jeunes conduits par l’actuel ministre d’Etat, Serigne Diop, faire une fronde pour dénoncer une gestion patrimoniale » du parti créé en 1974 par le président Wade. Les exemples foisonnent. Les divergences doctrinales ou tout simplement des conflits de personnalité conduisent inlassablement à l’éclatement des partis. En ce mois de mai 2009, une formation comme Aj/Pads doit vider devant les tribunaux le contentieux qui oppose Landing Savané à celui qui était carrément son doublon, à savoir Mamadou Diop Decroix, numéro deux incontesté depuis des décennies, aujourd’hui « exclu » des rangs du parti pour activités fractionnistes alors que ses partisans disent détenir la majorité des fédérations régionales. Le décès, en 1986, du Pr. Cheikh Anta Diop n’a pas soudé les rangs de son parti, le Rnd. Bien au contraire. Ainsi, feu Me Babacar Niang, Abdou Fall, le Pr. Madior Diouf, le Pr. Ely Madiodio Fall, tous développeront, avec des fortunes diverses, des aventures personnelles. Dans tous ces cas, sans être déterminant, « le facteur jeune » a été décisif.
CHASSE AUX VOIX
Quand, à la fin de la dernière guerre mondiale, Me Lamine Guèye, alors tout puissant leader politique de l’Aof, présentait aux Sénégalais un jeune grammairien frais émoulu de Normale Sup, il ne se doutait point que ce « nouveau venu » allait être un futur farouche adversaire. Le « jeune » Senghor allait sillonner le Sénégal des profondeurs, prêchant la bonne parole d’un « nouveau » qui « apprend même le français aux Français », jusqu’à le battre à différents scrutins législatifs, et obtenir l’Exécutif territorial en duo avec feu le président Mamadou Dia. Les jeunes, une menace
Dans tous les cas, une nouvelle vague arrive, dans la majorité présidentielle comme dans le camp d’en face. « Au Sénégal, il y a des personnes qui sont dans la politique depuis des décennies et ne veulent toujours pas en sortir », proteste Cheikh Bamba Dièye. « Nous sommes nés, avons grandi, sommes allés à l’école, avons eu du travail, sommes mariés, avec des enfants et ces mêmes personnes sont toujours là », se désolait récemment le jeune ingénieur, nouveau maire de Saint-Louis. Paradoxalement, c’est dans l’opposition que l’on retrouve les cas les plus flagrants de refus de céder la place aux jeunes. Pourquoi, après sa victoire dans des villes symboles, « Bennoo Siggil Senegaal » n’a-t-elle pas mis en selle des « nouvelles têtes » pour diriger les collectivités locales remportées. Des exemples ? Mme Aminata Mbengue Ndiaye, plusieurs fois ministre sous le régime socialiste, retrouve « sa » mairie de Louga. A Diourbel, le dernier ministre des Affaires étrangères sous le président Diouf, Me Jacques Baudin, lui aussi ancien premier magistrat de la capitale du Baol, a rempilé malgré les grognements dans les rangs de la coalition victorieuse. Dans la banlieue dakaroise, Chérif Macky Sall, lui aussi ancien ministre socialiste, noue à nouveau son écharpe de maire. Le ministre des Forces armées, Bécaye Diop, patron des libéraux du Fouladou, n’a pas laissé la place de maire à un jeune de son parti. Cet « accaparement » est cependant atténué par les changements opérés à la tête de la mairie de la ville de Dakar où plusieurs communes d’arrondissements sont dirigées par des quadras et des trentenaires. On ne change pas des habitudes ancrées dans le tréfonds des inconscients collectifs par des textes législatifs. Le renouvellement des générations se fera indubitablement par l’implacable loi de la nature. En attendant, « les jeunes loups » trépignent et attendent avec impatience la prochaine chasse aux... voix.
Mais, c’est sur la scène politique qu’un phénomène inédit se déroule sous nos yeux : l’irruption de trentenaires et de quadras dans le cercle restreint des figures politiques qui comptent. Cela a été entièrement démontré lors des dernières élections locales qui ont vu l’émergence de jeunes leaders, certains charismatiques, beaucoup inconnus au bataillon, d’autres engagés à l’extrême jusqu’à la virulence, mais tous ambitieux. Même s’il est latent, le conflit de générations freine les perspectives de beaucoup de partis politiques, notamment en ce qui concerne l’originalité dans le discours. « Y en a marre de tous ces vieux ! », marmonne un jeune fraîchement élu conseiller municipal dans une commune d’arrondissement de Dakar. Les jeunes qui avaient, pour la première fois, le droit de vote lors du dernier scrutin sont nés en...1990, deux ans après les fameuses élections de 1988 et leur lot de violences et d’affaires politico-judiciaires. Si près, si loin...
Le rythme du renouvellement des élites au sein des appareils freine, à n’en pas douter, l’adaptation du discours de la classe politique au vécu des jeunes, largement majoritaires au sein de la population. Or, ces jeunes ont de nouveaux modèles qui ne cadrent pas avec les discours post-indépendances pas plus qu’ils ne comprennent pas souvent le langage des collecteurs de suffrages habituels. Ou du moins, ils ne s’y identifient pas. Tous les grands acteurs de la scène politique locale sont nés avant les indépendances, à la notable exception de l’ancien Premier ministre et patron de « Yakaar » et Talla Sylla, secrétaire général de l’Alliance Jëf-Jël. Ce qu’ils veulent, c’est du « neuf », du clinquant, des choses qui incarnent l’avenir. Il n’y a qu’à voir la composition du bureau des « Assises nationales » pour se rendre compte d’une situation qui a maintenant presque force de loi : on met les plus anciens devant, c’est cela la règle !
Au milieu des années 2000, les moins de 25 ans représentaient plus de 60% de la population, selon les statistiques officielles. Beaucoup de nos institutions ne sont pas encore sorties de cette sorte de « paternalisme », alors que les individus deviennent de plus en plus autonomes.
CARRIÉRISME POLITIQUE
Paradoxalement, dans les pays au niveau de vie élevé, ce sont les anciens qui crient à la discrimination anti-vieux. Certes, les organisations de jeunesse restent des éléments déterminants dans les partis politiques, surtout en matière d’organisation et de mobilisation, mais c’est la portion congrue qui leur est souvent réservée. D’où cet incompressible besoin de changement qui traverse toutes les familles politiques. Voir autre chose. Le changement. Le président Wade n’est-il pas arrivé au pouvoir avec la jeunesse comme fer de lance. Cependant, depuis 2000, une confiance accrue est accordée aux jeunes cadres pour manager d’importantes structures étatiques ou privées. Mais, dans le champ politique, la nouvelle génération peine à convaincre beaucoup de figures historiques à se mettre à la rédaction de leurs mémoires. Résultat : là où les jeunes ne trouvent pas un cadre d’expression à leurs aspirations, ils vont le chercher dans la société civile qui devient, par ailleurs, de plus en plus un moyen pour intégrer le corpus politique et briguer les suffrages de leurs concitoyens. Naturellement, les « jeunesses politiques » n’ont pas toujours servi que de « chair à canon », si l’on ose dire, ou de « colleurs d’affiches ». Chaque année, les fameux « porteurs de pancartes », ceux qui réclamaient « l’indépendance tout de suite » au général De Gaulle lors de son mémorable discours de Dakar, en 1958, aiment célébrer l’anniversaire de leur bravade à « l’homme du 18 juin ». Ils étaient tout jeunes à l’époque. En mai 1968, avec l’appui des syndicats, ce sont essentiellement de jeunes lycéens et étudiants qui ont ébranlé le régime du président Senghor. Bis repetita en 1988, avec les événements post-électoraux qui ont vu des milliers de jeunes sénégalais secouer le vieux cocotier socialiste, alors au pouvoir depuis 1960. C’est dire leur place dans l’évolution politique du Sénégal.
Mamadou Ablaye Ndiaye et Alpha Amadou Sy, écrivains, philosophes, coauteurs de « Africanisme et théorie du projet social » et de « Conquêtes de la citoyenneté », Essais politiques sur l’alternance, soulignent « un fait majeur qui prend corps dans notre société. Une initiative citoyenne s’arrache de plus en plus à l’autorité politique et qui dispose d’une logique parallèle à celle politique. De plus en plus, on discerne et on essaie de développer des initiatives non pas à partir du centre, mais à partir de noyaux autres que le centre politique. Cette dynamique présage de moments heureux pour cette citoyenneté émergente. » Emergence des jeunes. Interrogé par le journaliste-écrivain Malick Diagne, les deux auteurs relèvent néanmoins « le progrès des hommes politiques du point de vue de leurs discours, en voulant être en phase avec cette citoyenneté. On les voit dans les champs avec des chapeaux, des grands boubous. Dans des concerts de rap. Renouvellement de l’image, mais aussi renouvellement de la personnalité politique sous l’onde de choc d’une citoyenneté avisée qui jette un regard critique sur ses actes et qui l’interpelle. Il est indéniable que la presse a joué un rôle d’avant- garde dans cette mutation. L’espace politique cède de la place à l’espace citoyen. Et c’est un événement heureux. » Place donc aux jeunes ?
Le carriérisme en cours dans les partis politiques sénégalais n’est pas pour faciliter l’émergence de nouvelles têtes. Le renouvellement de l’élite dirigeante se fait souvent au forceps avec, très souvent, des déchirures au bout. Rares sont les formations politiques qui voient leur secrétaire général se faire battre à des élections ou lors d’un congrès et (se) remettre dans les rangs en tant que « simple » militant. Après la victoire de la coalition « Bennoo Siggil Senegaal » dans d’importantes collectivités locales, en mars 2009, au moment de la désignation des maires et autres présidents de Conseil régional ou de communauté rurale, le conflit de génération était patent. Ainsi, du jeune Abdoulaye Wilane, nouveau maire socialiste de Kaffrine, qui a du ferrailler avec l’une des plus anciennes figures politiques féminines, Mme Mata Sy Diallo. Jusqu’au bout, l’octogénaire Pds Aly Kébé a disputé l’hôtel de ville de Kébémer à son « frère » de parti, le questeur de l’Assemblée nationale, Lamine Thiam. Le secrétaire général de la Présidence de la République, Abdoulaye Baldé, aime rappeler que, lycéen, l’ancien ministre Robert Sagna qu’il vient de déboulonner était déjà l’édile de la capitale du Sud. Dans la commune dakaroise de Fann Point E-Amitié, c’est un jeune pharmacien, le Dr Malick Diop, qui a obtenu gain de cause sur des cadors de la vie politique nationale. Mais, c’est surtout à Saint-Louis que « la nouvelle vague » a déferlé. Face à pas moins de cinq ministres, le patron du Fsd/Bj, Cheikh Bamba Dièye, est parvenu à devenir le maire de la vieille ville.
C’est que la classe politique sénégalaise accouche toujours dans la douleur dans ses recompositions, d’autant que beaucoup de partis sont avant tout le moteur d’un projet personnel. C’est l’éternelle équation de la démocratie interne. Le Pds, aujourd’hui au pouvoir, a vécu, en 1978, la douleur de voir un groupe de jeunes conduits par l’actuel ministre d’Etat, Serigne Diop, faire une fronde pour dénoncer une gestion patrimoniale » du parti créé en 1974 par le président Wade. Les exemples foisonnent. Les divergences doctrinales ou tout simplement des conflits de personnalité conduisent inlassablement à l’éclatement des partis. En ce mois de mai 2009, une formation comme Aj/Pads doit vider devant les tribunaux le contentieux qui oppose Landing Savané à celui qui était carrément son doublon, à savoir Mamadou Diop Decroix, numéro deux incontesté depuis des décennies, aujourd’hui « exclu » des rangs du parti pour activités fractionnistes alors que ses partisans disent détenir la majorité des fédérations régionales. Le décès, en 1986, du Pr. Cheikh Anta Diop n’a pas soudé les rangs de son parti, le Rnd. Bien au contraire. Ainsi, feu Me Babacar Niang, Abdou Fall, le Pr. Madior Diouf, le Pr. Ely Madiodio Fall, tous développeront, avec des fortunes diverses, des aventures personnelles. Dans tous ces cas, sans être déterminant, « le facteur jeune » a été décisif.
CHASSE AUX VOIX
Quand, à la fin de la dernière guerre mondiale, Me Lamine Guèye, alors tout puissant leader politique de l’Aof, présentait aux Sénégalais un jeune grammairien frais émoulu de Normale Sup, il ne se doutait point que ce « nouveau venu » allait être un futur farouche adversaire. Le « jeune » Senghor allait sillonner le Sénégal des profondeurs, prêchant la bonne parole d’un « nouveau » qui « apprend même le français aux Français », jusqu’à le battre à différents scrutins législatifs, et obtenir l’Exécutif territorial en duo avec feu le président Mamadou Dia. Les jeunes, une menace
Dans tous les cas, une nouvelle vague arrive, dans la majorité présidentielle comme dans le camp d’en face. « Au Sénégal, il y a des personnes qui sont dans la politique depuis des décennies et ne veulent toujours pas en sortir », proteste Cheikh Bamba Dièye. « Nous sommes nés, avons grandi, sommes allés à l’école, avons eu du travail, sommes mariés, avec des enfants et ces mêmes personnes sont toujours là », se désolait récemment le jeune ingénieur, nouveau maire de Saint-Louis. Paradoxalement, c’est dans l’opposition que l’on retrouve les cas les plus flagrants de refus de céder la place aux jeunes. Pourquoi, après sa victoire dans des villes symboles, « Bennoo Siggil Senegaal » n’a-t-elle pas mis en selle des « nouvelles têtes » pour diriger les collectivités locales remportées. Des exemples ? Mme Aminata Mbengue Ndiaye, plusieurs fois ministre sous le régime socialiste, retrouve « sa » mairie de Louga. A Diourbel, le dernier ministre des Affaires étrangères sous le président Diouf, Me Jacques Baudin, lui aussi ancien premier magistrat de la capitale du Baol, a rempilé malgré les grognements dans les rangs de la coalition victorieuse. Dans la banlieue dakaroise, Chérif Macky Sall, lui aussi ancien ministre socialiste, noue à nouveau son écharpe de maire. Le ministre des Forces armées, Bécaye Diop, patron des libéraux du Fouladou, n’a pas laissé la place de maire à un jeune de son parti. Cet « accaparement » est cependant atténué par les changements opérés à la tête de la mairie de la ville de Dakar où plusieurs communes d’arrondissements sont dirigées par des quadras et des trentenaires. On ne change pas des habitudes ancrées dans le tréfonds des inconscients collectifs par des textes législatifs. Le renouvellement des générations se fera indubitablement par l’implacable loi de la nature. En attendant, « les jeunes loups » trépignent et attendent avec impatience la prochaine chasse aux... voix.