« Le Schéma Directeur de l’Informatique (SDI) de la DGD, un instrument de mise en cohérence de la politique informatique de l’Administration des Douanes »
La Direction des Systèmes informatiques douaniers a changé d’appellation pour devenir la Direction des Systèmes d’Information des Douanes.
Qu’est ce qui justifie cette réorientation ?
Cette réorientation s’inscrit dans le sillage un peu plus large de la réforme des structures de notre Administration telle qu’elle découle des travaux du Comité mis en place par le Directeur général des Douanes pour réfléchir sur sa réorganisation.
En effet, après plus d’une décennie de mise en application de l’arrêté n°7282/MEF/DGD du 30 juillet 2009 portant organisation de la Direction générale des Douanes, le temps était venu d’en faire d’abord l’évaluation avant d’y apporter ensuite les ajustements nécessaires, dictés évidemment par les nouveaux enjeux auxquels les administrations douanières du monde doivent aujourd’hui faire face.
Ces travaux, fruit d’une réflexion profonde et inclusive, ont effectivement débouché sur une nouvelle organisation qui consacre, entre autres innovations, la création d’une nouvelle direction technique dénommée Direction du Renseignement, de l’Analyse du Risque et de la Valeur (DRAV) et l’avènement de la Direction des Systèmes d’Information des Douanes (DSID).
Au-delà de la sémantique, ce changement d’appellation replace l’Administration des Douanes au cœur de la stratégie des pouvoirs publics, dans l’élaboration et la mise en œuvre de leurs politiques de développement économique et social.
Or, en plus de disposer de systèmes informatiques focalisés uniquement sur la technologie, avec des ordinateurs et leurs équipements destinés à faciliter le dédouanement des marchandises importées ou à exporter, la Douane est également un réceptacle d’informations capitales, qu’il faut bien collecter et traiter à des fins d’analyse et de prospective.
En effet, un système d’information comporte, outre son volet technologique traditionnellement bien appréhendé, ses dimensions informationnelle et surtout organisationnelle. Sous cet angle, la DSID compte désormais jouer pleinement sa partition notamment grâce à son Bureau de la Qualité du Service et de l’Assistance aux Usagers (BAU), qui est également une nouvelle création.
C’est tout le sens qu’il faut donner à cette nouvelle appellation qui, faudrait-il le rappeler, intervient dans un contexte qui coïncide avec la fin du Programme de Vérification des Importations (PVI), et qui fait de l’analyse du risque un outil précieux dans la sélectivité et donc dans l’efficacité des contrôles douaniers.
La DRAV aura un rôle déterminant à jouer dans cette efficacité à assurer, et qui devrait se matérialiser sur le terrain par la mise en place d’un dispositif mettant davantage le curseur sur les expéditions à risque élevé et permettant au commerce légitime de franchir plus facilement le cordon douanier.
Pour ce faire, il faudra promouvoir les Echanges de données informatisés (EDI) pour disposer à temps des manifestes, adopter l’analyse des données miroir et intégrer dans nos pratiques quotidiennes les RPCV/PNR pour améliorer le dispositif de contrôle des voyageurs.
Tout cela nécessite la mise à disposition de bases de données fiables et sécurisées ; la DSID s’y est déjà préparée.
Quels sont les chantiers ou simplement ce qui est attendu de la Direction des Systèmes d’Information des Douanes (DSID) dans la mise en œuvre du PROMAD ?
Tout est attendu de la DSID dans la mise en œuvre du PROMAD. En effet, les TIC ont fait leur incursion dans tous les domaines d’activité. Aucune organisation n’est épargnée, en particulier la Douane qui joue actuellement et jouera encore plus à l’avenir un rôle de premier plan dans la transformation structurelle de l’économie nationale telle que promue par le Plan Sénégal émergent (PSE).
La mobilisation des ressources internes dont dépend en grande partie le succès de la mise en œuvre du PSE demeure également un objectif prioritaire de la Douane conformément aux orientations de la Stratégie de Mobilisation des Recettes à Moyen Terme (SRMT).
L’Administration des Douanes doit la réaliser sans perdre de vue sa mission de participation à la sécurisation du territoire contre les fléaux de notre époque (trafics de drogues, terrorisme, criminalité faunique et environnementale, cybercriminalité etc.).
Il s’y ajoute les enseignements que nous devons tous tirer de la crise sanitaire liée à la pandémie à COVID 19, qui doivent nous amener à repenser et actualiser nos méthodes d’intervention.
Au demeurant, cette pandémie est en train d’accélérer le mouvement de Relocalisation du monde qui, en faisant progressivement perdre à « l’atelier du monde », en l’occurrence la Chine, des parts de marché non négligeables, dessine en même temps les nouveaux contours des échanges internationaux des biens et services.
La révolution numérique et les opportunités et risques qui en sont le corollaire, présagent de beaux jours pour le commerce électronique avec la technologie 5G qui n’a pas encore livré tous ses secrets.
Autant de défis contemporains qui interpellent directement les Douanes sénégalaises qui doivent se réinventer pour rester performants, en ayant en ligne de mire les grands marqueurs juridiques de son champ d’intervention tels que la Convention de Kyoto révisée (CKR), le Cadre de Normes SAFE, l’Accord sur la Facilitation des Echanges (AFE) ainsi que les règles communautaires édictées par l’UEMOA et la CEDEAO, et celles en vue dans le cadre de la ZLCAF.
Il faut dès lors s’adapter ou disparaître. La Direction générale des Douanes a choisi, à travers le PROMAD, le premier terme de l’alternative.
Le Programme de Modernisation de l’Administration des Douanes (PROMAD) prend ainsi la pleine mesure de toutes les problématiques évoquées plus haut et se donne comme objectif de bâtir dès aujourd’hui ce que le Directeur général des Douanes appelle la Douane de demain.
Aussi, a-t-il initié, avec le soutien des hautes autorités, ce vaste chantier, ambitieux et inédit dans l’histoire des Douanes sénégalaises, qui vise à renforcer les capacités de la Douane, lui permettant ainsi de mieux accomplir ses missions de mobilisation de recettes, de protection de l’économie et de lutte contre la fraude et les trafics illicites sous toutes leurs formes.
En misant sur le capital humain, qu’il faut bien recruter et former, le PROMAD compte renforcer les capacités techniques et opérationnelles de tous les services douaniers.
Dans sa mise en œuvre, la DSID aura naturellement son mot à dire ; le numérique étant, de nos jours, au cœur de tout processus de modernisation.
Pour rendre opérationnel les orientations stratégiques de sa lettre de mission, la DSID a doté la DGD d’un Schéma directeur informatique (SDI).
Quels sont les principaux axes de ce SDI ?
Permettez-moi d’abord de rappeler que le Schéma directeur informatique de la Direction générale des Douanes est un instrument de mise en cohérence de la vision de notre administration en matière informatique, qui découle entièrement de la Stratégie Sénégal numérique (SN2025) et des orientations du Ministère des Finances et du Budget dans ce domaine.
Il se veut un accélérateur du processus de transformation digitale de l’Administration des Douanes sénégalaises, dans un horizon temporel de cinq (05) ans 2022-2026, et se décline à travers les axes ci-après :
- Automatisation et dématérialisation intégrales des procédures ;
- Haute disponibilité de GAINDE et connectivité des unités douanières ;
- Digitalisation des services douaniers ;
- Gouvernance des données ;
- Sécurité des Systèmes d’Information.
Sa mise en œuvre optimale permettra aux Douanes sénégalaises de s’inscrire pleinement dans l’ère du numérique en tirant parti de ce qu’elle nous offre aujourd’hui comme potentialités dans l’exécution du service.
Quels sont les impacts certains et immédiats de l’automatisation et de la dématérialisation sur la qualité du service et sur les entreprises et les usagers ?
Plus de célérité, de prévisibilité et de transparence dans le traitement des opérations commerciales à l’occasion des importations et exportations de marchandises, donc plus de gain de compétitivité pour l’entreprise et pour l’usager du service public de la Douane, en général.
La Douane c’est aussi la facilitation. Comment celle-ci est-elle prise en compte ou comment les outils sont-ils définis pour une meilleure prise en charge des dossiers des entreprises bénéficiaires ?
En plus des avantages attendus de l’automatisation et de la dématérialisation, il faut ajouter que les Systèmes d’information des Douanes disposent, en plus de GAINDE, d’autres applications et outils satellites tels que la Gestion des Régimes économiques et douaniers (GRED), le Traitement et Analyse de risque des Marchandises par voie électronique (TAME) et bientôt le Système interconnecté de Gestion des Marchandises en Transit (SIGMAT).
S’agit-il là d’une contribution à un environnement global plus propice aux affaires au Sénégal ?
Ces applications que je viens de citer, entre autres, participent évidemment à la facilitation, et par conséquent, à l’amélioration de l’environnement des affaires dans la mesure où elles constituent des outils techniques de mise en œuvre des différents mécanismes de promotion des activités commerciales, industrielles, de transport, des investissements et dérogatoires du droit commun.
Leur mise en production ne fera, assurément, que conforter les indicateurs de notre pays dans les notations relatives à l’environnement des affaires.
Pour rester sur la connectivité généralisée, en quoi le « GAINDE partout » cadre t-il avec les politiques de développement territorial ?
L’omniprésence de GAINDE sur le territoire douanier du Sénégal demeure un objectif prioritaire en ce sens qu’elle contribue, outre à l’aménagement numérique du territoire cher aux plus hautes autorités, à la réalisation de la politique de dédouanement de proximité.
Cette carte de la proximité que joue l’Administration des Douanes avec l’érection de plusieurs unités de dédouanement situées dans les régions de l’intérieur, en bureaux de plein exercice, répond à l’objectif de territorialisation des politiques publiques, conforté par l’Acte III de la Décentralisation.
La nature et le volume des opérations commerciales qui seront traitées par ces bureaux, dans le cadre de leurs nouvelles attributions, vont promouvoir les activités économiques et sociales connexes (établissement des commissionnaires en douane agréés, regain dans les activités de transport, de commerce, etc.).
Il en sera de même du développement local avec, d’une part, des opérateurs économiques qui vont bénéficier de façon plus rapprochée des prestations du service public de la Douane et, d’autre part, des populations qui disposeront davantage de possibilités d’activités génératrices de revenus.
Pour les collectivités territoriales, les retombées sur les ressources budgétaires vont accroître leur capacité d’investissement dans les infrastructures et équipements sociaux de base, conformément à leurs domaines de compétences.
Toutefois, l’opérationnalisation du dédouanement de proximité est fortement tributaire de l’informatique et de la connectivité dans ces bureaux de plein exercice, donc de la haute disponibilité de GAINDE, qui doit désormais y rugir à haute et intelligible voix.
Quels sont les principaux enjeux de la gouvernance des données ?
Nous vivons aujourd’hui dans une société de l’information avec le développement des TIC, terreau fertile à celui de l’intelligence artificielle.
Sous ce regard, la donnée devient une matière première précieuse que beaucoup d’observateurs avertis de l’écosystème du numérique assimilent à de l’or.
De par ses missions et sa position aux frontières, la Douane collecte beaucoup d’informations tant sur les statistiques du commerce extérieur que sur les autres aspects liés à la lutte contre la fraude et les trafics illicites de toutes sortes.
Toutes ces informations doivent être sécurisées et partagées avec les parties prenantes dans un cadre respectueux de la protection des données à caractère personnel.
La gouvernance des données, qui occupe une place centrale dans la stratégie de la Direction générale des Douanes, s’inscrit dans cette perspective.
Sans données, point de renseignement et d’analyse de risque ; l’efficacité des contrôles douaniers n’en serait que compromise.
L’Administration des Douanes a très tôt pensé mettre sur pied sa propre infrastructure informatique avec notamment la plateforme GAINDE. Le Sénégal vient d’inaugurer son Data Center, le premier de cette envergure. L’option informatique est devenue le premier critère de la modernisation des Administrations.
Que vous inspire ce statut de quasi précurseur de la Douane ?
Vous me permettrez ici de rendre un hommage appuyé à tous ceux qui ont eu à travailler à la mise en place et à l’amélioration continue de ce système informatique qui est une fierté nationale en même temps qu’il constitue un instrument performant de mobilisation des recettes douanières.
GAINDE est effectivement une parfaite illustration du rôle de pionnier que la Douane à joué en s’orientant depuis au moins trois décennies dans la voie de la modernisation à travers l’automatisation de ses procédures.
Cette orientation est aujourd’hui confortée par les autorités douanières qui sont convaincues de la pertinence de cette voie et de la nécessité de la suivre en consolidant les acquis et en y apportant de la valeur ajoutée.
Elles bénéficient, à cet effet, de l’engagement de ressources humaines internes à la DSID, qui font profiter nos systèmes de toutes les évolutions fonctionnelles et techniques nécessaires à leur performance.
Au vu de ce qui précède, nous pouvons dire que le Data Center de dernière génération qui vient d’être inauguré, par sa technologie et ses possibilités d’hébergement, est une opportunité pour les administrations publiques et les entreprises du secteur privé sénégalais de résorber leur gap numérique et de réussir ainsi définitivement leur transformation digitale.
Ce Data Center rassure également sur la sécurisation de nos données et servira, sans nul doute, de locomotive au train du numérique dans lequel le Sénégal s’est déjà aménagé une place plus que confortable.
Quel est l’état des lieux de la « coopération informatique » avec les pays voisins, en particulier le Mali dont près de 70% des importations transitent par le Port autonome de Dakar ?
Il faut d’abord rappeler un des temps forts de cette coopération informatique qui a été marqué par la signature, le 19 mars 2015, à Abidjan, par les Directeurs généraux des Douanes de la Côte d’Ivoire, du Burkina Faso, du Mali et du Sénégal, et sous l’égide de la CEDEAO, d’un Protocole d’accord relatif à l’interconnexion des systèmes informatiques des administrations douanières.
Ce protocole accompagne le Projet SIGMAT qui vise à faciliter et à sécuriser la circulation des marchandises en transit sur l’espace CEDEAO.
Ce régime douanier, qui permet aux pays de l’hinterland de pouvoir disposer des marchandises importées ou de les exporter via les pays de passage ayant des ouvertures maritimes, comporte également pour ces derniers des risques liés notamment à des déversements frauduleux. L’informatique devait pallier ces risques au moyen de l’interconnexion.
S’agissant du Sénégal, le corridor Dakar-Bamako a été identifié comme axe prioritaire de cette interconnexion et les autorités douanières du Mali et du Sénégal, avec le soutien des partenaires techniques et financiers (Organisation mondiale des Douanes, CEDEAO, Banque mondiale, Coopération allemande avec la GIZ), travaillent d’arrache-pied à l’opérationnalisation du SIGMAT.
Nos équipes techniques sont également à pied d’œuvre et depuis le 1er avril 2021, la phase pilote a démarré avec succès, GAINDE étant parvenue à dialoguer avec SYDONIA, à travers SIGMAT.
Il ne reste que la mise à disposition des équipements techniques, la formation des acteurs – celle des formateurs étant déjà réalisée – et le bon déroulement des activités de communication et de sensibilisation, pour que SIGMAT entre en production avec tous les résultats escomptés.