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SERIGNE DJILY FATAH FALILOU MBACKE : «Il faut créer une police spéciale contre la mendicité»

Rédigé par leral.net le Jeudi 25 Avril 2013 à 20:55 | | 0 commentaire(s)|

SERIGNE DJILY FATAH FALILOU MBACKE : «Il faut créer une police spéciale contre la mendicité»
Le phénomène de la mendicité frappe tout étranger qui met les pieds au Sénégal. Les mendiants sont innombrables. Des vieux lépreux aux pauvres enfants exploités par leurs marabouts, la communauté est sans cesse sollicitée par de pauvres gens sans ressources. Et au cœur de la polémique sur la volonté de l’Etat d’interdire la mendicité, une voix s’élève pour prendre le contre-pied de certains marabouts. Il s’agit de celle de Serigne Djily Fatah Falilou Mbacké. Le petit-fils de Serigne Fallou Mbacké plaide non seulement pour l’interdiction de la mendicité, mais aussi pour la création d’une police chargée de traquer les mendiants.

A Rufisque le week-end dernier pour rendre visite à ses talibés, Serigne Djily Fatah Falilou Mbacké, «le marabout des jeunes», a fait un réquisitoire contre le phénomène de la mendicité qui, selon lui, bafoue les droits les plus élémentaires de l’enfant. Pour ce petit-fils de Serigne Fallou Mbacké, deuxième khalife général des mourides, l’islam n’aime pas la malpropreté, l’impureté. «La purification ne concerne pas le côté formel comme la propreté du corps bien qu’elle est très importante, mais principalement la propreté du cœur et de l’esprit qui sont à la base de l’action humaine», a-t-il expliqué. Aussi propose-t-il la création d’une police chargée de traquer les mendiants. «L’Etat doit créer une police spécialisée dans la lutte contre ce fléau. Cette police doit pouvoir mettre fin à la mendicité en l’attaquant à la base. Ces marabouts escrocs, ces tortionnaires qui bafouent les droits des enfants doivent être repérés et punis conformément à la loi», explique le marabout.

Dans son réquisitoire contre la mendicité, Serigne Djily Fatah Falilou Mbacké souligne que le rôle d’un maître coranique est d’instruire l’enfant et l’éduquer, comme le lui recommande la charia, et non en faire un fonds de commerce. D’ailleurs, à l’en croire, la mendicité, telle recommandée par l’Islam, n’est pas de recevoir de la menue monnaie, mais c’est quand le démuni reçoit une aide substantielle à même de le sortir de sa précarité. «Ces enfants sont victimes de gens mal intentionnés qui ne sont pas soucieux de l’enseignement du Coran et de la Religion. Aucun marabout ne peut encourager la mendicité. Il n’est pas question que les droits les plus élémentaires des enfants soient bafoués et il n’est inconcevable que les marabouts, sous quelque prétextes que ce soient, continuent, au nom de l’islam, d’exploiter les enfants», dit-il. Avant de plaider : «Je suis pour la fermeture des daaras de Dakar et l’ouverture d’internats pour la sécurité des enfants talibés.

Dans la région de Dakar, vitrine du pays, le scénario est décevant. Voilà pourquoi il est urgent de fermer les daaras à Dakar et en même temps contrôler ceux de l’intérieur du pays.» Selon «le marabout des jeunes», encourager la mendicité, c’est donc allé à l’encontre des règles et préceptes de l’islam. «Je ne suis pas d’accord et je ne le serai jamais, avec ceux qui encouragent la mendicité. Tout bon musulman doit condamner la mendicité. L’islam est une religion civilisée et pure», insiste-t-il. Serigne Djily Fatah Falilou Mbacké estime qu’il y a plusieurs sortes de mendiants au Sénégal. D’après lui, il y a des mendiants qui ne sont mendiants que de nom car ne remplissant pas les critères. Les infirmes, les handicapés et autres qui n’ont pas les moyens de subvenir à leurs besoins peuvent mendier, selon lui. «Pour les talibés, il n’est aucunement dit qu’ils doivent mendier pour engraisser leurs maîtres. Il faut que ce phénomène soit réglementé. Les adultes, les handicapés et une certaine catégorie de Sénégalais peuvent réellement mendier. Il faut que les Sénégalais et l’Etat puissent faire la part des choses.»

«A Dakar, il n’y a pas de Serigne Daara»

Toutefois, Serigne Djily Fatah Falilou Mbacké admet que la mendicité n’est pas un phénomène nouveau. «Elle a longtemps existé, mas pas sous sa forme actuelle.» «Moi qui vous parle, je suis de Touba et j’ai mendié pendant des années. Mais jamais, nous n’avons reçu de l’argent de la part de ceux qui nous donnent de l’aumône. Il était formellement interdit, pour un talibé, de prendre un sou. La règle était de mendier le matin de bonne heure, à 6h 30 mn. Il s’agit de trouver des céréales, notamment le riz et le mil, seuls aliments acceptés par le marabout. Ainsi, nous passions de maison en maison pour trouver quelques grammes de riz et qui servira de repas pour le marabout et sa cour», se souvient-il. Avant de poursuivre : «A 13h, nous refaisions le même parcours pour cette fois se le partager. Le soir également, nous faisions le tour des maisons pour trouver de quoi se mettre sous la dent. Entre deux moments de mendicité, nous apprenions le coran. Notre maître coranique disait qu’il y a des moments où un talibé doit rester dans son daara.»

S’attaquant à ceux qu’il qualifie de «tortionnaires de talibés», Serigne Djily Fatah Falilou se dit convaincu qu’à Dakar, «il n’y a pas véritablement de Serigne daara». De son avis, ceux qui se font appeler Serigne Daara ne font, en réalité, que profiter de l’islam. «Il n’est pas normal que des gens profitent de l’islam pour vivre. Dans cette affaire, l’Etat du Sénégal, quelles que puissent être les pressions, ne doit pas reculer. Tout le monde est d’avis que mettre fin à la mendicité, c’est aider l’islam. Il faut que les gens arrêtent de gérer les intérêts personnels et aider l’islam.» Par ailleurs, Serigne Djily Fatah Falilou indique que les talibés sont des enfants issus, la plupart du temps, de familles musulmanes démunies et placés chez un «petit marabout escroc» qui, en échange de leur pseudo instruction au Coran, du couvert et du logis, sont censés recueillir l'aumône dans la rue quelques heures par semaine. «Mais, dit-il, la réalité est toute autre. Certains marabouts accueillent plusieurs dizaines de gosses parfois d'à peine 4 ou 5 ans, les maltraitent, ne les soignent pas, les nourrissent au lance-pierre et les font mendier 7 jours sur 7, durant toute la journée, voire la nuit.» Et le résultat est, selon lui, éloquent : de milliers d'enfants en haillons, mal nourris, sales, pied-nus, souvent malades qui courent les rues à la recherche des quelques sous qui leur permettront de ne pas se faire corriger par leurs tortionnaires.

Source:Walfadjri